Corps de l’article

Introduction[1]-[2]

Le mariage forcé est un phénomène méconnu, peu répertorié, d’ampleur mondiale, qui s’intègre dans le contexte global d’inégalités entre les hommes et les femmes et du poids de la culture patriarcale (Léo, 2003 ; Rude-Antoine, 2005 ; Khanum, 2008). Même si la plupart des pays reconnaissent la liberté matrimoniale, dans les faits, celle-ci n’est pas toujours respectée. Ainsi, le mariage peut, dans certains cas, être forcé.

L’usage de la force impliquant souvent une forme de violence, au moins psychologique, le mariage forcé peut donc de facto être associé à une forme de violence. Celle-ci, utilisée à la fois pour forcer la conclusion du mariage et, après le mariage, peut être physique, psychologique, économique et migratoire, ces catégories n’étant bien évidemment pas mutuellement exclusives.

Même si nous reconnaissons que les mariages consensuels peuvent aussi être source de violences, la problématique est mieux connue, et déjà des avenues de solution et d’intervention sont mises en oeuvre pour aider les femmes soumises à des violences dans un tel contexte. Le fait qu’il existe peu de données quantitatives sur les mariages forcés freine la mise en place des politiques d’intervention spécifiques, arguant qu’il s’agit de cas isolés ou que la situation peut être assimilée à toutes autres formes de violence conjugale. Or, il est connu qu’une des particularités du mariage forcé est que la violence vécue par les femmes dans ces conditions n’est pas seulement conjugale, elle est également intrafamiliale, voire parfois communautaire (Neyrand et al., 2008 ; Diouf et Ghosn, 2009), ce qui induit que l’intervention ne doit pas se restreindre au seul contexte conjugal, mais embrasser beaucoup plus large.

Cet article met en exergue les nombreuses difficultés éprouvées par les femmes victimes de mariage forcé vivant dans la région montréalaise. Celles-ci, nous le verrons, paraissent doublement vulnérables du fait, d’une part, des formes d’abus et d’exploitation dont elles peuvent être l’objet et, d’autre part, de leur statut parfois précaire d’immigrantes, en particulier lorsqu’elles sont parrainées par leur conjoint. Des études menées dans certains pays européens, notamment en Norvège et en Belgique, ont mis au jour l’ampleur qu’y prenait la problématique, signalant une certaine urgence d’agir. Ils ont alors fait le choix de criminaliser la pratique des mariages forcés. Le Canada n’a pas pris une telle initiative. L’aurait-il dû ?

À partir d’une étude menée à la fois auprès de femmes vivant, ayant vécu ou étant menacées d’une situation de mariage forcé et d’informateurs clés provenant de divers milieux de pratique oeuvrant auprès d’elles, nous posons la question : la criminalisation est-elle la bonne, voire la seule, solution au problème envisagé ?

Les fonctions de la loi criminelle

Au vu de l’objectif de cet article, il convient de se demander : quelle est la fonction de la loi criminelle ?

La loi criminelle est la norme qui dicte les conduites admissibles, et ce, en fonction des intérêts qui prédominent dans la société. Le groupe majoritaire a le pouvoir de trancher en approuvant un comportement plutôt qu’un autre soutient Boutellier (2000). En effet, pour Boutellier, le crime ne serait pas seulement une infraction au Code criminel, mais désignerait également les conduites qualifiées comme telles par les individus, les groupes, et les institutions. La loi criminelle énoncerait ainsi la « vérité morale ». Cependant, selon Boutellier, dans notre société multiculturelle d’aujourd’hui, il n’y a plus une morale, mais plusieurs, et ainsi la morale n’est plus une raison suffisante pour criminaliser un acte.

En effet, la criminalité d’une société et le système légal qui la sanctionne sont influencés par l’environnement social (Brienen et Hoegen, 1999), la morale (Durkheim, 1903), la condition sociale (Gottfredson et Hirschi, 1990), les conflits de culture (Sellin, 1938), tout autant que les politiques gouvernementales (Debuyst, 1975), l’opinion publique (Schneider, 1988), le mouvement des victimes et les groupes de femmes (Boutellier, 2000).

Dans nos esprits contemporains, le consensus porte la société à donner préséance aux choix individuels (Direction de l’Égalité des Chances, 2005). D’après Neyrand et al. (2008 : 23) :

Il est devenu socialement inadmissible qu’un mariage ne soit pas consenti [...] et qu’une relation sexuelle puisse être imposée ; ce d’autant plus que, à côté de la norme de liberté et d’autonomie individuelle, celle de l’égalité entre les sexes s’est affirmée et a présidé à la dénonciation des procédures traditionnelles d’imposition aux jeunes filles d’un conjoint non choisi.

