Article body

Introduction

Les nouveaux outils technologiques ont grandement transformé la façon de contester et de manifester son mécontentement auprès des différentes formes de pouvoir. Bien que des groupes d’intérêt utilisent ces technologies légalement, on assiste de plus en plus à des dérives qui ont des conséquences importantes et qui causent de grands torts aux gouvernements, aux entreprises et aux individus. Le groupe Anonymous est un exemple de groupe prônant des valeurs altermondialistes, dont une fraction recourt à des moyens radicaux pour obtenir gain de cause. Pourtant, plusieurs individus peuvent s’identifier au mouvement sans y prendre une part active. Considérant qu’il est difficile de se faire une idée précise de ce mouvement et que très peu de recherches existent quant à sa dynamique, la présente recherche a pour principal objectif de brosser le portrait des communautés en ligne s’identifiant à Anonymous au Canada.

La première partie de cet article s’intéressera aux études antérieures ayant porté sur le concept de communauté virtuelle. Nous verrons ensuite comment les individus se servent de ces communautés, qu’elles soient légitimes ou non. Nous préciserons les usages des communautés virtuelles et des médias sociaux pour les groupes d’activistes, et particulièrement Anonymous. Dans la deuxième partie, nous présenterons la méthodologie utilisée pour analyser les publications de sept groupes s’identifiant à Anonymous au Canada. Les principales fonctions des publications partagées sur les médias sociaux ainsi que les thèmes abordés formeront la section des analyses. Finalement, les résultats seront mis en relation avec les connaissances précédentes.

Revue de la littérature

Le terme « communauté en ligne » ou « communauté virtuelle » est souvent utilisé comme un synonyme de « groupe en ligne » alors que celui-ci n’a pas les mêmes caractéristiques. Les chercheurs ont tenté de déterminer les facteurs qui distinguent les communautés des autres groupes (Martinviita, 2016). Par exemple, un quartier dans une ville réunit des habitants qui interagissent et qui partagent plusieurs éléments en commun. Par contre, ce regroupement physique ne garantit pas la présence des caractéristiques d’une vraie communauté (Wellman, 1996). Une communauté est généralement un groupe de personnes auquel un individu se rattache et inclut deux types de relations : les personnes ayant plusieurs rôles, tels les membres de la famille, et les personnes tenant des rôles plus spécialisés, comme les collègues de travail (Hogan, 2008 ; Wellman et Worthley, 1990). Chua, Madej et Wellman (2011) rapportent que dans la société moderne, les fonctions des communautés se spécialisent davantage dans un domaine spécifique, et comme leur nombre de membres grandit, les spécialisations se diversifient. Les communautés sont définies comme étant des groupes sociaux qui incluent un aspect psychologique comme de l’attachement, ou un aspect culturel tel que des regroupements sur la base de points communs (Wilson, 2006). La définition de « communauté » inclut également la notion d’interaction à long terme (Chua et al., 2011), de développement de la relation (Wellman et Gulia, 1999) et d’engagement (Parks, 2010). Le terme « communauté » indique la présence d’un sentiment permettant de définir l’expérience comme étant celle de l’appartenance à cette communauté. Certains chercheurs ont déterminé qu’il s’agissait d’un sentiment d’unité (togetherness) (Preece, 2000) ou encore, d’identité partagée (shared identity) (Baym, 2010 ; Chayko, 2008). Les communautés, en plus de réunir des individus autour d’un sujet, accomplissent plusieurs fonctions. Par exemple, elles sont formées pour obtenir des conseils ou du soutien sur des sujets précis (Fischer 1982 ; Litchman, Rothwell et Edelman, 2018 ; Welbourne, Blanchard et Wadsworth, 2013), pour partager le savoir et développer les connaissances (Erickson, 1996 ; Sahut, 2014) et pour partager des intérêts communs (Blanchard, 2004 ; Roquais-Bielak, 2004).

Les résultats des travaux sur les communautés virtuelles démontrent que les caractéristiques d’une communauté sont les mêmes lorsque celle-ci prend forme virtuellement (Blanchard et Markus, 2004 ; Martinviita, 2014 ; Wellman, 1996). Alhabash, Chiang et Huang (2014) décrivent les différentes motivations qui sous-tendent l’utilisation et le développement des communautés virtuelles. D’abord, certaines communautés en ligne présentent un objectif cognitif d’acquisition de l’information et visent à informer sur certains sujets, alors que d’autres servent seulement un objectif de divertissement. Ensuite, certaines communautés souhaitent favoriser le développement de relations sociales, et d’autres visent à partager du contenu habituel pour passer le temps. Finalement, les auteurs rapportent que certaines communautés virtuelles englobent toutes les activités liées à l’identité et donc qui visent l’expression de l’individualité ou la recherche de reconnaissance.

