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La multiplication effrénée des outils de production et de diffusion numériques, parmi d’autres ressources sémiotiques, nous oblige aujourd’hui à repenser la notion de littératie. Il ne suffit plus de savoir lire et écrire ; il s’agit désormais d’appliquer ces compétences à l’univers numérique, ce qui a donné naissance à un champ multidisciplinaire dont l’école commence à peine à s’emparer, soit la littératie médiatique multimodale. Celle-ci rend compte du changement non seulement des médias un à un, mais de tout un environnement médiatique qui intègre l’imprimé, l’audiovisuel, la téléphonie et l’ordinateur. Selon Livingstone[1] et Hobbs et Frost[2], la littératie médiatique est l’habileté à accéder à des textes multimodaux, à les analyser, à les évaluer ou à les créer à travers une variété de contextes. D’abord, nous présentons les fondements sémiotiques de la littératie médiatique multimodale. Vient ensuite un développement sur l’évolution du concept et des pratiques de littératie médiatique au Canada et au Québec. Nous terminons par la description des résultats d’une enquête sur les perceptions des jeunes quant à leurs habiletés multimodales et par quelques recommandations touchant l’institution scolaire.

Une ère nouvelle de production du sens grâce aux nouveaux médias

Un environnement communicatif en mutation

Depuis au moins les vingt-cinq dernières années, le domaine de la communication humaine est l’objet de bouleversements répétitifs et cumulatifs dont on comprend plus ou moins bien, encore, les enjeux et les conséquences à court, moyen et long terme sur l’essor des civilisations contemporaines et à venir. L’avènement de l’ère numérique, notamment, ainsi que le développement exponentiel du cyberespace constituent les deux facteurs fondamentaux de la multiplication toujours plus grande des messages, donc des unités de sens que ceux-ci véhiculent, et ce, grâce à des supports médiatiques de plus en plus polymorphes, effervescents et, surtout, nombreux.

Si, tel que l’affirme Kress[3], la communication demeure intrinsèquement un travail sémiotique, c’est-à-dire que la production du sens ne devient possible que par la communication, donc par la création/utilisation de signes et surtout d’agglomérats de signes appelés messages, alors jamais l’être humain n’a-t-il autant baigné dans le sens qu’aujourd’hui et probablement n’a-t-il encore rien vu tant les canaux de diffusion, les codes sémiotiques, les interfaces, etc., se développent et se propagent à une vitesse inouïe. Or une telle métamorphose de l’environnement de la communication mérite absolument d’être observée, analysée et critiquée, afin d’en mesurer la portée réelle ainsi que les effets sur le destin communicatif de l’être humain, tâche à laquelle s’attardent depuis la fin des années 1980 – surtout au cours de la dernière décennie – plusieurs spécialistes de la communication sociale, de la sémiotique, de l’éducation aux médias, de la sociolinguistique, etc.

Cette « nouvelle production du sens », pour paraphraser Jewitt[4], et, plus spécifiquement, l’évolution de la mise à contribution des différentes modalités impliquées dans le cadre de cette mise en forme du sens (Van Leeuwen[5]) constituent le coeur de l’analyse multimodale. Il faut toutefois préciser, au préalable, que l’idée de « mode » renvoie directement à celle de « ressource sémiotique », que Kress et Van Leeuwen[6] définissent comme la réalisation, en simultané, d’un discours par un type donné d’(inter)action. En fait, le paradigme de la multimodalité – conjugaison d’au moins deux modes sémiotiques dans la production/émission/réception/compréhension d’un message[7] – sous-tend un renversement substantiel des conceptions habituellement associées à la communication. Il importe d’abord et avant tout d’associer, dans une perspective sociosémiotique, les diverses incarnations de signifiance des messages aux modes qui s’y trouvent déployés afin de (re)constituer le domaine du sens dans son amplitude maximale[8]. En tant que socle épistémologique en pleine genèse, la multimodalité – dont la littératie multimodale, son dérivé naturel – se veut une évolution affinée et surtout empirique des différents travaux fondateurs qui ont émergé dans la foulée de l’approche dite des « littératies multiples », elle-même influencée par le modèle de la « littératie médiatique », où étaient mises de l’avant les deux idées de prolifération des canaux médiatiques de communication et d’essor de la diversité culturelle et linguistique[9]. Certains fondements communs aux trois approches occupent d’ailleurs une position centrale dans l’appareil critique de la multimodalité : le rôle incontournable des différents modes porteurs de sens, leur concrétisation à l’aide de supports et de médias variés (imprimés, numériques, etc.) et, surtout, une attitude médiatique socialement responsable, donc critique parce que fondée sur l’analyse idéologique des contenus des messages et de leur contexte de production[10].

