Comptes rendus bibliographiques

BRASSARD, Diane et PROULX, Marc-Urbain (2011) Un juste prix pour l’énergie du Québec ? Québec, Presses de l’Université du Québec, 181 p. (ISBN 978-2-7605-3163-5)[Record]

  • Markus Herrmann

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  • Markus Herrmann
    Département d’économique, Université Laval

Diane Brassard et Marc-Urbain Proulx présentent dans cet ouvrage un survol de la production et de la consommation des différentes formes d’énergie entre 1990 et 2008 au Québec, ainsi qu’un portrait du potentiel énergétique de la province. L’ouvrage se divise en deux parties, dont la première sert surtout à rapporter de nombreuses statistiques sur l’énergie. La présentation de ces statistiques reste cependant descriptive et non analytique. À titre d’exemple, les auteurs rapportent à la page 41 une baisse annuelle de la consommation du gaz naturel de 0,8 % en affirmant sans autre précision que « [l]a hausse du prix du gaz naturel y est certainement pour quelque chose ». Ce livre publié en 2011 ne fait pas le constat que la seule centrale au gaz du Québec, située à Bécancour, n’est plus en fonction depuis 2008. Hydro-Québec a préféré développer des nouveaux projets hydroélectriques plutôt qu’au gaz même si cela implique des coûts par kWh supérieurs. D’un point de vue économique, cette gestion doit être qualifiée de destructrice de richesse pour l’ensemble des Québécois « aujourd’hui », alors les auteurs la qualifieraient plutôt de nécessaire afin de cheminer vers une indépendance énergétique « demain » face aux ressources non renouvelables comme le gaz. Dans la seconde partie de l’ouvrage, les auteurs prônent de manière sous-jacente l’indépendance énergétique grâce au développement d’énergies renouvelables. Cette indépendance n’est pas un objectif économique en soi, et ce, même dans un contexte de risque géopolitique ou de pollution résultant d’énergies fossiles. Les décennies récentes ont montré que la quantité d’énergie produite et consommée au Québec et ailleurs dans le monde est fonction de l’évolution des prix ainsi que du contexte réglementaire et institutionnel. Il en sera de même à l’avenir. Par conséquent, la poursuite de l’objectif d’indépendance énergétique peut s’avérer très coûteuse aujourd’hui et demain si les conditions nécessaires au Québec et ailleurs ne sont pas réunies. Les auteurs suivent une approche protectionniste voulant qu’une balance commerciale (BC) négative au Québec – et accentuée par les importations onéreuses d’énergie fossile – représente un problème en soi (p. 66). Ils sous-entendent aussi que l’élimination de la BC négative devrait être facilitée par un passage du Québec à l’indépendance énergétique. Cependant, dans le contexte technologique et politique actuel, l’importation nette d’énergie non renouvelable représente plutôt l’option la moins onéreuse pour subvenir aux besoins énergétiques du Québec. Même si les auteurs rapportent le potentiel des autres sources d’énergie renouvelable, ils restent muets en ce qui a trait aux coûts de leur fourniture, et ainsi à l’offre, d’où l’impact limité de l’ouvrage. Ils omettent aussi d’analyser les aspects économiques qui en déterminent la demande. La demande à laquelle ils font référence dans ce contexte proviendrait d’entreprises qui s’installeraient au Québec en quête de l’énergie verte à un « prix concurrentiel (p. 107) ». C’est aussi avec ces entreprises que « le Québec sera[it] alors en force pour négocier un juste prix pour ses abondantes énergies vertes (p. 107) ». De telles affirmations relèvent du paternalisme ou de la planification centrale, qui donnent d’ailleurs le ton à cette seconde partie de l’ouvrage. Une analyse économique approfondie sur la mobilité des entreprises ainsi que sur l’éventuel avantage comparatif du Québec par rapport à d’autres pays dans le domaine des énergies renouvelables serait nécessaire pour valider ou invalider les propos des auteurs. Par ailleurs, il importe de constater que cette analyse devrait tenir compte de la réglementation environnementale des partenaires commerciaux du Québec, pour que celui-ci évite le piège de fournir un environnement plus propre sans recevoir de compensation, diminuant ainsi le bien-être des Québécois aujourd’hui et demain. Autrement dit, ignorer le …