Comptes rendus : Études stratégiques et sécurité

From Promise to Practice. Strengthening un Capacities for the Prevention of Violent Conflict.Sriram, Chandra Lekha et Karin Wermester (dir.). Boulder, Lynne Rienner, 2003, 429 p.[Notice]

  • Jean-Christophe Boucher

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  • Jean-Christophe Boucher
    Institut québécois des hautes études internationales
    Université Laval, Québec

Les multiples échecs des interventions onusiennes dans les années 90’ eurent, ironiquement, un effet réfrigérant sur l’espoir post-guerre froide d’un « Nouvel ordre mondial ». Après l’euphorie interventionniste suivant la fin de l’antagonisme Est-Ouest, les déboires des missions de paix en Somalie, au Rwanda, à Haïti, en Iraq du Nord et en Angola illustrèrent non seulement la complexité et la difficulté des interventions de tierces parties, mais également l’importance et la nécessité d’un entendement adéquat du phénomène. Or, résultant de cette constatation, un large processus de réflexion fut entamé au niveau international afin d’analyser les prémisses théoriques et pratiques des interventions dans les conflits armés et, par extension, de fournir une compréhension générale ayant une portée normative. Cette problématique est toujours, aujourd’hui, une source intarissable de débats pour les étudiants et les praticiens des relations internationales. Dans le but de mener à terme cette ambition, From Promise to Practice nous propose trois groupes d’articles. En premier lieu, les trois premiers articles traitent des ramifications conceptuelles sur lesquelles nous devons bâtir notre compréhension des interventions préventives. Pour ce faire, les auteurs tentent d’élaborer un appareil théorique représentant l’interaction entre les conflits armés et les interventions. En deuxième lieu, neuf articles explorent la réalité et la complexité des interventions préventives sur le terrain en nous offrant un large éventail d’études de cas où la communauté internationale réussit ou échoua dans son rôle de prévention. En dernier lieu, deux textes cherchent à mettre en lumière les leçons et recommandations possibles découlant de la diversité des études de cas afin de servir, ultimement, à l’élaboration de politiques d’intervention onusiennes. Eu égard à la partie théorique de l’ouvrage, les articles de Chandra Lekha Sriram, Karin Wermester et Donald Rothchild développent une vision singulière des conflits. Selon eux, les enjeux sécuritaires et économiques sont intimement liés. Ainsi, les auteurs argumentent en faveur d’une interprétation holistique des conflits où les défis de développement et de sécurité s’entrecoupent. Cette interprétation, selon laquelle les enjeux de sécurité et de développement sont intrinsèquement liés, se démarque sensiblement de l’interprétation classique. Cette dernière suppose généralement une distinction théorique et pratique entre, d’une part, les interventions « structurelles » où les intervenants circonscrivent leurs activités aux causes originaires du conflit et, d’autre part, aux interventions « opérationnelles » caractérisées par des activités cherchant à éliminer ou réduire les manifestations immédiates de la violence. En contrepartie, Lekha Sriram, Wermester et Rothchild proposent une approche intégrative où l’on discrimine entre le « contenu du problème » – c’est-à-dire les risques et défis associés aux différentes phases d’un conflit – et le « contenu de la réponse » – les diverses stratégies déployées par la communauté internationale dans le but de prévenir le conflit. Ainsi, les auteurs distinguent cinq « phases » dans un conflit : conflit potentiel, gestation du conflit, catalyseur/mobilisation du conflit, escalade du conflit et post-conflit. À ceci correspondent respectivement cinq « actions préventives » : prévention structurelle, gestion et prévention du conflit, gestion de la crise et diplomatie préventive, gestion de la crise/conflit et terminaison et construction de la paix. À chacune de ces « phases » s’ajoute une panoplie de stratégies et d’outils ainsi que les acteurs onusiens pouvant les employer. D’ores et déjà on perçoit l’ambition démesurée de circonscrire une telle conception à l’intérieur d’une soixantaine de pages. Pour reprendre la formule de Kant, ce livre n’aurait pas été aussi long à lire s’il n’avait été aussi court. En dépit du caractère heuristique de la démonstration, qui se veut avant tout un « outil » analytique, le lecteur s’interroge sur la nécessité d’une telle construction. En effet, la valeur …