Il est convenu que le mariage forcé n’est pas qu’une affaire de femmes, toutefois, les études sur le sujet montrent clairement que les victimes du mariage forcé sont en grande majorité des femmes et des jeunes filles, voire de très jeunes filles (UNICEF, 2001).

Le concept de mariage forcé n’a ni statut épistémologique ni définition juridique claire (Rude-Antoine, 2011). Malgré une absence de consensus dans la littérature, nous partageons l’avis de Rude-Antoine (2011 : 5) selon lequel le mariage forcé est le fait d’être :

Promis ou donné en mariage contre [son] gré, à une personne connue ou inconnue, sans [avoir] le droit de refuser. [...] Il renvoie à l’idée que l’un des deux partenaires ou les deux n’ont pu consentir à leur mariage. Il est considéré comme un acte contraire aux droits fondamentaux de la personne et reconnu comme une violence.

Dans ce contexte, il apparaît que les victimes de mariage forcé encourent des mesures coercitives physiques et psychologiques de la part de leur entourage, les empêchant d’exercer leur liberté d’action. Il est distinct du mariage arrangé où le consentement des époux est, à tout le moins, supposé.

Alors qu’on les croyait obsolètes, les mariages forcés resurgissent dans certains pays occidentaux tels que le Canada ou encore en Europe. Le phénomène est essentiellement associé aux personnes immigrantes issues de pays où cette pratique a encore couramment lieu[3]. D’après Garcia (2008 :11), le phénomène serait l’objet d’un véritable chiffre noir.

La justice pénale n’est pas une panacée. Plusieurs études auprès des victimes et le système de justice pénale ont démontré qu’il n’est pas rare que ce dernier ajoute à la souffrance de la victime (Frazier et Haney, 1996 ; Erez et Belknap 1998 ; Herman, 2005). La justice pénale met souvent un fardeau sur les épaules de la victime (Baril, 1984). Ainsi, si la souffrance de la victime est au coeur de la criminalisation, est-ce qu’il y a des situations où la criminalisation n’est pas souhaitable parce qu’elle ajoute à sa souffrance au lieu de la protéger ?

Méthodologie

Cet article est basé sur une approche qualitative qui se construit autour d’entretiens, de type récit de vie, effectués auprès de 11 femmes âgées entre 18 et 50 ans vivant, ayant vécu ou étant menacées d’un mariage forcé au Québec, et 17 entrevues, de type récit d’expérience, menées auprès d’informateurs clés.

L’échantillonnage par cas multiples de micro-unités sociales (Pirès, 1997) a été privilégié. Les critères d’échantillonnage font appel à l’homogénéité externe basée sur l’expérience d’un mariage forcé, dans le cas des femmes, et la connaissance de la problématique, pour les informateurs clés. Globalement, l’échantillonnage est régi par le principe de la diversification interne, cherchant à faire état du plus grand nombre possible d’expériences potentiellement différentes.

Les 11 femmes rencontrées proviennent de sept pays différents : Cameroun (n = 1), Algérie (n = 1), Inde (n = 3), Bangladesh (n = 4), Pakistan (n = 1), Sri Lanka (n = 1). Les difficultés appréhendées en vue de constituer un échantillon des victimes de taille raisonnable, permettant d’atteindre une saturation empirique au moins partielle des données (Pirès, 1997), nous a incitées à ne pas restreindre l’étude aux femmes issues d’une communauté culturelle en particulier présentant des caractéristiques spécifiques.

S’agissant des 17 informateurs clés, les critères de diversification de l’échantillon tiennent compte du secteur d’intervention, de l’expérience d’intervention auprès des femmes provenant de diverses communautés culturelles et des caractéristiques de la personne (sexe, statut d’immigration et pays d’origine, s’il y a lieu). Divers milieux de pratique ont été considérés : universitaire (n = 1), policier (n = 3), judiciaire (n = 2), social (n = 3) et communautaire (n = 8).

Résultats

Les caractéristiques du mariage forcé

En théorie, si la distinction entre « mariage arrangé » et « mariage forcé » paraît relativement claire, dans la pratique, elle reste problématique et la confusion persiste. Sur le terrain, il est en effet souvent difficile d’établir si, lors du consentement au mariage, il y a eu des éléments de tromperie ou de coercition et, le cas échéant, s’ils sont suffisants pour convertir un mariage arrangé, a priori volontaire, en un mariage forcé. À partir de notre étude, il apparaît, d’un côté, que les informateurs clés ne font pas tous la distinction et, d’un autre côté, que les femmes ne veulent pas toujours employer le mot « forcé », ce dernier ayant pour elles une connotation trop négative, ou simplement parce qu’elles ne font pas de différence. Caroline, intervenante au Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) estime :

[...] que le fond est le même. C’est-à-dire qu’on empêche le choix de la personne de décider et, même s’il est arrangé, à quelque part il est forcé. Et s’il est forcé ben il a été arrangé, on a fait en sorte que ces deux personnes-là soient mariées. [...] Pour moi, je ne vois pas nécessairement de différence, au contraire je trouve qu’ils sont intimement liés l’un à l’autre.

