Corps de l’article

Introduction

L’importance des facteurs environnementaux pour la santé est reconnue depuis longtemps. Au Ve siècle av. J.-C., Hippocrate écrivait Airs, eaux, lieux, un traité destiné à aider le médecin à anticiper les maladies susceptibles d’être rencontrées lorsqu’il se rendait dans une ville ou une région inconnue. Dès le XVIIe siècle, l’urbanisation des villes a donné lieu à une prise de conscience de l’influence des conditions environnementales et sociales sur la santé (Rosen, 1993). Les travaux de Snow à Londres (1854) permirent d’attribuer la cause du choléra à l’eau viciée, tandis que les travaux de Chadwick en Angleterre (1842) et de Villermé en France (1826) associèrent la pauvreté à la mortalité. Du milieu du XIXe siècle à la fin du XXe, les préoccupations pour les conditions socioenvironnementales ont toutefois été relayées au second plan. Les développements en microbiologie, et ensuite l’émergence des maladies chroniques en occident après la Deuxième Guerre mondiale, ont précipité à l’avant-scène les déterminants individuels de la santé (Susser et Susser, 1996). Les variations d’états de santé dans les populations étaient principalement expliquées par des variations dans les déterminants individuels de la santé tels que les habitudes de vie et l’accès aux services de santé.

La fin du XXe siècle a été marquée par un retour des facteurs non individuels pour expliquer les variations d’états de santé (Rose, 1992), ouvrant la voie au développement d’un champ de recherche à l’interface de la géographie et de l’épidémiologie : l’étude de l’influence des conditions des milieux locaux sur la santé. Ces travaux s’inscrivent pour la plupart dans ce qu’il est maintenant convenu d’appeler l’analyse des effets de milieu (ou effets de contexte) sur la santé, de l’anglais neighbourhood effects. L’analyse des effets de milieu est un courant important en géographie de la santé, mais d’autres approches sont aussi utilisées. Par exemple, des études font l’analyse de localités spécifiques (par exemple, des villes comme espaces-laboratoires) ou de paysages thérapeutiques (signification et perception des lieux) (Kearns et Moon, 2002).

L’analyse des effets de milieu adopte une démarche principalement quantitative pour étudier les relations entre la santé et des caractéristiques sociales et matérielles des contextes locaux dans lesquels vivent les personnes. Un nombre croissant d’études associent les conditions des milieux résidentiels à divers indicateurs de santé (la mortalité, les maladies cardiovasculaires, l’état de santé auto-évaluée, etc.) et à des habitudes de vie influentes sur la santé (l’activité physique, les habitudes alimentaires, le tabagisme, etc.) (Riva et al., 2007). Ces caractéristiques des milieux locaux sont pertinentes à l’analyse des inégalités sociales de santé, car elles sont impliquées dans une relation d’influence mutuelle entre, d’une part, les structures sociales et les rapports sociaux et, d’autre part, la distribution géographique des populations et des ressources (matérielles ou non) locales ainsi que la signification des lieux, notamment par les expériences spatiales individuelles (Jones et Moon, 1993 ; Litva et Eyles, 1995 ; Kearns et Moon, 2002 ; Bernard et al., 2007).

Ce texte fait référence aux inégalités sociales de santé pour décrire la présence, dans une population, de disparités de santé qui ont pour origine des facteurs associés aux structures sociales. Il s’attarde spécifiquement à la dimension spatiale des disparités de santé et à l’influence des milieux locaux. La santé est définie ici selon une perspective holistique, reconnaissant à la fois les dimensions physique, mentale et sociale de la santé et du bien-être, et non seulement l’absence de maladies (Organisation mondiale de la santé, 1946). Dans un premier temps, ce texte propose un survol des principales explications fournies par la littérature sur les effets de milieu quant aux mécanismes par lesquels il est présumé que s’exerce leur influence sur la santé. Ensuite, il présente une description de l’analyse empirique des effets du milieu en discutant de la mesure des facteurs socioenvironnementaux, des approches analytiques pour mesurer les effets de milieu sur la santé et de la délimitation spatiale des milieux. Enfin, ce texte identifie des enjeux qui nous semblent primordiaux pour la recherche portant sur les effets de milieu sur la santé.

Conceptualisations des effets du milieu sur la santé

Des variations géographiques ont été observées sur un grand nombre d’indicateurs de santé. Ces disparités de santé entre des populations locales peuvent être attribuables au fait que les populations comparées sont composées d’individus différents (par exemple, la proportion de personnes âgées ou de fumeurs n’est pas la même dans toutes les populations) ou qu’elles vivent dans des contextes différents (par exemple, certains milieux sont plus favorables à l’activité physique ou sont mieux dotés en commerces d’alimentation). Ces deux dimensions ont donné lieu à ce qu’il est maintenant convenu d’appeler les effets de composition (déterminants individuels de la santé) et les effets de contexte (déterminants socioenvironnementaux de la santé) pour décrire les deux sources des variations géographiques de la santé (Diez-Roux, 2002 ; Blakely et Subramanian, 2006). Notons toutefois que cette définition des effets de composition peut porter à confusion ; nous y revenons ci-dessous (voir la section Analyses statistiques et spatiales).

