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Rituels en action, sous la direction de Bruno Sibona, réunit les exposés présentés lors du colloque intitulé « Performing Rituals/Rituels en action » qui s’est tenu du 5 au 8 septembre 2012 à l’Université d’Aberystwyth au Pays de Galles. L’objectif de ces actes de colloque est de fournir une réflexion autour de la notion de « rituel » à travers dix-huit études en littérature, théâtre et anthropologie.

L’ouvrage est divisé en deux parties : « TRANSGRESSER (initiatique) » et « RELIER (anxiolytique) ». Chacune comprend neuf études en lien avec ces deux fonctions du rituel. La première section porte sur l’aspect initiatique du rituel. Elle commence par un texte de Claire Lozier sur la relation entre rites et littérature dans la pensée de Georges Bataille. S’ensuit le chapitre d’Anaïs Bonnier sur les contre-rituels scatologiques présents dans quatre oeuvres littéraires ainsi qu’un troisième chapitre, de Bénédicte Maselli, sur le Théâtre des orgies et des mystères d’Hermann Nitsch. Cette partie se poursuit par une quatrième analyse (Alain Romestaing) portant sur les rituels de mise à mort dans l’oeuvre de Jean Giono. Vient ensuite un chapitre d’Agnès Rogliano Desideri sur la relation entre morts et vivants en Corse. Le sixième chapitre de cette partie est une étude de Claire Ghëerardyn sur un rituel en lien avec le pont Charles à Prague dans l’oeuvre d’Angelo Ripellino. Le chapitre suivant (Aline Wiame) s’intéresse aux pratiques de la « psychiatrie institutionnelle » à la Clinique de la Borde. « TRANSGRESSER (initiatique) » se termine par une analyse des séquences rituelles dans l’oeuvre de Samuel Beckett (Florence Godeau) ainsi que par une étude sur la question du genre en tant que rituel dans le milieu de la danse contemporaine (Hélène Marquié).

La seconde partie, « RELIER (anxiolytique) », concerne l’aspect anxiolytique du rituel. Le premier chapitre (Federica Maltese) est une analyse du film Medea (1969) de Pier Paolo Pasolini qui se concentre davantage sur la relation entre rituel et utopie. Une grande partie des chapitres suivants replace l’ouvrage dans un contexte anthropologique, tout d’abord avec un texte sur la création audiovisuelle autochtone au Brésil (Charles Bicalho), puis par un texte sur les rituels chamaniques liés à l’ayahuasca (Silvia Mesturini Cappo). La quatrième analyse porte sur la ritualité dans la littérature poétique et les arts martiaux contemporains (Matthieu Dubois). Cette seconde partie de Rituels en action se poursuit avec le chapitre de Nour Farra-Haddad sur les rituels divins dans une maison de visionnaires à Beyrouth ainsi que par deux études littéraires : la première porte sur les rituels dans l’oeuvre « Sylvie » (1853) de Gérard de Nerval (Catherine Talley), la seconde s’intéresse aux rites amoureux dans Belle du Seigneur (1968) d’Albert Cohen (Alain Schaffner). Le huitième chapitre concerne la question des rituels de mémoire dans les musées d’histoire (Nathanaël Wadbled). Enfin, le chapitre de Myriam Watthee-Delmotte est une étude sur la place des rituels dans la relation entre deuil et littérature.

Rituels en action est un ouvrage intéressant dans la mesure où il prend l’initiative de regrouper littérature, dramaturgie et anthropologie autour d’un même sujet : le rituel. Le livre présente cependant quelques points faibles, premièrement sa limite sur le plan théorique : il s’agit là d’un ouvrage qui vise essentiellement à récapituler les divers exposés présentés lors d’un colloque. Le livre en tant que tel n’apporte pas de nouvelles théories sur la notion de « rituel ». Puisqu’il s’agit d’actes de colloque, il est difficile de formuler une critique générale, au cas par cas, pour tous les chapitres en ce qui concerne la qualité de la méthodologie, de leur structure et de l’écriture. La composition du livre peut être perçue par certains lecteurs comme étant « lourde » avec deux parties seulement, chacune comprenant neuf chapitres s’enchaînant sans transition, sans liens les uns avec les autres. D’autre part, l’ouvrage ne présente aucune conclusion. Même si certains chapitres, comme le cinquième ou le onzième, ont un potentiel anthropologique intéressant, ils peuvent paraître limités pour un lectorat universitaire spécialisé dans cette discipline. Le même problème peut se présenter pour les lecteurs versés en littérature et dramaturgie.

Pour conclure, il s’agit d’un ouvrage qui, au travers des nombreuses études qu’il présente, permet une meilleure compréhension de la notion de « rituel », que ce soit en anthropologie comme en littérature ou en théâtre. Toutefois, son approche multidisciplinaire limite le potentiel de ses objectifs aux yeux de certains lecteurs spécialisés dans l’une de ces trois disciplines.