Comptes rendus

Mesli, Samy, La coopération franco-québécoise dans le domaine de l’éducation. De 1965 à nos jours, Québec, Septentrion, 2014, 380 pages[Notice]

  • Marie-Claude Larouche

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  • Marie-Claude Larouche
    Université du Québec à Trois-Rivières

Dans un ouvrage de grande qualité et bien documenté, Samy Mesli livre une analyse fascinante de la coopération franco-québécoise en éducation mise en oeuvre dans les années 1960. S’inscrivant dans le contexte de la Révolution tranquille et marquée par une volonté de rattrapage du Québec dans ce domaine trop longtemps resté la prérogative du clergé, cette coopération acquiert un sens particulier dans ce regard rétrospectif que pose le chercheur. Démarrée par une impulsion politique décisive et ayant bénéficié à ses débuts d’un soutien financier massif, cette coopération a joué un rôle important pour le développement tant social, économique que culturel de la société québécoise. Elle demeure un cas inédit dans les annales de la diplomatie, selon l’auteur. De fait, l’ouvrage apporte une contribution essentielle à la compréhension d’un phénomène original, de grande ampleur et méconnu jusqu’à présent. Rédigé dans une langue claire et vivante, il émane de la recherche doctorale de l’auteur. Décrivant le fonctionnement des échanges France-Québec et tentant d’en proposer un bilan pour les deux communautés éducatives, l’auteur s’interroge également sur les impacts qu’ont eus ces échanges France-Québec pour les acteurs concernés. Ainsi, à la croisée de l’histoire politique et de l’éducation, s’appuyant sur les archives des ministères français et québécois de l’Éducation, il accorde une place aux témoins privilégiés. Malgré la disparition de sources importantes, il analyse les diverses ententes, de même que les négociations qui y ont conduit. Il se penche aussi sur le fonctionnement de plusieurs programmes par l’entremise de sondages et de questionnaires remplis par leurs participants. L’auteur retrace la genèse de cette coopération sous le gouvernement Lesage dans un premier chapitre. Les lacunes des structures scolaires de l’époque sont décriées par le Rapport Parent qui recommande la création du ministère de l’Éducation. Pour la « reconquête des cerveaux » (p. 22), l’appareil étatique québécois entrevoit une façon de faire épargner des années d’efforts au Québec en coopérant avec la France. Citant les mémoires de Guy Frégault, alors sous-ministre québécois des Affaires culturelles qui y voit un formidable « métro aérien » (p. 30), l’auteur rappelle que c’est dans les discussions survenues entre ce dernier et André Malraux, en lien avec la venue du général de Gaulle, que s’esquisse cette coopération. Le second chapitre de l’ouvrage porte sur la signature de l’entente de coopération en éducation, en février 1965, marquant les « grandes retrouvailles du Québec avec la France » (p. 24). Elle sera suivie la même année de l’adoption d’un accord culturel entre le Canada et la France, qui fera l’objet d’une « attention rigoureuse de la part des autorités fédérales » et qui sera lui-même complété d’une entente franco-québécoise. Sous l’égide la Commission permanente de coopération, une dizaine de professeurs d’écoles normales françaises séjournent au Québec, et une vingtaine de leurs homologues québécois font le trajet inverse, en plus d’enseignants du secteur technique. Évoquées dans un troisième chapitre, les années 1966 à 1969 marquent l’essor de la coopération sous le gouvernement de l’Union nationale de Daniel Johnson qui n’en avait pas moins dénoncé les « dépenses somptuaires » du gouvernement Lesage à l’étranger. Grâce aux accords Johnson-Peyreffite, une coopération de masse s’enclenche, car le volontarisme des deux partenaires s’accompagne d’un réel soutien financier. Tous les secteurs de l’éducation sont concernés, de la maternelle à l’enseignement supérieur. La création de l’Office franco-québécois pour la jeunesse facilite d’ailleurs ces échanges. L’auteur qualifie la décennie subséquente (1969-1979) d’« âge d’or de la coopération », en dépit des tensions qui se manifestent dans le triangle démocratique Paris-Québec-Ottawa. Tel qu’exposé dans un quatrième chapitre, l’éducation continue d’occuper une place prépondérante dans les échanges avec la France. En …