Le contexte, aussi appelé milieu local, milieu résidentiel ou voisinage (de l’anglais neighbourhood), peut être défini comme le résultat de dynamiques d’influences mutuelles qui associent des ensembles d’individus et des processus économiques et sociaux d’une façon spécifique à un lieu (Curtis et Jones, 1998 ; Galster, 2001). L’action conjointe de ces processus produit des espaces qui se distinguent les uns des autres par des agencements différents de conditions socioéconomiques et d’éléments susceptibles d’influencer directement ou indirectement la santé des individus : le milieu biophysique naturel (eau, sol, air, etc.) ; le milieu bâti (édifices, aménagement urbain, infrastructures, etc.) ; les services publics et commerciaux (écoles, commerces de détail, services de santé, etc.) ; les facteurs socioculturels (normes, valeurs, cohésion sociale, etc.) ; et la réputation des milieux (Macintyre et al., 2002).

Les processus économiques et sociaux qui définissent la distribution spatiale des déterminants socioenvironnementaux de la santé s’influencent mutuellement. Des facteurs structurels, c’est-à-dire des éléments de l’organisation sociale (programmes de soutien aux infrastructures municipales, subventions aux organismes communautaires, etc.), agiront de façon spatialement différenciée sur la disponibilité et l’accessibilité des facteurs contextuels, soit les conditions de vie et opportunités (par exemple, qualité du mobilier urbain, centres d’aide aux familles). Il en résulte des ensembles de facteurs socioenvironnementaux spécifiques à des milieux locaux et dont l’influence contribue à la variabilité géographique de la santé (Daniel et al., 2008).

Un milieu local donné est généralement composé d’une population relativement homogène sur le plan socioéconomique conséquemment à la répartition géographique des facteurs socioenvironnementaux qui définissent les milieux locaux. En effet, des individus ayant des profils socioéconomiques semblables auront tendance à se concentrer en un lieu donné, que ce soit volontairement afin de profiter des avantages offerts par le milieu ou involontairement en y étant contraints par leur situation individuelle ou familiale qui ne leur permet pas d’accéder à un milieu mieux doté en ressources.

Les différents déterminants individuels et socioenvironnementaux interagissent dans un système multiscalaire complexe pour influencer la santé des populations locales. Tous les processus actifs sur la santé d’une population locale n’opèrent pas à la même échelle (Philibert et Breton, 2007 ; Séguin et al., 2011). Certains processus créent des conditions spécifiques à des espaces restreints et contribueront ainsi à l’existence des variations géographiques de la santé à une échelle locale (p. ex. accès aux commerces de proximité). D’autres processus influenceront les variations géographiques à une plus grande échelle en produisant des conditions homogènes sur des espaces plus étendus, par exemple à l’échelle régionale (allocation des effectifs médicaux) ou nationale (p. ex. politiques publiques).

Le type de milieu est fortement associé au type de la population qui l’habite. L’enchevêtrement des facteurs socioenvironnementaux et individuels représente un défi analytique (Macintyre et al., 2002 ; Diez-Roux, 2004) ; il importe de distinguer les uns des autres pour fournir des informations pertinentes au soutien à la prise de décision dans l’élaboration d’interventions visant l’amélioration de la santé des populations. Pour isoler les différentes influences socioenvironnementales sur la santé et en estimer l’impact, les analyses empiriques doivent reposer sur une compréhension fine des mécanismes en cause dans l’influence qu’exerce le milieu sur la santé. Mais comment les conditions du milieu local peuvent-elles influencer la santé ?

Daniel et al. (2008) proposent que les conditions du milieu influencent la santé selon des mécanismes d’influence directs et indirects. L’influence de facteurs socioenvironnementaux est directe lorsqu’elle a une conséquence physiologique déterminante sur l’état de santé des individus. Une influence est indirecte lorsqu’elle agit sur des facteurs psychosociaux qui influenceront à leur tour la physiologie individuelle. Ces mécanismes d’influence du milieu sur la santé sont décrits ci-dessous.

Influences directes

Des caractéristiques du milieu physique ont le potentiel d’affecter directement la santé et le niveau de fonctionnement des individus. L’effet des conditions d’habitation est un exemple de l’influence directe : la qualité de l’air peut affecter la santé respiratoire (Gibson et al., 2010) alors que la présence d’obstacles est associée au risque de chute chez les personnes âgées (Kool et al., 2010). L’accès aux services de santé peut avoir une influence directe sur la santé puisque les services curatifs et les interventions de prévention secondaire ou tertiaire agissent sur les systèmes physiologiques. Par exemple, la distance géographique est associée à la participation au Programme québécois de dépistage du cancer du sein (St-Jacques et al., 2012). Or, l’accessibilité géographique (proximité) aux services est inégale dans l’espace (Gauthier et al., 2009). Les différences d’accès entre les milieux sont susceptibles de contribuer aux variations géographiques de la santé.

