Corps de l’article

Introduction

Le récit historique, depuis près de quarante ans, a vu émerger de nouvelles figures : des individus sans visage, des êtres jusque-là anonymes. L’artisan vitrier Jacques-Louis Ménétra, le meunier Menocchio, le poilu des tranchées de la Grande Guerre Louis Barthas, la jeune Caroline Brame, le paysan Xavier-François Pinageot et tant d’autres sont venus peupler l’histoire et son grand récit (Artières, Kalifa, 2002).

Mais il est une autre galerie de portraits qui a été composée parallèlement à celle des protagonistes ordinaires, celle de ceux que l’on pourrait désigner après Jorge Luis Borges (1935) et Michel Foucault (1977) : les infâmes. Ceux-là se caractérisent par le fait qu’à un moment donné, leur trajectoire s’est prise dans les mailles du pouvoir et, le plus souvent, cette rencontre a produit un éclat de discours. Les archives judiciaires sont pleines de ces individus de l’exceptionnel ordinaire. Petits malfrats, délinquants à la petite semaine, mais également bandits redoutés et tueurs sanguinaires (Blanc et Fabre, 1982).

Suite à leur reconnaissance comme acteurs à part entière de l’histoire de l’individu ordinaire et de son ombre noire, la grande cohorte des infâmes, les correspondances familiales, journaux intimes, autobiographies, mémoires ont constitué des sources privilégiées pour tenter de saisir la complexité du monde social. La publication du mémoire autobiographique de Pierre Rivière (Foucault, 1973) a initié une série qui n’a cessé depuis d’être poursuivie : celle des écrits de criminels, dont Philippe Lejeune fut l’un des premiers à dresser l’inventaire pour le domaine français (Lejeune, 1986). Historiens, anthropologues, sociologues et quelques littéraires se sont particulièrement intéressés à ces écritures que l’on peut qualifier de monstrueuses. Ce caractère monstrueux tenait à la fois de leur auteur et du fait que pour leurs contemporains cet acte d’écriture redoublait le geste meurtrier. Le cas de Joseph Vacher, tueur de bergers dans toute la France au moment de l’affaire Dreyfus, est le plus symptomatique de cette relation instaurée entre crime et écriture, déjà visible dans la figure de l’assassin poète Pierre-François Lacenaire (Artières, 2000, 2007 ; Demartini, 2001). L’histoire de la déviance et des institutions de répression s’est donc largement développée et a été en partie renouvelée par la valorisation de ces textes de criminels. Une histoire de la prison de l’intérieur a ainsi pu être écrite, qu’elle soit un lieu de détention pénal ou politique (Vimont, 1993 ; Petit, 1990 ; Carlier, 1994). En outre, des phénomènes criminels tels que le parricide ont été largement éclairés par des travaux s’appuyant sur des mémoires d’assassins (Lapalus, 2004). Enfin, il s’est avéré que la prison pénale et plus généralement le système juridico-pénitentiaire formaient une extraordinaire machine graphomaniaque au tournant du xixe siècle (Perrot, 2001). Dans cette perspective, nourrie par les travaux sur l’expertise (Chauvaud, 2000 ; Porret, 2003), un intérêt pour les mémoires autobiographiques conservés dans les dossiers individuels d’expertise mentale s’est imposé (Renneville, 2003).

C’est à partir de l’un de ces cas, le manuscrit de Jean B., que nous voudrions dans cet article plaider pour un travail de relecture de ces écrits des grands transgresseurs de nos sociétés de la modernité (Ginsberg, 1996). Jean est un jeune garçon qui assassina en 1905 l’un de ses camarades et qui rédigea dans les semaines suivantes un long mémoire autobiographique (voir encadré 1). Ce manuscrit inédit constitue dans le corpus des écrits de criminels un point extrême. Les experts s’appuyèrent largement sur ce dossier pour démontrer l’irresponsabilité du jeune accusé et faire de lui un cas de « sadisme sanguinaire congénital » (Lacassagne, 1907). Le dossier composé d’un manuscrit autobiographique de onze cahiers a été rédigé par un jeune assassin au début du xxe siècle ; il est conservé dans le fonds d’archives du professeur de médecine légale Alexandre Lacassagne (1843-1924), déposé à la Bibliothèque municipale de Lyon (Renneville, 1995 ; Artières et Corneloup, 2000 ; Salle, 2007). Si l’affaire est particulièrement extrême, c’est par l’âge des protagonistes, la violence dont elle est le théâtre, la réception sociale dont elle fait l’objet à l’époque, mais aussi et surtout par la nature du récit autobiographique de l’accusé (dont nous donnons une transcription du premier cahier en appendice). S’y concentrent en effet, comme nous voudrions le montrer brièvement après avoir exposé l’histoire des usages historiens de ces textes, les limites tout comme les multiples perspectives qu’offrent ces écrits pour l’historien.