Du texte au multitexte

Une caractéristique fondamentale de l’actuelle reconfiguration de l’espace de la communication doit alors être mise en exergue : il s’agit de ce passage « obligé » d’une conception et d’une utilisation fortement traditionnelles des messages écrits vers des représentations et, surtout, des usages résolument multimodaux de la littératie. Nous sommes passés, de la seconde moitié du xxe siècle aux années actuelles, où explosent les communications numériques, d’un monde foncièrement monomodal, donc dominé par la sacro-sainte et quasi exclusive présence des codes écrits (mode textuel) dans les messages, à un tout autre environnement communicatif, celui-ci de plus en plus hétérogène, sémiotiquement parlant, parce que très fortement multimodal : se juxtaposent progressivement à l’écrit des représentations iconographiques/images (mode visuel), des gestes/mouvements (mode cinétique) et des sonorités de tout acabit (mode sonore)[11]. Cette multimodalité, en plus de devenir presque la norme, complexifie nécessairement, malgré les apparences, notre rapport au sens, en général, ainsi que notre rapport particulier au contenu des innombrables messages qui envahissent désormais notre existence.

Qu’elles soient fixes (publicité, littérature illustrée, iconographie documentaire, etc.) ou mobiles (cinéma, vidéo, animation, etc.), les images font partie intégrante de la vie moderne et exigent de l’individu un minimum de compréhension du sens qu’elles transportent et appuient. À vrai dire, nous évoluons aujourd’hui dans un monde saturé par l’image, seule ou combinée à d’autres, à du texte, à des sons, etc. La compétence à comprendre et à utiliser l’image est devenue un prérequis de la compétence à communiquer[12].

Si la bonne maîtrise du mode textuel demeure tout aussi importante et essentielle qu’auparavant, elle n’occupe plus seule, de toute évidence, la première marche sur le podium de la communication signifiante et réussie ; un bon communicateur contemporain est celui qui possède ainsi les clés d’autres modes sémiotiques et de supports technologiques toujours plus originaux, interactifs, diversifiés et, conséquemment, complexes[13]. L’homogénéité relative des messages écrits du passé a assurément de moins en moins à voir avec l’hétérogénéité et le métissage croissants de ceux d’aujourd’hui et de demain, et cela, seul l’émetteur véritablement soucieux de la multimodalité peut parvenir à réellement l’incarner. D’où cette idée de faire évoluer la notion de texte vers une conception certes plus large, mais aussi, et surtout, plus complète et en phase avec la réalité actuelle de la communication : celle de multitexte[14].

La fin des dialogues (entre maîtres et apprenants, entre les générations) ?

Lieu fondamental de la socialisation, l’école n’échappe évidemment pas à une telle dynamique culturelle, à une telle redéfinition pragmatique et conceptuelle de la communication. De nombreuses questions y sont soulevées, car l’expansion prodigieuse de la communication bouleverse la donne pédagogique « classique », du moins en classe de langue : un fossé se creuse inexorablement entre les élèves, de plus en plus intuitifs, actifs et habiles, voire autodidactes, en multimodalité, et leurs pédagogues, souvent dépassés par l’évolution fulgurante des technologies de la communication et, surtout, assez attachés au paradigme de la littératie traditionnelle – à prédominance monomodale[15] –, dont l’un des porte-étendard les plus connus demeure le bon vieux manuel scolaire. Wood[16] considère d’ailleurs que, dans le contexte de l’âge numérique, ce support doit absolument être repensé de telle sorte qu’il corresponde davantage à la réalité informationnelle actuelle, où l’on ne peut plus se fier à une seule et unique source de sens, et qu’il puisse surtout être mis à jour de façon constante, ce qui est impossible lorsqu’il est question d’imprimé.

La multiplication des médias, notamment le recours à la téléphonie numérique, l’usage des tablettes et la prolifération des réseaux sociaux font en sorte que les possibilités actuelles de communication qui s’offrent aux jeunes et moins jeunes dépassent tout simplement les limites de l’esprit, a fortiori celui des enseignants[17]. À un tel point, d’ailleurs, que de plus en plus de maîtres prétendent cohabiter difficilement au quotidien avec la génération hyperconnectée qui fréquente actuellement les classes[18]. Dans ce sens, les enseignants craignent la disparition des pratiques de littératie traditionnelle, ce qui les déstabilise, au minimum, et en décourage plusieurs.

