Comptes rendus : Théorie, méthode et idées

Giesen, Klaus-Gerd et Kees van derPijl (dir.), Global Norms in the Twenty-First Century, Newcastle, Cambridge Scholars Press, 2006, 228 p.[Record]

  • Oana Tranca

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  • Oana Tranca
    Candidate au doctorat
    Département de science politique et Programme Paix et sécurité internationales
    hei, Université Laval, Québec

Cet ouvrage collectif s’inscrit dans la perspective critique des relations internationales. L’objectif principal des auteurs est de découvrir les conséquences de la diminution de la centralité de l’État comme sujet principal des normes internationales. L’évolution de la deuxième période du xxe siècle, particulièrement à partir des années 1970, consacre une transformation importante des frontières économiques et politiques des États. Par conséquent, des théories centrées sur l’interdépendance et le transnationalisme font leur apparition, tout comme un corpus de normes éthiques qui commencent à être appliquées au comportement des États. Ces nouvelles théories mettent l’accent sur les acteurs non étatiques, sur l’interaction des forces internes et internationales dans la politique étrangère (et commerciale) d’un État, ainsi que sur le rôle des organisations internationales. L’évolution récente de l’ordre international et des courants théoriques qui s’y rattachent entérine, avec la fin de la Guerre froide, l’instauration de nouvelles normes internationales, telles que la résolution pacifique des conflits, les droits de la personne et la bonne gouvernance par la pratique de la démocratie et du libre marché. De ce point de vue, la perte de souveraineté des États modernes renvoie à une perte de légitimité quand des violations graves de ces normes ont lieu. L’ensemble des auteurs de cet ouvrage critiquent plus ou moins ouvertement la notion de normes globales de justice et de droits de la personne, ainsi que la diminution du caractère inviolable de la notion de souveraineté. Ils les voient comme des tentatives de légitimer le droit de la « communauté internationale » d’intervenir dans les compétences des États souverains qui sont catégorisés comme n’appartenant pas à cette communauté. Des notions telles que le soft power, la gouvernance globale et la société civile internationales qui sont à l’origine des théories récentes expliquant la création des normes internationales sont critiquées par les auteurs de cet ouvrage ; leur perspective épistémologique et méthodologique se distingue des préceptes rationnels de la théorie des régimes. L’ouvrage est divisé en trois parties traitant respectivement de la souveraineté nationale et le cadre normatif des relations internationales, de l’économie politique des normes internationales et de l’exploration politique et philosophique des droits et des normes. Dans la première partie, Roger Coate et Jacques Fomerand se penchent sur le rôle de l’onu dans la promotion des Objectifs du millénaire, en synthétisant les différentes étapes qui ont contribué à l’élaboration d’un agenda global concernant le développement durable et le développement humain. Les auteurs considèrent que cette évolution est un seuil majeur : il marque le départ des principes de libéralisme économique qui avaient dominé jusqu’alors le débat sur l’avenir des pays en voie de développement. Ils mettent toutefois en garde contre le danger de dilution des compétences de l’onu par un retour à l’unilatéralisme et le transfert de compétences aux organisations régionales, évolution qui diminuera l’importance des acquis récents dans le domaine du développement. Ronen Planan analyse le phénomène d’érosion de la souveraineté, en s’arrêtant sur les interactions entre l’hégémonie des États puissants et les trois principes du « compromis souverain » (puissance, multilatéralisme et forces du marché). La pratique de transgression de la souveraineté a créé un ensemble de règles et normes de comportement qui limitent également le degré d’indépendance exercé par les États hégémoniques, en dépit du fait qu’ils ont été les principaux créateurs de ce phénomène. Ainsi, le multilatéralisme, promu par les États-Unis à la fin de la Guerre froide, a commencé à limiter la capacité de ceux-ci à agir de manière indépendante. Cela a provoqué après 2001 un retour vers l’unilatéralisme comme moyen pour les États-Unis de se libérer des contraintes du monde multilatéral …