Les organisations présentes dans les médias sociaux (au sein de communautés) sont plus susceptibles de partager des messages communiquant de l’information ainsi que des messages qui encouragent l’engagement des adhérents en présentant des occasions de dialogue (Jansen, Zhang, Sobel et Chowdury, 2009 ; Rybalko et Seltzer, 2010). Dans leur étude sur l’utilisation des médias sociaux par des organisations à but non lucratif, Lovejoy et Saxton (2012) soulèvent que les messages qui sont échangés ont plusieurs fonctions qui peuvent être regroupées en trois grandes catégories. D’abord, les organisations semblent partager des informations afin d’informer leur communauté de sujets liés aux intérêts du groupe. Afin de favoriser le dialogue entre les membres, certains types de publications servent à construire la communauté. Les auteurs incluent les publications associées à la promotion du groupe ainsi que celles sollicitant le dialogue en demandant l’avis des membres. La dernière fonction de l’utilisation des médias sociaux présentée dans cette étude est l’action. Il y a alors recours à des publications qui sollicitent la participation à des événements ou à faire des gestes concrets visant à répondre aux intérêts du groupe.

Les réseaux sociaux sont aussi utilisés par des groupes d’individus visant à enfreindre les lois et règlements. Choo (2008) détermine trois types de groupes ayant cet objectif à travers les technologies de communication : 1) les groupes criminels organisés traditionnels ; 2) les groupes de cybercriminels, qui se consacrent exclusivement aux crimes commis en ligne ; et 3) les groupes d’individus à motivations idéologiques ou politiques qui profitent des technologies pour faciliter leur comportement criminel (voir aussi Farwell [2014] pour l’utilisation des médias sociaux par les terroristes).

Les plateformes des médias sociaux sont aussi un moyen pour les activistes provenant de différents systèmes politiques de développer et d’entretenir leur mouvement (Youmans et York, 2012) et ainsi servir des objectifs politiques de réforme, de révolution et de lutte contre la démocratie (Iskander, 2011 ; Youmans et York, 2012). Lynch (2011) expose d’ailleurs, dans son étude sur l’utilisation des médias sociaux par les mouvements activistes, que les réseaux facilitent la coordination du mouvement social en créant des cascades d’informations qui renforcent la perception qu’ont les manifestants de la probabilité de succès du mouvement. L’auteur ajoute que les réseaux sociaux augmentent les coûts de la répression par les régimes en place et servent de vitrine grâce à la diffusion d’informations aux publics de la région, mais également à l’international. Les plateformes permettent aux individus de communiquer sans être filtrés par le journalisme traditionnel (Cardon et Granjon, 2010).

Anonymous

Le groupe Anonymous est décrit par Milan (2013) comme étant une communauté en ligne dont les membres se livrent à des activités perturbatrices en utilisant des techniques électroniques de désobéissance civile pour soutenir leurs revendications telles que la liberté d’expression sur le Web. Il aurait vu le jour en tant que groupe ad hoc d’un forum de discussion en ligne qui traitait de blagues politiquement incorrectes. Les membres s’opposent à des lois qu’ils jugent injustes, ou encore à des entreprises et individus corrompus en utilisant des méthodes qui frôlent et parfois franchissent la limite de la légalité (Coleman, 2012). En exploitant les caractéristiques techniques de cette infrastructure, leurs gestes illégaux comprennent entre autres des tactiques de perturbation électronique, la désobéissance civile en ligne, l’auto-organisation des mouvements dans le monde physique comme des manifestations, la création autonome d’infrastructures telles que des plateformes Web, le piratage de logiciels et de matériel informatique et la fuite d’informations confidentielles (Klein, 2015).

Toutefois, il demeure difficile de faire une description précise et d’en arriver à un consensus quant à ce qui caractérise le groupe. Cette difficulté peut découler du fait que l’organisation n’a aucun chef et qu’elle peut prendre diverses formes (Badò, 2014 ; Milan, 2013). Par le fait même, au fil des années, les actions et les causes défendues par le groupe ont varié, allant d’attaques anecdotiques envers certains individus à la prise de position contre l’Église de scientologie, en passant par la coordination de manifestations visant à dénoncer des actions gouvernementales (Coleman, 2014).