Dans la même veine, Bahia, menacée d’un mariage forcé, signale qu’au final, pour elle, c’est du pareil au même :

Si c’est un mariage arrangé, ce n’est pas moi qui choisis, c’est eux [les parents], ils parlent avec qui ils ont choisi eux-mêmes, ils décident la date du mariage. Moi, je suis comme une statue, je n’ai pas le choix, je fais ce qu’ils disent. C’est la même chose [le mariage] forcé et arrangé, c’est les deux ensemble.

Alors que Dora, intervenante à la Maison secours aux femmes de Montréal, soutient :

Moi je distingue, parce que quand on dit « arrangé » quelque part, indirectement, on fait comprendre, convainc la personne que, « oui, c’est pour ton bien-être », mais « forcé », pour moi, ça veut dire que tu ne l’écoutes même pas, tu ne prends pas le temps avec ta fille pis, c’est toi qui contrôle, au fond ; la personne qui va se marier, elle n’a aucun mot à dire dans le mariage.

Enfin, tentant de faire la distinction, Inès, enquêteuse à la Gendarmerie royale du Canada (GRC) à Montréal, indique :

Pour le mariage forcé, il n’y a rien qui empêche que ça commence par être un mariage arrangé. [...] C’est vraiment une question de consentement qui va primer là par rapport aux deux mariages. Il va y avoir des menaces, violence psychologique, violence physique, il va y avoir une pression familiale qui va être exercée, séquestration, violence. Ça va être l’isolement complètement de la personne pour pouvoir finalement qu’elle consente à un mariage.

Malgré l’ambivalence manifestée tant par les informateurs clés que par les femmes lorsqu’il est question de distinguer « mariage arrangé » et « mariage forcé », il ressort sans conteste de leur propos que le mariage forcé est clairement caractérisé par l’absence de consentement, libre et éclairé, d’au moins un des deux époux. D’autres éléments, plus secondaires, que nous verrons maintenant, vont aussi venir circonscrire les mariages forcés.

L’absence du consentement au mariage

D’après les règles civiles de formation du mariage du Canada, le consentement ne doit pas être qu’une apparence, il doit correspondre à la volonté consciente de la personne et doit être exempt de vices. En effet, l’acceptation du mariage ne doit pas avoir été obtenue par la violence ou par la tromperie sur tout élément essentiel du consentement, qu’il s’agisse, par exemple, de l’identité réelle de la personne, de son âge, de sa profession, ou encore de ses futures conditions de vie (Castelli et Goubau, 2005). Dans le cadre d’un mariage forcé, ces différents éléments sont bafoués. C’est ce que considère, comme d’autres, Laurence, procureure aux poursuites criminelles et pénales en violence conjugale à la Cour de Montréal :

Il ne doit pas y avoir de contraintes, que ce soit physiques ou morales, religieuses, peu importe. Si c’est fait sous la menace, la peur, la pression, c’est évident que le consentement n’est pas libre, pas éclairé, le consentement est vicié, donc ça, c’est un mariage forcé.

Bahia, l’une des femmes interviewées, illustre la contrainte ressentie devant l’éventualité d’un mariage de la manière suivante :

On est deux filles qui ne sont pas mariées encore, et j’ai un frère qui n’est pas marié, donc on va aller dans notre pays, on va rester deux-trois mois, on va choisir deux garçons pour nous deux, une fille pour lui. On va aller là-bas, ils ne demandent même pas mon opinion. Et j’ai peur de le dire, parce que je ne sais pas qu’est-ce qui va arriver si je dis quelque chose. Il va y avoir des conséquences, elles peuvent être violentes.

Mariage forcé, un moyen...

D’après Rude-Antoine (2011), ceux qui forcent une personne à se marier, souvent, ne considèrent pas le mariage comme une fin, mais comme un moyen. La personne mariée contre son gré constitue un moyen pour les parents d’atteindre leurs objectifs, ou parfois de respecter leurs valeurs. Ces objectifs sont, principalement, économiques et migratoires, et ont pour but le contrôle social et sexuel des femmes.

Un moyen d’ordre économique et migratoire

Les familles pratiquant le mariage forcé démontrent une préférence pour les mariages endogames en vue de la transmission économique des biens, de manière à ce qu’ils restent dans le cercle familial (Léo, 2003 ; Rude-Antoine, 2005). À l’inverse, dans un contexte de pauvreté, le mariage peut être vu par les parents comme un moyen de réduire les dépenses du ménage, de régler des dettes, et aussi de mettre à l’abri financièrement leur fille en lui trouvant un « bon » mari, comme l’explique Fatou, mariée de force à 14 ans :

Comme on dit : c’est un bon garçon, pis la famille est très bonne [il faut comprendre ici de bonne réputation et riche], il faut que je me marie. [...] Mes parents ont dit que je n’avais pas terminé mes études, qu’il fallait au moins qu’on me laisse finir mon secondaire, mais mon oncle a dit : « Non, non, c’est un bon garçon, il ne faut pas le laisser aller » [...]. À un moment donné, ils ont tout arrangé pour le mariage, pis ça a été fait. Lui, il avait vingt-cinq ans pis j’en avais quatorze.

