Comptes rendus : Études stratégiques et sécurité

Zartman, I. William et Guy Olivier Faure (dir.), Escalation and Negotiation in International Conflicts, Cambridge, Cambridge University Press, 2005, 336 p.[Notice]

  • Oana Tranca

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  • Oana Tranca
    Candidate au doctorat
    Département de science politique et
    Programme Paix et sécurité internationales
    HEI, Université Laval, Québec

Ce livre, sous la direction de Zartman et Faure, se veut avant tout un essai qui permette de relier les différentes phases qui caractérisent l’évolution des conflits aux stratégies de négociation destinées à faciliter leur résolution. De ce point de vue, il s’inscrit à la fois dans la tradition des recherches qui visent à expliquer les origines, les causes et le cheminement des conflits (le champ d’analyse de conflits) tout comme dans la littérature à caractère plus normatif plus orientée vers la pratique politique portant sur la gestion, la résolution et la prévention des conflits. Cette perspective, qui combine les résultats des analyses de plusieurs chercheurs reconnus aux conseils d’ordre pratique, s’adresse donc non seulement aux membres de la communauté universitaire mais également aux décideurs politiques impliqués dans la résolution des conflits internationaux. Les auteurs se proposent de découvrir, par une analyse minutieuse des différents processus qui caractérisent un conflit, les situations propices au déclenchement des négociations. Cette tradition a été inaugurée par Zartman lui-même dans les années 1980, moment où il introduit le concept de ripeness pour décrire un stade dans l’évolution du conflit où les adversaires deviennent plus réceptifs aux bénéfices de la coopération. Valoriser et réactualiser cette hypothèse ainsi que mieux la préciser et l’opérationnaliser du point de vue théorique et pratique constituent l’objectif principal des chapitres de cet ouvrage. La première partie du livre est destinée à l’étude de l’escalade des conflits, dont l’importance est soulignée non seulement à cause de la fréquence de ce phénomène, particulièrement dans le cas des conflits violents, mais également à cause des effets dévastateurs qu’elle peut avoir si elle échappe à tout contrôle. Toutefois, les auteurs soulignent également les opportunités de négociation qu’un processus d’escalade, dans certaines circonstances, peut offrir. La deuxième partie du livre approfondit notamment cet aspect. En apparence opposées, les multiples facettes de ces phénomènes ne les rendent pas forcément incompatibles. En général, l’argument central est que si l’escalade du conflit ne produit pas les résultats escomptés, les négociations peuvent devenir une alternative de plus en plus attirante. L’escalade renferme un côté transitif qui la rend tributaire des actions des acteurs et un côté intransitif, qui fait ressortir les dynamiques propres au conflit contraignant les actions et oblige les acteurs à voir l’escalade comme la seule alternative à une défaite. En ce sens, la complexité conceptuelle qui entoure l’escalade ne souligne pas seulement une intensification du conflit, mais également un changement qualitatif qui marque son passage vers un stade supérieur de la confrontation en termes de violence, d’enjeux, de moyens, de coûts, des risques ou d’engagement des parties. Ainsi, l’escalade peut prendre de nombreuses formes et ses conséquences sont multiples : l’impasse (dead-lock), la dissuasion, la course aux armements, la prise au piège (entrapment) et la vengeance. L’impasse, une situation où aucune concession ou action constructive n’est perçue comme acceptable, peut être, selon Guy Olivier Faure, une cause ou une conséquence de l’escalade. L’impasse peut acquérir un caractère durable, illustré souvent par des cessez-le-feu qui n’aboutissent pas à un accord définitif. L’auteur souligne par conséquent l’importance des actions des acteurs du conflit tout comme des tierces parties, afin de contrecarrer les effets intransitifs de l’impasse et de la transformer en point de départ pour les négociations. En dernière instance, l’impasse peut représenter un tournant dans le conflit, que les adversaires peuvent utiliser pour entamer des négociations, aspect souligné également dans le chapitre de Daniel Druckman. Concept central des relations internationales pendant la guerre froide, la dissuasion constituait essentiellement une stratégie de sécurité destinée à prévenir l’escalade des hostilités entre les deux superpuissances. La …