1. les historiens et les archives de l’exception

Cet intérêt pour les « archives personnelles » et singulièrement celles des mauvais garçons a pourtant suivi depuis trente ans des chemins divers aux destinations parfois opposées, qui dessinent une histoire. On peut estimer qu’un premier moment de cette histoire se caractérise par la forte valorisation des archives personnelles en général. Excluant le cas limite, cette valorisation avait pour objet des documents produits par des individus appartenant à la catégorie des « damnés de la terre » ; elle s’inscrivait explicitement dans le contexte des années 68 et des luttes dont elles furent le théâtre. Il s’agissait d’ouvrir l’histoire à ses victimes, à ceux qui avaient été privés de parole — les ouvriers — et de constituer cette parole en instrument de lutte. Carlo Ginzburg écrit dans la préface de son livre Le fromage et les vers : « On pouvait autrefois accuser les historiens de vouloir seulement connaître “la geste des rois”. Aujourd’hui certainement il n’en est plus ainsi. Ils se tournent toujours davantage vers ce que leurs prédécesseurs avaient tu, écarté ou simplement ignoré. “Qui a construit la Thèbes aux sept portes ?” demandait déjà le lecteur de Brecht » (Ginzburg, 1980). De nombreux journaux et autobiographies d’ouvriers (Perrot, 1984) furent alors publiés dans une écriture de l’histoire militante et accueillis dans des maisons d’édition engagées. La collection des « Actes et mémoires du peuple », chez François Maspéro, est très caractéristique de ce premier moment : « Apporter, dans l’écoute de l’histoire, des voix qui sont différentes de celles qui ont toujours parlé plus haut et plus fort. Il s’agit d’aller vers le passé, d’apporter pour l’avenir, des éléments à une culture populaire »[1]. C’est ce même souci qui en 1973 amena Michel Foucault à proposer à Libération une rubrique intitulée « Chronique de la mémoire ouvrière », rubrique constituée d’écrits d’ouvriers : « Il serait intéressant, autour du journal, de regrouper tous ces souvenirs, pour les raconter et surtout pour pouvoir s’en servir et définir à partir de là des instruments de lutte possible[2]. » Mais aussi, comme l’écrit Daniel Roche en 1980 : « Aujourd’hui comme hier, l’enjeu de la biographie authentique, c’est de redonner la parole à ceux qui en ont été dépossédés. » L’archive personnelle était ainsi perçue comme une contre-source, énonçant ce que l’on a tu, disant l’envers de l’histoire. Dans bien des cas, son usage se limite à une publication accompagnée d’une simple contextualisation, le discours du témoin faisant preuve. Sans doute assiste-t-on outre-Atlantique à un phénomène assez comparable, s’agissant de l’usage de ces archives dans le développement des recherches sur les minorités. Dans les Black Studies ou dans les Gay Studies, les autobiographies et autres écrits d’esclaves ou d’homosexuels constituent la source privilégiée, comme si on était en quête de la parole vierge des individus aux identités minoritaires, une parole qui viendrait rétablir la vérité sur une série d’événements traumatisants. Dans ce projet initial d’écrire une « véritable » car « populaire » histoire, l’exceptionnel, le cas limite, le marginal n’a pas alors sa place. C’est un « je » partageable qui est à l’honneur. C’est Michel Foucault le premier qui s’empare alors de l’exceptionnel à travers certaines affaires judiciaires telles que le cas Pierre Rivière, déplaçant ainsi légèrement le regard, sans se douter qu’il modifie lourdement et durablement la place de la figure du transgresseur en histoire. Cette révélation d’un extraordinaire ordinaire suscite chez les historiens un intérêt immédiat pour ces archives des grandes transgressions. Écrire l’histoire avec Foucault passe désormais aussi par un dehors : le grand criminel, tel un miroir, en livrerait le meilleur des reflets. Absent du récit historique, le voici soudain introduit en son coeur, exactement comme, quelques années plus tard en sociologie, Robert Castel introduira le vagabond dans une histoire du salariat (Castel, 1995).

S’ouvre en effet le second moment de cette évolution : l’investigation historique ne porte plus seulement sur les silencieux de l’histoire mais, dans une perspective anthropologique, sur ses silences même. À l’initiative des historiennes des femmes, le regard se fixa sur un ensemble de gestes et de pratiques quotidiennes que l’histoire jusque-là avait délaissés. L’entreprise de l’histoire de la vie privée est exemplaire de ce changement d’optique. Ces recherches sur l’intime donnèrent aux archives de soi une place privilégiée, comme l’indique Michelle Perrot en introduction du volume qu’elle dirige :

Les sources les plus directes et les plus riches, les archives privées, sont cependant dissymétriques et d’un accès aléatoire. Leur conservation est aussi hasardeuse que leur consultation. [...] La conjoncture actuelle tend à revaloriser ses épaves. Correspondances familiales et littérature « personnelle » (journaux intimes, autobiographies, mémoires), irremplaçables témoignages, ne constituent pas pour autant les documents « vrais » du privé. Ils obéissent à des règles de savoir-vivre et de mise en scène de soi par soi qui régissent la nature de leur communication et le statut de leur fiction. Rien de moins spontané qu’une lettre ; rien de moins transparent qu’une autobiographie, faite pour sceller autant que pour révéler. Mais ces subtils manèges du cacher/montrer nous introduisent du moins au seuil de la forteresse.