Le facteur migratoire peut également « justifier » le mariage forcé aux yeux des parents, dans le but de faciliter le processus d’immigration pour leur fille et, ultérieurement, pour le reste de la famille. D’abord, grâce au parrainage privé de son époux et au programme de regroupement familial, la femme peut obtenir le droit de séjour ou de résidence au Canada. Elle pourra, à son tour, parrainer les autres membres de la famille et obtenir ainsi pour eux l’accès espéré au pays signifiant une meilleure qualité de vie. Le mariage forcé devient alors un moyen d’immigrer (Léo, 2003 ; Rude-Antoine, 2005). La quasi-totalité des femmes rencontrées dans le cadre de notre étude avait le même parcours migratoire étant des femmes parrainées par leur époux résident permanent ou citoyen canadien. Bahia explique ce qui est devenu une règle implicite dans sa communauté :

Dans notre société, dans notre village où j’habite, c’est : « Si quelqu’un vient ici [au Canada], pourquoi on ne donne pas la chance à une autre personne de venir ici [au Canada] pour qu’il fasse sa vie, qu’il fasse de l’argent. » C’est rare qu’ils vont marier un garçon d’ici [du Canada] avec une fille d’ici [du Canada] parce qu’il va y avoir deux personnes qui ne pourront pas venir vivre ici [au Canada], et c’est pour ça, c’est devenu comme une règle.

Inès, aide-enquêteuse à la GRC à Montréal, constate :

C’est une nouvelle problématique [le mariage forcé] qui est émergente par rapport à l’immigration, parce que, effectivement, de notre point de vue, il y a beaucoup de familles qui vont faire rentrer les membres de leur famille au Canada avec ce moyen-là.

Bien que le parrainage par un mari soit, pour plusieurs femmes, la seule possibilité d’immigrer au Canada, ce régime peut avoir comme effet pervers de les confiner dans une situation de vulnérabilité et de grande dépendance envers leur conjoint qui est aussi leur parrain (Poupart, 1997).

Un moyen de contrôle social et sexuel

Il a été établi que le mariage forcé est, dans certains cas, utilisé pour contrôler le comportement social et sexuel d’une femme ou d’une fille en vue de préserver l’honneur de la famille et ses traditions culturelles, en limitant les unions mixtes ou les mésalliances (Rude-Antoine, 2005), ou encore pour maintenir la subordination du rôle des femmes (Léo, 2003).

Dans certaines cultures, une femme transgresse les normes sexuelles « appropriées » si elle tombe amoureuse, s’engage dans une relation extra-conjugale, demande le divorce, ou encore choisit son propre mari (Rude-Antoine, 2005 ; Siddiqui, 2005 ; Khanum, 2008). Dora, intervenante à la Maison Secours aux femmes de Montréal, raconte :

[...] Une fille non vierge ou qui tombe enceinte sans mariage, c’est une horreur, horreur pour les parents. Alors, souvent, ils vont l’amener dans leur pays, ils vont trouver quelqu’un pour la marier, ils vont même la faire rester là-bas un, deux ans pour qu’elle s’ajuste, bien comprendre tout ça [le rôle que doit tenir une femme] et après, ils parrainent le gars ici.

Il ressort d’ailleurs des analyses la difficulté de distinguer ce qui résulte d’une visée de protection et d’une visée de contrôle exercée par les parents.

Les conséquences possibles d’un mariage forcé

Dans le cadre d’un mariage forcé, la plupart des femmes participant à notre étude racontent vivre non seulement beaucoup de violence conjugale, mais aussi de la violence venant de leur famille, belle-famille et parfois de leur communauté. Le contrôle de leurs faits et gestes serait omniprésent, même à distance. C’est la situation que décrit Houda, une des femmes interrogées dans le cadre de notre étude :

Ils [les membres de sa belle-famille] disent [à son mari] : « Ta femme est très impolie, ce n’est pas gentil », et mon mari il me frappe, et puis tout le monde a commencé à me frapper. En même temps, mon beau-frère, ma belle-soeur, mon beau-père, ma belle-mère et mon mari, tout le monde commence à frapper et mon beau-frère a donné une idée comme quoi j’étais en habit traditionnel indien avec des foulards, il a dit : « Bien si on veut la tuer, pourquoi on ne le fait pas ? On va la tuer avec son foulard comme ça (geste), pis comme ça, après, on va montrer qu’elle s’est suicidée. » Pis j’ai eu vraiment peur.

