Comptes rendus : Analyse de politique étrangère

Jean-François Payette, 2009, Introduction critique aux relations internationales du Québec. Esquisse d’un modèle formel de politique étrangère pour les États subétatiques, Québec, Presses de l’Université du Québec, 97 p.[Notice]

  • Papa Samba Ndiaye

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  • Papa Samba Ndiaye
    Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques
    Université du Québec à Montréal, Montréal

Le livre de Jean-François Payette n’est pas un livre de plus s’intéressant au Québec sur la scène internationale. Il renouvelle les études sur les relations internationales du Québec. Il enrichit ce champ par une perspective diachronique et théorique innovante. Le concept central du livre est celui de la « paradiplomatie identitaire » que Payette propose comme approche pour dépasser la « doctrine Paul Gérin-Lajoie » qui était le socle et l’épine dorsale de la politique extérieure du Québec. En effet, les relations internationales du Québec reposent sur deux pôles : celui de la francophonie et celui des relations économiques avec les États-Unis. Ainsi, la question qui mérite d’être posée est de savoir à quelles conditions le Québec peut avoir (et doit-il avoir ?) une politique étrangère. Cette question soulève selon l’auteur trois enjeux : théorique, politique et épistémologique. Sur le plan théorique d’abord, il y a toute la question du statut du Québec qui n’est pas un État en soi au regard du droit international, mais une province dans une fédération, donc qui ne peut avoir qu’une souveraineté subordonnée. Sur le plan politique ensuite, une menace plane sur l’unité de la fédération canadienne. Enfin, sur le plan épistémologique, un aspect fondamental de la science politique considère qu’il ne peut exister de souveraineté sans légitimité. Ce qui fait défaut à un État subétatique. Cependant, au sujet des relations internationales du Québec, l’auteur rappelle que, souvent, trois thèses s’affrontent : la thèse souverainiste, la thèse fédéraliste et la doctrine Gérin-Lajoie. La thèse souverainiste postule qu’il faut un Québec souverain comme État indépendant pour être un vrai acteur des relations internationales. La thèse fédéraliste, elle, met l’accent sur la nécessité de l’uniformité de la politique étrangère canadienne conduite par le gouvernement fédéral. La « doctrine Paul Gérin-Lajoie », appelée aussi thèse québécoise, suggère que le Québec peut prolonger sur le plan international ses champs de compétences constitutionnelles. Cette dernière est la thèse dominante selon l’auteur. À la place de ces trois thèses, Payette apporte sa contribution et propose le concept de « paradiplomatie identitaire ». C’est l’élaboration d’une politique étrangère au niveau subétatique. Elle relève des Low Politics (économie, commerce, social, environnement, droit de la personne) et non des High Politics (questions de sécurité, cultures stratégiques, ententes de coopération militaire). Or, deux courants s’affrontent dans l’école de la paradiplomatie identitaire. Le premier courant soutient que la structuration d’une paradiplomatie identitaire peut améliorer la politique étrangère des États-nations. Le deuxième courant de la paradiplomatie identitaire soutient que le développement des relations internationales sur le plan subétatique peut être source de tension et synonyme de lutte de pouvoir. L’auteur souscrit à ce deuxième courant et postule deux hypothèses : d’abord, la doctrine Paul Gérin-Lajoie empêche le Québec de se doter d’une politique étrangère ; ensuite, la paradiplomatie identitaire permettrait au Québec d’avoir une vraie politique étrangère sans ingérence d’Ottawa. Pourtant, même la doctrine Paul Gérin-Lajoie a connu quelques difficultés et a créé des tensions entre Ottawa et quelques pays étrangers. Pensons au Gabon, par exemple, qui avait invité le Québec en 1968 à participer à une conférence internationale portant sur l’éducation. Le gouvernement du Canada rompra ses relations diplomatiques avec ce pays. Aussi en janvier 1969, lorsque le Québec signa une entente avec la France sur l’utilisation de satellites français de télécommunication, Ottawa déclara cette entente sans valeur. Mais la doctrine Paul Gérin-Lajoie ce sont aussi les échanges économiques avec les autres pays, notamment les États-Unis dont le Québec est le sixième partenaire commercial (86 % du commerce international du Québec en 2001 s’est fait avec ce pays). La francophonie a aussi été un champ …