Article body

Y a-t-il géographe plus connu et plus lu que Paul Claval? Le parcours de l’homme est impressionnant, tant par le nombre de ses publications que par les tournants marqués de sa réflexion. Dans la formation géographique universitaire, tant du côté francophone qu’anglo-saxon, les références à Claval sont constantes depuis une quarantaine d’années. Aussi le titre de cet ouvrage est-il intriguant: quels défis théoriques et pratiques le géographe va-t-il nous proposer de relever, en éclaireur, pour le siècle qui vient de s’amorcer?

D’entrée de jeu, Claval précise son intention: «Je l’ai fait pour aider les collègues et les étudiants à voir plus clair dans une évolution qui les submergeait parfois, et pour permettre aux non-géographes de saisir ce que notre discipline pouvait leur apporter». Comme d’autres de ses publications auparavant, l’ouvrage a donc une visée de vulgarisation scientifique. En effet, l’auteur propose une vaste synthèse des grandes mutations qui ont profondément modifié le paysage et l’organisation territoriale de la planète. Les transformations de la structure des réseaux de transport et de communication, la transformation de la scène internationale à la suite de l’effondrement de l’empire soviétique et l’émergence d’une crise systématique de la modernité: voilà les trois axes autour desquels Claval articule la nécessaire «nouvelle» lecture géographique du monde, organisée principalement à partir du concept de culture. Cette vaste synthèse sera développée en sept chapitres où les problématiques écologiques, paysagères, urbaines et multiculturelles tiendront le haut du pavé.

Ce type de synthèse incite toutefois à se demander à qui l’ouvrage est vraiment destiné. Les étudiants et les professeurs n’ont-ils pas déjà en main des ouvrages plus substantiels de Paul Claval? Les amateurs de géographie vulgarisée fréquentent-ils vraiment les éditions L’Harmattan? Nous avons eu un peu le sentiment d’avoir déjà lu cet ouvrage quelque part. Au fil des pages, on glisse sur un certain nombre de lieux communs. «Le monde a profondément changé au cours des quarante dernières années», affirme-t-on en introduction (p. 9). La conclusion nous rappelle que «le monde dans lequel nous vivons est en pleine mutation» (p. 321). Il faudra un jour recenser le nombre d’ouvrages qui commencent ou finissent ainsi. Autre exemple: faut-il, encore aujourd’hui, démontrer l’impact de l’automobile sur l’organisation de l’espace au cours du XXe siècle? Bref, le champ couvert par l’ouvrage était sans doute trop vaste pour offrir une vue autre que générale sur les problématiques abordées. Toutefois, pour ceux et celles qui en doutaient encore, Paul Claval rappelle dans ce livre que, oui, les ambitions de la géographie ont changé, et que les approches proposées pour réfléchir sur le monde se sont enrichies et diversifiées, plus particulièrement sous l’angle de la perspective humaniste et culturelle.