L’évolution du concept et des pratiques de littératie médiatique au Canada et au Québec

Afin de dégager les tendances actuelles de l’usage du concept de littératie médiatique au Canada anglais et au Québec, nous avons procédé à la recension de recherches théoriques et expérimentales des dix dernières années en contexte scolaire canadien misant sur des dispositifs d’enseignement de la lecture et de l’écriture multimodales sur des supports médiatiques. À ce corpus s’ajoutent des enquêtes québécoises et canadiennes sur l’usage des médias chez les jeunes. Cette exploration des écrits officiels a permis d’identifier trois types de compétences en littératie médiatique : la compétence informationnelle visant la capacité à utiliser des stratégies de recherche efficaces, à analyser, à organiser et à critiquer les sources d’information sur le web ; la compétence technologique visant l’appropriation du fonctionnement et des usages des outils technologiques ; et la compétence multimodale visant la capacité à lire et à communiquer en combinant efficacement l’écrit, l’image et l’audio sur des supports médiatiques variés. Toutes les études, recherches, thèses et rapports consultés concernant les pratiques en littératie médiatique en milieu francophone en Amérique du Nord réfèrent à différents degrés à ces trois compétences pour définir les enseignements-apprentissages à réaliser en contexte scolaire, associant la lecture, l’écriture et la communication orale aux différents supports technologiques et médiatiques. Ainsi, certaines recherches recensées combinent deux compétences (par exemple, la lecture et la recherche d’informations sur Internet) ou trois compétences (par exemple, les productions de documents audiovisuels sur ordinateur à partir d’informations recueillies sur le Web). Ces combinaisons se déploient dans un rapport dynamique entre lire/écrire (produire)/communiquer à l’oral et s’informer/ manipuler les outils technologiques/varier les modes sémiotiques.

Nous verrons comment la valorisation de ces compétences a fait évoluer la conception d’une formation à la littératie classique (lecture, écriture, oral) qui inclut progressivement la littératie médiatique (lecture/ écriture/oral associés aux compétences informationnelles, technologiques et multimodales).

Tout d’abord, le Canada, par la voie de ses ministres de l’Éducation[19], s’est engagé depuis une dizaine d’années dans le vaste projet soutenu par l’UNESCO (2003-2012) d’augmenter le niveau de littératie des jeunes en formation en misant sur ses institutions scolaires. Partant de cette conception que la littératie va plus loin que la lecture et l’écriture – puisqu’elle relève de la pratique sociale, des relations, de la connaissance, du langage et de la culture –, le projet de l’UNESCO distingue les supports de communication sur papier (classique) de ceux sur écran d’ordinateur, à la télévision, sur des affiches ou des panneaux (médiatique). Cette distinction renvoie à une conception élargie de la littératie qui convient de la nécessité de maîtriser des modes de communication variés afin de s’intégrer socialement et professionnellement aux sociétés actuelles. C’est dans cette foulée que le Conseil canadien pour l’apprentissage[20] (CCA) incite, dans son rapport de 2008, parents, enfants et éducateurs à développer leur littératie médiatique, soit leur « capacité à lire, à analyser, à évaluer et à créer des médias dans diverses formes » et à développer leur pensée critique.

Malgré cette volonté de plus en plus affirmée d’intégrer la littératie médiatique à la littératie classique, il y a lieu de s’inquiéter des résistances du milieu de l’éducation. Ainsi, même si le Canada se classe en tête des « États-Internet », et en dépit d’investissements importants (OCDE[21]), la littératie médiatique tarde à faire partie du paysage scolaire. Nous avons retenu trois lieux importants de résistance : la prédominance de la compétence technologique sur les autres compétences en littératie médiatique ; le sentiment d’incompétence des enseignants vis-à-vis des nouvelles technologies ; et la nécessité de créer des scénarios pédagogiques en littératie médiatique fondés sur la recherche.

Une intégration de la littératie médiatique qui mise exclusivement sur la compétence technologique

Le développement de compétences en littératie médiatique peut avoir différentes visées : sémiotique, critique (sociale ou éthique), technique, motivationnelle[22]. Il apparaît très clairement, dans les plans d’action des provinces canadiennes pour soutenir la formation à la littératie médiatique, que la compétence technologique à visées technique (soit ce qu’on appelle communément les TIC – technologies de l’information et de la communication) et motivationnelle domine, suivie de la compétence informationnelle à visée critique. La compétence multimodale est pratiquement absente et n’est pas mentionnée de manière explicite. Les rapports concernant les pratiques en littératie médiatique (OCDE[23] ; Ministère de l’Éducation de l’Ontario[24]) insistent davantage sur les outils technologiques pour développer la littératie médiatique que sur l’explicitation des compétences.

Les ressources proposées sont disparates et gagneraient à être structurées et systématisées en fonction d’apprentissages spécifiques à la lecture, l’écriture et l’oral à l’aide des technologies. Ainsi, Barrette[25] propose des exemples de technologies électroniques et de ressources multimédias qui appuient l’apprentissage de la littératie : des ordinateurs connectés à Internet, le courriel, le traitement de texte, les logiciels graphiques et les imprimantes, pour permettre aux élèves d’avoir accès à une foule de renseignements, d’idées et de textes de tout genre, et pour leur fournir les outils nécessaires pour créer et partager leurs propres textes (par exemple, sur le site Web de la classe ou le réseau de l’école). Il propose de munir les élèves de caméras et d’appareils photo numériques pour les encourager à améliorer leurs textes et à explorer d’autres moyens de consigner et de communiquer des idées et de l’information. D’autres outils électroniques, y compris des logiciels de reconnaissance vocale, de coécriture et d’organisation graphique sont également présentés en lien avec l’apprentissage de la littératie médiatique. Bibeau[26] présente pour sa part une taxonomie des projets pédagogiques intégrant les TIC en précisant pour chaque outil la manière dont les élèves peuvent en faire l’usage pour développer leur littératie médiatique. Cette conscientisation des présupposés technopédagogiques qui sous-tendent la nature même des logiciels et des plateformes Web (médias sociaux, blogues, portfolios) utilisés en enseignement-apprentissage de la langue est essentielle à toute recommandation de l’usage d’un outil en littératie médiatique. Ainsi, la littératie médiatique se révèle efficace quand elle s’intègre à une didactique diversifiée qui articule finement les activités d’apprentissage et les approches pédagogiques, selon Barrette[27].