Les milieux locaux agiront aussi directement sur la physiologie des personnes par des mécanismes de réponse au stress. Les individus seront exposés, à des degrés variables, à des stresseurs de différentes natures selon le type de milieu auquel ils seront exposés (Daniel et al., 2008). Le stress a pour effet d’activer différents processus physiologiques (p. ex. les systèmes médullosurrénal-sympathique, endocrinien, métabolique, cardiovasculaire et immunitaire) qui entraîneront des réactions (p. ex. variation dans le niveau de sécrétion d’hormones, inflammation de tissus, augmentation de la pression sanguine, accélération du rythme cardiaque, etc.) susceptibles d’affecter le bon fonctionnement de certains organes si elles sont fréquentes. Des études suggèrent qu’une exposition à un stress chronique pourrait être associée à différents problèmes de santé (obésité, diabète, artériosclérose, maladies cardio-vasculaires, arthrite rhumatoïde ou perte de densité minérale osseuse [Bjorntorp, 2001 ; Black, 2003 ; Seeman et al., 2010]). En étant des sources de stress spatialement différenciées, les facteurs socioenvironnementaux des milieux locaux contribueraient donc à influencer directement la santé. D’autres facteurs socioenvironnementaux pourraient aussi agir sur la santé de façon indirecte.

Influences indirectes

Les ressources locales ont le potentiel d’influencer – positivement ou négativement – les habitudes de vie et les activités quotidiennes des individus, qui peuvent à leur tour être déterminantes de la santé des personnes (Daniel et al., 2008). Ces facteurs socioenvironnementaux n’agissent donc pas directement sur les systèmes physiologiques ; ils exercent plutôt leur influence sur la santé indirectement en conditionnant des déterminants psychosociaux et comportementaux de la santé.

Par exemple, l’aménagement du territoire influencera l’utilisation des transports actifs (marche, vélo ou transports en commun) qui favorise l’activité physique (Badland et al., 2008). L’activité physique a pour effet de diminuer les risques d’obésité en augmentant la dépense énergétique (Hill et al., 2003) et elle contribue à la santé fonctionnelle chez les personnes âgées en réduisant le risque de chute et en favorisant le bien-être psychologique ainsi que la cohésion sociale (Edwards et Tsouros, 2006).

L’influence de l’environnement social sur la santé s’exercerait aussi par des effets sur les caractéristiques comportementales et psychosociales des individus. L’environnement social déterminera l’accessibilité et la nature des réseaux sociaux. Les réseaux sociaux, la cohésion sociale et le niveau de capital social d’une collectivité peuvent être source de soutien et d’influence pour les individus, par exemple, en favorisant l’engagement social des personnes, les contacts interpersonnels et l’accès à des ressources matérielles (Bernard et al., 2007). Notons que des facteurs sociaux peuvent aussi augmenter les risques à la santé (Moore et al., 2009). Parmi les effets de l’environnement social sur la santé, mentionnons par exemple une étude menée dans la région de Québec montrant que la perception de cohésion sociale est associée à la santé perçue et au handicap (Pampalon et al., 2007).

Ainsi, l’influence des caractéristiques des milieux locaux sur la santé s’exerce à travers divers processus, certaines caractéristiques agissant directement sur la santé des individus, d’autres agissant indirectement en influençant des déterminants individuels de la santé. Des mesures précises et des analyses cohérentes avec les mécanismes présumés actifs sont essentielles pour que l’étude des effets de contexte puisse guider les décideurs vers des interventions de santé publique efficaces. l’opérationnalisation des facteurs socioenvironnementaux et l’analyse des effets de milieu sur la santé sont développées dans la section suivante.

Analyse des effets du milieu sur la santé : aspects opérationnels

Les aspects opérationnels de l’étude des effets de milieu sur la santé incluent la définition de variables socioenvironnementales, les approches analytiques pour mesurer les effets de milieu et la délimitation spatiale des milieux.

Variables socioenvironnementales

Différents types de variables peuvent être utilisés pour décrire les milieux. La mesure des facteurs socioenvironnementaux peut être faite par trois types de variables : les variables dérivées, les variables intégrales et les variables perceptuelles (Diez-Roux, 2004).

Les variables dérivées

Les variables dérivées (ou agrégées) sont construites à partir de caractéristiques des individus résidant dans un secteur géographique. Elles sont issues de l’agrégation d’information tirée d’enquêtes, du recensement ou de fichiers médico-administratifs (registre des tumeurs, par exemple) en divers découpages territoriaux. Elles décrivent les caractéristiques des populations (et non des milieux eux-mêmes, voir la section sur les variables intégrales), souvent en termes socioéconomiques (p. ex. revenu moyen) ou sanitaires (incidence de cancer, prévalence de diabète, etc.). Les variables dérivées peuvent être produites par l’intégration de plusieurs variables dans des indices composites à l’aide d’analyses statistiques, par exemple un indice de défavorisation construit avec des variables tirées du recensement (Pampalon et al., 2010). L’intérêt pour les variables dérivées est qu’elles sont faciles d’accès et peuvent être produites à plusieurs échelles géographiques.

