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Pour une nouvelle mondialisation. Le défi d’innover est un ouvrage collectif sous la direction de Juan-Louis Klein et Matthieu Roy. Il réunit une vingtaine de contributions issues du troisième colloque international du CRISES, qui s’est tenu en avril 2011. Pluridisciplinaire, multiscalaire, abordant différents contextes nationaux et majoritairement écrit en français, cet ouvrage est ambitieux. Il se donne pour objectif de mettre en évidence les raisons de l’émergence et la diversité des nouvelles dynamiques sociodémocratiques en réponse à la crise économique et aux solutions néolibérales trop souvent considérées comme les seules possibles. L’originalité de l’ouvrage est d’entrer dans ces dynamiques par la mondialisation.

Cet ouvrage est articulé en quatre parties. La première aborde l’innovation sociale face à la crise. Après avoir posé le diagnostic des transformations qui affectent les contextes analysés, les différents auteurs mettent en avant les nouvelles formes d’action collective, qu’elles s’inscrivent dans une perspective macroéconomique ou dans des champs plus spécifiques tels que le travail, l’action syndicale, les services à la personne ou le développement territorial. La seconde caractérise les expérimentations tournées vers le cadre de vie et de travail. Ces expérimentations concernent tout autant les conditions de vie, avec la dimension du vieillissement et de la précarité, que les conditions de travail (emplois atypiques et travailleurs autonomes, entrée sectorielle par les centres commerciaux) ou les dynamiques locales, à travers le logement, la culture et l’art. La troisième partie porte sur la contribution des territoires aux dynamiques innovantes. Elle illustre comment ces territoires résistent aux chocs et mettent en oeuvre des formes de coconstruction du bien commun. La quatrième et dernière partie tente de présenter les soubassements d’un nouveau modèle, ou plus exactement, différentes facettes d’un modèle pluriel.

Combinant, sous différents prismes, analyses théoriques et expérimentations, l’ouvrage met au jour la diversité des dynamiques innovantes dans la mondialisation, sans nier pour autant leurs limites. L’un de ses intérêts majeurs est d’exhiber la relative cohérence de ces dynamiques et donc leur potentiel à faire système. Car le lien principal entre tous ces textes, outre de s’inscrire dans une remise en question radicale du modèle de développement actuel, est de surligner le rôle de la société civile et de l’action collective dans les processus réactifs et créatifs et comme acteurs centraux de cette autre mondialisation. En effet, loin de remettre en cause la mondialisation, ces processus développent une « mondialisation par le bas » qui ne se limite pas à l’activité des « fourmis » laborieuses et exploitées souvent immigrées (Tarrius, 2002), mais se nourrit des aspirations et engagements citoyens. On y retrouve une analyse d’inspiration polanyenne faisant de la réciprocité et de l’engagement un principe d’échange tout aussi important que le marché ou la redistribution.

L’ouvrage n’échappe pas à l’écueil de l’inégale qualité ou intérêt des contributions pour un lecteur donné. Il permet cependant, en près de 400 pages, de comprendre les mutations en cours, de les resituer dans un cadre plus général qui donne à voir que les stratégies néolibérales ne sont pas inéluctables et qu’au-delà de seuls propos militants, une mondialisation plus citoyenne existe. Un résultat qui ouvre de belles perspectives d’approfondissement.