Comment expliquer que le Canada adopte une approche de la littératie médiatique fondée sur les compétences technologiques (à visée technique) et désincarnée de contenus disciplinaires ? L’usage du terme « éducation aux médias » pour désigner la littératie médiatique dans la plupart des écrits officiels (notamment dans les programmes du Québec) illustre bien comment le domaine des communications et des technologies s’est approprié le champ de la lecture et de l’écriture par les médias. Il en résulte que les applications en cours de langue misent plus sur les connaissances et les habiletés technologiques que sémiotiques : on met les élèves dans des situations d’utilisation des médias sans en faire une étude approfondie des modes d’expression et de réalisation. Même la formation à l’esprit critique passe rarement par une initiation systématique à l’analyse des codes des textes médiatiques ; on mise essentiellement sur des compétences informationnelles de type identification et validation des sources.

Force est de constater que le progrès technologique et le progrès pédagogique ne vont pas nécessairement de pair. Ainsi, l’investissement massif de provinces canadiennes dans l’achat d’outils électroniques pour équiper les classes, les enseignants et les élèves d’ordinateurs, de tableaux blancs interactifs (TBI) ou de tablettes (iPad) se doit d’être accompagné d’une formation technopédagogique et technodidactique spécifique à l’apprentissage de la langue.

Le sentiment d’incompétence des enseignants vis-à-vis des élèves qui, eux, manipulent les technologies avec aisance

Une revue des recherches sur les pratiques enseignantes effectuée par Bussière et Gluszynski[28] laisse supposer que ce n’est pas tant la disponibilité des TIC, mais la qualité et le type d’utilisation qui constituent un facteur clé de l’apprentissage. Par exemple, selon Baron et Bruillard[29], les enseignants doivent comprendre que l’appropriation des TIC dépasse la maîtrise technique de l’outil ; ils doivent saisir le potentiel pédagogique et didactique des multiples logiciels et plateformes Web pour l’enseignement de leur discipline. Le modèle basé sur le déficit[30] tente d’expliquer les motifs pour lesquels les enseignants éprouvent une certaine aversion des TIC. Les recherches menées sur ce modèle identifient le fait que les enseignants se considèrent généralement comme technophobes, traditionnels dans leur style d’enseignement et très résistants au changement. Par ailleurs, ce modèle est sous-jacent aux études portant sur les obstacles et les barrières limitant la mise en oeuvre des TIC en classe. Dans les résultats de ces études, les enseignants identifient que c’est en raison de l’infrastructure et des équipements insuffisants, d’un manque de formation et d’habiletés (compétences) avec la technologie, ou même de la difficulté à planifier l’innovation en enseignement-apprentissage, qu’ils n’intègrent pas la technologie[31].

En conclusion de sa recherche sur les pratiques d’enseignants intégrant les TIC au primaire, Lefebvre[32] constate, à l’instar de Karsenti, Savoie-Zajc et Larose[33], que très peu d’enseignants semblent en mesure d’évaluer le potentiel didactique des outils technologiques. Elle attribue la difficulté qu’ont les enseignants à lier leurs connaissances des contenus disciplinaires à leurs connaissances des outils technologiques au fait que ces liens sont très complexes et exigeants. De fait, toute la formation initiale et continue est à revoir dans le sens où, bien souvent, elle n’assure pas le lien entre technologie et didactique disciplinaire.

Les quelque 400 enseignants d’une enquête pancanadienne sur l’usage des technologies mobiles à des fins éducatives[34] reconnaissent que celles-ci contribuent au développement d’habiletés (compétences) pour la préparation de leur enseignement. Les enseignants[35] qui modifient le plus leur philosophie d’enseignement sont ceux qui utilisent les fonctions les plus avancées des TIC, tant pour la préparation de l’enseignement que pour l’enseignement-apprentissage. Ainsi, les compétences technologiques faciliteraient le développement de compétences technodidactiques. Les TIC se révèlent donc efficaces lorsqu’elles s’intègrent à une didactique diversifiée qui articule finement les activités d’apprentissage et les approches pédagogiques.