Pour le mouvement, l’organisation d’une communauté se réalise au moyen de « revendications identitaires », c’est-à-dire des actes qui concernent ce que la communauté est ou fait (Dobusch et Schoeneborn, 2015). Anonymous défend principalement la libre circulation de l’information, sa gratuité ainsi que sa décentralisation (Beyer, 2014). Malgré l’accent mis sur la liberté d’expression, le groupe a démontré à répétition qu’il ne s’agit pas de sa priorité (Coleman, 2013). En effet, les groupes s’identifiant à Anonymous dénoncent un large éventail de causes, allant de la dénonciation de viols jusqu’au soutien à des communautés pendant le printemps érable de 2012 (Coleman, 2013). Cette pluralité de sujets (voir McGovern et Fortin, 2019) montre à quel point Anonymous a plusieurs visages et qu’il y a sans doute plusieurs différents mouvements à l’intérieur de celui-ci. D’ailleurs, Uitermark (2017) affirme que les « croyances partagées » et les « solidarités » ne sont pas une partie essentielle du mouvement Anonymous tel qu’il est décrit dans la littérature sur les mouvements sociaux. Les membres sont conscients que l’organisation poursuit des objectifs parfois radicalement différents et qu’elle n’a pas d’idéologie fondamentale ni ne représente un intérêt, une valeur ou une identité en particulier.

Problématique et objectifs

Anonymous représente donc un mouvement, ou du moins une idéologie ou philosophie, se traduisant par un regroupement qui semble très décentralisé. La création de communautés virtuelles sur les médias sociaux permet aux adhérents de ce mouvement de se regrouper, de partager et d’échanger sur les objectifs du groupe. Ceci permet une meilleure administration de l’information et une meilleure centralisation de celle-ci. Les communautés virtuelles sur les médias sociaux permettent d’étudier les sujets auxquels le groupe se rattache puisque l’information est transmise publiquement et provient directement des membres. Il est donc possible d’en connaître plus sur les champs d’intérêt et objectifs des membres qui se rattachent à ce mouvement. Ainsi, pour bien le comprendre, il faut multiplier les observations, ces dernières permettant ultimement de découvrir les points communs et les distinctions des sous-groupes qui viennent se greffer à la communauté.

Les initiatives de mobilisation d’Anonymous afin d’atteindre ses objectifs entraînent des réactions dans la population et chez ceux qui les « suivent ». L’une des façons de mesurer cet impact est d’observer la teneur des propos et la mesure dans laquelle leurs actions arrivent à convaincre et à influencer l’opinion publique à travers les médias sociaux qu’ils entretiennent. À notre connaissance, aucune étude ne s’est intéressée à la nature des propos partagés par ces groupes. En prenant les publications produites sur sept pages Facebook s’identifiant à Anonymous au Canada, il sera possible de découvrir non seulement le type de discours que tiennent les administrateurs des pages, mais certainement les réactions que celui-ci provoque. Par exemple, cherchent-ils à partager leur opinion ou plutôt à inciter les membres à commettre des actions concrètes ? De plus, puisque la question des enjeux défendue par le groupe est au coeur de la définition d’un mouvement activiste, il y aura aussi matière à explorer les thèmes qui sont abordés dans les publications. Par exemple, retrouve-t-on des publications portant plutôt sur l’environnement ou sur la politique ? L’ensemble de ces analyses permettra de mieux comprendre l’impact médiatique et la teneur des discours partagés au sein de ces groupes encore méconnus.

De plus, considérant que très peu d’études sont réalisées à partir des informations accessibles publiquement sur Facebook[2], la présente recherche se veut également une occasion de présenter une méthode d’analyse permettant de mieux connaître les différentes communautés qui s’y trouvent.

Méthodologie

Données

Facebook offre la possibilité aux entreprises ainsi qu’à tout autre type de regroupement (équipe, groupe, club, etc.) de créer des pages. Par ces pages, les membres d’une communauté peuvent échanger entre eux dans une section réservée aux publications. Selon la configuration préconisée par les administrateurs de la page, ces publications pourront soit être créées par n’importe quel utilisateur de Facebook ou limitées à eux-mêmes. Les publications peuvent prendre la forme d’une image, d’un texte, d’une vidéo, ou encore d’une combinaison de ces éléments. Selon le type de publication, les individus interagiront soit en partageant la publication sur leur propre fil d’actualité, en indiquant qu’ils aiment son contenu (Like), ou bien en répondant par un commentaire (Kim et Yang, 2017).

Comme l’indiquent Holtz, Kronberger et Wagner (2012), les forums de discussion offrent l’avantage aux chercheurs de découvrir une communauté par son discours, cet avantage étant d’autant plus important lorsque le groupe en question soutient une idéologie « sensible » et dont les membres peuvent être réticents à participer à des entretiens. Afin de découvrir ce qui caractérise les communautés s’identifiant à Anonymous au Canada, sept pages Facebook ont été sélectionnées. Elles l’ont été dans un premier temps en raison de la mention explicite du terme « Anonymous » dans leur titre. Dans un deuxième temps, une représentation canadienne a été préconisée. Puis, les pages avec le plus grand nombre de mentions « J’aime » (Like) au total ont été sélectionnées. Lorsque possible, les deux groupes les plus populaires de chaque province ont été retenus[3] (voir Tableau 1).

