Recensions

Claire Wolfteich, American Catholics through the Twentieth Century. Spirituality, Lay Experience and Public Life. New York, The Crossroad Publishing Company, 2001, 224 p.[Notice]

  • Gilles Routhier

…plus d’informations

  • Gilles Routhier
    Université Laval, Québec

Il m’a fallu d’abord surmonter deux difficultés avant d’entrer de plain-pied dans la lecture de cet ouvrage. D’une part, ceux que l’on désigne comme « catholiques », dans cet ouvrage, sont tous « laïcs » et ceux que l’on nomme « Américains » ne sont en fait que les « États-Uniens ». On a donc affaire à deux réductions et, si le titre annonce qu’il sera question des « catholiques américains », il ne faut pas s’attendre à ce que l’on ne parle que des laïcs catholiques des États-Unis. Une fois surmontée cette double réduction, le lecteur peut entrer dans l’ouvrage et en tirer profit. Le propos est certainement original. À travers quelques figures de proue de laïcs fort connus — Dorothy Day, John F. Kennedy, Mario Cuomo, Geraldine Ferraro — ou de mouvements — Commonweal, The Catholic Worker, The Grail Movement, les mouvements familiaux, United Farm Workers, The Civil Rights Movement, etc. — l’A. tente de rendre compte du combat de laïcs catholiques qui ont tenté de définir une spiritualité et une position catholique originale dans la culture et dans la société états-unienne contemporaine. Le défi, en effet, pour ces hommes et ces femmes, a été d’arriver à se poser comme catholique et comme laïques, dans la vie publique, de relever le défi que représente la construction d’une vie chrétienne authentique et d’une spiritualité spécifiquement laïcale sans renoncer à ce que suppose l’inscription dans la vie publique de son pays, de ce que signifie accepter le caractère pluraliste de l’espace public et sans renoncer non plus à une vie chrétienne dans la condition laïcale (travail, famille, etc.). L’ensemble du parcours (1930‑2000) se déploie en quatre étapes. La première, qui met en avant de la scène Dorothy Day, The Catholic Workers et The Family Life Movement et la revue Commonweal (la section sur l’Opus Dei ne se rattachant pas réellement à une expérience états-unienne sauf dans un paragraphe de la p. 49) correspond aux 30 années qui précédèrent Vatican II et renvoie à une théologie du laïcat encore en élaboration et à une spiritualité laïcale en définition. Cela correspond, en gros, à l’Action catholique et aux mouvements qui y sont associés : mouvement liturgique, engagement social et syndicalisme catholique, mouvements familiaux, etc. Il s’agissait alors, pour les catholiques, de christianiser une société séculière « païenne ». En d’autres mots, le défi était de porter la foi dans un espace public sans foi. Aux États-Unis, cela correspondait aussi à cette période où les catholiques, longtemps marginalisés et vivant dans une atmosphère de forteresse, commencent à se manifester dans l’espace public. Au plan de l’Église tout entière, cela correspond à la redécouverte du sacerdoce baptismal et à la découverte de l’Église comme corps mystique. Autant dans la société états-unienne que dans l’Église tout entière, les laïques acquéraient alors une place et parvenaient à faire entendre leur voix. John F. Kennedy — protagoniste éminent du chapitre II — correspond à la période du concile Vatican II qui devait renouveler et approfondir la théologie du laïcat, au tournant des années 1960. Pour la première fois, un catholique parvenait à la présidence, mais au prix d’une « compartimentalisation » entre le privé et le public, sa foi, disait-il, ne relevant que de la sphère privée et n’interférant d’aucune façon dans son discernement politique. À la même époque, John Courtney Murray devait permettre une réconciliation entre le catholicisme et la conception que se font les États-Uniens de la liberté religieuse, ce qui ouvrait à une autre manière de penser l’action des catholiques dans une société pluraliste. Les nouvelles orientations de Vatican II sur la place …