Les formes de violence qu’elles peuvent subir sont multiples : tant verbale, psychologique, économique que physique, allant de la gifle à la tentative de meurtre déguisée en suicide, comme vu plus haut, en passant par des viols à répétition, et ce, qu’elles soient enceintes ou non, comme Jada le raconte :

Il m’a forcée pour avoir un deuxième bébé. [...] Avant mon deuxième bébé, j’ai eu des jumeaux [...]. La deuxième grossesse, c’est des jumeaux aussi et moi je ne savais pas que j’étais tombée enceinte. Je suis quelques jours en retard [dans mes menstruations], je n’étais pas sûre... Une journée, il m’a frappée fort et je sentais l’hémorragie et tout ça. Lui, il était au travail et c’est là que je suis allée aux toilettes... deux morceaux sont tombés dans la toilette. [...] Il ne m’a même pas demandé pour aller à l’hôpital... Pourquoi il ne veut pas m’amener à l’hôpital ? Parce que j’étais toute bleue, toute ma face est bleue parce que le soir, il m’avait frappée.

Certaines de ces violences pourraient, dans certains cas, être associées à une forme « d’exploitation » comprenant l’exploitation sexuelle (viol conjugal), physique (mauvais traitements, blessures), psychologique (pressions, manipulations) ou encore économique (travail forcé, privation d’autonomie financière) (Neyrand et al., 2008). Kenza, mariée de force à 16 ans, raconte :

Dès que j’ai commencé à travailler là-bas, il [son mari] a congédié deux personnes, alors je faisais le travail de deux personnes. [...] Je travaillais de 8 h du matin jusqu’à 10 h du soir. [...] J’ai cuisiné là-bas [à l’usine], j’ai fait à manger là-bas aux enfants, j’allais chercher entre-temps mon fils à la garderie, je revenais, je faisais tout, tout, tout et continuellement il me battait... il avait un bâton pour me battre.

De même, le récit d’Imane illustre bien l’exploitation dont sont victimes certaines femmes mariées de force, non seulement par leur mari, mais par l’ensemble de la famille avec laquelle elles vivent :

J’ai vécu beaucoup de torture psychologique. Mes belles-soeurs comme les femmes de mon beau-frère, tout le monde me maltraitait [...]. On m’a donné beaucoup, beaucoup de travail à faire, tous les travaux domestiques. C’est devenu de plus en plus difficile pour moi. [...] J’étais enceinte. Ma mère m’a dit : « C’est mieux que tu restes ici », mais en même temps il y a beaucoup de pression de la société [...]. Ma belle-soeur puis mon mari sont venus me rechercher et après, ils ont continué la torture psychologique. Je faisais tout, tout, tout. Personne ne travaillait, sauf moi. Je faisais tous les travaux domestiques, je devais nettoyer la cuisine, le ménage, nettoyer les vêtements à la main, tout.

Les violences subies par ces femmes sont telles que certaines confient avoir pensé à maintes reprises à se suicider. Fabienne, intervenante au Centre haïtien d’animation et d’intervention sociale (CHAIS), évoque le cas d’une femme à qui elle est venue en aide :

Cette dame-là a tellement subi de chantage qu’elle est devenue dépressive, elle a fait plusieurs tentatives de suicide, à un moment donné elle était enfermée à l’hôpital. Elle m’a expliqué : « Fabienne, mon mariage forcé m’a envoyée à l’hôpital, je suis dépressive, c’est noté dans tous mes dossiers, je ne peux pas trouver du travail. »

D’autres, au contraire, feraient preuve d’une incroyable résilience, notent certains informateurs clés rencontrés. Dora, intervenante à la Maison secours aux femmes de Montréal, relate qu’une fois que les femmes voient la lumière au bout du tunnel, elles vont se prendre en main, suivre des cours de français, d’anglais, chercher du travail, suivre des cours de conduite :

Tu sais, c’est super bien... incroyable comme c’est rapide, tu les vois comme elles partent de Secours aux femmes, tu les vois dans six mois, à ce moment-là ça te fait du bien parce que, oui, j’ai fait quelque chose pour changer... C’est incroyable, les enfants, la façon de penser, la façon de parler, c’est fort.

Quoi qu’il en soit, la cicatrisation d’un tel vécu, quand elle est possible, est longue à venir et prend des voies parfois inattendues, comme le raconte Jada qui, malgré l’emprisonnement de son mari, continue d’avoir peur de sa sortie :

Je suis vraiment fatiguée. Un jour, on va être corrects [elle et ses trois enfants]. Pour le moment, je suis correcte parce que je l’ai mis en prison, il va goûter qu’est-ce qu’il m’a fait, il m’a emprisonnée six ans dans la maison. [...] Même si je suis mieux là... C’est sûr que je suis stressée. Un jour [à sa sortie de prison], il va me trouver, il va faire des choses pour moi.

