Thème 2 - Les défis théoriques et méthodologiques de la géographie

SynthèseLa dialectique du mouvement et des lieux : combiner échelles et récits[Record]

  • Laurent Deshaies

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  • Laurent Deshaies
    Université du Québec à Trois-Rivières

La table ronde sur les défis théoriques et méthodologiques de la géographie a permis la présentation de quatre textes. Ceux-ci soulèvent principalement les problèmes d’analyse de phénomènes dont l’articulation se situe à différents niveaux géographiques. Les auteurs nous convient donc à prendre en compte la complexité de la réalité sociale et géographique. Après une sélection d’éléments majeurs des textes des auteurs, nous ferons état des questions auxquelles la discipline géographique est maintenant confrontée à la lumière de leurs propos. Diane Saint-Laurent souligne l’intérêt des études sur les inondations et les paléo-inondations dans le contexte des sociétés actuelles, plus soucieuses de connaître les impacts de ce phénomène et les risques engendrés. Ce regain d’intérêt depuis deux décennies oblige les chercheurs à combiner plusieurs approches méthodologiques et disciplinaires pour rendre compte de la complexité des inondations, où les facteurs humains doivent être considérés avec les aspects purement physiques et climatiques. En effet, les activités humaines dans un bassin hydro-graphique ont des impacts négatifs à différents échelons géographiques, impacts qui ont tendance à s’accumuler à certains endroits plus vulnérables. Ainsi les chercheurs ont intérêt à considérer les crues dans leur dimension historique pour une meilleure compréhension globale et pour, éventuellement, apporter des correctifs dans le bassin et sur les infrastructures. Ces études sont de plus en plus demandées par les populations qui veulent minimiser les risques et les catastrophes engendrés par les crues et les inondations. Le contexte des changements climatiques semble accentuer cette demande sociale. À cette fin, les disciplines hydrologique et climatique doivent s’appuyer davantage sur l’apport de la géographie et de l’histoire pour faire face à la complexité du phénomène des inondations dans le cadre d’équipes pluridisciplinaires. Diane Saint-Laurent fait aussi état des différentes approches méthodologiques à mettre en oeuvre dans l’analyse des inondations dont la stratigraphie, la sédimentologie, les méthodes pédologiques et paléo-écologiques, et les techniques de datation. La mise en commun de ces approches, méthodes et techniques est essentielle pour la reconstitution des événements récents et plus anciens entourant les inondations et qui en constitue toute la complexité. Bref, Saint-Laurent plaide en faveur d’approches géographiques et pluridisciplinaires pour comprendre les inondations actuelles et anciennes. Mathieu Charron insère ses activités de recherche sur la ségrégation, socioéconomique principalement, et sur les déplacements domicile-travail dans le contexte évolutif de la géographie, surtout quantitative, depuis une cinquantaine d’années.Il souligne la confiance exagérée aux méthodes d’analyse spatiale et la tentation du positivisme logique dans les années 1970 et 1980, auxquels une géographie postmoderne, surtout dans les années 1990, a tenté de faire contrepoids, contrepoids déjà amorcé par les critiques de David Harvey dans Social Justice and the City en 1973. Cette nouvelle géographie est plus sensible aux comportements, à l’intersubjectivité et aux difficultés des modèles réducteurs par leur causalité simpliste et leurs relations linéaires. Charron fait toutefois état des progrès formidables de l’informatique qui « ont stimulé les réflexions sur les systèmes chaotiques, sur l’auto-organisation et sur l’importance des trajectoires historiques ». La géographie quantitative a ainsi mis à nu la complexité de nos sociétés et des phénomènes géographiques. Charron suggère que la recherche doit maintenant se mener « à l’intérieur de cette nébuleuse qu’Edgar Morin appelle le paradigme de la complexité ». Alors que le paradigme analytique repose sur la disjonction (concepts, dimensions, variables), la réduction et la linéarité dans les causes, le paradigme de la complexité propose de réaliser l’inverse en faisant des liens pour ne pas réduire la réalité à quelques unités élémentaires simples. Le paradigme de la complexité peut éclairer des notions centrales en géographie comme l’organisation spatiale et les niveaux géographiques. Charron écrit que « la pensée complexe …

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