Le dossier : les AutochtonesÉcho juridique

Le Canada et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtonesValeur et pertinence[Notice]

  • Karine Gentelet,
  • Doris Farget et
  • Christopher Campbell-Duruflé

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La première reconnaissance des droits des Autochtones sur la scène internationale remonte à 1957, avec la Convention 107 relative aux populations aborigènes et tribales, de l’Organisation internationale du travail (OIT). Suivra le rapport Cobo, en 1986, puis, en 1989, la Convention 169 relative aux peuples autochtones et tribaux. C’est dans cet esprit de renforcement de la protection des populations autochtones qu’a été adoptée, le 13 septembre 2007, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Après quelque vingt années de négociations et de consultation dirigée par le Groupe de travail sur les questions autochtones, elle a été adoptée par 143 pays. Seuls quatre États ont voté contre : les États-Unis, la Nouvelle-Zélande, le Canada et l’Australie. Comme toute résolution de l’Assemblée générale, elle n’est pas de nature contraignante et ne lie pas les États juridiquement. Néanmoins, elle les engage politiquement, comme déclaration d’intention, signalant leur volonté d’adopter un comportement respectueux vis-à-vis des peuples autochtones. De plus, les dispositions de ce document peuvent être considérées par les juridictions nationales en tant qu’outils d’interprétation du droit interne. Certains pays ont d’ailleurs incorporé la Déclaration à leurs droits nationaux ou encore s’apprêteraient à modifier leur constitution. Enfin, si elle est appliquée par une large majorité d’États et qu’ils la perçoivent comme contraignante, elle pourrait le devenir pour tous. La transformation de principes issus du droit international volontaire en coutume internationale s’est déjà produite. La Déclaration universelle des droits de l’homme est un bon exemple. Elle est aujourd’hui perçue par les États comme coutumière, c’est-à- dire que son contenu contraint les États sans que la nature du document (une résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies) ne soit juridiquement obligatoire, elle ne l’était pas initialement. Certains auteurs considèrent déjà que cela s’applique à la Déclaration, puisque 143 États, auxquels sont venus s’ajouter l’Australie en 2008 et la Nouvelle-Zélande en 2010, l’ont adoptée et qu’elle contient des principes de protection minimums. À ce propos, la Commission interaméricaine des droits de l’homme, organe politique et juridique de l’Organisation des États américains, a déjà qualifié les formes traditionnelles de propriété – faisant l’objet d’une protection dans la Déclaration via le droit à la terre – comme des « principes juridiques généraux du droit international », autrement dit de la coutume. La Déclaration, premier document international consacrant des normes adaptées aux besoins des Autochtones et les intégrant à la rédaction du texte, contient des normes minimales. Ses dispositions peuvent être classées en trois catégories. Il s’agit, premièrement, de celles qui reconnaissent les règles issues des droits de la personne aux peuples autochtones. En la matière, la Déclaration reconnaît les droits fondamentaux classiques, tels que les droits à une nationalité (article 6) ou à la vie (article 7). Elle reconnaît également les droits économiques et sociaux et les adapte aux besoins des Autochtones, par exemple, l’article 24 consacrant le droit à la santé, dont le droit aux pharmacopées autochtones. Une adaptation similaire est proposée aux articles 14 et 15, sur le droit à l’éducation. L’article 14 permet ainsi aux peuples autochtones d’instaurer leurs propres établissements scolaires ainsi qu’un système éducatif dans leur propre langue, ce qui encourage l’accès pour les enfants à une éducation en relation avec leur identité autochtone. La Déclaration reconnaît, deuxièmement, des dispositions qui consacrent des droits spécifiques aux peuples autochtones et à leurs membres. Elle reconnaît notamment le droit à la terre à travers le droit de posséder, d’utiliser, de mettre en valeur et de contrôler les territoires qu’ils occupent ou qu’ils utilisent (articles 26 et 27). Elle définit le rapport qu’ils entretiennent avec leurs territoires (article 25). Elle …

Parties annexes