Les récits de vie combinés avec les récits d’expérience montrent que les femmes vivant, ayant vécu ou étant menacées d’un mariage forcé, pour un grand nombre, font face à diverses formes de violence à la fois conjugale, familiale, et parfois même communautaire. La criminalisation propre au mariage forcé constituerait-elle une voie d’action pour leur venir en aide et ultimement faire cesser ces violences ?

La criminalisation propre au mariage forcé, une solution ?

Le gouvernement et le Parlement canadiens ne se sont pas légalement prononcés sur la question des mariages forcés, contrairement à d’autres pays qui en ont dénoncé et même criminalisé l’existence. Mais criminaliser, est-ce une solution ? Cette question a été posée aux participants à notre étude ; il en est ressorti quatre constats.

Il faut comprendre avant d’agir

Plusieurs informateurs clés s’entendent pour dire qu’avant de criminaliser le mariage forcé, il est essentiel d’en comprendre tous les tenants et les aboutissants et, en premier lieu, de se mettre d’accord sur une définition commune afin de faire la même lecture de la problématique. Or, on l’a vu, ce n’est pas encore le cas. En outre, la plupart des informateurs clés rencontrés commencent seulement à s’inquiéter de ce phénomène dit émergent dans leur milieu de pratique.

Martin, procureur en violence conjugale souligne que : « Il faut amener des éléments concrets pour convaincre le gouvernement qu’il a besoin d’intervenir puis qu’il y a là nécessité d’une loi. Je ne suis pas sûr qu’on soit rendu là actuellement, ici [au Québec] en tout cas. »

En effet, comme nous l’avons mentionné, il n’y a pour ainsi dire aucune donnée quantitative sur le sujet ; on ne connaît donc pas son ampleur réelle. Les mariages forcés existent au Canada et au Québec, mais dans quelle proportion ? Ceux que l’on a pu identifier constituent-ils la pointe de l’iceberg ou des cas isolés ? C’est à cette question qu’il faudrait répondre avant d’entamer une quelconque démarche en vue de légiférer, ou de prendre quelque autre mesure. Par ailleurs, il existe d’autres voies qui permettent de criminaliser les comportements néfastes qui découlent des mariages forcés.

Il existe des sanctions possibles pour les comportements répréhensibles associés au mariage forcé

La violence conjugale, et même la violence familiale, est une situation répandue en contexte de mariage forcé (Neyrand et al., 2008 ; Diouf et Ghosn, 2009). Et comme pour la violence conjugale dans toutes formes d’union, ce sont souvent les femmes qui en font les frais. Au Canada, il n’existe pas de crime de violence conjugale. Les situations qui s’y rapportent sont sanctionnées en faisant référence au comportement violent correspondant à un article du Code criminel. Il sera alors question de menaces, de harcèlement criminel, de voies de fait simples ou graves, d’agressions sexuelles simples ou graves, voire de tentative de meurtre ou même de meurtre. Le fait que de tels actes soient commis en contexte de violence conjugale est perçu comme un facteur aggravant[4] la situation et, conséquemment, son traitement pénal. Inès, aide-enquêteuse à la GRC à Montréal, explique :

Du point de vue policier, pour pouvoir agir en tant que policier, on est obligé d’avoir une loi, on ne peut pas agir tant et aussi longtemps qu’on n’a pas un cadre législatif, qu’on n’a pas un pouvoir pour le faire. On n’en a pas, alors on va se référer à d’autres articles du Code criminel comme séquestration, viol, enlèvement, voies de fait... tout ce qui est agression sexuelle.

Reste une panoplie de situations plus insidieuses, déjà bien documentées, qui marquent la réalité des mariages forcés : exploitation, servitude domestique, voire esclavage (Jimenez et al., 2011). Ces situations sont beaucoup plus difficiles à faire valoir légalement, ou même socialement. À cet égard, on peut certainement soutenir que les femmes victimes de mariage forcé manquent de protection et d’assistance, tout autant que de compréhension en regard de leurs conditions de vie qui entraînent les conséquences funestes que nous avons évoquées plus tôt.

À l’échelle internationale, même si plusieurs conventions dénoncent le mariage forcé et rappellent les règles du mariage voulant en premier lieu que celui-ci soit consensuel, aucune ne prévoit de mesures de protection particulières pour les victimes d’un tel mariage. Ailleurs, nous avons établi un lien possible entre traite des personnes et mariage forcé (Jimenez et al., 2011). Et nous nous sommes interrogées sur la pertinence, dans un contexte migratoire et en l’absence d’un instrument international de protection particulier pour les victimes de mariage forcé, d’envisager l’application du Protocole relatif à la traite (Jimenez et al., 2011). Le Protocole a été ratifié par un grand nombre d’États, dont le Canada. Il prévoit de mettre en oeuvre des mesures en vue d’assurer la sécurité physique des personnes et d’examiner la possibilité de prendre des mesures législatives grâce auxquelles les victimes pourraient rester au pays de manière temporaire ou permanente. À défaut de sanction particulière, le Protocole serait une avenue possible de solution à explorer.

