Comptes rendus bibliographiques

GOPALAKRISHNAN, Chennat, TORTAJADA, Cecilia et BISWAS, Asit K. (dir.) (2005) Water institutions: Policies, Performance and Prospects. Berlin, Springer, 210 p. (ISBN 3-540-23811-5)[Record]

  • Frédéric Lasserre

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  • Frédéric Lasserre
    Université Laval

Cet ouvrage se veut une étude en profondeur des nombreux enjeux liés à la mise sur pied d’institutions de gestion de l’eau, à leur adaptation aux enjeux locaux de partage et de gestion de la ressource, à leur évolution et capacité d’adaptation à des réalités sociales, politiques, économiques changeantes. Quels sont les facteurs qui font que des institutions de gestion de l’eau sont performantes ? Cette réflexion est certes novatrice. Les auteurs la présentent comme une première, ce qui est exagéré : il y a longtemps que des chercheurs francophones étudient les mécanismes institutionnels de gestion de l’eau, en France en particulier, où le laboratoire que constitue la loi sur l’eau de 1962 a déjà suscité bon nombre de travaux scientifiques. Les trois directeurs de l’ouvrage ont assemblé de nombreux textes présentant un large éventail d’études de cas : gestion de l’eau à Hawaii, au Sri Lanka, en Inde, dans les districts d’irrigation en Chine, dans l’Ouest américain, au Mexique, au Moyen-Orient, en Afrique du Sud. Ces chercheurs sont réputés et leur compétence est reconnue. Les différentes contributions abordent ainsi, tour à tour, les différentes conditions qui ont prévalu lors de la fondation des institutions de gestion de l’eau, les raisons qui ont conduit les fondateurs à opter pour ces arrangements institutionnels ; mais aussi les défis qui se posent, le temps passant et les conditions changeant, à ces institutions : dans quelle mesure sont-elles capables de trouver des solutions afin de faire face à leurs contraintes financières, politiques (allocation entre secteurs concurrents ; protection de la ressource ; adaptation à une structure de la demande en évolution). Les auteurs proposent une définition intéressante des institutions : elles sont comprises, de façon volontairement très large, comme l’ensemble des règlements et lois, des pratiques réglementaires, des administrations responsables de la gestion de l’eau, y compris les usages de transport, de production hydroélectrique ou d’irrigation, considérées en tenant compte des dimensions sociales, économiques, politiques et culturelles de leur cadre de fonctionnement. Les institutions ne se limitent pas ainsi aux seuls organismes, publics ou privés, expressément chargés de l’administration des usages sociaux ou économiques de l’eau : elles comprennent aussi l’ensemble des règles, légales ou non, implicites ou explicites, internationales ou internes à un État, qui articulent et structurent l’ensemble des demandes formulées par les différents secteurs de la demande, agriculture, industrie, agglomérations, transport, production hydroélectrique, loisirs et protection environnementale. Cette approche a l’avantage de pouvoir intégrer un ensemble de composantes plus vaste que le seul aspect administratif, qui souvent ne permet pas de rendre compte efficacement de l’ensemble des facteurs qui entrent en jeu dans les complexes mécanismes de gestion de l’eau. En revanche, elle pose le problème de la capacité des auteurs à proposer, dans le cadre de cet ouvrage, une approche théorique à même de bâtir une vue d’ensemble à partir des différentes études de cas proposées. Et c’est là que le bât blesse. En effet, dès l’introduction, on reste un peu sur sa faim. Lapidaire, l’introduction (2 pages et demi) évoque très sommairement les thèmes de l’ouvrage, mais ne cerne pas suffisamment les enjeux théoriques et pratiques de l’ouvrage. Aucune définition n’est donnée du concept d’efficacité, qui pourtant revient de façon récurrente : qu’entend-on par efficacité pour des institutions, surtout si elles sont définies aussi largement ? S’agit-il d’une approche étroite, leur capacité à faire face à moindre coût à la construction puis à l’entretien d’infrastructures de distribution de l’eau ? De leur capacité à satisfaire le plus large éventail de secteurs de la demande, à défaut de pouvoir susciter l’unanimité ? De leur capacité à allouer la ressource …