Perrot, 1987 : 11

De fait, dans cette seconde phase, l’intérêt des historiens commença à porter non plus seulement sur le contenu du discours, mais aussi sur les conditions de production de ces gestes, sur ces pratiques dont les archives sont issues. Le cas des travaux sur les journaux de jeunes filles témoigne probablement le mieux de ce second moment[3]. Deux grands chantiers contribuèrent au cours des années 1980 à faire de cette interrogation marginale un véritable objet historique : aux marges de l’histoire d’une part, en anthropologie et en littérature, des enquêtes furent menées sur les écritures ordinaires (Fabre, 1993, 1997) et sur le genre autobiographique (Lejeune, 1971, 1992) ; au sein de la discipline d’autre part, sous l’impulsion de Roger Chartier et de Cécile Dauphin (Dauphin, 1995 ; Bossis, 1994), s’élabora l’histoire de la lecture et avec elle l’esquisse d’une histoire de l’écriture (Chartier, 1991). Les archives personnelles deviennent en elles-mêmes des objets historiques : les travaux sur l’histoire de la correspondance, sur les pratiques du journal, de l’album photographique sont une illustration de cet ensemble de pratiques individuelles et collectives qui furent alors sorties de l’ombre à partir de l’analyse d‘archives personnelles. L’écrit de l’exceptionnel, à commencer par celui que saisit le judiciaire, croise fortement ce second moment ; car, en même temps que des scripteurs dévalués sont révélés, des dispositifs de mise en écriture ordinaire sont mis en lumière. On découvre un ensemble important d’archives limites, à commencer par des séries de mémoires de criminel(le)s produits au sein des formidables ateliers que deviennent les établissements pénitentiaires, à l’initiative commune des juges et des médecins criminologues (Chauvaud et Petit, 1998). Ces investigations ne portent pas sur le crime mais sur la grande archive de l’infamie qui est alors étendue des écoles aux asiles. Véritables pièges d’écritures personnelles, les dossiers de ces institutions passent sous l’oeil de l’historien. Ces écrits, par l’analyse de leurs modalités de production, renseignent désormais autant sur la société contre laquelle ils se sont insurgés (Magna, 1993) que sur leurs scripteurs.

On peut faire l’hypothèse d’une dernière phase dans laquelle nous serions aujourd’hui entrés : les archives personnelles ont non seulement investi la majorité des champs historiques, mais elles font aussi l’objet d’une véritable critique au même titre que les autres sources, qu’elles soient archives de l’anonyme ou de l’exceptionnel ordinaire. Et l’on peut même estimer qu’avec cette banalisation s’opère un léger recul, en particulier des écritures de l’exceptionnel et de sa galerie de cas limites. Il y a des raisons à ce relatif désintérêt. D’une part, si les archives de l’homme ordinaire sont un gisement quasi inépuisable, il n’en est rien des écrits à la première personne dans les archives du judiciaire ; pour le xixe siècle, la destruction lors de la Commune de Paris des archives d’avant 1870 accentue cette pénurie. D’autre part, une figure contraire émerge massivement dans le champ historique, celle de la victime. Les sciences sociales s’intéressent en effet de plus en plus aux victimes des violences collectives (guerres et génocides), des systèmes de domination (colonisation), relayant à la marge la figure du transgresseur, à commencer par le criminel et le marginal.

Enfin, et c’est sans doute le plus important, l’analyse de ces archives correspondait à une conception de l’événement aujourd’hui largement battue en brèche ; car ce qui intéresse depuis quelques années l’historien est la richesse des matériaux autobiographiques pour appréhender l’infra-ordinaire de Georges Perec, auteur qui devient une référence obligée en histoire (Perec, 1989), en particulier s’agissant d’événements extraordinaires ou de situations extrêmes (Audouin-Rouzeau et Becker, 2000) — la guerre, la shoah, la maladie. On se concentre sur les Bardamu de l’histoire et non sur les individus ayant produit des actes exceptionnels : les archives personnelles sont en ce cas utilisées pour appréhender souvent avec des outils anthropologiques ce qui échappait jusqu’à présent à l’historien : l’infra-ordinaire des soldats sur le front ou des femmes à l’arrière, par exemple. Il s’agit de saisir les événements de « faible intensité » (Veyne, 1978), à l’image des travaux d’Arlette Farge sur le xviiie siècle (Farge, 1994, 1997) ou d’un Laé pour la période contemporaine. Cette quête des vies minuscules tend ainsi désormais à rejeter tout ce qui fait bruit et vacarme. Aussi la série inaugurée par le Pierre Rivière de Foucault est-elle en train de s’achever, ouvrant et laissant place à une écriture de l’ordinaire. Que peuvent aujourd’hui les historiens du social avec de telles sources ? Quelle histoire s’agit-il d’écrire ?

