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Keck Frédéric, 2021, Les sentinelles des pandémies. Chasseurs de virus et observateurs d’oiseaux aux frontières de la Chine, préface de Vinciane Despret. Paris, Points, coll. « Essais », 336 p.

  • Benjamin Malo

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  • Benjamin Malo
    Département d’anthropologie, Université Laval, Québec (Québec), Canada

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Couverture de Solidarités et tensions, Volume 47, numéro 3, 2023, p. 11-239, Anthropologie et Sociétés

L’auteur, Frédéric Keck, est historien de la philosophie et anthropologue de formation. Il est directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), notamment au Laboratoire d’anthropologie sociale. À partir de divers terrains ethnographiques, il étudie les croisements entre les maladies animales et les crises sanitaires. L’ouvrage s’ancre dans une recherche ethnographique réalisée par Keck à Hong Kong, Taïwan et Singapour entre 2007 et 2013, dans le sillage de la crise du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) de 2003. Particulièrement affectés par cette épidémie, ces trois lieux investissent grandement pour faire face aux futures pandémies, ce qui les rend d’autant plus intéressants pour y observer les relations entre les humains et les animaux, particulièrement les oiseaux, qui sont régulièrement des réservoirs pour la grippe. L’ouvrage de Keck est divisé en deux grandes parties ; l’une théorique, et l’autre, plus ethnographique. La première partie retrace les manières dont les zoonoses ont amené les humains à problématiser différemment les maladies animales. Plus particulièrement, Keck postule qu’un nouveau paradigme se dessine en matière d’anticipation du futur lorsqu’il est question de pandémies ou de l’extinction d’une espèce : la préparation. Par le passé, les menaces à la vie étaient gérées selon des stratégies de précaution (par exemple, la vaccination) ou de prévention (par exemple, l’abattage massif). À la différence des stratégies associées à la précaution et la prévention, qui se fient sur le passé pour prédire le futur, celles provenant de la préparation cherchent à imaginer l’avenir à partir du présent. Les pires scénarios catastrophiques sont ainsi imaginés et des pratiques sont déployées pour gérer ces futurs incertains, mais possibles. La seconde partie, qui se veut plus ethnographiquement ancrée, présente des exemples empiriques des façons dont les techniques de préparation sont mises en place en Asie. À Hong Kong, l’utilisation d’oiseaux « sentinelles » permet de se préparer à la propagation de maladies infectieuses. Dans le cas d’une ferme visitée par Keck, ceci signifie, par exemple, choisir volontairement de ne pas vacciner certains poulets et de les séparer des autres. Si ceux-ci tombent malades et meurent de la grippe, il devient alors possible de réaliser un abattage massif de poulets pour endiguer une possible propagation. Keck se déplace par la suite à Singapour pour illustrer deux techniques de préparation additionnelle face aux pandémies : les simulations et les scénarios. Grâce à l’accumulation de données génétiques et épidémiologiques par rapport à des maladies infectieuses précises, il est possible de recréer virtuellement leur contagion et d’imaginer leurs effets sur la réalité concrète pour mieux s’y préparer. Les scénarios, de leur côté, reposent plutôt sur la simulation du futur. Par exemple, il s’agit de simuler l’arrivée massive de patients présentant des symptômes de la grippe dans un hôpital donné pour préparer le personnel à cette éventualité. Keck se déplace enfin à Taïwan pour illustrer comment le stockage de virus et de vaccins est une technique de préparation face à des avenirs incertains et à d’éventuelles pandémies. L’apport anthropologique principal du livre de Keck est dans la jonction de sa théorisation, de la préparation et de ses observations, particulièrement en ce qui concerne les effets sur les relations entre humains et non-humains. La préparation face aux pandémies ne peut ignorer les animaux. C’est pourquoi Keck argumente qu’améliorer « les infrastructures de biosécurité signifie être attentif aux conditions de vie des oiseaux et de ceux qui en prennent soin, et partager avec équité les produits de cette interaction » (p. 272). Une meilleure compréhension des zoonoses implique de facto une reformulation des relations entre humains et non-humains, comme le propose l’auteur. Si la théorisation de …

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