Le besoin de stratégies d’enseignement-apprentissage spécifiques aux nouveaux modes de lecture, d’écriture et de communication afin de créer des scénarios pédagogiques adaptés

Plusieurs chercheurs canadiens voient dans l’élaboration et l’expérimentation de scénarios didactiques en littératie médiatique la solution à une véritable mise en place de pratiques enseignantes intégrant les TIC. Gauthier[36] suggère que la nouvelle tendance de mettre en place des environnements multimédias comme espace d’apprentissage ne changera rien si l’apprenant n’est pas baigné dans un contexte d’apprentissage riche et si les activités proposées par le personnel enseignant ne sont pas bien structurées. Cette vision s’apparente à celle des tenants d’une littératie médiatique telle qu’exposée en introduction à cet article. Kress[37], par exemple, insiste sur la création en recherche de designs pédagogiques originaux utilisant des modes d’expression différents pour enrichir les curriculums actuels. Barrette[38] va d’ailleurs dans le même sens et dénonce la juxtaposition dans les programmes d’études de connaissances, de notions, de concepts et de compétences en littératie médiatique, léguant ainsi au pédagogue la responsabilité de faire les liens entre toutes ces composantes.

La littératie médiatique : un champ de recherche en développement au Québec

Les nombreuses initiatives pour l’enseignement à travers d’activités didactiques intégrant les blogues/réseaux sociaux, les bandes dessinées, les productions vidéo, les romans-photos et les jeux vidéo (serious games) laissent croire à une intégration progressive des notions en littératie classique à celles de la littératie médiatique. Les compétences en littératie médiatique intéressent de plus en plus les chercheurs au Québec. Quelques recherches scientifiques sont déjà parues sur les textes multimodaux, leurs structures narratives et les croisements d’un média à l’autre. Dans leur synthèse, Lebrun et Lacelle[39] mentionnent, entre autres, leurs recherches sur l’analyse par les élèves du secondaire des stéréotypes dans les médias, leur enquête sur la langue qu’utilisent les jeunes dans les blogues, de même que l’étude de Caron-Bouchard, Allard, Dupuis et Quesnel[40] sur l’usage du clavardage et de la visiophonie pour développer les capacités argumentatives des cégépiens. Le terrain est donc prêt pour une jonction recherche/expériences de terrain, puisque, de plus, certaines universités commencent à donner des formations portant spécifiquement sur la littératie médiatique.

Les jeunes, les nouveaux médias et la littératie : perceptions et pratiques

Afin d’illustrer l’engouement des jeunes pour tout ce qui se rapporte aux nouvelles formes de communication, il nous apparaissait indispensable d’illustrer nos propos par un sondage sur leurs pratiques médiatiques informelles, celles-ci pouvant éventuellement leur servir de tremplin dans leurs activités de littératie médiatique scolaires. À l’automne 2011, nous avons passé un questionnaire ad hoc à 121 sujets de 4e secondaire (soit 53 filles et 68 garçons) afin de déterminer leurs usages des médias, particulièrement des nouveaux médias. Nous laisserons donc de côté leur fréquentation des médias traditionnels. Nous évoquerons tout d’abord leurs usages d’Internet, en les comparant aux résultats d’autres enquêtes. Nous aborderons également la question de leurs perceptions de compétences en lecture et en production en littératie multimodale.

Les usages du Web

Les nouveaux produits technologiques, tels qu’ordinateurs, portables, cellulaires, téléphones intelligents, modulent les habitudes d’utilisation du Web chez les adolescents à l’affût de nouveautés et d’occasions de socialiser. Tous sexes confondus, 37,1 % des jeunes répondants vont sur Internet de une à deux heures par jour de semaine et de trois à quatre heures par jour de fin de semaine. Il y a peu de différences entre les habitudes de fréquentation des filles par rapport à celles des garçons. Par contre, l’utilisation des jeux vidéo varie selon les sexes. Si 13,2 % des filles y jouent de une à deux heures par jour en semaine, et à peine 1 %, de trois à quatre heures, les garçons, pour leur part, sont 29,4 % à y jouer de une à deux heures par jour de semaine et 29,4 % à y jouer de trois à quatre heures. Ces jeux sont surtout pratiqués sur console (ex. : Play Station, Nintendo Wii, Xbox), en ligne et sur ordinateur (47,1 %, 30,5 %, 28,0 %, respectivement), les jeux en réseau apparaissant marginaux (9,9 % y jouent souvent ou très souvent). Ce sont surtout les garçons, nous l’avons souligné précédemment, qui s’adonnent à ces jeux, leur usage chez les filles étant très faible (en général, moins de 10 % disent y jouer souvent ou très souvent).

