Comptes rendus

Cáceres Würsig, I. (2004) : Historia de la traducción en la Administración y en las relaciones internacionales en España (s. XVI-XIX), [Histoire de la traduction dans l’administration et dans les affaires internationales en Espagne (XVIe-XIXe s.)], Soria, Éditeur Excma, Diputación provincial de Soria, 230 pages.[Notice]

  • Jenny Pérez Carrasco

…plus d’informations

  • Jenny Pérez Carrasco
    Université de Montréal, Montréal, Canada

L’histoire de la traduction reste un mystère pour beaucoup de gens, mais suscite un vif intérêt chez celles et ceux qui veulent élucider, ou simplement souligner, l’apport parfois déterminant des traducteurs à l’évolution d’une société au cours de l’histoire. Le livre Historia de la traducción en la Administración y en las relaciones internacionales en España (s. XVI-XIX), d’Ingrid Cáceres Würsig, illustre bien cet intérêt. L’auteure est professeure d’allemand au Département de traduction et d’interprétation de l’Université européenne de Madrid. Ce livre est l’aboutissement de sa thèse de doctorat soutenue à l’Instituto universitario de Lenguas modernas y Traductores, à l’Universidad Complutens. Il est aussi la chronique du Secrétariat d’interprétation des langues, ou, comme l’indique son titre, l’histoire de la traduction administrative et diplomatique espagnole du xvie au xixe siècle. Cet ouvrage purement référentiel est composé de six chapitres, très clairement subdivisés, à travers lesquels l’auteur nous expose le résultat de ses recherches effectuées dans diverses archives : Archivo Histórico Nacional, Archivo del Ministerio de Asuntos Exteriores et Archivo General de Simanzas, en Espagne. Le premier chapitre analyse les relations entre la langue et le pouvoir, soit l’administration, l’État et la diplomatie, du xvie au xixe siècle. Les gouvernements, en effet, peuvent, à travers la langue, exercer une forte domination sur un peuple, et même sur d’autres gouvernements, mais ils peuvent aussi s’en servir pour se défendre ou résister à toute tentative de domination. Si la maîtrise de plusieurs langues est indispensable dans les relations diplomatiques, les diplomates ont toujours préféré s’exprimer dans leur langue maternelle, qui incarne leur rang et leur distinction. Cette habitude, illustrée dans l’étude de Cáceres Würsig, s’est maintenue en Espagne jusqu’à nos jours, mais pour d’autres raisons, les hauts fonctionnaires faisant appel à des interprètes et à des traducteurs dans les réunions diplomatiques. Le pouvoir qu’octroie la maîtrise des langues se traduit, pour un diplomate, par une meilleure compréhension non seulement des coutumes et de la culture de ses interlocuteurs, mais aussi de leur façon de penser et d’agir. Jusqu’au début du xvie siècle, la langue utilisée dans les affaires diplomatiques en Espagne était le latin ; c’est ensuite que sont apparus l’italien, puis l’espagnol et le français. Avec l’élargissement des relations diplomatiques entretenues par l’Espagne au xvie siècle, les diplomates de métier ont dû maîtriser plusieurs langues et, en l’absence de traducteurs, traduire des documents officiels et diplomatiques. À mesure que la diplomatie espagnole se développait, la présence du traducteur est devenue indispensable et, en 1527, la Secretaría de Interpretación de Lenguas (SIL) a été fondée sous la direction de Diego Gracián de Alderete. Gracián de Alderete, le premier à se voir attribuer le titre de secrétaire en 1536, a exercé ses fonctions de 1527 à 1575. De langue maternelle espagnole, il connaissait le français et l’italien. Il a commencé en tant que secrétaire de l’évêque Francisco de Mendoza, puis, après neuf années au service de l’évêque, est devenu le secrétaire de la SIL. Son travail consistait notamment à traduire et à interpréter des lettres confidentielles et des documents officiels. Dans le deuxième chapitre, l’auteur nous conte la naissance, le développement, la décadence et le rétablissement de cette institution, accompagnés d’une biographie détaillée des divers secrétaires et membres éminents du Secrétariat. Les secrétaires d’interprétation (ici le terme interprétation est synonyme de traduction) étaient des lettrés de l’administration espagnole, occupant un poste de rang moyen et membres de la classe moyenne. Ces intellectuels avaient une bonne connaissance de l’écriture et de l’histoire, ce qui donnait crédibilité et prestige à leurs fonctions. Quant au poste de secrétaire, …