2. Le manuscrit de Jean

C’est la journée du 1er septembre 1905, année de ses 17 ans, qui constitue le jeune homme en criminel en même temps qu’en scripteur. Ce sont ses faits et gestes pendant quelques heures qui font entrer Jean dans la grande machine médico-juridique et avec elle dans la grande encyclopédie de l’infamie. Son emploi du temps ce jour-là fait l’objet par Jean d’un long et très détaillé récit, d’abord à l’oral lors des nombreux interrogatoires auxquels il est soumis, puis couché sur le papier (voir encadré 2).

À la lecture du récit du crime de Jean, on retrouve une situation de confrontation à l’archive bien connue des historiens (Farge, 1989) : le lecteur est d’abord submergé par un sentiment d’horreur associé à de la compassion. La jeunesse des protagonistes et l’acte de décapitation exacerbent ici ce double ressenti. Mais il faut s’empresser d’ajouter, et la situation est elle aussi courante, que cette réaction de répulsion est largement atténuée ou tout au moins mêlée de curiosité. Cette curiosité à la fois scientifique et personnelle nous pousse à poursuivre la lecture du document. Car aussi terrible soit le crime de Jean, son récit révélerait d’abord une subjectivité fascinante parce qu’énigmatique aux yeux des contemporains. Et sans doute y a-t-il souvent dans l’analyse des archives de ces cas extrêmes pour les historiens le fantasme d’appréhender une vérité jusque-là inaccessible, un impensé anthropologique. La précision des détails donnés, la forme de l’interrogatoire et de la confession placent l’historien dans une situation singulière qui fait de lui un témoin privilégié. Au contact de ces textes, il arrive qu’il se mue en médecin et en enquêteur dont la mission serait de révéler une vérité. Le crime apparaît ainsi comme une énigme, l’autobiographie un ensemble d’indices, le travail de l’historien consistant en leur interprétation, en somme à un travail d’herméneutique.

Le second écueil que l’on rencontre lors de l’analyse de ces archives est la tentation de reprendre l’instruction du procès ; la possibilité de disposer outre de l’autobiographie, d’un ensemble de discours (journalistiques, médicaux, juridiques, pénitentiaires) et qui plus est de l’ensemble de la production postérieure encourage une histoire du crime qui serait celle aussi des erreurs judiciaires (Berlière, 2003). L’envie est grande également face aux cahiers de Jean de poursuivre le diagnostic des médecins au regard des savoirs actuels dans un anachronisme savant. Ce recouvrement du discours historique par un regard socio-psychologique est souvent mené sous couvert de donner à voir une anthropologie historique de la marge. Lire l’autobiographie de Jean consisterait à entrer dans l’intimité de son scripteur pour reconstituer la série de schémas mentaux qui l’animeraient. Il s’agirait en somme de contribuer à une histoire de la violence.

On pourrait enfin lire le texte de Jean comme un discours de plus venant s’ajouter à tous ceux produits dans le cadre de l’affaire et construisant ce personnage de papier qu’est le criminel fin-de-siècle (Artières et Kalifa, 2001 ; Demartini, 2001). Se distinguant d’une histoire des représentations, cette approche du discours comme fait social se veut une contribution à une histoire renouvelée du crime (Kalifa, 1995). Il nous semble que le dossier de Jean, cette grande archive autobiographique de l’infamie, permet ainsi d’interroger un objet jusque-là ignoré et qui peu à peu émerge dans les sciences sociales (Fraenkel, 2007), à savoir non pas l’histoire du crime et ses écritures (Kalifa, 1995, 2005), ni le champ des représentations criminelles (Chauvaud, 1991, s.d.), mais l’objet historique que constitue l’écriture. Il n’est en effet sans doute pas neutre, dans nos sociétés, qu’une plume ait souvent été proposée aux auteurs de crimes monstrueux.