Il est aussi possible d’utiliser des variables dérivées pour décrire des aspects des populations qui n’ont pas d’équivalent au niveau individuel, par exemple des indicateurs d’hétérogénéité interne des unités spatiales, tels l’écart-type ou le coefficient de Gini qui mesure le degré d’inégalité d’une distribution. Ces mesures permettent d’estimer l’effet des inégalités de revenus sur la santé, un facteur associé à la santé des populations dans les sociétés occidentales (Wilkinson et Pickett, 2009).

Les variables intégrales

Les variables intégrales mesurent directement des caractéristiques des milieux ; elles n’ont pas d’équivalent au niveau individuel. Elles permettent de décrire des caractéristiques de l’environnement bâti (p. ex. réseau routier, services et infrastructures collectives), naturel (p. ex. couvert végétal) ou social (p. ex. participation à des organismes communautaires, caractéristiques des réseaux sociaux, réciprocité, etc.). On appelle aussi « variables structurelles » celles qui décrivent l’environnement social (Diez-Roux, 2002).

Des mesures intégrales sont obtenues selon diverses méthodes. Des grilles d’observation permettent de recenser la présence et les propriétés de certaines conditions des milieux, comme la convivialité des quartiers pour l’activité physique (Gauvin et al., 2008). Des mesures de disponibilité peuvent s’appuyer sur l’identification de différentes ressources, par exemple la localisation de différents types de services à partir de bases de données administratives ou commerciales géoréférencées (centres de santé, épiceries, clubs sportifs ou sociaux, etc.) ou d’images satellitaires (présence de parcs, par exemple). L’accès et la collecte de données intégrales engendrent des coûts souvent importants et potentiellement prohibitifs.

Les variables perceptuelles

Les variables perceptuelles sont développées à partir des perceptions que les individus entretiennent sur leur quartier résidentiel (p. ex. confiance envers les voisins, valeurs partagées, entraide, dangerosité, propreté). Cette information est par la suite agrégée pour créer une variable contextuelle. Les variables perceptuelles sont surtout utilisées pour caractériser certains éléments du contexte social des milieux locaux, par exemple le contrôle social, l’accessibilité (à ne pas confondre avec la proximité ou la disponibilité) et le sentiment d’appartenance à la communauté.

La description des milieux par les variables perceptuelles sera teintée par la composition de la population ; les perceptions individuelles d’une « réalité objective » dépendront des caractéristiques des personnes interrogées. En effet, certains groupes de personnes sont plus ou moins sensibles à un élément du milieu. On peut s’attendre, par exemple, à ce que le niveau de sécurité d’un quartier soit perçu différemment selon le sexe ou encore que la proximité des services influence la perception d’accessibilité différemment selon les capacités motrices des personnes.

Analyses statistiques et spatiales

Tel que discuté ci-dessus, les variations géographiques de la santé ont potentiellement deux sources (non mutuellement exclusives) : les effets de composition et les effets de contexte. La capacité de caractériser les effets de contexte indépendamment des effets de composition sera influencée par le choix des variables, mais aussi par le type d’analyse employée. Étant donné la relation étroite entre la composition et le contexte, la caractérisation des effets de contexte est associée à celle de la composition.

Des effets de composition peuvent être estimés par des variables dérivées dans des analyses écologiques. Une analyse écologique évalue la relation entre un indicateur de la santé d’une population locale (par exemple, la mortalité) et une autre caractéristique de la population (comme le niveau de défavorisation [Pampalon et al., 2008a et b]) ou une caractéristique du milieu (comme la ruralité [Martinez et al., 2004]). Ces associations peuvent être estimées par des mesures de corrélation, mais elles le sont plus souvent par des régressions multivariées qui permettent de contrôler l’influence que peuvent avoir d’autres facteurs sur l’association d’intérêt. Les études écologiques permettent donc d’évaluer si la variation géographique de la santé est associée à celle d’une caractéristique du milieu (variable intégrale) ou de la population (variable dérivée). Les écarts de santé ainsi mis en lumière par des variables dérivées reflètent à la fois l’influence des caractéristiques des personnes qui composent les populations (composition) et celle de différents facteurs socioenvironnementaux qui caractérisent les milieux où vivent les populations (contexte). Dans les analyses écologiques, il est hasardeux d’inférer un effet de contexte d’une variable dérivée puisque celle-ci décrit la population et pourrait aussi être un « marqueur » d’une caractéristique du milieu (les facteurs socioenvironnementaux étant fortement associés aux caractéristiques des populations). Cette difficulté est à l’origine de la préférence pour les modèles multiniveaux dans l’analyse des effets de milieu.

