Corps de l’article

Cet ouvrage est l’aboutissement d’une thèse de doctorat préparée à la Faculté de droit de l’Université libre de Bruxelles sous la direction de Jean-François Bellis. Il se présente sous des dimensions assez inhabituelles puisqu’il atteint 1 322 pages. Il faut dire qu’il y a 52 pages de bibliographie qui comprennent les références habituelles, la jurisprudence et, pour moitié, les documents de l’omc. L’index de 30 pages doit représenter au moins 500 mots, dont certains sont beaucoup démultipliés. La table des matières s’étend sur 38 pages, ce qui fait regretter l’absence d’un sommaire qui aurait permis d’avoir plus facilement une idée générale de l’ouvrage. Enfin, pour mettre à jour son travail, l’auteur a eu la bonne idée d’ajouter (mais pourquoi au début ?) un addenda consacré aux développements survenus entre la remise du manuscrit (1er juillet 2003) et la dernière lecture des épreuves (1er octobre 2003). Il ne s’agit là que de trois mois, mais l’addenda fait 26 pages.

C’est dire qu’il s’agit là d’un ouvrage exceptionnel, qui présente un panorama complet, en langue française, du droit de l’omc. Ce droit est complexe, car il trouve sa source dans une série d’accords le plus souvent techniques qui portent sur des sujets très variés et qui sont le résultat de longues négociations et de compromis délicats. On se souvient de l’Uruguay Round qui s’est terminé par l’accord signé à Marrakech le 15 avril 1994. La première partie comprend une description détaillée des règles et des principes essentiels contenus dans ces accords. Mais la jurisprudence est aussi source de droit, et elle l’est dans le commerce international, notamment dans la mesure où l’accord de Marrakech a institué un mécanisme contraignant de règlement des différends. C’est donc un exposé complet des sources et des règles du droit commercial international que l’auteur nous propose, en examinant non seulement les dispositions relatives aux produits – agriculture, textile, services, propriété intellectuelle – mais aussi celles relatives aux subventions, aux licences d’importation, à la concurrence, aux clauses de sauvegarde, aux marchés publics.

La deuxième partie concerne les procédures de règlement des conflits. En instituant l’omc, l’accord de Marrakech a innové sur ce point. Alors que les conflits ne pouvaient être réglés auparavant que par une démarche essentiellement politique et donc diplomatique, les pays ont accepté d’être liés désormais par une procédure bien définie, obligatoire et indépendante. L’ouvrage expose longuement les différentes étapes de cette procédure « de droit commun », notamment la constitution du groupe spécial et l’examen de son rapport, mais aussi les voies de recours ou les sanctions. Il examine également les procédures que l’on pourrait appeler spéciales, et qui concernent par exemple les restrictions liées à la balance des paiements ou les dérogations liées aux accords régionaux.

La troisième partie est beaucoup plus courte. Elle est présentée comme une annexe, elle n’est pas pour autant la moins intéressante. Sous le titre Problématiques horizontales d’actualité, l’auteur examine quelle incidence les accords de l’omc ont sur certains domaines qui n’ont pas de rapport direct avec le commerce mais auxquels les États peuvent accorder de l’importance. Il s’agit de la protection de l’environnement, de la protection des personnes, y compris la protection des consommateurs, comme celle des droits sociaux, enfin – et ce n’est pas le moins essentiel – de la défense de la culture et des savoirs traditionnels. En se fondant surtout sur l’évolution de la jurisprudence, l’auteur montre que les règles de l’omc n’empêchent pas les pays membres de poursuivre des objectifs politiques nationaux, nonobstant cependant quelques difficultés d’interprétation qui subsistent...

Le seul reproche un peu sérieux que l’on puisse faire à cet ouvrage est le plan, moins l’enchaînement des parties que l’importance de chacune : 750 pages, puis 280, puis 100 pour la dernière qui tient plutôt d’une conclusion, d’autant qu’il manque à cet ouvrage une conclusion générale qui mérite son nom. Mais cela n’empêche pas que nous sommes en présence d’une véritable somme sur l’omc. Les juristes ne seront pas les seuls à l’apprécier, les économistes y trouveront une description, combien minutieuse, de l’ensemble des règles qui régissent le commerce international. Et au-delà de la simple description, ils comprendront mieux à travers les observations pertinentes de l’auteur, l’enjeu considérable que représente l’organisation du commerce entre les nations.

Il est surprenant de constater que ces règles ont été mises en place progressivement depuis la guerre et que le commerce international s’est trouvé peu à peu organisé, alors que les relations monétaires avaient été organisées il y a soixante ans, et que les règles fixées ont été peu à peu abandonnées...