Comptes rendus

Jean Cimon, Mémoires d’un piéton, Québec, Septentrion, 2007, 176 p.[Notice]

  • Madeleine Pastinelli

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À l’aube des fêtes qui ont souligné le 400e anniversaire de Québec, Jean Cimon, sociologue, urbaniste, amoureux de la vieille ville et fervent défenseur d’un aménagement de l’espace favorable aux marcheurs, aux promeneurs et à tous ceux qui privilégient un contact sensible et immédiat avec l’espace urbain, publiait ses Mémoires d’un piéton. Dans ce petit ouvrage de trois chapitres, l’auteur enfile les uns après les autres de courts récits, comme autant de fenêtres sur des lieux et des époques, faisant état de ses souvenirs d’enfance dans la Haute-Ville des années 1930, de plusieurs de ses rencontres et amitiés, de ses découvertes de villes européennes et de régions du Québec, de ses travaux dans la capitale mais aussi ailleurs et des projets et luttes auxquels il s’est consacré. C’est la constance de son point de vue de marcheur et de son parti pris pour l’urbanité qui constitue le fil conducteur de cet ensemble de souvenirs et récits qui, autrement, pourraient paraître quelque peu disparates. On devine combien Jean Cimon est attaché à ce Vieux-Québec qui l’a vu naître et grandir par la subtilité des éléments de la vieille ville qui retiennent son attention et par la finesse des descriptions qu’il livre de certaines scènes urbaines au détour de ces Mémoires. Plusieurs des lieux que le lecteur est invité à traverser avec l’auteur sont également habités par différents personnages qui peuplent les souvenirs de Jean Cimon et qui ont, d’une manière ou d’une autre, marqué son histoire. On y voyage ainsi de Québec à Stockholm et Paris en passant par Ottawa, Rimouski et l’Île-aux-Coudres, et on y rencontre, parmi plusieurs autres, Georges Henri-Lévesque, Jacques Gréber, Marcel Rioux, de même que des amis, des compagnons de route et de luttes urbaines de l’auteur et même certains de ses ancêtres – la famille Cimon ayant comporté son lot de notables. Ceux qui ont connu les lieux, les personnages et les époques que dépeint l’auteur dans les deux premiers chapitres de l’ouvrage liront certainement ceux-ci avec beaucoup de plaisir. C’est pour ma part le troisième et dernier chapitre, dans lequel l’auteur retrace plusieurs de ses luttes « urbaines », qui m’est apparu le plus intéressant. Après avoir campé son propos en se référant à Marc Boutin, qui définit la lutte urbaine comme la « poursuite d’une valeur (l’urbanité) dans le cadre d’un rapport de force (la lutte) spatialisé » (p. 100), l’auteur souligne que le conflit de valeur et le rapport de force en question peuvent très bien mettre en jeu des espaces situés hors des centres-villes. Plusieurs des « luttes urbaines » dans lesquelles s’est engagé Jean Cimon et dont il fait état dans ce chapitre concernent d’ailleurs de tels espaces. C’est le cas notamment de la lutte qui a permis l’aménagement d’une station de ski au Mont Sainte-Anne dans les années 1960, de celle visant, plus récemment, à empêcher la construction d’un immense stationnement au pied de la chute Montmorency et l’imposition à celle-ci des balafres que sont le téléphérique et le pont suspendu. C’est également le cas des luttes auxquelles a participé l’urbaniste-piéton (et skieur !) pour la création d’un autre centre de ski, également dans les années 1960, cette fois à Biencourt près de Rimouski, ou de celle qui visait à empêcher la démolition du manoir Nairne de la Malbaie. Mais bien sûr, plusieurs des questions spatiales qui ont préoccupé Jean Cimon et l’ont amené à s’engager, tantôt comme citoyen, tantôt comme urbaniste, concernent plutôt le centre-ville. C’est le cas d’abord du plan directeur d’urbanisme de l’Université Laval sur lequel reposait le déménagement de celle-ci depuis le quartier latin vers …