Les modèles multiniveaux permettent de distinguer les effets de composition des effets de contexte en les traitant séparément dans une structure hiérarchique où les individus sont nichés dans des milieux (Chaix et Chauvin, 2002 ; Gauvin et Dassa, 2004). Les effets de composition sont estimés dans ces modèles par des variables de niveau individuel (et non par des variables dérivées comme le font les analyses écologiques) tandis que les effets de contexte sont estimés à partir de variables de niveaux supérieurs, non individuels (milieux). Les variables contextuelles peuvent être des variables dérivées ou des variables intégrales. Notons ici que les variables dérivées utilisées à un niveau non individuel sont des marqueurs de caractéristiques des milieux ; elles ne sont pas des mesures directes du contexte (voir variables intégrales) et décrivent des disparités de santé qui ne sont pas attribuables aux caractéristiques des personnes (composition). Notons aussi que la distinction entre les caractéristiques individuelles et celles du milieu que font les modèles multiniveaux est critiquée par certains, qui y voient une fausse dualité (Cummins et al., 2007 ; voir la section Enjeux pour la recherche).

Les modèles multiniveaux classiques ne permettent toutefois pas de tenir compte de l’influence sur la santé exercée par le contexte des milieux voisins. En effet, une étude écossaise a observé que le risque de diabète était plus faible dans les quartiers populaires entourés de quartiers mieux nantis, alors qu’il était plus élevé dans les quartiers favorisés mais bordés par des quartiers plus défavorisés (Cox et al., 2007). Ceci illustre la pertinence de considérer non seulement les facteurs socioenvironnementaux du milieu de résidence comme des facteurs de risque pour la santé, mais aussi le contexte plus large dans lequel s’insère le milieu.

Par ailleurs, il est aussi possible que l’importance de l’influence des milieux ne soit pas identique partout dans l’espace. Les modèles de régression pondérée géographiquement (Fotheringham et al., 2002) permettent d’évaluer la variation spatiale des coefficients de régression qui estiment ces associations. Une étude montréalaise a utilisé cette approche pour examiner l’association entre les accidents de piétons chez les enfants et certaines caractéristiques des bassins de desserte d’écoles primaires, telles la défavorisation, la densité du réseau de rues et l’utilisation du sol (Cloutier et al., 2007). Cette étude a démontré non seulement que l’ampleur des associations varie à travers la région d’étude, mais aussi que les facteurs socioenvironnementaux pouvaient être des facteurs de risque dans certains secteurs de la zone d’étude, et des facteurs de protection dans d’autres.

Délimitation géographique des milieux

La variation géographique de l’influence des facteurs socioenvironnementaux sur la santé est liée à la délimitation spatiale des milieux. Cette dernière reflète la conceptualisation de l’espace dans l’analyse des inégalités sociales de santé. La prise en compte de l’espace dans les analyses statistiques peut être faite de plusieurs façons. Deux sont couramment utilisées dans l’analyse des influences socioenvironnementales sur la santé : la délimitation de milieux d’influences communes et celle de milieux spécifiques à chaque individu.

Les milieux comme espaces d’influences communes

Les analyses écologiques et multiniveaux regroupent généralement les individus sur la base de territoires définis par des unités spatiales administratives (p. ex. secteurs de recensement, arrondissements municipaux, régions sociosanitaires) ou définis par les chercheurs spécifiquement pour l’étude. Les unités spatiales administratives ont l’avantage d’être faciles à utiliser, entre autres parce qu’il est possible d’y associer des informations individuelles tirées du recensement, d’enquêtes sociosanitaires (comme l’Enquête québécoise sur la santé de la population [Institut de la statistique du Québec, 2008]) ou de fichiers médico-administratifs (p. ex. hospitalisations, décès) à partir du code postal du lieu de résidence des personnes. Ce type d’approche est de loin le plus courant et il a permis de très nombreuses démonstrations de la contribution de facteurs socioenvironnementaux aux variations géographiques de la santé.

La délimitation de milieux d’influence commune repose sur la présomption implicite que tous les individus d’un territoire donné sont exposés aux mêmes facteurs socioenvironnementaux et que les influences des différents milieux locaux sont mutuellement exclusives (Chaix et al., 2009). Bien que certains découpages administratifs soient délimités par des frontières « naturelles » susceptibles de représenter le milieu local tel que vécu par ses résidants (autoroutes, p. ex.) et que d’autres soient délimités en considérant le profil socioéconomique des populations (p. ex. secteurs de recensement), l’utilisation des unités administratives peut conduire à des découpages territoriaux qui ne reflètent pas adéquatement la distribution spatiale « réelle » d’un facteur socioenvironnemental. Par exemple, une zone homogène en termes de convivialité à la marche pourrait être subdivisée ou encore chevaucher, plusieurs secteurs de recensement (Riva et al., 2008) ou, inversement, un arrondissement municipal pourrait inclure des secteurs de recensement de natures différentes. Ces différences entre la distribution spatiale d’un facteur socioenvironnemental et le découpage utilisé pour le représenter pourrait biaiser les analyses, soit en introduisant une fausse homogénéité entre les milieux, soit en lissant des différences potentiellement importantes.