Dégagé par ce constat du qualificatif de brut, l’écrit mis au jour par les affaires comme celle de Jean est particulièrement riche. Non seulement il porte la culture écrite dont il est issu — il en est, dira-t-on, un spécimen et, s’agissant des paysans du Massif central au début du xxe siècle, la chose n’est pas sans intérêt —, mais il témoigne aussi de la relation entre écriture et oralité. L’enquête montre en effet que le premier cahier de Jean est composé d’une « confession générale » faite par son auteur quelques semaines auparavant au prêtre de la paroisse voisine. Or, ces confessions suivaient un plan bien précis et répondaient à un questionnaire très élaboré contenu dans des guides de confesseurs alors imprimés et distribués aux curés des paroisses (Corbin, 2008). Le manuscrit de Jean est ainsi archive personnelle d’une parole produite dans le cadre spécifique d’une pratique religieuse. L’adaptation d’un discours parlé de confidence à un discours écrit d’aveu est particulièrement intéressante à étudier pour caractériser et définir la pénétration de l’écrit et ses usages en France au xixe siècle. Par l’ampleur de l’investigation dont un criminel est l’objet, le dossier contient ainsi de nombreux éléments pour appréhender ce que les anthropologues anglo-saxons appellent avec Brian Street literacy (Street, 1984 ; Barton, 2007). Si Daniel Fabre dans sa relecture du dossier Pierre Rivière (Fabre, 1991) avait souligné les perspectives que ce type de dossiers ouvrait, il nous semble que ces écrits autobiographiques de criminels sont des lieux pour élaborer une anthropologie historique de l’écrit qui s’attache à la fois aux pratiques matérielles d’inscription et aux effets que l’écriture produit. Cette pragmatique de l’écriture, en particulier son caractère perlocutoire, est ici centrale et explique sans doute l’épreuve que la lecture constitue même à un siècle de distance. Une telle approche menée en série, de l’assassin de Pierre Rivière à Jean B., en passant par Louis Luchini, le meutrier de Sissi (1909-1998) et Joseph Vacher (1898-2006), permettrait de réfléchir à la force de l’écrit dans cette Europe d’avant 1914. Car si de Jean B. nous ne conservons que quelques cahiers, des autres, comme Vacher, demeurent lettres, billets, pancartes et autres écrits du quotidien. Faire l’analyse de ces écrits de l’exception nous ouvrirait sans nul doute sur cet exceptionnel ordinaire[4].

