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Bernadette Tillard, Des familles face à la naissance. Paris, L’Harmattan, Collection Savoir et formation, 2002, 298 p., bibliogr.[Record]

  • Sandra St-Laurent

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  • Sandra St-Laurent
    Département d’anthropologie
    Université Laval
    7, Arnhem Road
    Whitehorse (Yukon) Y1A 3B5
    Canada

On connaît l’intérêt marqué depuis quelques décennies pour la petite enfance. Médecin de formation, l’auteure Bernadette Tillard emprunte une démarche ethnologique pour étudier le lien entre l’éducation et la petite enfance, dès les premiers moments de la vie. Dans son ouvrage, elle présente les résultats d’une recherche effectuée auprès d’une population défavorisée du quartier populaire de Lille-Moulins en France, qui tente d’identifier les conditions d’accueil et d’intégration des enfants à leur famille. L’auteure cherche aussi à comprendre les obstacles qui tiennent les familles défavorisées à distance des services sanitaires. Le choix de s’attarder sur ces deux univers, celui de la famille et celui du système médical, relève du fait que « la médicalisation participe maintenant aux différentes étapes critiques de la vie humaine » (p. 10) et que les naissances n’y échappent pas. L’auteure présente d’abord un bref historique de la présence de l’État français dans le domaine de la petite enfance en rappelant l’évolution des programmes de santé publique et l’émergence du Service de protection maternelle et infantile. Tillard s’intéresse ensuite à l’évolution des perceptions populaires sur les maternités, qui, il y a moins d’un siècle, étaient un lieu où l’on « accouche dans le déshonneur » (p. 102) et sont devenues le lieu où naît toute la population. Elle soutient qu’une telle intrusion de l’État dans le domaine de la famille provoque inévitablement des changements dans la façon dont la famille approche la grossesse et prépare la naissance. Les résultats de la recherche sont présentés selon deux grands axes, l’un traitant de la préparation à la naissance et l’autre explorant l’attribution des noms de l’enfant dans les familles. Dans la première partie, Tillard se penche sur la façon dont la naissance est perçue par les femmes. On y retrouve les principales perceptions de la fécondation et les expressions populaires entourant la découverte de la grossesse. L’auteure met ensuite en relief l’annonce personnelle de la grossesse à l’entourage et elle s’interroge sur une nouvelle recommandation de droit social qui impose la déclaration de la grossesse avec suivi médical et social. Or, elle remarque que cette déclaration est parfois perçue comme une menace (la possibilité de se faire retirer son enfant par les services sociaux). Résultat de cette perception, certaines femmes préfèrent ne pas déclarer la grossesse et refuser le suivi médical par crainte des services sociaux. Tillard aborde aussi les perceptions que les mères ont de leur grossesse, de l’enfant qu’elles portent ainsi que du rôle joué par l’échographie dans cette construction de l’enfant à naître. La première partie se termine sur le statut de la famille, qui change avec la venue d’un enfant, et sur ce que l’on attend de la mère lors de son séjour à la maternité. La seconde partie intitulée « Décrire la parenté », explore les contraintes de l’état civil français quant à l’attribution des noms et la reconnaissance de l’enfant. On y découvre différentes stratégies qui tentent d’intégrer le nouvel enfant dans la famille et le rôle que jouent les traditions familiales, culturelles, religieuses des familles dans l’attribution du nom, la reconnaissance paternelle et celle de la fratrie. Des schémas de parenté sont présentés au fil des chapitres afin d’illustrer quelques exemples d’attribution des noms et d’inscription dans l’un ou l’autre des lignages. L’auteure explore ces éléments par le biais de la filiation, l’alliance et la germanité. Tillard s’attarde aussi aux alliances et aux relations de pouvoir qui influencent ces choix. Elle traite brièvement de la question des couples exogames et de l’adoption de traditions nominales en fonction de l’origine culturelle des parents, de même que des emprunts culturels qui s’observent parfois dans …