Chronique bibliographique

Karim Benyekhlef, Une possible histoire de la norme. Les normativités émergentes de la mondialisation, 2e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2015, 921 p., ISBN 978-2-89400-346-6[Record]

  • Karounga Diawara

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  • Karounga Diawara
    Université Laval

L’internationalisation des échanges commerciaux, l’interpénétration économique des marchés nationaux et étatiques sous forme de blocs régionaux et suprarégionaux, le rôle fulgurant et croissant joué, dans ce contexte, par les acteurs privés ainsi que l’affaissement corrélatif de la partition normative dévolue aux pouvoirs publics et étatiques sont autant de thèmes développés dans la deuxième édition de l’ouvrage de Karim Benyekhlef, professeur à la Faculté de droit de l’Université de Montréal et directeur du Centre de recherche en droit public. Cette nouvelle édition de la monographie, intitulée Une possible histoire de la norme. Les normativités émergentes de la mondialisation, est une mise à jour à la fois documentaire et substantielle de la première édition parue en avril 2008 chez le même éditeur. D’un point de vue formel, une introduction a été ajoutée (p. 1-10), les références infrapaginales, bibliographiques et illustratives (tableaux et figures) ont été actualisées. Cependant, la structure d’ensemble du texte, sur laquelle nous reviendrons, est restée inchangée. Sur le plan matériel, l’auteur analyse principalement, dans cette nouvelle édition, l’impact de faits historiques récents d’ordre économique (crise de 2008) ou géopolitique (visée russe sur la Crimée, prétention expansionniste de la Chine sur la mer éponyme, etc.) sur la doxa libérale qui a jusque-là façonné les phénomènes de la mondialisation. En empruntant un chemin hétérodoxe au regard des objectifs traditionnellement assignés au présent type d’exercice, qui voudrait être avant tout un compte rendu qui condense et synthétise les idées et les opinions défendues par un auteur dans un ouvrage, nous accorderons plutôt un poids plus important à la démarche épistémique adoptée par l’auteur dans cette monographie consistante sur le plan formel et substantiel, qui apporte des arguments intéressants à l’ère d’un monde devenu global et malgré les résistances épidermiques et saccadées d’une montée des nationalismes mis au défi et d’un conservatisme qui se mire sans se comprendre ni se reconnaître lui-même du fait, notamment, des visages qui l’incarnent. À cet égard, nous discuterons d’abord des choix méthodologiques défendus par l’auteur et nous terminerons par la considération de quelques conclusions promues dans l’ouvrage, en passant par une appréciation de la structure d’ensemble de la monographie. Dans la deuxième édition de son ouvrage, le professeur Karim Benyekhlef garde intacts les choix méthodologiques déjà opérés lors de la première parution en 2008. De même, ces choix traduisent aussi les conceptions qu’il a développées dans d’autres publications. Destiné d’abord aux étudiants des cycles supérieurs et ensuite aux chercheurs de la communauté scientifique, l’ouvrage leur offre un bon modèle d’une démarche méthodologique valide dans la mesure où l’auteur justifie et argumente tous les sous-jacents épistémologiques à cet égard. Ces avenues épistémologiques constituent, selon l’auteur, le meilleur moyen pour répondre à la problématique au coeur de l’ouvrage, à savoir : quelle est la conséquence de la mondialisation sur la capacité normative des États ? Autrement dit, quel est l’effet du rapprochement d’ordre économique des régions et des continents, dans une économie-monde, sur la souveraineté normative des États, étendue au sens large ? Pour aborder cette question aux ramifications multiples, l’auteur inscrit son analyse dans le pluralisme et la pluridisciplinarité. D’abord, le pluralisme permet de s’éloigner d’une « théorie pure » pour emprunter, à juste titre, selon Jean-Guy Belley, une « théorie des mélanges et des rapports de la normativité juridique avec les autres espèces de la normativité sociale ». Il ne fait aucun doute qu’une approche pluraliste aménageant un dialogue internormatif en forme de réseau est plus adaptée pour résoudre la question des normalités émergentes suscitées par la mondialisation qu’une perspective dogmatique fondée sur une pyramide. Cette discussion internormative assure un cadre opératoire au pluralisme (p. xxix …

Appendices