Matériel

Les publications produites sur ces pages par les administrateurs ont été récoltées grâce au programme Facepager[4]. Cet outil envoie des requêtes à l’interface API (application program interface) de Facebook afin d’en extraire les données publiques. La collecte a été réalisée entre le 19 mars 2018 et le 20 juillet 2018. Par la suite, 20 publications de chaque page ont été inspectées de façon manuelle afin de vérifier leur concordance avec les informations récoltées, lesquelles se sont avérées conformes au site original. Soulignons que les informations récoltées contiennent ce qui était disponible sur la page au moment de la collecte.

L’outil permet de connaître les détails relatifs à la forme que prend chaque publication : (1) si elle a été créée pour promouvoir un événement ; (2) les liens menant vers un site Web ; (3) si elle contient des photos ; (4) si elle contient une vidéo ; (5) si les créateurs y ont ajouté des commentaires personnels ; (6) et finalement, la date de sa création. Le Tableau 1 présente un sommaire des caractéristiques des publications qu’on retrouve sur les sept pages.

Tableau 1

Caractéristiques des publications se trouvant sur les pages d’Anonymous

Caractéristiques des publications se trouvant sur les pages d’Anonymous

Note : Trois publications de type « note » ont été retirées du tableau.

-> See the list of tables

De plus, l’outil permet de connaître le nombre de « J’aime », le nombre de partages ainsi que le nombre de commentaires qu’ont suscités les publications. Le Tableau 2 présente le nombre moyen de chacun de ces indicateurs de réactivité par publication.

Tableau 2

Nombre moyen de « J’aime », de partages et de commentaires par publication

Nombre moyen de « J’aime », de partages et de commentaires par publication

-> See the list of tables

Les publications d’Anonymous du Québec sont celles qui suscitent le plus de réactions, avec un nombre moyen de 29 « J’aime » et de 55 partages. Ces nombres sont de loin les plus élevés alors que la deuxième page qui suscite le plus de réactions est celle de Québec Anonymous Médias, ayant en moyenne 12 « J’aime » et 16 partages par publication. À l’opposé, les publications qui sont diffusées par les administrateurs de la page Anonontario sont celles qui entraînent le moins de réactions, avec un nombre moyen de 1 « J’aime » et 1 partage par publication.

Pour la sélection des publications les plus populaires, trois mesures de popularité ont été utilisées : le nombre de « J’aime », le nombre de partages ainsi que le nombre de commentaires. Cette diversité permet de mesurer plusieurs aspects d’une réaction que peut engendrer une publication. Par exemple, les publications qui demandent une opinion sont plus susceptibles d’engendrer des commentaires, alors que les publications qui contiennent uniquement une photo risquent de s’attirer plus de « J’aime » ou de partage (Kim et Yang, 2017). Pour chacune des mesures, les 20 publications ayant reçu le plus haut taux ont été sélectionnées sur chaque page pour un total de 60 publications par page (420 publications sélectionnées). Puisque plusieurs publications n’étaient plus disponibles au moment de l’analyse et qu’une même publication pouvait être simultanément la plus aimée, la plus partagée et la plus commentée, le nombre de publications a été de 294 pour l’analyse[5].

Méthodes d’analyse

Afin de déterminer les fonctions et les thèmes des publications, le texte et les images de celles-ci ont été pris en compte. L’analyse thématique permet de mieux comprendre la signification des publications en comparaison de ce qui serait offert si les termes les plus fréquents étaient simplement quantifiés (Altheide et Schneider, 2013). De plus, elle permet de comparer aisément les données ayant été codifiées (Vaismoradi, Turunen et Bondas, 2013).

Afin de former les catégories, une approche à la fois déductive et inductive a été utilisée. Dans un premier temps, certains types de fonctions des publications ont pu être déduits des travaux précédents portant sur le rôle des messages découlant des échanges en ligne. Dans un même ordre d’idées, les thèmes dérivaient des travaux sur les principaux enjeux que soutient Anonymous. Ensuite, nous avons utilisé une approche inductive pour les publications qui n’entraient dans aucune des catégories prédéterminées (Hsieh et Shannon, 2005 ; Vaismoradi et al., 2013). Il était alors question d’observer les publications se trouvant dans la catégorie « autre » et, en se basant sur le contenu, de former de nouvelles catégories non envisagées au départ. Ainsi, une fois la première classification établie, les publications se trouvant dans la catégorie « autre » ont été analysées afin de vérifier si des regroupements pouvaient être réalisés et mener à la création de nouvelles catégories. En somme, toutes les publications ont été classées par deux codeurs afin d’assurer la constance de la codification. En cas de disparité, le groupe de codeurs discutait pour arriver à un consensus.

