En ces jours de février 2018, DSK (pour Dominique Strauss-Kahn) – le don Juan compulsif –, Weinstein – le maître-chanteur libidineux –, et Tariq Ramadan – le Tartufe du Coran –, composent une sorte de triade maudite aux yeux de l’opinion publique. À eux trois, ils incarnent le mal absolu. Violeurs, abuseurs, harceleurs, en un mot : prédateurs des femmes. Et mon propos n’est pas de les défendre. Il ne fait aucun doute qu’à mes yeux, ces trois personnes ont eu des comportements profondément amoraux, et, partant, répréhensibles. L’affaire Weinstein a été perçue comme la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Elle a joué un rôle de déclencheur : la parole des femmes s’est libérée. Et les accusations ont fusé de toutes parts, en particulier par le biais des réseaux sociaux, au mot d’ordre #MeToo, puis de façon plus agressive encore avec #BalanceTonPorc. En ce moment, en France, pas un jour ne s’écoule sans que le débat ne soit relancé. À voir les derniers rebondissements, on a l’impression que cette campagne de dénonciation prend la tournure d’une folie collective. Tout récemment, le tableau de chasse de la dénonciation s’est enrichi d’un double trophée dans la catégorie people, l’agresseur supposé étant en effet Nicolas Hulot, personnalité très populaire, qui est devenu ministre de l’écologie du nouveau président Macron ; et la victime, pas moins qu’une petite-fille d’un ancien président de la république, à savoir Pascale Mitterrand. On exhibe une plainte pour agression sexuelle vieille de plus de dix ans, laquelle avait déjà été classée pour cause de prescription, et voilà que pointe déjà la plainte symétrique pour diffamation… Notre ministre de l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, perd la boussole en disant la chose et son contraire. Un jour, elle soutient le mouvement #BalanceTonPorc, et le lendemain, elle s’indigne de ce que l’on accuse son collègue au gouvernement. Au sujet d’un fait divers tragique (un homme a tué son épouse), elle s’empresse d’invoquer la notion de féminicide alors même que celle-ci n’existe pas en droit français, et que par ailleurs, en vertu de la doctrine héritée de Montesquieu sur la séparation des pouvoirs, un ministre n’est pas censé commenter une affaire dont s’est saisie la justice. Les appels à la délation continuent d’affluer, dont certains prennent une tournure inquiétante. Aujourd’hui j’ai reçu un courriel circulaire provenant d’un « groupe d’étudiant(e)s de l’EHESS », l’institution à laquelle j’appartiens. Ce courriel appelle chaque étudiant ou membre du personnel à faire part de façon anonyme, sur un site dédié, de toute « expérience désagréable » à laquelle il ou elle aurait été confronté(e). Or, un tel anonymat ouvre la porte à toutes les dérives. Tout cela prend des proportions qui apparaissent à des esprits modérés, catégorie dans laquelle je me range, largement exagérées. La féministe Caroline de Haas a fait hier une déclaration sur France-Inter, notre radio nationale. Selon elle, il y aurait 200 viols par jour en France. L’État serait complice ; les policiers ne feraient rien ; les magistrats seraient coupables de négligence et de passivité. On peut s’étonner du reste de la dernière accusation car, en France, la magistrature est devenue, en l’espace de quelques années, une profession très largement féminisée. Cette campagne a toutefois du bon, dans la mesure où, même si on n’en partage pas les outrances, elle nous enjoint de nous poser des questions cruciales : que faut-il considérer comme étant un viol, comme relevant de l’agression sexuelle, ou comme synonyme d’harcèlement et, en miroir, comment entendre le « consentement », mot qui prolifère dans toutes bouches comme la recette-miracle, …
Appendices
Références
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