Document
Je suis né à R. (Cantal) le 12 juin 1888.
Je me rappelle que durant mes premières années je vivais avec mes parents et mes frères et mes soeurs qui étaient plus âgés que moi. Les premiers faits de ma vie que je puis me rappeler eurent lieu lorsque j’avais 3 ou 4 ans et ces faits je ne les ai que vaguement dans ma mémoire. Je me rappelle assez bien qu’un jour à cet âge-là, étant monté au grenier et ayant voulu ouvrir une fenêtre qui s’ouvrait en dehors, en la poussant je tombai et fus précipité d’une hauteur de 5 mètres 50 sur des pierres. Je tombai debout, je crois, et je n’eus aucun mal. Je me rappelle aussi qu’à cette même époque j’eus de la teigne et que pendant toute une année il m’en sortit des oreilles. À cette même époque, j’eus pour la première fois l’idée de tuer quelqu’un, mais je ne me rappelle pas quand pour la première fois me vint cette idée. Ce que je me rappelle bien, c’est que le soir au lit, avant de m’endormir, je me représentais en train de tuer ou de faire souffrir de jeunes garçons de mon âge ou même plus âgés, que je connaissais et avec lesquels je me trouvais souvent. Ce n’était pas le désir de donner la mort que j’avais mais il me semblait que j’avais un grand plaisir à les frapper d’un couteau ou à leur faire souffrir toutes sortes de supplices, non dans le but de leur donner la mort (qu’ils vivent ou qu’ils meurent cela m’était indifférent) mais il me semblait que j’avais du plaisir à les supplicier. C’est pourquoi je me représentais en train de le faire. Et alors ma « verge » grossissait quoique me représentant en train de tuer et que j’en ressentisse comme un plaisir, je n’étais pas satisfait et il me semblait que je jouirais véritablement et que je serais soulagé dès que je pourrais réaliser ce que je me représentais. Je me rappelle pas exactement comment je me représentais le supplice que je faisais subir à ma victime imaginaire. Je la frappai de mon couteau dans le cou et le visage. Je la mutilais, mais je ne me représentais pas dans l’esprit du sang qui coulait. Je dois dire d’ailleurs qu’en grandissant ma passion changeait, mes idées n’étaient plus les mêmes, par exemple, à l’âge de 15 ans qu’à l’âge de 5 ans. Ce que je ne puis pas bien m’expliquer c’est que je ne me sentais porté à tuer que certaines personnes. Pour que je fusse porté à tuer cette personne, il fallait qu’il y ait assez longtemps que je la connaisse, qu’elle ait une certaine beauté de figure, une certaine intelligence, qu’elle fut à peu près de mon âge ou plus âgée de quelques années ou ayant quelques années de moins. Jamais ces idées-là ne me sont venues pour mes frères et mes soeurs. Lorsqu’à l’âge de 4 ans, j’allais à l’école, je me sentis porté à tuer certains de mes camarades de classe. Je me rappelle qu’un jour en récréation, passant à côté d’un de mes camarades que je me sentais porté à tuer, mais ne pouvant naturellement pas le faire, je lui mis mon doigt dans la bouche et lui prenant la lèvre supérieure, je lui tirais ou je la lui soulevais trouvant une certaine satisfaction à faire cela. À 5 ans, on me mit à l’école maternelle avec des filles et d’autres garçons de mon âge et comme à l’école des garçons, je désirais tuer quelques-uns de mes camarades à n’importe quel sexe qu’ils appartinssent. À 7 ans, de retour à l’école des garçons, ce furent certains parmi mes camarades que je désirais tuer et je ne me sentis plus porté à tuer des filles. À l’âge de 7 ou 8 ans, je commençais à me confesser. En confession, je ne m’accusais pas d’avoir ainsi des idées de tuer parce qu’en me confessant, je ne m’en rappelais point ; d’ailleurs, je ne l’aurais sans doute pas dit, alors même que je me le serais rappelé. Je fis ma première communion à l’âge de 11 ans et avant de la faire, je fis ma confession générale ; j’aurais désiré oublier involontairement d’accuser ces idées de tuer. Mais je me les rappelais et je me vis obligé de les accuser. Mais je n’osais pas le dire tout de même. Je cherchai à donner à ces idées un nom pour dire ce nom en confession, au lieu de dire bien explicitement que j’avais eu l’idée de tuer quelqu’un, j’ouvris donc mon catéchisme au 3e commandement de Dieu et je vis que non seulement ce commandement défendait de donner la mort soit à autrui, soit à soi-même, mais qu’il défendait en outre la haine, le mépris, la vengeance, etc., autant de mots qui m’étaient inconnus. Je me dis que ce singulier désir de tuer quelqu’un pouvait bien être de la haine, et en confession au lieu de dire que j’avais désiré donner la mort à mon prochain, je dis que j’avais eu de la haine pour mon prochain. Je n’étais pas sûr d’avoir dit le mot juste, mais je me disais que peut-être cela suffisait. Pendant quelques années, quoique doutant que ce mot de haine n’était pas le juste, je m’accusai ainsi de mes désirs de tuer, ou bien encore d’autres mots tels que : mauvaises pensées, mauvais désirs, mauvais regards, jusqu’au jour où ayant caché en confession que j’avais démoli une ruche d’une voisine et me croyant cette fois dans le sacrilège sans aucun doute, je ne cessai de m’accuser des idées de donner la mort de n’importe quelle manière que ce fût, en attendant le jour où je pourrai me confesser comme il faut à un prétexte que je ne connaîtrais pas et mettre ordre aux affaires de ma conscience. À l’âge de 10 ans, j’eus un jour des relations avec une jeune fille de 10 ans, mais je n’en ressentis nulle jouissance et cela ne me laissa pas d’impression. À ce même âge-là, un jour ayant rencontré un berger, celui-ci me coucha par force à terre et se mit malgré moi à me masturber. Au bout d’un certain temps je me laissai faire et je jouis. Je savais désormais comment on se