Comptes rendus

À propos du compte rendu du livre de René Hardy, Contrôle social et mutation de la culture religieuse, 1830-1930 (Montréal, Boréal, 1999), 284 p. par John Zucchi dans le volume 55,3 (hiver 2002) de la Revue d’histoire de l’Amérique française.[Notice]

  • René Hardy

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  • René Hardy
    CIEQ
    Université du Québec à Trois-Rivières

Je devrais probablement me réjouir que la RHAF ait publié une recension de Contrôle social et mutation de la culture religieuse au Québec, 1830-1930 et davantage que l’auteur du compte rendu, John Zucchi, l’ait reçu favorablement et en ait recommandé la lecture. Il me faut tout de même y revenir pour corriger les impressions laissées et certaines opinions qu’il me prête, qui sont, en fait, assez éloignées des miennes. Je m’en tiendrai aux assertions et interprétations qui, aux yeux du lecteur, risqueraient de m’être attribuées. En début de compte rendu, J. Zucchi écrit : « René Hardy soutient que le mot de “révolution” est peut être exagéré, car la “transformation rapide” de la pratique religieuse s’étendit sur plusieurs décennies. » Il faut corriger le sens de cette phrase car je n’ai certainement pas qualifié de rapides des transformations qui se déroulent sur plusieurs décennies. Dans ce même paragraphe, il souligne que mon étude porte essentiellement sur l’évolution du respect des pratiques religieuses obligatoires, soit la confession annuelle et la communion pascale, et sur les moyens mis en oeuvre par le clergé « pour les imposer et en ajouter de nouvelles ». Les imposer, certes, ou encore les inculquer, selon le terme que je préfère, mais non pas ajouter de nouvelles pratiques obligatoires. En fait, les ajouts dont il est question sont les nouvelles dévotions introduites au cours de ce demi-siècle et qui caractérisent la piété ultramontaine. Selon la présentation qu’il fait du contenu de l’ouvrage, le chapitre 2 « traite du renouveau religieux dans la paroisse Notre-Dame de Québec » et le chapitre 3 « s’attache aux réveils religieux des années 1840-1850 dans les diocèses de Montréal et de Trois-Rivières ainsi qu’à la montée de la fréquentation religieuse qui s’ensuivit jusqu’aux années 1930 ». Soyons clair : puisqu’il ne développe pas beaucoup cette partie de son commentaire et que, dans mon livre, les concepts de « renouveau » et de « réveil » signifient deux choses distinctes, il convient de préciser ma thèse selon laquelle le réveil religieux s’est manifesté non pas au cours des décennies 1840-1850, mais plus précisément au cours des premières années de la décennie de 1840 et, par conséquent, qu’on ne peut l’interpréter, ainsi qu’on l’a fait à quelques reprises dans l’historiographie, comme le moteur ou l’explication des transformations de la pratique religieuse obligatoire au cours de ce demi-siècle. Mon hypothèse est que ce réveil religieux s’inscrit dans le climat de défaitisme consécutif à la défaite de 1837-1838 qui favorise le refuge dans les valeurs religieuses après une période au cours de laquelle se sont manifestés l’anticléricalisme et l’indifférence religieuse des milliers de paysans qui, ne l’oublions pas, ont combattu sous la menace de l’excommunication. Le retour aux valeurs religieuses après la défaite répond aussi à l’appel conjugué d’un événement choc, l’échec des Rébellions probablement interprété comme une punition divine, et deux événements extraordinaires que sont les premières retraites paroissiales, prédications spectaculaires par Mgr de Forbin-Janson et les premières campagnes de tempérance. À ce schéma explicatif j’ai ajouté que le réveil, dont la manifestation la plus marquante a été le retour à la pratique du sacrement de communion à l’occasion des retraites paroissiales, doit être interprété à la lumière du rigorisme des prêtres au confessionnal qui, par l’imposition du délai d’absolution jusqu’à la preuve d’une contrition parfaite, éloignait les fidèles de la pratique de la communion. Ainsi exclus, plusieurs fidèles auraient accepté d’y revenir par suite de l’échec de 1837-1838 et des appels spectaculaires qui ont suivi. Ce type de réveil, marqué par une conjoncture, ne peut durer que le temps où l’événement déclencheur conserve …