Des doutes quant à l’effet dissuasif d’une loi criminelle

De l’avis du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) des Nations Unies : « Si la plupart des pays se conforment aux recommandations de la CEDEF dans leur constitution et leur législation nationale, concrètement, en revanche, ils y contreviennent par leurs traditions et par les carences dans l’application de la loi » (CEDEF, 1992).

Rude-Antoine (2011 : 182) s’est interrogée sur la faisabilité d’une interdiction du mariage forcé : « Les textes juridiques sont nombreux. Pour autant, on n’est pas convaincu de voir dans cette action législative une efficacité et une adéquation avec la réalité sociale de ces mariages forcés qu’elle prétend combattre. »

Dans le même sens, un sergent détective du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) confie :

[...] Comme n’importe quel autre crime, ça ne change absolument rien que ce soit criminalisé ou non, dans le sens où les gens trouvent toujours moyen de contourner la loi. Je pense que, de toute façon, ces mariages-là se font quand même assez en secret et je ne sais pas si les victimes de ces mariages forcés-là dénonceraient. Je pense qu’il y aurait tout le problème de la dénonciation.

Plusieurs pays européens, soit l’Allemagne, la Belgique et la Norvège, ont pris l’initiative de criminaliser les mariages forcés. Toutefois, il n’est pas encore possible d’affirmer que ces mesures aient eu un effet positif ou négatif, ou bien qu’elles aient été la solution aux mariages forcés ; leur application étant trop récente, il n’y a pas encore eu d’étude sur leur impact (Rude-Antoine, 2005, 2011 ; Ministère de la Justice Canada, 2008).

Un fardeau supplémentaire pour la victime

La criminalisation du mariage forcé entraîne plusieurs défis de taille à surmonter pour la victime, surtout au vu des conséquences qu’elles vivent ou ont vécues. Même si cet aspect n’est pas ressorti aussi clairement de nos données, Neyrand et al. (2008 : 24) notent :

La difficulté au principe de cette démarche de pénalisation s’avère double : il s’agit en effet, d’une part, de pouvoir identifier le moment du passage de la suggestion que propose le mariage arrangé à l’imposition que réalise un mariage forcé ; et, d’autre part, d’éviter que la pénalisation, en stigmatisant les parents, les familles et leur culture d’origine, n’incite encore plus de jeunes filles (et jeunes gens) à consentir malgré elles (eux).

Ainsi, le mariage forcé peut être doublement source de victimisation pour la femme qui le subit. Premièrement, par le caractère forcé du mariage et, deuxièmement, lorsqu’elle a le courage de porter plainte et d’intenter un recours en justice, par le système de défense impliquant l’aspect culturel pris en considération dans la décision (Siddiqui, 2005 ; Desai, 2007). Lewis Herman (2005) qualifie les crimes sexuels et de violence domestique de « crimes de l’impunité », leurs victimes portant rarement plainte ou allant rarement jusqu’au bout du processus judiciaire, en partie à cause du fait que leur agresseur est un membre de la famille.

La plupart des femmes que nous avons interviewées nous ont également fait part de leurs préoccupations quant au sort de leurs enfants et de leur survie hors de la sphère familiale et communautaire. Bahia raconte l’histoire de sa soeur, mariée de force, qui a demandé le divorce. Depuis, elle est, selon ses propos, « condamnée ». À tel point que selon Bahia :

Tu ne peux même pas dire bonjour quand ils [les parents] passent, ils ne te parlent même pas. Parce que je l’ai vu, parce que quand j’ai été au magasin, ma soeur était là en train de magasiner... ma soeur... elle voulait parler avec ma mère, mais ma mère n’a même pas répondu, elle est partie, ce n’est comme plus sa fille.

Rude-Antoine (2011 : 207) observe que : « Dans les faits, les personnes mariées de force ne vont pas au prétoire pénal [...] elles ne font souvent qu’une procédure civile pour obtenir la nullité de leur mariage. »

De fait, ce qui ressort du discours des femmes rencontrées dans le cadre de notre étude est qu’elles veulent de l’aide pour faire cesser une situation de violence devenue intolérable, pas nécessairement une action policière et pénale qui jetterait le discrédit sur la famille et risquerait de les mettre encore davantage en danger.

Deux obstacles majeurs s’ajoutent encore au fait que les femmes ne dénoncent pas toujours leur situation ou le font tardivement : l’isolement et la méconnaissance de la langue. Premièrement, plusieurs d’entre elles nous ont confié ne pas connaître le numéro d’urgence 911, et deuxièmement, plusieurs d’entre elles ne parlaient ni l’anglais ni le français au moment des faits, ce qui augmentait grandement leur degré de vulnérabilité en consolidant leur isolement, réduisant du même coup leur accessibilité aux services sociaux canadiens.