masturbait, mais pendant quelques années je n’associai pas encore l’idée de tuer aux plaisirs sexuels et je me masturbais que fort rarement sinon jamais, car je n’arrivais pas à avoir une éjaculation et je ne parvenais à jouir que très difficilement. Or, un jour, à l’âge de 14 ans, je me masturbai et je ne pouvais parvenir à jouir quand par hasard l’idée de tuer me vint : je me représentais en train de tuer quelqu’un et aussitôt je jouis très facilement. Pendant tout l’hiver qui suivit, j’allai à l’école primaire de mon village et je me masturbais très souvent (plusieurs fois par jour) en me représentant en train de tuer certains de mes camarades et de cette manière-là, je jouissais après m’être masturbé très peu de temps. Pendant l’été suivant, on me loua, quoique je me masturbasse encore quelques fois cela m’arrivait beaucoup moins souvent que quand j‘allais à l’école et je recommençai plus fort que jamais à me masturber en me représentant en train de tuer quelques camarades. J’ai déjà dit que ce n’était pas une personne quelconque que je me sentais porté à tuer. Je n’aurais pas pu tuer une personne ayant quelque chose de grossier dans sa physionomie, ni une personne inintelligente. Il me semblait que j’avais plaisir à un de mes camarades ou une personne avec laquelle je me trouvais souvent, mais qui ait une belle physionomie, une intelligence assez grande, et une certaine fierté dans sa démarche, sa tenue, ses gestes. C’est à l’âge de 14 ou 15 ans que je remarquai que parmi les personnes que je me sentais porté à tuer, il y en avait chez qui la beauté, l’intelligence, la fierté me les faisait détester, tandis que d’autres en qui je trouvais je ne sais quoi, de la bonté, de la franchise, j’avais pour eux de l’estime, de l’admiration. Je les aimais ; lorsque je me masturbais, je ne jouissais pas aussitôt à me représenter en train de tuer une telle personne qu’une telle autre. Tel jour il me semblait que j’aurais eu plaisir à tuer un tel ou même une telle, tandis que le lendemain, ce n’était plus les mêmes mais un tel ou une telle autre qu’il me semblait que j’aurais eu plaisir à tuer. J’ai remarqué aussi qu’en me masturbant, je n’avais pas tant de plaisir ou je ne jouissais pas si tôt à me représenter en train de tuer une personne qui m’était indifférente ou presque indifférente, qu’une personne que sa beauté, sa fierté, son intelligence, me faisait détester mais surtout j’ai remarqué que si je me représentai en train de tuer une personne que j’aimais pour sa beauté, son intelligence, sa fierté, j’éprouvais un bien plus vif plaisir et je jouissais plus tôt qu’à me représenter en train de tuer une personne que je détestais ou qui m’était un peu indifférente. Je me rappelle que quelques fois après m’être masturbé plusieurs fois de suite et que je me masturbais encore, ne pouvant jouir, je me représentais en train de tuer un de mes camarades que j’aimais. Je me voyais lui disant : « Mon pauvre, je suis obligé de te tuer, je le regrette, je tacherai de te faire souffrir le moins possible. » Et alors je me le représentais ne m’opposant nulle résistance, et je me voyais le tuant, comme à regret car je l’aimais, mais ne pouvant faire autrement. Et en me représentant ainsi en train de tuer un camarade que j’aimais, quoique m’étant déjà masturbé plusieurs fois de suite, je jouissais encore de nouveau. Quant à la manière dont je me représentais en train de tuer, ce n’était pas toujours la même. Je me représentais une victime imaginaire que j’aimais : je la voyais se laissant faire, je la saignais ou je la décapitais avec un couteau. Si c’était une personne que je détestais, je me la représentais impuissante ne bougeant pas et je la laissais en mon esprit mourir plus cruel en lui disant ou en ayant l’air de lui dire : « Je te tiens, je suis ton maître, que feras-tu ? » Et en même temps, je me voyais lui plongeant le couteau dans la gorge ou lui déchirant la figure.
Ainsi, je croyais que je jouirais en tuant mais je ne voulais cependant pas le faire craignant les tristes suites de mon crime ou bien encore que la justice divine se venge sur moi en me frappant d’un grand malheur tel que la perte d’un des membres de ma famille. Cependant lorsque ce désir devenait trop fort et que je ne me masturbais pas, je ne voyais plus qu’un but : tuer quelqu’un. Ce but me paraissait une félicité infinie et il me semblait que rien ne pouvait m’empêcher de l’atteindre. Je me rappelle qu’un jour, à l’école primaire, ce désir se faisait plus vivement sentir. Un de mes camarades, qui justement était ma pauvre victime, s’était levé et je l’avais devant moi ; le désir que j’avais de le tuer se fit si vivement sentir que je pensai que tôt ou tard il faudrait que ce besoin de tuer qui devait me procurer une si grande jouissance fut satisfait et comme en ce moment je me sentais le plus porté à tuer ce camarade que j’avais devant moi, je pensai en le regardant : « Tu ne vieilliras pas. » Un moment plus tard ce désir et cette volonté de tuer avaient disparu de mon esprit. Et cependant ce que je me dis intérieurement à ce moment-là ne s’est trouvé que trop vrai !
Au mois d’avril 1904, une mission fut prêchée dans ma paroisse à R., je résolus de profiter de cette occasion pour mettre ordre aux affaires de ma conscience. Je me confessai deux fois à un prêtre qui prêchait cette mission, et qui était le Supérieur du Petit Séminaire de St F. Je m’accusai en pleurant de mes mauvaises confessions où j’avais caché que j’avais le désir de tuer, et dans cette confession, je le dis. Mon confesseur, après ma 2e confession, me dit qu’il regrettait que je fusse trop âgé, car si j’avais la vocation de me faire prêtre, il aurait pu me faire entrer au Petit Séminaire de St F.
