Abstracts
Résumé
Au début de la colonie on trouvait des pâturages communaux dans un tiers à la moitié des seigneuries de la vallée du Saint-Laurent. Peu d'entre eux ont survécu aux vicissitudes de l'histoire et il semble que les cinq pâturages communaux du lac Saint-Pierre comptent parmi les seuls en existence aujourd'hui au Québec. Parmi les facteurs permettant d'expliquer la survivance de ces pâturages communaux, appelés ici communes, les plus évidents semblent relever du domaine de l'environnement. En effet, les communes du lac Saint-Pierre se trouvent dans des terres riveraines, basses et inondables. Elles peuvent profiter ainsi d'une certaine fertilisation naturelle à la suite des inondations printanières et, de par leur position souvent insulaire, semblent ne nécessiter qu'une clôturation limitée. Cependant, à l'examen des documents historiques concernant les communes au Québec depuis l'établissement des seigneuries au XVIIe siècle, il semble que les cinq communes encore en existence au lac Saint-Pierre aient fait l'objet d'un très grand nombre de litiges, entre les seigneurs (avant le régime anglais) ou la corporation des syndics d'une part, et les censitaires ou utilisateurs de la commune d'autre part. À ce titre d'ailleurs, elles comptent parmi les plus contestées. De plus, la cause de ces différends semble presque toujours reliée aux conditions même de l'environnement. En effet, les utilisateurs se sont toujours plaints de la maigre qualité des pâturages et du mauvais drainage des communes. Les inondations n'entraînent pas ces seuls problèmes mais peuvent également, par l'entremise des glaces errantes du printemps, arracher les quelques clôtures limitant les communes. Si de tels problèmes ont été à la source de la disparition des autres communes, pourquoi celles du lac Saint-Pierre — où ces problèmes sont particulièrement aigus — ont-elles survécu ?
Les communes jouent encore aujourd'hui un rôle économique important puisqu'à chaque printemps, près de trois cents agriculteurs provenant d'un hinterland d'une soixantaine de milles de rayon viennent y mener au total près de trois mille bovins, chevaux et moutons. Cette pérennité de l'utilisation des communes ne peut cependant pas seulement s'expliquer par les avantages naturels des pâturages des pays du lac Saint-Pierre. Il semble maintenant évident que des critères d'ordre économique et même socio-psychologique particuliers à la région doivent contribuer à expliquer la survivance, à travers trois siècles d'histoire, de ces formes originales de mise en valeur agricole. C'est ce que des enquêtes actuellement en cours auprès des utilisateurs devraient permettre de mieux mesurer.
Mots-clés:
- Géographie historique,
- culture régionale,
- pâturages communaux Cent-îles du lac Saint-Pierre,
- fleuve Saint-Laurent,
- Québec
Abstract
During the early days of the French regime, common pastures were established on a third to a half of all the seigneuries in the St. Lawrence valley. Only a few have survived and it seems that besides the five commons in the lake St. Peter region very few are still in existence. Among the factors that contribute to explain the survival of these commons, the more obvious ones appear to be related to the local natural environment. The common pastures of lake St. Peter are located on low grounds easily covered by the spring floods. As a result they benefit from natural fertilisation and, because of their generally insular position, only need to be partly fenced. However, the historical
documents concerning common pastures in Québec province indicate a great number of legal disputes between the seigneurs (in pre-conquest days) or the corporation, on the one hand, and the censitaires or farmers making use of their rights on the other. Indeed, these particular commons appear to have been marred by a long series of disputes generally related to problems of the natural environment. The farmers have always complained about the poor quality of the pasture and the inadequate drainage System of the fields. These are not the only problems related to the spring floods, for even the limited fencing heavily damaged by the moving ice blocks tumbling down the St. Lawrence. If such problems have contributed to the abandonment of other commons, why have the commons of lake St. Peter — where these problems are apparently even more frequent — survived ?
The commons of lake St. Peter continue to play an important economic role. Every spring nearly three hundred farmers, from sixty miles around, lead nearly three thousand cattle, horses and sheep to these pastures. The perennial character of these commons cannot be explained solely by the relative advantages of the natural pastures in the low regions bordering the lake. Reasons of an economic nature and even perhaps of a socio-psychological nature, particular to this region, contribute to explain the survival of such original but « outdated » forms of agricultural land use. Survey research, already being carried out among the users, should help solve this question.
Keywords:
- Historical geography,
- regional culture,
- common pastures,
- The Hundred Islands of lake St. Peter,
- St. Lawrence River,
- Quebec
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