Note liminaire

Routes touristiques : lire le passé, lier l’avenir[Record]

  • Pascale Marcotte and
  • Laurent Bourdeau

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Le tourisme et la route sont intimement liés. Que l’on voyage pour visiter et revisiter les hauts lieux ou, au contraire, que l’on cherche à sortir des sentiers battus pour rompre avec le quotidien, c’est toujours une route, petite ou grande, qui nous y mène. À une époque où la mobilité croît toujours davantage – les statistiques de déplacements des touristes internationaux fracassant sans cesse des records depuis 60 ans nous le démontrent aisément –, la route, qu’elle soit terrestre, aérienne, nautique ou ferrée, est empruntée pour des raisons multiples. La présence de la route se retrouve dans la littérature, dans l’histoire, dans le monde virtuel, mais elle s’inscrit, aussi et surtout, dans le paysage. La route, qu’elle permette la réalisation d’une quête ou d’une aventure, qu’elle soit empruntée par les conquérants ou les pèlerins, apparaît dans la littérature sous différentes formes, et elle a tracé la voie tant aux explorateurs qu’aux touristes modernes. Par exemple, certaines voies très anciennes, même peu empruntées aujourd’hui, continuent d’être visibles sur le territoire. La terre y a tant été tassée que la végétation n’y revient pas. La route possède donc une part symbolique, part certainement aussi importante que sa part physique. La route permet l’évasion, le dépaysement, la progression. Univers plus grand que la somme de ses parties, la route est relation, lien, dont le cheminement permet, à l’instar d’une narration, de comprendre son environnement, mais aussi de laisser dans l’ombre, ou à la marge, une part de non-dit. L’inscription de la route dans un paysage semble ainsi fixer le temps dans l’espace. La route permet de visualiser la voie à suivre pour atteindre le but du voyage. Elle permet de représenter l’accessibilité d’un territoire qui autrefois était inatteignable. La présence de la route dans l’espace illustre le passage du temps, même si reprendre la même route ne garantit aucunement de vivre le même voyage. Aujourd’hui, les routes se multiplient dans le monde du voyage. Routes aériennes, terrestres, maritimes ou pédestres, elles reflètent des pratiques commerciales adoptées par les touristes et développées par les acteurs de l’industrie touristique. Dans ce cadre, l’analyse de l’aménagement d’une route touristique permet de comprendre les liens entre les dimensions physiques, commerciales, historiques et politiques d’une route. Le texte de Venzal, à travers l’exemple de la Route géologique transpyrénéenne, nous permet ainsi d’en suivre la genèse et d’en évaluer les plus récents développements sur le plan des équipements qui la constituent. Comme une même route peut lier plusieurs régions et plusieurs pays, elle confronte et remet nécessairement en question aussi les logiques territoriales et de partenariat. Pour les acteurs de l’industrie, la route touristique est en effet non seulement un « produit », mais également un outil d’organisation de l’espace et un outil de communication. De communication entre les partenaires, afin de faciliter la mutualisation des investissements, mais aussi pour mieux se positionner dans l’esprit du touriste. Bien aménagée, la route peut donc devenir un produit et un argument de vente pour aiguiser la curiosité des touristes et prolonger leur séjour. Une route prend place dans l’espace, un espace qu’elle organise, qu’elle sélectionne et qu’elle sépare. En effet, la route peut être considérée comme un lieu en elle-même, ou comme une succession de lieux. En créant un ensemble, elle unit mais, du coup, marginalise. Ces lieux exclus sont, dès lors, forcés à d’autres associations pour attirer des flux touristiques, comme le montre le texte de Bernier sur ces espaces marginalisés. La route est donc un moyen de relier, mais aussi de diviser. Elle crée ou entretient des frontières : physiques, temporelles, administratives. Alors que certaines routes semblent éternelles, …

Appendices