Tout d’abord, je ne pensai pas à me faire prêtre. Mais je recommençai à me masturber quoique bien moins souvent et toujours en me représentant en train de tuer. J’avais beau lutter contre ma passion, lorsque je me sentais tenté de me masturber et que l’image de la jouissance se présentait devant mes yeux, si je ne parvenais pas à me débarrasser de cette idée avant qu’elle fût devenue trop forte, je finissais par y succomber. Et ensuite, je regrettai de l’avoir fait, je me jetai à genoux pour implorer le pardon de Dieu en me promettant de tout souffrir plutôt que de recommencer. Mais dès que de nouveau la tentation se représentait à mon esprit je luttais un moment, mais bientôt l’idée de la jouissance me faisait oublier les résolutions que j’avais prises et je me disais que Dieu me pardonnerait bien encore une autre fois et je succombais de nouveau. C’est alors que je me dis que si j’étais au séminaire, je serai bien plus en sûreté contre moi-même. Et la pensée d’être prêtre me souriait, non pas parce que je désirais être prêtre pour être à mon aise, toucher une bonne paye et ne travailler que très peu ; mais je me serais estimé heureux de pouvoir mener une vie réglée, sainte, pénitente, exempte de tout désordre, et de pouvoir partir un jour pour les missions étrangères. Mais comment faire ? Je me souvins alors de ce que m’avait dit le Supérieur du Petit Séminaire de St F., et je lui écrivis. Je lui exposai que je tombais souvent dans des fautes et que j’aurais voulu m’en confesser mais que je n’osais ; je lui disais ensuite que je m’estimerais heureux si je pouvais être prêtre et mener une sainte vie loin du monde et je le suppliai de me dire ce que j’avais à faire. Il me dit d’aller me confesser ce que je fis le 15 août 1904, et me dit que si je désirais me faire prêtre, j’avais deux voies à suivre : ou à faire des études au Petit Séminaire de St F. et alors j’avais une grande partie de la pension de payée et il restait une faible partie de la pension que mes parents auraient à payer, plus divers autres frais — ou bien je pouvais encore entrer dans une école apostolique à l’étranger et mes parents n’auraient qu’à payer mon voyage une fois pour toutes, car si on y allait, c’était à la condition de ne pas revenir. Ce qui restait à payer de la pension était encore une charge trop lourde pour mes parents. Mais je leur dis que je préférais partir à l’étranger et ne pas revenir, ce à quoi naturellement ils s’opposèrent. Enfin, tout s’arrangea. Un riche propriétaire s’engagea à payer ce qui restait à payer de ma pension, et il fut décidé que je ferais mes études au Petit Séminaire de St F.
Je me confessai donc au 15 aôut 1904 et je fis une confession générale dans laquelle je m’accusai de tout jusqu’à la moindre pensée que j’aurais même pu avoir malgré ma volonté. Après cette confession, je fus tranquille. Mais je ne tardai pas à retomber dans les mêmes fautes en me masturbant et en me représentant en même temps en train de tuer. Ne voulant pas m’accuser de ces fautes à un prêtre du séminaire avant d’y aller je me confessai de nouveau à un prêtre de la paroisse voisine.
Au séminaire je me confessai de nouveau quelques jours plus tard à l’occasion d’une retraite. Je fis une confession générale et je m’accusai encore de mes idées de tuer. Quelques jours après ma confession générale, je revins encore au confessionnal et je m’accusai de certains péchés que j’avais oubliés et de certaines mauvaises pensées qui me venaient malgré ma volonté mais que mon esprit naturellement porté à exagérer, je crois, prenait pour des péchés mortels. Mon confesseur me dit que j’exagérais le mal que je commettais et il me dit qu’il ne me donnait même pas l’absolution car je n’en avais pas besoin. Malgré ce que m’avait dit mon confesseur, je ne fus pas rassuré au contraire et je communiai dans cet état de doute. Plusieurs jours s’écoulèrent et un soir après m’être couché l’idée de tuer et le désir de me masturber se présentèrent à mon esprit, je cherchai à les repousser, me disant que c’était mal de penser à ces choses-là. Je me disais que si je succombais, il faudrait que je dise en confesse ce que j’avais fait et que cela était très honteux surtout pour un séminariste. Malgré cela la tentation fut trop forte. Je me masturbai deux fois de suite mais sans me représenter en train de tuer pour ne pas avoir à dire cela en confession. Le lendemain, je crois, j’allai me confesser. Je m’adressai au Préfet de religion du Petit Séminaire et je lui dis tout ce qui me gênait. Ces doutes sur ma dernière communion, comment ces doutes m’étaient venus, je lui dis que je m’étais touché et comme c’était la première fois que je m’adressais à ce confesseur pour lui faire voir ce que j’avais fait autrefois, je lui dis que j’étais resté longtemps dans le sacrilège parce que j’avais caché en confession les idées de donner la mort. Puis dans cette confession, je m’accusai de toutes les sortes de pensées qui m’étaient passées par la tête même malgré moi-même et que je prenais pour des péchés mortels. Par là, mon confesseur vit bien que j’étais porté à exagérer le mal que je pouvais commettre et même à prendre la tentation pour le mal lui-même. Il me dit donc de ne pas voir ainsi les choses sous des couleurs si sombres, de ne pas prendre la tentation pour le péché et il me dit que si de mauvaises idées me venaient ainsi, de les repousser et que je ne serais pas coupable. Il me dit aussi que malgré que ces idées mauvaises me viendraient, si je faisais mon possible pour les repousser, je pouvais aller communier sans nulle crainte. Je fus rassuré et je sortis bien tranquillement du confessionnal.