Les types de publications

Afin de déterminer la fonction d’une publication, les catégories établies par Lovejoy et Saxton (2012), Naaman et al. (2010) ainsi que Java, Finin, Song et Tseng (2007) ont servi de point de départ. Les catégories suivantes ont été utilisées :

  • Partage de l’information : à toute publication qui avait pour unique objectif de transmettre de l’information. Cette information devait venir d’une source fiable telle que les grands réseaux de journalisme traditionnels et devait présenter une certaine objectivité dans la façon de la communiquer. Par exemple, si l’auteur de la publication émettait une opinion quant au contenu de l’article de journal, cela rendait la publication non objective et elle ne visait plus seulement à informer. La publication n’était donc pas classée dans cette catégorie.

  • Promotion du groupe[6] : présence d’éléments liés à l’image d’Anonymous et la publication n’avait pas une fonction couverte par les autres catégories. Par exemple, c’était le cas lorsque les administrateurs publiaient des photos d’individus masqués avec l’emblème d’Anonymous. Ces publications étaient parfois accompagnées de quelques lignes de texte rappelant les idéaux du groupe.

  • Opinion recherchée : le texte indiquait clairement une question sur les sujets d’intérêt du groupe et l’opinion des membres était sollicitée.

  • Opinion partagée : l’auteur du message indiquait une opinion arrêtée sur un sujet.

  • Engagement[7] : sollicitation de gestes plus actifs tels que la participation et la promotion de manifestations, ou encore un appel à signer une pétition.

  • Dénonciation : publication d’enjeux tels qu’une nouvelle loi qui allait à l’encontre des droits qu’ils revendiquaient. Cette catégorie incluait également les publications qui visaient à dénoncer un individu ayant commis un geste répréhensible tel qu’une agression sexuelle.

Après les premières observations des types de publications, nous avons relevé deux nouvelles catégories que nous avons ajoutées.

  • Humoristique : des publications qui visaient exclusivement à faire rire et qui ne pouvaient pas être classées dans les autres catégories.

  • Messages positifs : caractérisés par des images ou paroles inspirantes qui parlaient de l’amour ou du bonheur. Pour entrer dans cette catégorie, le message devait être positif, viser à faire du bien et ne présenter aucune information objective ou opinion.

Lorsque le codeur n’était pas certain que le sujet avait un lien avec le mouvement, l’ensemble des codeurs se sont réunis et, s’appuyant sur des lectures concernant le mouvement, ont procédé à la classification.

Les thèmes des publications

Afin de déterminer les différentes catégories de thèmes abordés dans les publications du groupe, une première observation qualitative a été effectuée afin de déterminer ceux qui revenaient le plus souvent et qui allaient former les catégories les plus représentatives. Le thème de la politique revenait le plus souvent, créant ainsi la première catégorie. Ce thème incluait les publications concernant les lois et les acteurs politiques. Ensuite, le thème de l’intervention policière était abordé fréquemment et concernait toutes les publications portant sur les actions posées par les policiers. La religion était également un thème récurrent, formant ainsi la troisième catégorie. Les publications pouvaient être favorables ou défavorables à une certaine religion et la catégorie incluait toutes les religions. Les membres du groupe abordaient également la maltraitance animale, englobant tous les messages en lien avec les animaux et leur souffrance. Les droits fondamentaux formaient la cinquième catégorie. Cette catégorie incluait par exemple la défense de la liberté d’expression, de la liberté de réunion et d’association, et le respect de la vie privée. Le groupe se trouvait également à faire des publications qui allaient à la défense des personnes plus vulnérables, c’est-à-dire les enfants, les minorités visibles, les personnes handicapées, ou encore les femmes maltraitées. Le groupe faisait des publications sur l’environnement, parlant de sa protection et de l’importance d’en prendre soin. Une dernière catégorie, nommée « Autres », a été créée afin de classer les autres publications dont les thèmes ne revenaient que rarement et qui ne pouvaient pas être classées dans les catégories déjà mentionnées. Par exemple, une publication parlant d’une nouvelle technologie cinématographique était classée dans cette catégorie.

Résultats

Après avoir relevé les différentes catégories de types et de thèmes des publications, le contenu des sept pages a été analysé en classifiant les publications dans les catégories.

Les types de contenu des publications

Les 60 publications les plus populaires pour chacun des groupes ont été étudiées et classées par type de message (Tableau 3). Les proportions du tableau doivent être lues en ligne puisqu’il s’agit des proportions pour chacune des pages de façon indépendante.

