Thème 7 - La géographie des nouvelles territorialités

SynthèseCaractérisation de territorialités émergentes[Record]

  • Yaïves Ferland

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  • Yaïves Ferland
    Recherche et développement pour la défense Canada,
    Valcartier

Discuter de la territorialité au sens strict, c’est invoquer la qualité juridique ou politique propre tenant à un objet géographique polymorphe, le territoire, qualité établie selon quelques caractères généralement admis de ce qu’il est (ou pourrait être). Cela dit, on peut admettre que de nouvelles territorialités émergent dans nos sociétés autant que dans le discours des géographes. Cela changera-t-il pour autant les caractéristiques de définition, d’élaboration et de représentation de ce qu’est un territoire ? Ou ne s’agira-t-il pas encore que de métaphores auxquelles emprunteront les diverses sciences sociales dissertant sur leur aspect spatial ? D’après Le nouveau Petit Robert (2004), le territoire est d’abord une « étendue de la surface terrestre sur laquelle vit un groupe humain ». Au sens étroit, il peut n’être que la « surface d’une subdivision administrative » ou d’un espace sous juridiction, même s’il est plus ou moins organisé, déterminé, délimité ou temporaire . Et plus précisément, c’est une « étendue sur laquelle s’exerce l’autorité [physique ou morale] d’une communauté politique ou économique » dont l’existence même dépend (ibid.) ; c’est l’assis de cette communauté qui et, par conséquent, s’y identifie et s’y investit. Normalement, un territoire porte un nom propre, un toponyme, qui s’applique à ses gens et s’adapte à sa géographie. Un territoire est l’élément constitutif et définitoire principal d’une communauté , parce que formant l’extension spatiale et la limite de sa juridiction, sa compétence, sa sécurité, sa capacité de contrôle et d’exercice de ses activités privilégiées. Il est le contenant et le contenu de ses conditions physiques d’existence et de ses ressources. C’est un espace de vie et d’action essentiel pour ses membres qui y réfèrent sans cesse, même si le territoire ainsi reconnu n’en jouxte pas d’autres équivalents. Le territoire et la complexe relation de territorialité sont tout à la fois : enjeu, emprise, appartenance, identité et argument de conflits. Ce qui définit et caractérise un territoire structure en bonne partie la communauté qui l’a fait sien en le déterminant (sens des lieux, limites de référence, finalité, voisinage, etc.), le délimitant (en soi, relativement, par découpage, en partition, ou en front seulement tout en délaissant son arrière-pays ou son intérieur), le démarquant (frontières, architecture), le nommant et même en le défendant au besoin. Toutes des activités géospatiales fort différentes ! Il faut voir le territoire comme polysémique ; c’est un terme porteur et pas seulement évocateur ou métaphorique, qui se distingue bien des qualités physiques propres au terroir, lequel n’est considéré qu’à une échelle locale (sauf au sens absolu). Une dernière définition relève de l’éthologie, soit l’étude du comportement animal : la « zone qu’un animal se réserve et dont il interdit l’accès à ses congénères », le sens de zone référant ici à un contenu spatial, pas seulement à une surface terrestre. Au figuré, c’est « un endroit qu’une personne [ou une famille] s’approprie en y mettant des objets personnels » (ibid.), donc en s’y investissant et en y entretenant une relation spatiale particulière. Autrement dit, en y menant un processus d’élaboration, de prise de conscience ou de réalisation d’une appropriation, à la fois naturelle et délibérée : la territorialisation. Discuter de la territorialité au sens commun, c’est évoquer l’interaction entre la conscience identitaire d’une collectivité humaine, même indéfinie, envers un lieu ou un espace plus ou moins déterminé mais bien compris par occupation, signification ou usage forts . Il s’agit du pouvoir marquant que cette collectivité développe, exerce (ou non) et projette sur un espace au fur et à mesure qu’elle émerge, se constitue, se nomme, …

Appendices