Les réseaux sociaux ont la cote : 98,1 % des filles vont sur Facebook, de même que 82,3 % des garçons. Les autres réseaux sociaux sont beaucoup moins importants ; ainsi, si MSN tire encore son épingle du jeu avec 57,8 % des garçons et filles qui le fréquentent, Twitter a peu de succès, avec 11,5 % d’utilisateurs. Les adolescents confondent d’ailleurs réseaux sociaux et messagerie Internet, le tiers des sujets (36,4 %) ayant nommé Hotmail, qui, il est vrai, contient une application classée dans la catégorie des réseaux sociaux. Par ailleurs, 32,2 % nomment YouTube, qui, sous sa nouvelle version, intègre les réseaux sociaux. Les principales raisons d’aller sur ces réseaux sociaux sont les mêmes pour les filles et les garçons, soit, en combinant les réponses « souvent » et « toujours », pour 75,2 % des ados, le maintien du contact avec les amis, pour 66,9 %, le fait d’y « faire autre chose » et enfin, pour 42,1 %, le fait d’y tuer le temps. Ils ne sont que 13,2 % à y aller souvent ou toujours dans le but d’y exprimer leur opinion (d’où, entre autres, l’usage restreint de Twitter déjà souligné pour cette population), mais 26,4 % reconnaissent tout de même y aller pour « prendre des nouvelles du monde ». Les irréductibles du jeu vidéo, soit 20,6 % des sujets (la plupart étant des garçons), y vont souvent ou toujours pour se trouver des partenaires et jouer. Il n’est pas étonnant de voir que 62,8 % des sujets (soit 64,1 % des filles et 61,7 % des garçons) téléchargent souvent ou toujours de la musique sur Internet, mais un nombre infime écoute la Web radio, télécharge des jeux, ou encore participe à un sondage en ligne ou y fait des achats.

Nous avons comparé ces statistiques à celles de quelques enquêtes. Il fallait que celles-ci soient récentes, car la situation évolue très vite et les enquêtes antérieures à 2008 doivent être considérées comme déjà un peu vieillies. Selon Wing et Roy[41], voici les activités les plus populaires chez les jeunes Canadiens de 9 à 17 ans de l’enquête Réseau éducation-médias : 62 % des filles et 43 % des garçons aiment s’adonner à la messagerie instantanée en ligne (« chat » ou clavardage). Si le choix des jeux vidéo est très important chez les 11 ans, au point que plus de la moitié s’y adonnent, il baisse régulièrement avec l’âge : à 17 ans, seulement 9 % des filles et 38 % des garçons le font. Écouter ou télécharger de la musique est également une activité importante : 41 % des filles et 37 % des garçons de 11 à 17 ans disent le faire. Voici le temps que ces jeunes consacrent à leurs activités préférées quotidiennement quand ils ont 17 ans : 68 minutes à parler à des amis par messagerie instantanée, 61 minutes à télécharger ou à écouter de la musique, 54 minutes à télécharger des films ou des émissions de télévision, 42 minutes à écrire sur des blogues, les devoirs requérant Internet n’occupant que 37 minutes.

Selon l’enquête du Centre facilitant la recherche et l’innovation dans les organisations (CEFRIO)[42] de 2009 menée chez les jeunes Québécois de 12 à 24 ans, au cours du dernier mois précédant l’enquête, 71 % des répondants de 12 à 24 ans avaient écouté ou téléchargé de la musique en ligne, 32 % avaient regardé des photos en ligne sur des sites comme Flickr et 32 % avaient écouté ou téléchargé des vidéos ou des longs métrages sur Internet. Cependant, les deux sexes n’utilisent pas Internet de la même manière : les garçons préfèrent jouer à des jeux (58 % le font), et les filles, parler en ligne (54 % visitent des sites de réseautage). Le sondage fait ressortir que 13 % des garçons et 24 % des filles écrivent sur leur blogue personnel et que 41 % des garçons et 42 % des filles vont régulièrement sur les blogues, surtout pour être en contact avec leurs amis. D’après le sondage Ipsos-Reid[43] de 2008, un jeune Canadien de 12 à 17 ans passe en moyenne 13 heures par semaine sur Internet, soit autant de temps qu’en 2004, ce que l’on peut comparer aux résultats du CEFRIO indiquant que le temps de navigation des jeunes Québécois du même âge est passé de huit heures à 16 heures par semaine pendant la même période. Selon le CEFRIO, les jeunes Québécois sont plus « spectateurs » que « créateurs » sur le Web. Ainsi, au cours du mois précédant le sondage, seuls 5 % des jeunes ont utilisé Internet pour écrire dans un wiki (par exemple pour enrichir Wikipédia, qui intéresse les jeunes par son caractère collaboratif) et 8 %, pour donner leur opinion sur un produit donné. Pour le CEFRIO, plus un jeune passe du temps sur Internet, plus il est susceptible de produire des écrits. Van Grove[44] rappelle que l’agence américaine Forrester a classé les internautes en sept catégories aux États-Unis : parmi celles-ci, on note que seuls 23 % sont des créateurs, par opposition à 68 % qui sont spectateurs. Au-delà des disparités méthodologiques, on remarque que ces enquêtes rejoignent la nôtre quant à l’importance des pratiques des adolescents sur le Web, particulièrement en période de loisirs. Bien que ne pouvant nous livrer à un parallèle point par point des divers résultats, en raison des discordances de méthodologies (que l’on songe par exemple aux disparités dans la façon de définir les tranches d’âge considérées), citons néanmoins les concordances les plus importantes : incroyable popularité des réseaux sociaux, très fort intérêt pour les jeux vidéo, surtout pour les garçons, et, enfin, activité marquée de téléchargement de la musique.