La définition de l’unité spatiale d’analyse est directement liée au problème des unités géographiques modifiables (Openshaw, 1984), c’est-à-dire que le nombre d’unités spatiales ou la localisation de leurs frontières influencera le degré d’association observé entre deux variables. Le choix de l’échelle d’analyse fera donc varier l’estimation de l’ampleur des influences socioenvironnementales. Ce type de variation peut avoir des conséquences importantes sur la prise de décision, par exemple pour des interventions de santé publique, puisqu’il est possible que, dans des cas extrêmes, le changement de l’échelle d’analyse fasse passer une influence socioenvironnementale de facteur de risque à facteur de protection (Krieger et al., 2002 ; Philibert et Breton, 2007).

Afin de pallier ce problème, il est possible de délimiter des unités spatiales sur la base de l’homogénéité locale des facteurs contextuels d’intérêt. Pour ce faire, diverses approches peuvent être appliquées. Certains auteurs ont privilégié le groupement discursif, voire manuel, d’unités spatiales selon la distribution de variables d’intérêt, par exemple en regroupant des unités contiguës similaires au plan socioéconomique (Lebel et al., 2007) ou en combinant des modèles de classification statistique et des systèmes d’information géographique (Law et al., 2005 ; Riva et al., 2008). Il existe aussi des algorithmes de zonage automatique qui regroupent des unités spatiales en maximisant l’homogénéité interne de plusieurs variables contextuelles tout en respectant des critères de taille de population (Haynes et al., 2007).

Les milieux comme espaces spécifiques à chaque individu

Il est probable qu’une personne résidant à la frontière d’un secteur de recensement soit aussi influencée par les caractéristiques du secteur de recensement voisin, ce que l’utilisation d’unités administratives ne permet pas de prendre en compte. Ainsi, un nombre croissant d’études définit le milieu de façon spécifique à chaque individu en mesurant les facteurs socioenvironnementaux auxquels chacun est exposé (Chaix et al., 2009). Par exemple, des études portant sur l’influence de l’environnement bâti sur la pratique d’activités physiques ont défini l’environnement par une zone tampon centrée sur le lieu de résidence de chaque individu et dont les frontières sont déterminées par une distance sur le réseau de rues ou encore par une distance euclidienne (Oliver et al., 2007 ; Robitaille, 2009). Ainsi définis, les milieux peuvent se chevaucher et leur superficie varier selon les paramètres de distance spécifiés. Par ailleurs, cette approche pour délimiter le milieu a été proposée comme solution au problème des unités géographiques modifiables (Kwan, 2009).

Ce type d’approche permet d’élargir la mesure des influences socioenvironnementales à d’autres facteurs que ceux du milieu résidentiel. On peut, par exemple, penser à la définition d’un espace vécu délimité sur la base du réseau de rues et des lieux fréquentés quotidiennement (Chaix et al., 2009 ; Kwan, 2009). Ces définitions opérationnelles des milieux sont facilitées par l’utilisation de systèmes d’information géographique et de systèmes de positionnement global (GPS) qui permettent de colliger de l’information sur les différents lieux visités au cours d’une période et ensuite de jumeler cette information avec des données décrivant les caractéristiques des milieux locaux.

Enjeux pour la recherche

Devis d’analyse

Qu’il s’agisse d’expliquer l’origine des différences de santé entre les populations urbaines et rurales, ou celles entre les secteurs de niveaux socioéconomiques différents, la recherche sur la contribution des facteurs socioenvironnementaux aux inégalités sociales doit porter sur les mécanismes par lesquels s’exerce cette influence pour pouvoir soutenir adéquatement la prise de décision. La majorité des études publiées à ce jour sur les variations géographiques de la santé ont décrit des différences de santé entre des groupes de population définis sur la base des types de milieux locaux (défavorisation du milieu, par exemple). Ces descriptions de la présence d’écarts de santé n’expliquent toutefois pas pourquoi ces écarts existent. La plupart des études traitent plutôt l’origine de ces différences comme une boîte noire (Susser et Susser, 1996) et les études qui portent sur des mécanismes précis de l’influence de facteurs socioenvironnementaux sont relativement rares.

