Comptes rendus : Théorie, méthode et idées

The Self-Determination of Peoples. Community, Nation, and State in an Interdependent World.Danspeckgruber, Wolfgang (dir.). Boulder, co, Lynne Rienner Publishers, 2002, 467 p.[Record]

  • Georges Labrecque

…more information

  • Georges Labrecque
    Département de sciences politiques et d’économie
    Collège militaire royal du Canada, Kingston

Cet ouvrage est le fruit d’un programme de recherches élaboré à l’Université Princeton sous le patronage du prince Hans Adam ii du Liechtenstein et regroupant d’éminents spécialistes du droit international et des relations internationales qui proviennent de divers milieux, notamment l’enseignement universitaire et la diplomatie. Le lecteur aura tôt fait de constater que cette contribution collective est non seulement importante, mais aussi originale en ce que la distinction autodétermination interne et autodétermination externe n’est plus exclusivement ou surtout expliquée en fonction d’une entité jalouse de sa souveraineté nationale, mais bien dans le contexte beaucoup plus large et plus complexe de la mondialisation, comme le laisse d’ailleurs deviner le sous-titre. L’ouvrage, constitué principalement de deux parties bien équilibrées, est consacré, dans la première partie, à l’analyse théorique et conceptuelle du droit à l’autodétermination, alors que l’approche est empirique dans la seconde, avec des études de cas diversifiées tant par les régions observées que par les sujets choisis. Dans le premier chapitre, Jeffrey Herbst se demande, en examinant les facteurs qui ont contribué à l’émergence des États-nations, dans quelle mesure ceux-ci arriveront à fonctionner dans le contexte de la mondialisation. Non seulement sauront-ils le faire, estime-t-il, mais il est permis de croire que leur nombre va augmenter, l’une des raisons principales étant que les grandes puissances sont peu enclines à vouloir intervenir là où des tentatives de sécession menacent la cohésion d’un ensemble. Si l’approche géopolitique caractérise ce premier chapitre, le second, signé par le juriste Richard Falk, montre comment le droit à l’autodétermination externe, laquelle peut prendre la forme d’une sécession, a évolué depuis la fin de la première Grande guerre jusqu’à la résolution 2625 de 1970. Ensuite, l’auteur met en opposition ce qu’il appelle la cohérence de la doctrine et l’incohérence de l’expérience. S’agissant de faire la démonstration de cette incohérence, Falk examine notamment deux analyses juridiques qui, pour savantes qu’elles soient, dit-il, ont semé la confusion plutôt que la conviction, en l’occurrence le rapport de la Commission d’arbitrage pour l’ancienne Yougoslavie (commission Badinter), de même que le rapport déposé par un groupe d’éminents internationalistes à la demande du gouvernement du Québec, en 1992, concernant l’intégrité territoriale du Québec dans l’éventualité de son accession à la souveraineté (rapport Pellet). Dans ce dernier cas, l’auteur estime que l’affirmation peut-être la plus confuse consiste à soutenir que l’indépendance n’est pas une question de droit mais de fait. Michael W. Doyle examine, dans le chapitre 3, les fondements juridiques des divers types d’intervention armée sous l’égide des Nations Unies, en particulier dans les cas où des minorités sont opprimées. Pour éviter que de telles interventions soient contre-productives et que leur légitimité soit contestée, l’auteur estime que leur premier objectif doit être l’ouverture d’un espace politique suffisamment large pour que soient garantis les droits de la personne et la libre expression des diverses communautés. L’autodétermination est-elle véritablement un droit ou seulement un principe difficile à appliquer, se demandent, au chapitre 4, Emilio J. Cardenas et Maria Fernanda Canas. Les auteurs examinent ce qu’ils appellent la dimension morale du problème en définissant ce que n’est pas cette autodétermination : ni fragmentation ni balkanisation, mais plutôt respect des minorités, de leurs cultures et de leurs religions. S’agissant de minorités et de communautés à l’intérieur d’ensembles plus vastes, John Waterbury, dans le chapitre 5, démontre la difficulté de les définir selon des critères soi-disant objectifs et estime qu’on devrait éviter de cibler et de stigmatiser ces groupes dans des législations spécifiques, tandis qu’une loi générale neutre et permissive aura pour effet de favoriser la pratique de la démocratie. Dans la première des études de cas (chap. 6), …