Selon une partie non négligeable de nos sujets, l’école devrait jouer un plus grand rôle dans leur éducation vis-à-vis d’Internet. Voici ce que l’on trouve en combinant les choix de réponses « important » et « très important ». Premièrement, 85,9 % des sujets aimeraient que l’école leur fournisse des renseignements sur la sécurité informatique. Ils sont 80,9 % à trouver important ou très important d’avoir un accès plus libre à Internet à l’école, et 75,5 % à souhaiter que l’école leur enseigne comment accéder plus rapidement à l’information sur le Web. De plus, 55,3 % des sujets garçons aimeraient que l’école leur donne les moyens de vérifier la véracité des informations sur Internet, tandis que ce pourcentage est de 30 % chez les filles. On remarque ici un souci chez ces jeunes de devenir plus conscients de leurs usages des instruments numériques, de même qu’une ouverture concernant les nouvelles responsabilités que l’institution scolaire devrait envisager. Ce discours est tout à fait concordant avec celui de l’enquête CEFRIO de 2009, selon lequel 36 % des jeunes souhaitent que l’école les aide à valider la fiabilité des sources, et 26 %, qu’on les mette en garde contre les dangers potentiels du Web.

Les compétences en lecture et en production multimodale

Il était important, dans notre sondage, de diviser les compétences multimodales déclarées (ce qui est différent des compétences observées) selon qu’elles touchaient la compréhension ou la production, car celles-ci sont généralement plus exigeantes. De plus, nous avons isolé les compétences monomodales des compétences multimodales. Les élèves s’estiment généralement assez compétents en littératie médiatique puisque, sur une échelle de 1 à 5, où 5 représente la compétence maximale, ils sont 90 % à se situer dans les deux échelons supérieurs pour ce qui est de la compréhension des messages textuels (compétence monomodale très prisée à l’école), 85,9 % à bien comprendre les messages iconiques à images fixes (ex. : photos), 81,8 % à bien comprendre les messages iconiques à images fixes et séquentielles (ex. : bande dessinée), 95 % à bien comprendre les messages iconiques à images mobiles (ex. : vidéos) et, enfin, 66,9 % à bien comprendre les messages sonores (ex. : radio). Les garçons et les filles sont à peu près à égalité sur le sujet. Il est à remarquer que les sujets sont fortement confiants en leurs compétences à lire les images (compétence monomodale), bien que cette compétence ne soit à peu près pas enseignée à l’école.

Lorsqu’il s’agit de la production de messages textuels ou iconiques, les perceptions de performance varient sensiblement, à la baisse. En ne considérant toujours que les deux échelons supérieurs d’estimation de compétence (sur un total de cinq échelons), la situation se présente comme suit : ils sont 80,9 % à estimer être capables de bien produire des messages textuels (dont ils ont une grande habitude, à l’école) ; 52,8 % à estimer être capables de bien produire des messages iconiques à images fixes ; 38,8 % à bien produire les messages iconiques à images fixes et séquentielles ; 58,6 % à bien produire les messages iconiques à images mobiles ; et, enfin, 43,8 % à bien produire les messages sonores. Les garçons ne se distinguent pas des filles. On remarque qu’ici, les élèves ont moins confiance en leurs capacités relatives à la production d’images, ce qui peut sembler normal, l’école ne les y ayant pas préparés.

Dans la foulée de la question sur leurs perceptions de compétence monomodale, nous avons jugé intéressant de demander aux sujets leur autoperception de compétence concernant la compréhension de messages à combinatoire image et texte, donc de messages réellement multimodaux. Il apparaît que 88,4 % s’estiment compétents (deux derniers échelons sur cinq) à bien comprendre des messages combinant textes et images fixes sur papier, à bien comprendre des textes et images fixes sur ordinateur et à bien comprendre des textes, images fixes et sons à la télévision. Par ailleurs, 84,2 % s’estiment compétents à bien comprendre les textes, images mobiles et sons au cinéma, et 90,9 %, à bien comprendre les textes, images mobiles et sons à l’ordinateur. Les différences entre garçons et filles sont minimes. La compréhension d’un document multimédia est un phénomène cognitivement complexe, que Mayer, Hegarty, Mayer et Campbell[45], de même que Rouet[46] et Perfetti, Rouet et Britt[47], ont étudié. L’information présentée (visuellement ou auditivement) est reçue dans la mémoire de travail ; le sujet se construit alors des représentations verbales ou imagées (séquentiellement ou concurremment). Ce qui en résulte est une représentation multidocumentaire : le sujet identifie les types de « textes » multimodaux, les compare, les contextualise selon le contenu, etc. Chez les sujets les plus doués, l’indexation complète de chaque contenu et la fusion des contenus sont plus fortes en raison d’une plus grande mobilisation des savoirs, savoir-être et savoir-faire.