Le type de message le plus souvent publié par l’ensemble des groupes est celui visant à dénoncer une situation (37,9 %). Le deuxième type de message le plus populaire regroupe les publications qui font la promotion du groupe (14,5 %) suivi des informations partagées (10,6 %). Pour ce qui est des résultats au sein des groupes, Anonymous du Québec se démarque par le nombre de publications visant à partager son opinion (32,6 %), mais également par son contenu humoristique (16,3 %) et pour ses publications qui visent à rechercher l’opinion des autres (14 %). Anonymous Québec a un contenu visant principalement la dénonciation (79,2 %). Le groupe Anonymous Ontario se distingue par la quantité de publications partageant des messages positifs (20,4 %). Anonymous West-Coast et le groupe d’Halifax se distinguent par le fait qu’ils partagent beaucoup de contenu visant le partage d’informations plus objectives telles que des articles de journaux (24,4 % ; 20 %) ainsi que par leurs publications visant à faire la promotion du groupe (24,4 % ; 20 %). Anonymous West-Coast est également plus axé sur les publications engageantes que les autres groupes (17,8 %), suivi de près par Anonymous Toronto (15,7 %).

Les thèmes des publications

Une catégorisation des thèmes de ces publications a ensuite été déterminée avec les huit thèmes retenus précédemment. Le thème qui revenait le plus souvent était la politique (34,5 %) ainsi que les sujets « autres » regroupant des objets tels que la musique, la mode, la santé, etc. (23 %). Comme dans le Tableau 3, les proportions du Tableau 4 doivent être lues en ligne puisqu’elles concernent chacune des pages de façon indépendante.

Tableau 3

Synthèse des fonctions des publications les populaires des comptes Facebook d’Anonymous sélectionnés

Synthèse des fonctions des publications les populaires des comptes Facebook d’Anonymous sélectionnés

-> See the list of tables

Tableau 4

Synthèse des thèmes des publications les plus populaires des comptes Facebook d’Anonymous sélectionnés

Synthèse des thèmes des publications les plus populaires des comptes Facebook d’Anonymous sélectionnés

-> See the list of tables

Les administrateurs d’Anonymous du Québec produisent beaucoup de publications portant sur des sujets qui sortent des revendications habituelles d’Anonymous (60,5 %). Les membres de l’autre groupe originaire du Québec, Quebec Anonymous, touchent davantage la politique (66,6 %). La même observation peut être faite auprès des groupes de l’Ontario : Anonymous Toronto verse plutôt dans la politique (62,7 %) alors qu’Anonymous Ontario obtient beaucoup de réactions avec ses publications concernant des sujets divers (28,6 %), mais aussi la politique (28,6 %). Anonymous Halifax partage un peu de contenu divers (31,1 %), mais suscite beaucoup plus de réactions avec ses publications visant à dénoncer des situations traitant des droits des personnes plus vulnérables (33,3 %). Les pages des provinces de l’Ouest obtiennent des réactions pour du contenu similaire, c’est-à-dire politique (22,4 % et 31,1 %).

Le contenu politique peut englober plusieurs aspects différents. Nous avons donc subdivisé cette catégorie afin de mieux décrire son contenu et le résultat apparaît au Tableau 5.

Le contenu politique qui est le plus apprécié de l’ensemble des groupes partage des publications qui s’opposent au gouvernement. D’ailleurs les groupes Anonymous WEST COAST (72,7 %) et Halifax Nova Scotia Anonymous (75 %) sont ceux qui partagent le plus ce genre de publications. Les groupes du Québec publient de façon marquante sur le capitalisme (57,1 %). Le groupe de l’Ontario parle davantage de terrorisme que les autres groupes (28,6 %). Les groupes de l’Ouest ainsi que le groupe de l’Ontario démontrent un plus grand intérêt pour la reprise du pouvoir par le peuple (27,3 % ; 28,6 % ; 21,4 %). Finalement, Halifax Nova Scotia Anonymous partage plus de publications en lien avec la guerre que les autres groupes (25 %).

Mesures de popularité

Une autre contribution importante des données se situe au niveau de la mesure du contenu étudié. Les publications faisant le plus réagir la communauté ont été observées puisque celles-ci sont censées représenter ce à quoi les membres adhèrent. Il était donc nécessaire de comparer les trois mesures pour s’assurer de leur validité.

