Comptes rendus

Nadeau, Jean-François, Adrien Arcand, führer canadien (Montréal, Lux, 2010), 405 p.[Notice]

  • Hugues Théorêt

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  • Hugues Théorêt
    Historien

Dans une biographie consacrée à Adrien Arcand, Adrien Arcand, führer canadien, publiée en avril 2010, le journaliste et historien Jean-François Nadeau nous dépeint un Adrien Arcand drapé de svastikas et de feuilles d’érable. D’un couvert à l’autre, l’auteur veut démontrer qu’Adrien Arcand était un fédéraliste adorateur d’Hitler. Cette approche quelque peu sensationnaliste a ses avantages. Elle attire le lecteur non averti, mais elle comporte aussi des lacunes. Adrien Arcand a-t-il été aussi influencé par le Führer que l’auteur veut le laisser croire ? Quelques bémols s’imposent sur ce point. L’ouvrage de 404 pages se découpe en 11 chapitres. Il commence par un prologue fort intéressant qui nous parle de Joachim Von Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères du gouvernement nazi d’Hitler, qui a vécu sa jeunesse au Canada et serait retourné en Europe en 1914 à l’âge de 21 ans. Quoiqu’intéressante, cette anecdote n’apporte rien d’éclairant sur de présumés liens qu’Arcand aurait pu avoir avec l’entourage d’Hitler au cours des années 1930. Il n’y a pas de rapport entre le fait que Ribbentrop ait séjourné au Canada dans les années 1910 et la campagne fasciste et antisémite d’Arcand qui a pris naissance en 1930 avec le projet de loi sur les écoles juives. Dans le premier chapitre, Nadeau aborde sommairement les éléments biographiques du personnage. Il nous parle de son père Narcisse Arcand, pionnier du syndicalisme au Québec, et des années d’Arcand au Collège Saint-Jean puis au Collège de Montréal. Le chapitre 2 (« Les Goglus ») se penche sur sa carrière de journaliste, sur ses démêlées avec le propriétaire de La Presse et sur son premier journal à caractère fasciste, Le Goglu, qu’il lance en 1929 en compagnie de l’imprimeur Joseph Ménard. Cette étape est importante dans la carrière d’Arcand. Dans Le Goglu, Arcand s’en prend aux communistes, aux immigrants et en particulier au gouvernement libéral de Louis-Alexandre Taschereau. Dans ce chapitre, Nadeau ne met pas suffisamment l’accent sur le rôle du projet de loi sur les écoles juives dans la croisade d’Arcand contre les Juifs. C’est ce projet de loi du gouvernement Taschereau, qui proposait d’accorder des écoles confessionnelles à la minorité juive à Montréal, qui a lancé Arcand dans l’antisémitisme. Il y fait référence, en citant notamment Robert Rumilly, mais il ne s’attarde pas à expliquer l’impact qu’a eu cette loi au Québec en 1930 auprès du clergé montréalais et dans l’ensemble de la société québécoise. L’axe du chapitre 3 (« Le feu et les cendres ») repose essentiellement sur le rôle joué par Arcand lors des élections fédérales de 1930. Grâce à leur association aux conservateurs de Richard Bennett, Arcand et Ménard peuvent continuer à financer la publication de leurs journaux. Mais à force de tirer sur tout ce qui bouge, le duo Arcand-Ménard se fait vite des ennemis. C’est ainsi qu’en août 1931, leur imprimerie est saccagée et incendiée. Dans ce chapitre, l’auteur publie en page 103 une photo d’un immeuble de la rue Troy à Verdun qui, en 1940, affichait un svastika sur sa façade. L’auteur insinue, dans le bas de vignette, que ce symbole (« qui apparaît sans gêne dans la maçonnerie ») est lié au fascisme et au nazisme. Or, il s’agit d’une erreur. Car la croix gammée à l’envers (par rapport à celle d’Hitler) est reliée à l’hindouisme et au bouddhisme. Elle n’a rien à voir avec les élucubrations haineuses d’Hitler et d’Arcand. Il importe de préciser ici qu’on utilisait souvent le svastika traditionnel comme symbole décoratif en architecture, un héritage de l’Inde, avant qu’Hitler ne se l’approprie entre les deux guerres mondiales. Le chapitre 4 (« L’Illustration fasciste …

Parties annexes