Comptes rendus bibliographiques

KOEBEL, Michel et WALTER, Emmanuelle (dir.) (2007) Résister à la disqualification sociale. Espaces et identités. Paris, L’Harmattan, 214 p. (ISBN 978-2-296-04559-0)[Record]

  • Jules Lamarre

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  • Jules Lamarre
    Université Laval

Publié sous la direction de Michel Koebel et d’Emmanuelle Walter, l’ouvrage Résister à la disqualification sociale. Espaces et identités rassemble neuf études de cas mettant en relief les stratégies que des groupes utilisent pour contrer la disqualification sociale dont ils sont l’objet, directement ou indirectement. Il comprend également une introduction rédigée par les directeurs de la publication, ainsi qu’une conclusion générale signée par Maurice Blanc. Les textes du recueil ont d’abord été présentés au colloque Identité et Espace, tenu du 22 au 24 novembre 2006 à Reims, en France. En introduction, Koebel et Walter signalent que deux axes principaux traversent l’ouvrage. Selon un premier axe, qui inclut les cinq premières études, les acteurs cherchent à se défaire des catégorisations identitaires négatives dont la société les affuble. Ils revendiquent le droit à la différence en mettant de l’avant, avec leurs faibles moyens et ceux que l’on peut mettre à leur disposition, des valeurs qui, en soi, mériteraient le respect. Selon le deuxième axe qui regroupe les quatre autres études, les acteurs ne subissent pas cette fois la disqualification sociale en tant que telle. Cependant, ils veulent défendre leur environnement spatial assailli par des nuisances en usant de stratégies qu’ils justifient en invoquant le « pas dans ma cour ». Au premier chapitre, Djemila Zeneidi soutient que le squat peut servir de territoire à la reconstruction de l’identité de jeunes rejetés par la société qui, par ailleurs, refusent toute prise en charge par les institutions et les autorités. Rappelant qu’en devenant majoritaires dans des espaces physiques restreints qu’ils contrôlent en partie, l’auteure montre qu’ils usent du sentiment d’appartenance au groupe pour faire front commun et prendre place sur l’échiquier social, leur pouvoir bien réel de se faire reconnaître par leurs actions leur faisant l’effet d’une promesse. Pour sa part, Catherine Tourrilhes revendique pour les jeunes en difficulté d’intégration le droit d’user d’espaces intermédiaires tant sociaux que spatiaux, où inventer des manières inédites d’être reconnus et acceptés socialement. Enfin, Annamaria Colombo et Annie Larouche montrent qu’il peut s’avérer prometteur de recourir au dispositif Mendel pour forcer le dialogue entre des univers à réconcilier, soit celui des jeunes marginaux et celui des institutions de la société, comme la police. Ce dispositif consiste à recourir aux échanges par écrit qui permettent d’éviter les blocages auxquels conduisent habituellement les rencontres en face-à-face. Ce dialogue à distance dans le temps et dans l’espace entre gens « qui acceptent de jouer le jeu » pourrait, à long terme, accroître la compréhension de l’Autre. Au second chapitre, Delphine Corteel interroge des éboueurs travaillant pour la ville de Paris afin d’apprendre comment ils s’accommodent de la pratique d’un métier disqualifiant, s’il en est un. Elle découvre que les éboueurs sont avant tout conscients d’exercer une fonction indispensable, ce qui compense pour l’effacement symbolique qu’ils subissent. De plus, ils valorisent leur statut d’agent de la fonction publique qui leur permet de bénéficier des avantages financiers et autres qui l’accompagnent. Ensuite, Anne-Marie Mamontoff présente les résultats de son enquête menée auprès de Tsiganes en France qui a pour but d’aider à comprendre le rôle que jouent leurs représentations du travail sur le maintien de leur identité. Elle montre comment les Tsiganes, et d’abord les femmes, s’ajustent à la marge à des conditions extérieures changeantes de manière à reconduire sans cesse cette séparation du groupe avec l’extérieur qui les caractérise, et à persister dans leur refus du travail salarié. À leurs yeux, celui-ci entame le lien au terrain, à la famille et à la liberté qui sert de fondement à leur construction identitaire. Ces cinq premières études mettent donc l’accent sur les …