Comptes rendus : Études stratégiques et sécurité

Conflict Prevention. The Untapped Potential of the Business Sector.Wenger, Andreas et Daniel Möckli. Boulder, co, Lynne Rienner Publishers, 2002, 233 p.[Notice]

  • Olivier Boiral

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  • Olivier Boiral
    Faculté des sciences de l’administration
    Université Laval, Québec

Depuis la fin de la guerre froide, la prévention des conflits intrarégionaux et la consolidation de la paix ont fait l’objet d’un nombre croissant d’initiatives qui entendent remettre en cause la prédominance des approches réactives ou postconflits. Ces initiatives ont cependant donné, jusqu’à présent, des résultats peu concluants. Selon Andreas Wenger et Daniel Möckli, le manque de participation du secteur des affaires et les problèmes socioéconomiques qui en découlent ne sont pas étrangers aux échecs répétés de ces efforts de prévention, qui reposent trop souvent sur une logique interétatique peu adaptée au contexte actuel de mondialisation. La principale contribution de l’ouvrage est de montrer en quoi les entreprises, considérées dans de nombreux travaux comme une source possible de tensions et de conflits, peuvent activement contribuer, de concert avec les institutions internationales et les organisations non gouvernementales, à la pacification d’une région. Dans le chapitre d’introduction, les auteurs exposent rapidement le concept de prévention des conflits et ses enjeux, tant pour la sécurité internationale que pour la stabilité économique, en soulignant d’emblée les lacunes et le flou théorique des études dans ce domaine. Le second chapitre s’attache à décrire l’évolution des approches de prévention des conflits, en distinguant notamment le système Westphalien, centré sur l’intervention des États, et le système post-Westphalien, qui repose sur une logique beaucoup plus multilatérale. Ce multilatéralisme, qui s’impose de plus en plus depuis le début des années 90, a été notamment marqué par l’intervention croissante des organisations non gouvernementales dans des opérations humanitaires préventives ou palliatives. En dépit de ces interventions, les auteurs rappellent que le nombre de conflits intra-étatiques a considérablement augmenté et que les mesures préventives sont loin de faire consensus. Pour répondre au flou sémantique dans ce domaine, plusieurs concepts associés à la prévention des conflits sont définis et exposés avec une relative clarté. Les auteurs définissent en particulier trois types de prévention des conflits caractérisés par des domaines d’activités et des objectifs spécifiques : prévention opérationnelle, systémique et structurelle. Le troisième chapitre se propose d’évaluer les mesures actuelles de prévention des conflits et les raisons qui expliquent leur efficacité discutable. Les mesures de prévention opérationnelles, structurelles et systémiques sont successivement abordées et illustrées par différents exemples qui en montrent les limites. Ces limites sont moins liées à un manque d’initiatives, qu’à des réponses trop souvent inadaptées, insuffisantes ou tardives. La complexité des problèmes de sécurité, le manque de moyens financiers et humains, la réticence de certains États, ou encore la dispersion des efforts entrepris sont autant de raisons qui peuvent expliquer les échecs rencontrés. L’analyse de la contribution relative des États, des organisations internationales et des organisations non gouvernementales montre le manque de coordination entre ces différents acteurs. Cette analyse comparative met également en lumière des lacunes que pourrait combler l’implication plus active du secteur des affaires, notamment au niveau de l’apport de nouvelles ressources et de l’amélioration de la situation socioéconomique. Dans le quatrième chapitre, les auteurs analysent les avantages, pour les entreprises, de s’engager plus activement dans la prévention des conflits. Ces avantages sont essentiellement économiques. En premier lieu, l’émergence de conflits se traduit par une déstabilisation socioéconomique, par des risques majeurs pour les personnes ou pour les infrastructures, et par des coûts qui sont préjudiciables aux échanges commerciaux. Les entreprises sont d’autant plus vulnérables à ces risques que le processus de mondialisation a renforcé l’interdépendance des économies et que les investissements directs à l’étranger des pays riches vers les pays en voie de développement ont considérablement augmenté au cours des années 90. En deuxième lieu, les entreprises multinationales sont l’objet de critiques croissantes, en particulier par la mouvance anti …