Les études sur l’acquisition du français langue seconde ont fait d’importantes contributions aux théories et modèles de l’acquisition de la compétence morphosyntaxique en langue non native (ex. Hawkins, Towell et Bazergui 1993, Herschensohn 1999, Myles, Mitchell et Hooper 1999, Bartning et Schlyter 2004, Dewaele 2005). Les cinq articles rassemblés dans le présent numéro ajoutent à notre compréhension de plusieurs phénomènes qu’on retrouve régulièrement dans la recherche sur l’acquisition de la morphosyntaxe, soit le traitement et la production de la morphologie de l’accord (Dewaele ; Felker, Tremblay et Golato), l’acquisition du système verbal (temps du futur – Howard ; complémentation – Gaffney) et l’importance du contexte – y compris du contact avec les francophones – pour l’appropriation de la variation linguistique (Thomas). Ces contributions se basent sur des expériences faisant principalement intervenir des apprenants avancés, si bien qu’elles rejoignent d’autres études cherchant à caractériser la compétence – y compris la nature et la source des lacunes persistantes – des apprenants expérimentés (ex. Bartning 1997, Labeau et Myles 2009). S’il y a un fil thématique qui relie les contributions scientifiques des différents articles, c’est sans doute le rôle primordial de l’input et les difficultés associées à l’apprentissage des variabilités grammaticale et sociolinguistique. En effet, tous les chercheurs soulignent le fait que les apprenants L2 peuvent éprouver des difficultés à traiter la langue cible pour une variété de raisons (entre autres, l’ambiguïté et la variabilité des données linguistiques disponibles et les limites de la mémoire, en particulier chez les apprenants moins compétents). Ces difficultés expliquent, au moins en partie, les différences de compétence observées entre les locuteurs natifs et non natifs. Ouvrant le numéro, l’article de Dewaele, « Gender Errors in French Interlanguage: The Effect of Initial Consonant versus Initial Vowel of the Head Noun », porte sur les difficultés qu’éprouvent les apprenants L2 dans l’attribution du genre au nom. Il est indéniable que les erreurs d’attribution et d’accord sont persistantes chez les apprenants L2 (voir Ayoun 2007 pour un survol des tendances observées). Alors qu’un nombre important d’études ont investigué le rôle des terminaisons dans l’attribution du genre chez les apprenants L2 (ex. Carroll 1999, Lyster 2010), Dewaele examine l’effet du phonème initial (vocalique ou consonantique) sur l’exactitude des attributions. Bien que l’opposition masculin-féminin soit facilement repérable lorsqu’il s’agit de mots à consonne initiale (ex. le [lə] / un [oẽ] / ce [sə] monsieur versus la [la] / une [yn] / cette [sɛt] madame), on constate du syncrétisme lorsqu’il s’agit de mots à voyelle initiale, surtout au niveau phonétique (ex. [l] / [sɛt] autobus / automobile), sauf dans le cas des noms précédés d’un déterminant indéfini (ex. [oẽ] autobus, [yn] automobile). Comme la forme du déterminant est un des principaux indices du genre, ce syncrétisme a pour effet de rendre la tâche d’attribution du genre au nom plus difficile, car les indices sont relativement appauvris pour les mots à voyelle initiale. L’étude cherche à déterminer si l’attribution du genre aux mots à voyelle initiale cause effectivement plus de difficultés aux apprenants et, le cas échéant, si ces difficultés sont corrélées à deux variables, soit le genre du nom et l’expérience avec la langue cible. À l’aide d’une analyse de données tirées de conversations entre des participants néerlandophones et le chercheur, Dewaele observe que la moyenne et la distribution des erreurs sont plus grandes dans le cas des mots à voyelle initiale, mais uniquement chez les apprenants ayant moins d’expérience en français. Dewaele est conduit à supposer que la difficulté des mots à voyelle initiale est passagère et que les apprenants L2, une fois qu’ils ont bénéficié d’un input …
Appendices
Bibliographie
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