Tableau 5

Synthèse des sous-catégories politiques

Synthèse des sous-catégories politiques

-> See the list of tables

Figure 1

Niveau d’activité lié au type de publication pour l’ensemble des groupes

Niveau d’activité lié au type de publication pour l’ensemble des groupes

-> See the list of figures

La Figure 1 montre que les opinions et les informations partagées ainsi que les dénonciations sont le type de publications qui suscite le plus de réactions. De manière générale, le type de publications générant le plus d’activité pour l’ensemble des groupes s’identifiant à Anonymous au Canada partage du contenu lié à la dénonciation de situations, des informations, ainsi que des opinions, de même que beaucoup de contenu visant à promouvoir leur groupe. Cependant, le niveau de publications de type « engagement social » est assez bas comparé aux autres types d’actions. Les opinions partagées et les publications visant à faire la promotion du groupe suscitent plus de « J’aime » que les autres types de réactions. Les opinions recherchées mènent vers un plus haut taux de commentaires que les autres types de mesure. Le contenu humoristique obtient plus de partage et de « J’aime » que de commentaires.

Le même exercice a été effectué avec les thèmes des publications. La Figure 2 indique que le contenu politique et le contenu divers concernant toute sorte de différents sujets sont les thèmes qui obtiennent le plus de réactions pour les trois mesures. Les publications parlant de l’environnement et des interventions policières récoltent plus de « J’aime » que les autres mesures. La maltraitance animale et les droits fondamentaux obtiennent plus de commentaires que les autres types de mesures. Le contenu concernant la défense des individus vulnérables suscite plus de partages que de « J’aime » ou de discussions.

Figure 2

Niveau d’activité lié au thème de la publication pour l’ensemble des groupes

Niveau d’activité lié au thème de la publication pour l’ensemble des groupes

-> See the list of figures

Interprétation des résultats

De façon générale, les types de messages relevés dans les analyses de cette étude étaient similaires à ceux relevés dans la littérature (voir, par exemple, Java et al., 2007 ; Lovejoy et Saxton, 2012 ; Naaman et al., 2010). Cependant, l’importance de la présence de ces différents types de messages par rapport aux autres semble différer dans cette étude. Par exemple, pour Lovejoy et Saxton (2012), le partage d’informations arrivait au premier rang, suivi des publications visant le dialogue puis celles qui sollicitaient des actions concrètes. Dans le cas présent, ce sont les publications cherchant à dénoncer qui arrivent au premier rang, une catégorie qui était incluse implicitement dans des actions concrètes pour Lovejoy et son collègue. Ensuite, les publications sur le partage d’informations sont le plus représentées, pour terminer avec les publications visant le dialogue, comme les publications sollicitant l’opinion. Lovejoy et Saxton (2012) ont collecté leurs données sur Twitter et auprès d’une organisation à but non lucratif, cela pourrait expliquer les différences dans les catégories relevées ainsi que dans les résultats. Par exemple, la catégorie dénonciation a été ajoutée à notre étude. La collecte de données sur un groupe revendicateur tel qu’Anonymous montre, comme attendu, que cet aspect revendicateur ressort davantage que dans les autres types de regroupements. Toutefois, Anonymous est un groupe non conformiste qui vise à défendre des causes sociales (Milan, 2013). Il aurait été attendu de voir beaucoup de publications liées à des manifestations et des pétitions puisqu’il s’agit de l’essence de la revendication et de l’action sociale. Ce genre de contenu a été observé, mais arrive seulement au quatrième rang des publications les plus populaires. Au premier rang des types de messages les plus courants se trouvent les dénonciations de certaines situations. Les membres du réseau social Facebook des groupes Anonymous au Canada ont tendance à soutenir ces dénonciations et s’identifient au groupe par ces revendications constantes. Les publications de type plus informatif et objectif se classent seulement au troisième rang. Au deuxième rang des publications les plus populaires se trouvent celles visant à faire la promotion du groupe. Selon Dobusch et Schoeneborn (2015), les groupes tels qu’Anonymous ont besoin de promouvoir leur identité en réitérant leur image et leurs idéaux, et c’est ce qui explique qu’ils publient du contenu lié à l’aspect promotionnel du groupe. Ce contenu est encore plus populaire que les publications associées à l’engagement social concret. Certains groupes mettent en valeur du contenu humoristique, ou encore sollicitent l’opinion des membres. D’ailleurs, le groupe comptant le plus grand nombre d’individus ayant apposé un « J’aime » sur sa page est également celui dont le contenu est empreint d’humour et de sollicitation d’opinions. Il est possible que ce genre de contenu suscite une plus grande adhésion au groupe. Anonymous était au départ un groupe issu d’un forum de discussion en ligne qui traitait de blagues politiquement incorrectes. Anonymous du Québec est donc le groupe qui se rapproche le plus de l’essence originale et du contenu partagé par Anonymous, ce qui pourrait également expliquer sa popularité.