Des cadres conceptuels ont été proposés pour expliquer les variations géographiques de la santé (Macintyre et al., 2002 ; Bernard et al., 2007 ; Daniel et al., 2008). Tel que décrit ci-dessus, ces influences impliquent souvent plusieurs caractéristiques socioenvironnementales liées les unes aux autres et qui agissent sur la santé des individus, souvent avec d’autres caractéristiques individuelles. Les analyses empiriques doivent donc porter sur ces aspects et reposer sur des devis qui intègrent des tests de médiation et d’interaction. Les tests de médiation servent à identifier la présence d’intermédiaires dans une relation entre deux facteurs (MacKinnon et al., 2007), par exemple la distance aux ressources pour expliquer la relation entre la ruralité et la santé, ou encore les habitudes de vie pour expliquer le lien entre la défavorisation du milieu et les maladies cardiovasculaires. Les tests d’interaction permettent, quant à eux, d’évaluer si la relation entre deux facteurs varie selon un tiers facteur. Par exemple, l’accessibilité des services n’est pas associée de la même façon aux restrictions dans les activités quotidiennes selon que les personnes ont un problème de mobilité ou non (Clarke et George, 2005). Des tests d’interaction permettent d’évaluer, par exemple, si la santé de certains groupes, tels les enfants, les personnes âgées, les personnes avec incapacités, est associée différemment aux caractéristiques des milieux locaux.

Certaines critiques ont récemment été faites à l’égard de la façon dont l’analyse des effets de milieu tend généralement à négliger les différences interpersonnelles dans les influences socioenvironnementales sur la santé (Cummins et al., 2007). Alors que les modèles multiniveaux sont considérés comme le gold standard, on néglige le fait que ces analyses sont souvent faites en l’absence d’interaction et donc en présumant d’une influence socioenvironnementale uniforme sur tous les individus d’un milieu donné. En segmentant ainsi les origines individuelles et contextuelles des inégalités sociales de santé, et en traitant l’espace comme une mosaïque de milieux isolés les uns des autres, l’analyse des effets de milieu pourrait n’offrir qu’une compréhension partielle, voire biaisée, de la contribution des facteurs socioenvironnementaux à la production des inégalités sociales de santé. Une attention accrue aux mécanismes qui lient les lieux et les personnes, par exemple par l’analyse d’interaction et de médiation, a le potentiel de permettre une meilleure compréhension de ces influences.

Les méthodes quantitatives ne sauraient fournir à elles seules un meilleur éclairage sur les systèmes complexes qui produisent les inégalités sociales de santé. Les analyses qualitatives ont une plus grande capacité à traiter la complexité des interactions personnes-milieux. Les relations à l’espace des individus et d’autres acteurs sociaux, et la façon dont l’espace influence leurs relations, font intervenir un grand nombre de mécanismes et de caractéristiques. Cette complexité est parfois difficile à intégrer dans des modèles statistiques et le recours à des protocoles d’analyse mixtes (quantitative-qualitative) représente une voie importante de développement des connaissances sur les effets de milieu sur la santé.

Données

La densité spatiale des données analysées (le nombre d’observations par unité territoriale) est aussi un enjeu important, d’autant plus lorsque des tests d’interaction sont nécessaires. Les influences socioenvironnementales sur la santé étant relativement plus faibles que celles de facteurs de risque individuels, il importe que les données analysées permettent une puissance statistique suffisante pour détecter ces effets. Les analyses multiniveaux et les tests d’interaction ont besoin d’une précision statistique qui est parfois à la limite de ce qu’offrent certaines enquêtes sociosanitaires, particulièrement lorsque l’analyse est faite à une échelle fine comme celle de l’aire de diffusion (environ 600 habitants en moyenne au Québec). Par exemple, même en combinant trois cycles de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC, cycles de 2003, 2005 et 2007-2008), près de 40 % des répondants québécois résident dans une aire de diffusion contenant cinq répondants ou moins, et plus de 60 % des aires de diffusion contiennent cinq répondants ou moins (Philibert, travaux non publiés). Ceci limite les analyses statistiques faites avec des modèles multiniveaux, qui ont avantage à avoir une fréquence plus élevée d’individus par territoire pour mesurer les effets de milieux. L’ESCC est une source importante de données pour la surveillance continue de l’état de santé de la population, au Québec (Institut national de santé publique du Québec, 2006). De plus, la faible densité de répondants dans les milieux locaux rend difficile l’analyse de l’évolution temporelle des effets de milieu s’il faut que des échantillons recueillis à différentes périodes soient combinés pour atteindre une puissance statistique acceptable. Ceci est encore plus problématique dans les milieux ruraux. Il faut toutefois noter que le plan d’échantillonnage de l’ESCC n’a pas été conçu pour permettre des analyses multiniveaux à une échelle géographique fine. L’ESCC vise plutôt à fournir des estimations aux échelles provinciales et régionales. D’ailleurs, notons aussi que le plan d’échantillonnage ne vise pas la représentativité des milieux (les analyses multiniveaux présument que les unités spatiales analysées, par exemple les secteurs de recensement, sont tirées d’un échantillon représentatif de l’ensemble des unités spatiales), seulement celle des individus.

