Comptes rendus : Régionalisme et régions - Europe

Lequesne, Christian et Yves Surel (dir.), L’intégration européenne. Entre émergence institutionnelle et recomposition de l’État, coll. Académique, Paris, Les Presses de sciences po, 2004, 292 p.[Notice]

  • Jérôme Montes

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  • Jérôme Montes
    Conseil général des Pyrénées-Atlantiques
    Pau, France

Cet ouvrage collectif souligne la complexité des logiques de décisions et la diversité des acteurs qui interviennent dans le processus d’élaboration des politiques publiques, qu’il s’agisse des politiques de service public, des systèmes de protection sociale ou des modes de régulation de l’économie européenne. Sa principale originalité repose sur le fait qu’il mêle les approches à la fois politiques, économiques et sociologiques. Ce livre se démarque, aussi, de la littérature foisonnante qui existe sur l’objet européen, notamment dans le champ de la science politique, en réunissant les travaux de spécialistes européens mais également américains du fonctionnement des institutions communautaires. Dans le premier chapitre, Jacques Le Cacheux se penche sur les logiques économiques de l’intégration européenne. Il souligne, notamment, la forte hétérogénéité macroéconomique qui subsiste au sein de l’union monétaire en dépit du processus d’unification monétaire et des critères de Maastricht. Il insiste, aussi, sur l’exacerbation de la concurrence fiscale et entre systèmes nationaux de protection sociale du fait de l’impossibilité, dorénavant, de recourir à la dévaluation ou à la désinflation compétitive. Dans la même veine, mais avec une approche davantage théorique, Colin Crouch s’intéresse aux analyses typologiques (chap. 2). Il revendique, ainsi, un examen plus différencié des économies « de marché » ou « organisées », dès lors qu’est posée la question de la survie sclérotique – voire la disparition – d’un capitalisme organisé ou coordonné qui, à l’inverse du « marché libéral », s’avère peu ajusté aux exigences actuelles, enraciné dans le passé industriel et générateur de taux de sous-emploi élevés. Dans un registre plus sociologique, John Crowley s’interroge sur l’institutionnalisation d’un « modèle politique européen » (chap. 3). Ainsi, le débat autour de la « constitutionnalisation » de l’Union européenne apporte la claire illustration du peu de crédit, voire de la suspicion, qui entoure l’hypothétique émergence d’un État européen. À la suite, Paul Magnette pointe le louvoiement de l’intégration des Parlements entre une convergence européenne longtemps contrariée et des tropismes nationaux prégnants (chap. 4). Ainsi, parce qu’à la différence des organes de décision exécutive (gouvernements, diplomaties et administrations), au sein de l’Union la collaboration parlementaire reste faiblement institutionnalisée, le modèle politique européen demeure extraordinairement asymétrique et le débat reste inexorablement confiné à l’intérieur de cadres pour l’essentiel nationaux. Privilégiant l’analyse institutionnelle pour expliquer l’intégration, George Tsebelis se démarque des courants intergouvernementaliste et néo-fonctionnaliste (chap. 5). Étayant sa démonstration de nombreux graphiques, l’auteur s’attache ainsi à aborder les institutions communautaires en tant que variables à la fois indépendantes (étudier leurs effets) et dépendantes (étudier leurs origines). À travers l’analyse du fonctionnement des groupes de travail du Conseil européen, Jacques de Maillard, Ève Fouilleux et Andy Smith montrent le rôle primordial acquis par les arènes de médiation et de compromis où se prépare la genèse des politiques communautaires (chap. 6). Ils mettent en évidence, notamment, comment en élaborant les projets législatifs qui seront avalisés par les responsables politiques ces comités de fonctionnaires participent à l’européanisation de la décision, ainsi qu’à l’apparition d’un espace d’action publique européen. Vivien Schmidt, ensuite, s’intéresse à l’européanisation des mécanismes d’ajustement de l’économie politique (chap. 7). Elle met ainsi en relief l’importance des discours de justification particuliers à chaque État membre pour expliquer la persistance de modèles d’économie politique encore très différents les uns des autres, malgré des tendances à la convergence. Dans un même ordre d’idées, Adrienne Héritier observe que la question des services publics a fait l’objet d’interactions multiples qui ont eu pour conséquence d’amender les projets initiaux de la Commission dans un sens plus favorable au maintien des services d’intérêt général (chap. 8). Dans le dernier chapitre, Christelle Mandin et Bruno Palier s’appuient …