Corollairement, les élèves ont eu à se prononcer sur leur autoperception de compétence concernant la production de messages à combinatoire image et texte. Comme nous l’avons fait précédemment, nous n’avons considéré que les deux échelons supérieurs de la performance. Il apparaît ainsi que 66,1 % s’estiment compétents (deux derniers échelons sur cinq) à bien produire des messages combinant textes et images fixes sur papier, 81,8 %, à bien produire des textes et images fixes sur ordinateur, et 41,3 %, à bien produire des textes, images fixes et sons à la télévision. Par ailleurs, 33,8 % s’estiment compétents à bien produire les textes, images mobiles et sons au cinéma, et 58,6 %, à bien produire les textes, images mobiles et sons à l’ordinateur. Les différences entre garçons et filles sont non significatives. En production multimodale, l’élève doit naviguer à vue afin de trouver l’équilibre parfait entre image et texte. À l’adolescence, la tentation est forte, en raison de la prégnance des images, à insister sur celles-ci au détriment du texte, ce que Lebrun[48] a d’ailleurs conclu de son expérimentation sur la rédaction d’un document multimodal dans des classes de 4e secondaire. Lapp, Moss et Rosell[49] ont démontré, pour leur part, à quel point il est important que des exercices d’écriture multimodale soient précédés d’activités de lecture multimodales, car, souvent, la faiblesse des jeunes à produire des textes multimodaux résulte d’un manque de maîtrise des codes en lecture. D’ailleurs, Schradie[50] a bien démontré que l’intensité de l’usage d’Internet ne garantit pas la qualité et la quantité de la production multimodale personnelle de contenus multimédias en ligne (ex. : sites Web et blogues) et que des facteurs socioéconomiques jouent, les classes défavorisées étant moins actives en production multimodale.

Propositions et recommandations pour un enseignement efficace de la littératie médiatique multimodale

Il faudrait que l’école prenne résolument le tournant de la littératie médiatique multimodale et mette à profit les compétences informelles des jeunes sur le sujet. Est-ce une affaire d’approche pédagogique à infléchir, de système scolaire à améliorer, de formation des enseignants à remettre en question ? Sans doute un peu de tout cela à la fois, en commençant par la réforme de la formation des maîtres, qui constitue le noyau et le garant d’un changement durable. Il faudra, pour ce faire, vaincre les résistances que nous évoquions plus haut et agir sur le plan des didactiques spécifiques, dont celle de la langue. Par sa nature même, la littératie médiatique multimodale est appelée à transformer la pédagogie traditionnelle. Il faut penser ici non seulement à l’apprentissage en général, mais aussi à la formation du citoyen par l’intermédiaire d’une étude critique des médias (sans oublier le plaisir que les élèves peuvent retirer de l’étude des médias) et, surtout, à la pertinence pour leur émancipation personnelle d’adopter une telle posture critique.

Le Québec n’a toujours pas intégré officiellement les compétences en littératie médiatique à ses programmes d’études, mais il est en voie de le faire. Par contre, les enseignants sont initiés depuis plusieurs années aux nouvelles technologies et à leur usage en classe, entre autres au moyen d’un plan d’action qui vise à former de futurs enseignants à l’usage pédagogique des TIC, et aussi à observer et à évaluer les pratiques. Qu’on s’entende bien : il s’agit ici d’une approche pragmatique à l’usage des TIC, et non d’une formation en littératie médiatique multimodale telle que nous la définissions plus haut. Dans cette foulée, les programmes d’études du primaire et du secondaire recommandent l’usage des TIC dans toutes les disciplines. Certains acteurs du milieu poussent les choses plus loin. Ainsi, diverses associations (AQUOPS, RECIT) réunissent et animent les enseignants désireux de perfectionner leurs habiletés en littératie médiatique et en nouvelles technologies et de faire connaître leurs travaux. Il faut poursuivre sur cette voie, enrichir les programmes officiels de contenus propres à la littératie médiatique multimodale et y former spécifiquement les enseignants. On mettra ainsi l’accent sur les multilecteurs – des « lecteurs » de multitextes – qui participeront alors activement à la médiation des messages, qui refuseront de les recevoir passivement et qui, plutôt, les analyseront, les mettront en question et même en débattront comme ils le feront aussi à l’égard notamment du contexte de production de ces (multi)sens.