Conclusion

Il ressort de l’analyse préliminaire des données que nous venons de présenter que malgré une grande vulnérabilité des victimes d’un mariage forcé vivant au Canada, pour le moment, la criminalisation propre à cette forme d’union conjugale ne paraît pas pouvoir être envisagée comme une solution[5].

En effet, même si cela donnait certainement plus de pouvoir d’action aux autorités, le Canada ne paraît pas prêt à prendre une telle mesure. D’ailleurs, est-elle nécessaire ? L’État ne possède-t-il pas déjà toutes les ressources juridiques pour intervenir ? Le Canada n’est en effet pas démuni pour faire face à cette problématique nouvellement découverte, dans la mesure où il est possible d’intervenir judiciairement pour criminaliser les actions répréhensibles qui marquent un grand nombre de situations de mariage forcé, sans toutefois leur être propres.

De surcroît, plusieurs des personnes interviewées, tant du côté des informateurs clés que du côté des femmes, doutent de l’effet dissuasif d’une disposition criminelle spécifique aux mariages forcés. Effectivement, par ce biais, la société canadienne affirmerait son désaccord quant à une telle pratique culturelle, mais pourrait-elle, dans la foulée, assurer la protection des femmes qui en sont victimes ? Bon nombre s’entendent plutôt pour dire qu’on stigmatiserait ainsi encore un peu plus une victime dont le lot de vulnérabilités pèse déjà bien assez lourd.

Si l’avenue de la criminalisation n’est pas ouverte à ce stade des connaissances, quelles sont les solutions possibles pouvant être mises en place ou simplement utilisées par le Canada et le Québec afin de venir en aide aux victimes de cette problématique complexe ?

Les participants à notre étude ont répondu à l’unanimité : « faire de la prévention », tant auprès des intervenants (juges, procureurs, policiers, intervenants sociaux, scolaires et communautaires, personnel médical, médecins, etc.) qu’auprès des étudiants dans les écoles (secondaires, cégeps, universités) ou qu’auprès des nouveaux arrivants au pays, hommes et femmes confondus. Pour cela, il serait nécessaire de créer, d’une part, un réseau de partenaires qui puissent collaborer en ayant l’objectif commun de sensibiliser la population canadienne à la problématique et, d’autre part, des outils de formation accessibles s’adressant en particulier aux professionnels et aux immigrants.

La prévention passe nécessairement par la réaffirmation des droits inaliénables de la personne et des valeurs auxquelles adhère la société canadienne, dont l’égalité entre les sexes. Comme le dit Manji (2006, cité dans Hirsi Ali, 2006 :74) : « Culture is not a reason to tolerate human suffering ». Citoyenneté et Immigration Canada (2011 : 9), dans son guide rappelant les droits et responsabilités des nouveaux citoyens, indique clairement :

Au Canada, hommes et femmes sont égaux devant la loi. L’ouverture et la générosité du Canada excluent les pratiques culturelles barbares qui tolèrent la violence conjugale, les meurtres d’honneur, la mutilation sexuelle des femmes, les mariages forcés ou d’autres actes de violence fondée sur le sexe. Les personnes coupables de tels crimes sont sévèrement punies en vertu des lois pénales du Canada.

Dans le même esprit, on pourrait concevoir un document d’information générale fourni à tous les résidents temporaires ou permanents, hommes ou femmes, rappelant par exemple les valeurs de la société, les droits et responsabilités liés au statut d’immigrant, et fournissant quelques coordonnées de ressources diverses (aide alimentaire, logement, maisons de la culture, maisons d’hébergement) et le numéro d’urgence 911. Ce document devrait être produit dans de nombreuses langues en plus du français et de l’anglais afin qu’il soit accessible à un maximum de personnes, surtout lorsque l’on sait que plus de la moitié des femmes rencontrées dans le cadre de notre étude ne parlaient ni l’anglais ni le français.

Enfin, si la criminalisation propre au mariage forcé n’est pas envisageable ou souhaitable, pourrait-il être envisageable ou souhaitable que la condition forcée du mariage se rajoute au contexte conjugal pour former un facteur aggravant des violences affligées qui pourrait comprendre les notions d’exploitation et d’esclavage ?

Quelle que soit la voie d’intervention qui sera retenue, les témoignages que nous avons recueillis des femmes vivant, ayant vécu ou étant menacées d’un mariage forcé et des professionnels intervenant auprès d’elles nous ont convaincues qu’il fallait continuer de chercher une meilleure solution pour faire cesser les violences vécues sans risquer de produire une victimisation secondaire tout aussi dommageable.