Comptes rendus

Oeuvres de Charles De Koninck, T. II, vol. 2 : La primauté du bien commun, Québec, PUL, 2010, 446 p.[Notice]

  • Jean-Claude Simard

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  • Jean-Claude Simard
    Collège de Rimouski

Les PUL poursuivent la publication des Oeuvres de Charles De Koninck, une entreprise intellectuelle qui a apposé sa marque sur l’évolution philosophique du xxe siècle québécois. Le T. I-1 était consacré à la Philosophie de la nature et des sciences (PUL, 2010), tandis que le T. II-1 (Tout homme est mon prochain, PUL, 2009) inaugurait le volet sociopolitique, auquel fait suite aujourd’hui le T. II-2 sur La primauté du bien commun. Le schéma général adopté pour ce vaste projet éditorial apparaît maintenant clairement : chaque ouvrage est précédé d’un bref avant-propos de Thomas De Koninck, fils de Charles, et orchestré par un maître d’oeuvre différent. Le présent volume a été préparé par Sylvain Luquet, qui en signe la remarquable introduction, sur laquelle nous aurons l’occasion de revenir. L’actuel volume des Oeuvres complètes inclut, dans l’ordre, 6 (p. 105-225) et 9 (p. 227-403), suivis, en annexe, de 8 (p. 407-437). Le tout est précédé de l’habituel avant-propos (p. XI-XII), ainsi que de l’introduction de Luquet (p. 1-104), qui a aussi traduit certains textes de l’anglais ou du latin. Un index rerum et nominum détaillé complète l’ouvrage. Discuter ces questions à la fois vastes et complexes dans le cadre d’une simple recension est évidemment exclu ; tout au plus pourrons-nous donner ici un aperçu des positions de Charles De Koninck ainsi que des raisons de son opposition résolue au personnalisme. La préoccupation centrale, celle autour de laquelle gravite l’ensemble du débat, a évidemment trait au statut de la personne et à son rapport au bien commun. Qu’on évoque le personnalisme thomiste de Maritain, le personnalisme chrétien de Mounier, ou, au Québec, celui du franc-tireur Hertel, bref les principaux représentants de ce courant chrétien non conformiste, la question polarise alors l’opinion. En effet, dans ce débat entre Maritain et De Koninck, ce « sont […] deux conceptions du bien commun qui s’affrontent, […] deux façons de considérer Dieu et le rôle de la personne dans l’économie du salut » (Luquet, p. 80-81). Étant donné le magistère incontestable dont jouissait ici Maritain, l’ouvrage publié par De Koninck suscita alors une onde de choc dont les répercussions se firent sentir bien après sa parution. Pourquoi ? On le sait, Maritain enracine ses thèses dans une réinterprétation de la métaphysique thomiste. En ramenant les choses à leur plus simple expression, on peut affirmer qu’il identifie primauté du spirituel et primauté de la personne, car elle seule peut prétendre à la félicité céleste, bien ultime de l’être humain. En effet, si la personne est ordonnée à la béatitude, elle prévaudra sur toute forme de communauté politique, voire sur le bien commun intrinsèque de l’univers. En d’autres termes, si l’individu doit s’incliner devant la société, il n’en va pas de même de la personne : au contraire, tant la société que l’univers lui sont assujettis, et non l’inverse. C’est ce personnalisme sans concession que rejette De Koninck. Citant saint Thomas, il considère erronée la vision d’une société conçue comme « tout accidentel » (PBC, p. 141-143). Il ajoute que c’est dévaluer l’univers que de subordonner ainsi « le bien commun créé […] à la personne singulière » (PBC, p. 144). Il croit enfin et surtout que Dieu est le « bien commun de toutes choses » (DST, p. 315). À ce titre, la personne est ordonnée à une félicité qui n’est pas son bien propre. Rappelons que cette polémique philosophique s’inscrit alors dans un cadre précis, celui de la Deuxième Guerre mondiale, et qu’un tel contexte implique une lutte de tous les instants contre le totalitarisme. D’ailleurs, l’expression …

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