Temporalité

La majorité des études portant sur l’effet des facteurs socioenvironnementaux sur la santé reposent sur des devis d’études transversaux qui estiment ces effets à un moment précis dans le temps. Bien qu’un nombre croissant d’études s’interrogent sur les effets des milieux sur le changement de la santé dans le temps, encore peu d’études ont examiné l’aspect temporel de la relation entre les facteurs socioenvironnementaux et l’état de santé. Or, des recherches sur le parcours de vie démontrent non seulement que la position socioéconomique des individus au cours de leur vie influence leur santé (Kuh et Ben-Shlomo, 2004), mais qu’il y a aussi une période de latence entre l’exposition à des facteurs socioenvironnementaux et leurs répercussions sur leur santé (Curtis et al., 2004). Des études qui considèrent la durée de résidence dans le quartier et les divers milieux de résidence auxquels les individus ont été exposés au cours de leur vie sont requises.

De plus, des processus sélectifs de migration seraient à l’origine de la concentration spatiale d’individus aux profils socioéconomiques similaires. En effet, l’âge, le statut socioéconomique et l’état de santé des personnes sont associés au fait de déménager (Bentham, 1988 ; Boyle et al., 1998) ainsi qu’à la distance de cette migration (Boyle et al., 2002). Les personnes mieux nanties (et jouissant généralement d’un meilleur état de santé) se déplaceront vers des milieux plus favorables, laissant sur place des personnes dont le plus faible statut socioéconomique limitera leur possibilité de déménager. Ce changement de la composition de la population du milieu d’origine influencera le niveau de défavorisation de ces milieux (Connolly et O’Reilly, 2007 ; Connolly et al., 2007). Tenir compte de ces processus de migration avec des études longitudinales permettrait d’expliquer, en tout ou en partie, les associations observées entre les facteurs socioenvironnementaux et la santé avec des données transversales. Or, peu d’études ont jusqu’à présent examiné le rôle que jouent les migrations dans les variations géographiques de la santé.

La prise en compte des différentes influences socioenvironnementales gagnerait aussi à être faite à une échelle temporelle plus fine afin de tenir compte des lieux correspondant aux différentes activités quotidiennes, comme le lieu de travail. L’espace vécu par les individus sur une base quotidienne est susceptible d’être plus diversifié que le seul milieu résidentiel et d’exercer une influence sur la santé des personnes. Il y a toutefois encore relativement peu d’études de ce type.

Autres populations, autres contextes

La majorité des études portant sur les effets de milieu sur la santé sont localisées en contexte urbain, voire métropolitain. Ceci pourrait s’expliquer par la plus grande densité de population des grandes régions urbaines et par les importantes inégalités de santé qui y sont observées. Or, il existe d’importantes inégalités géographiques de santé entre les milieux urbains, d’une part, et les milieux périurbains et ruraux, d’autre part. Ces derniers sont souvent caractérisés par des taux de mortalité et d’hospitalisation plus élevés ainsi que par des prévalences plus élevées de certaines maladies chroniques (Canadian Population Health Initiative, 2006 ; Pampalon et al., 2008). D’autres études font état d’importantes inégalités de santé entre les communautés allochtones et autochtones, ces dernières ayant un profil de santé généralement moins bon que la moyenne canadienne, notamment en ce qui concerne l’espérance de vie (bien qu’elle s’améliore), les taux de mortalité (notamment infantile et par suicide) (Waldram et al., 2006) ainsi que les maladies cardiovasculaires et leurs facteurs de risque (Deering et al., 2009). Plus d’études sont nécessaires pour mesurer les disparités de santé et celles des déterminants socioenvironnementaux de la santé dans les populations périurbaines, rurales et autochtones. Ceci est indispensable pour soutenir la mise en oeuvre d’interventions qui visent l’amélioration de la santé de ces populations et la réduction des inégalités de santé entre ces différents groupes de la population.

Conclusion

Cet article présente un survol (non exhaustif) de bases conceptuelles et des principaux aspects empiriques qui influencent l’étude des effets de milieu sur la santé.

Alors que le nombre d’études portant sur les effets de milieu sur la santé connaît une forte croissance depuis le milieu des années 1990, l’intégration des résultats d’analyses empiriques dans des cadres théoriques n’en est probablement qu’à ses premiers pas et d’autres développements sont à prévoir. Les développements conceptuels permettront de mieux définir certains aspects opérationnels, telles les caractéristiques précises d’un milieu qui doivent être mesurées, l’échelle spatiale appropriée pour le faire et les hypothèses d’influence socioenvironnementale à tester statistiquement. Des développements analytiques sont aussi à prévoir. Alors que la perspective analytique développée dans le présent article repose sur des approches quantitatives de l’étude des effets de milieu, il est à noter que des approches mixtes combinant des données d’enquêtes populationnelles à des données qualitatives sont prometteuses pour aider à mieux comprendre l’influence des facteurs socioenvironnementaux (Taylor et al., 1997). De nombreux enjeux demeurent, faisant de ce champ de recherche un domaine potentiellement fertile en développements de connaissances qui enrichiront la géographie dans son ensemble puisque l’analyse des influences socioenvironnementales sur la santé des populations locales fait appel à différentes expertises géographiques, tant conceptuelles qu’analytiques.