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Si la publication d’un tel ouvrage sur un pays qui fait tous les jours la manchette des médias papier et électroniques était très attendue, plusieurs devront tenir compte du fait que sa lecture n’est pas à la portée de tous. Même le lecteur rompu à la lecture de textes exigeants, à moins d’avoir une solide formation en économie, ne pourra vraiment passer au travers de ce volume en étant assuré d’en avoir compris l’essentiel. Les contributions des vingt auteurs, en majorité chinois et australiens, résultent d’un colloque tenu à Perth en juillet 2005. Organisé conjointement par la School of Economics and Commerce de University of Western Australia et la Chinese Economic Studies Association of Australia, cette initiative a bénéficié, entre autres, de l’appui du Australia-China Business Council et de Edward Elgar Publishing.

Yanrui Wu, de l’Australian National University, responsable de cet ouvrage collectif, décrit en introduction, l’évolution récente de l’économie chinoise. Vient ensuite, comme c’est le cas de plusieurs auteurs, une rétrospective des différentes facettes de la transition initiée en 1978. Personne ne sera surpris d’apprendre que durant les 26 années qui vont suivre, l’empire du Milieu connaîtra en moyenne une croissance de son produit national brut équivalente à 9,5 % alors que les exportations augmenteront à un rythme de 18 %. En fait, la valeur des exportations qui a augmenté de 5,6 % en 1978, a atteint un sommet de 54,9 % en 2004.

L’ouvrage se divise en trois parties. Une première intitulée EconomicGrowth and Outlook comprend quatre contributions qui vont des sources de la croissance jusqu’à une projection couvrant la période 2005 à 2020 en passant par les retombées interrégionales de la production. Dans le premier chapitre, dix-neuf équations et une douzaine de tableaux servent à mettre en évidence les origines de la croissance économique. Ses trois auteurs ont cherché à montrer que l’approche duale en matière de comptabilité nationale s’applique bel et bien au contexte étudié mais, comme il fallait s’y attendre, pour bien cerner le sujet abordé, la poursuite des efforts s’impose. On retrouve Yanrui Wu en tant que responsable du chapitre sur le cycle et la croissance dans lequel il attire d’entrée de jeu l’attention sur la rareté des études portant sur ce sujet. Il tente donc ici de fournir une modeste contribution à un vaste champ qui demeure à explorer. Le lecteur y apprend notamment que la volatilité et la croissance évoluent dans le même sens.

La deuxième partie : Urban Economy, Migration and Labour Market débute par un constat qui, lui non plus, n’étonne personne, soit la grande rapidité du taux d’urbanisation depuis le lancement de la réforme. Observant les données sur les villes ayant reçu en 1978 un statut administratif économique (on ne parle pas de fusions ni de défusions ici…) suivant le positionnement hiérarchique consenti par le gouvernement, les deux auteurs du chapitre 6 s’appliquent à vérifier s’il y a corrélation entre leurs performances et leur positionnement dans l’échelle administrative. Seize équations et six tableaux semblent suffire à démontrer que les prefecture-level cities ont un rendement inférieur aux county-level cities.

La troisième et dernière partie Banking, Exchange Rates and Globalization est celle qui intéressera probablement un plus grand nombre de lecteurs, non seulement parce qu’elle se veut moins formaliste (absence d’équations), mais également parce qu’elle traite d’un problème auquel les pages économiques des journaux ont sensibilisé les lecteurs : la valeur de la monnaie chinoise (le renminbi : rmb). On sait que selon les autorités des puissances occidentales, le rmb est sous-évalué, ce qui a pour conséquence de favoriser l’envahissement de la planète par des produits Made in China. Comme on ne peut parler monnaie sans se rapporter au fonctionnement du système bancaire, le premier chapitre de cette partie nous apprend que les prêts bancaires représentent 140 % du pnb. Il s’agit du double de ce qui s’observe parmi les puissances occidentales. C’est toutefois le taux de change qui retient l’attention ici. On admet la pertinence du questionnement sur la valeur réelle du rmb tout en signalant que les avis ne sont pas unanimes, loin s’en faut. Les ajustements à apporter pourraient s’avérer d’ordre mineur. Le chapitre 10 en entier fait l’objet de cette épineuse question avec, dès le départ, des informations tirées de The Economist. Il est ici fait allusion à quatre arguments fréquemment utilisés pour soutenir que le rmb est sous-évalué : le surplus de la balance commerciale (par rapport à celle des États-Unis) ; le déclin du taux d’échange depuis la fin de 1961 ; l’accroissement de la productivité ; l’augmentation importante des réserves en devises étrangères. Or, selon les deux auteurs de ce chapitre, les arguments avancés ne justifient pas une réévaluation du rmb et il n’y a pas lieu d’espérer des changements de ce côté dans un proche avenir.

Cet ouvrage, qui s’appuie sur de nombreuses références bibliographiques et traite de manière rigoureuse des différents problèmes soulevés par la vingtaine d’auteurs, apporte indéniablement une contribution à l’avancement des connaissances sur un sujet de toute première importance. À d’autres revient la tâche de présenter le tout d’une façon accessible à un public plus vaste.