Introduction : Les relations transatlantiques dans la période de l’après-guerre froideRegards croisés franco-allemands et nord-américains[Notice]

  • Paul Létourneau et
  • Stephan Martens

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  • Paul Létourneau
    Département d’histoire
    Université de Montréal
    C.P. 6128 succ. Centre-ville
    Montréal (Québec) H3C 3J7

  • Stephan Martens
    Université Michel de Montaigne / Bordeaux 3
    UFR d’études germaniques
    Domaine universitaire
    F 33607 Pessac Cedex
    France

Quatre États majeurs de la scène internationale (États-Unis, Allemagne, France et Canada) – importants piliers de la relation transatlantique – ont connu dans les dernières années des changements profonds dans leur vie politique : arrivée au pouvoir en Allemagne, en octobre 2005, de la chrétienne-démocrate Angela Merkel, première femme à devenir chancelier ; au Canada, en février 2006, du premier ministre conservateur Stephen Harper ; à la présidence de la République française, en mai 2007, de Nicolas Sarkozy ; et, aux États-Unis, en janvier 2009, à la suite des élections remportées en novembre 2008, de Barack Obama, premier président noir. Ces quatre pays connaissent l’avènement d’une nouvelle génération de responsables politico-économiques qui n’a pas connu personnellement les enjeux de la guerre froide. De plus, les acteurs qui se sont opposés, en Europe, à la vision du monde de George W. Bush ont quitté la scène. Jacques Chirac en France et Gerhard Schröder en Allemagne ont laissé la place à des dirigeants ouvertement proaméricains. Il faut noter par ailleurs l’évolution de l’administration Bush, car, dès le début du second mandat, George W. Bush a tenté de rétablir le dialogue, les alliés européens n’étant plus considérés comme des empêcheurs de tourner en rond, mais, au contraire, comme des partenaires dont l’aide est d’autant plus appréciée qu’elle se révèle nécessaire, en Afghanistan notamment. S’il existe des divergences objectives (modèles de société) et des intérêts stratégiques et géoéconomiques différents, l’Europe et l’Amérique du Nord ont en commun un grand nombre de valeurs et sont liées par des interactions géoculturelles très denses – le Canada notamment est un pays allié et lié historiquement aux Européens en général, à la France et au Royaume-Uni en particulier – et doivent faire face aux mêmes menaces. Durant la guerre froide, l’Europe occidentale a été à la fois un atout stratégique mondial et un relais de puissance essentiel pour Washington. À l’inverse, les États-Unis ont protégé pendant des décennies cette Europe d’une éventuelle attaque soviétique. Il reste qu’après la chute du mur de Berlin et des régimes communistes, presque tout a été remis en question dans le système international, avec des conséquences sur les relations euro-américaines. D’abord, on assiste à un accroissement inédit de la puissance américaine qui ajoute ses effets au basculement radical de l’équilibre mondial résultant de la disparition de l’Union soviétique. Certes, à l’issue de la guerre du Golfe en 1991, le président George Bush parle d’un « nouvel ordre mondial » dans lequel la coopération entre l’Europe et les États-Unis permettrait de résoudre, de concert, les problèmes politiques et économiques dans le monde. Mais avec la disparition du bloc communiste l’Europe n’est plus le centre de la politique extérieure américaine. Le président Bill Clinton exprime d’ailleurs des réserves à l’égard du Vieux Continent et, tout en admettant l’importance cruciale de l’otan, il estime que l’Europe doit régler ses propres problèmes. Ni Washington ni les capitales européennes ne sont cependant préparées à faire face à l’exaspération des conflits ethniques en Europe du Sud-Est (guerre en Yougoslavie) et dans le Caucase, à la criminalité organisée et au terrorisme : si l’Europe continue à pousser son projet d’unification (traité de Maastricht en 1992), elle n’arrive pas encore à s’affirmer politiquement sur la scène internationale de manière crédible. En même temps, les États-Unis entendent se prémunir contre les aspirations émancipatrices de l’Union européenne (ue), car, libérée de la menace militaire, l’Europe peut souhaiter se détacher de la tutelle américaine et se positionner de façon plus autonome face à la superpuissance, voire s’affirmer comme un rival de la puissance américaine, en défendant de manière ferme ses …

Parties annexes