En observant les thèmes abordés dans les communautés Facebook, il n’est pas surprenant de voir beaucoup d’implication dans les sujets entourant la politique. Le deuxième rang des thèmes les plus abordés est occupé par les sujets divers concernant une grande quantité de différents sujets qui n’ont pas pu être classés. Il est intéressant de noter que tous les groupes partagent des publications aux diverses questions ne touchant pas a priori les implications sociales que prétendent défendre les groupes s’identifiant à Anonymous, telles que la liberté d’expression. Le troisième sujet le plus populaire est la défense des plus vulnérables suivi des publications visant la protection de l’environnement. Il y a donc une multiplicité de thèmes abordés qui fait d’Anonymous un mouvement difficile à cerner.

L’une des constatations générales des activités sur les réseaux sociaux des groupes s’identifiant à Anonymous au Canada est que les publications les plus populaires dénoncent des situations plus qu’elles ne sollicitent l’engagement dans des actions concrètes. Par exemple, on y verra l’expression de leurs opinions politiques, mais aucune pétition ne suivra pour s’opposer à une décision du gouvernement. Leurs actions semblent donc plus passives qu’actives. Seuls les membres de AnonWCC, de l’Ouest canadien, et Anonymous Toronto popularisent les sollicitations à participer en grand nombre à des événements tels que des manifestations populaires. Les gens semblent donc plus impliqués dans les changements sociaux de manière active dans ces régions. Il pourrait y avoir un aspect culturel important influençant les attitudes des activistes des différentes régions.

En ce qui concerne les types de publications, la mesure (c’est-à-dire les « J’aime », les partages et les commentaires) utilisée afin de jauger le niveau d’activité ne semble pas avoir une grande répercussion. Les publications sur le marketing du groupe occasionnent plus de « J’aime » que d’autres types de mesures. Les opinions recherchées entraînent plus de commentaires puisque c’est ce qui est demandé dans la publication, et le contenu humoristique ne suscite pas de commentaires, mais plus de « J’aime » et de partages. De façon générale, la mesure semble avoir peu d’impact, mais il est important de se questionner quant à la nature de ce qui est étudié afin que la mesure corresponde au contenu.

Pour ce qui est des thèmes abordés, quand le niveau d’activité des groupes est élevé, le décompte des commentaires, partages et « J’aime » donne des mesures équivalentes qui sont adéquates pour mesurer les thèmes. Une observation intéressante est que pour les sujets concernant la maltraitance animale, les droits fondamentaux et l’intervention policière, les commentaires semblent être plus populaires que les autres types de mesures. Ces sujets suscitent plus de discussions entre les membres et le désir de s’exprimer au-delà d’un simple « J’aime ».

Au départ, il semblait pertinent de regarder si les commentaires étaient favorables ou défavorables à la publication, puisque cela a un impact sur l’interprétation des données en lien avec les thèmes. Cependant, comme les publications sont principalement vues par les membres du groupe qui ont déjà adhéré et manifesté leur intérêt pour les opinions auxquelles adhère normalement le groupe Anonymous, les commentaires étaient principalement favorables.

Limites et recherches futures

Les données présentent une limite quant à la diffusion des publications en lien avec le statut public du groupe. En effet, chaque publication a son propre auditoire comprenant les personnes qui sont abonnées au groupe et qui adhèrent à l’idéologie de celui-ci, celles qui donnent la mention « J’aime » aux publications partagées par leurs amis qui adhèrent au groupe, etc. Il est donc impossible d’appliquer un filtre pour déterminer si les commentaires, « J’aime » ou partages viennent réellement des membres de la page adhérant aux idéologies ou si un utilisateur Facebook a partagé une publication qui apparaissait sur son fil d’actualité après que l’un de ses contacts qui, lui, est un membre du groupe, a donné la mention « J’aime » à la publication. Cependant, le fait de considérer uniquement les publications des administrateurs permettait d’observer du contenu qui concordait bel et bien avec les idéologies des groupes.

La présente étude a considéré les groupes qui s’identifient à une région du Canada afin de tracer un portrait général du niveau et du type d’activité des groupes Anonymous à travers le pays. Cependant, d’autres groupes Anonymous sont peut-être encore plus populaires et regroupent des gens de partout dans le monde sans être rattachés à une ville en particulier. Ces organisations partagent possiblement du contenu différent.

La collecte a été effectuée au moment précis où l’activité sur les pages Facebook était très dynamique. Certaines informations, telles que le nombre de « J’aime », pourraient donc être en plus (ou moins) grande quantité que lors de la dernière collecte. Même si le script de collecte de données fonctionnait en continu, il faudrait nécessairement l’arrêter afin de procéder aux analyses. Il est impossible de garder les informations en temps réel chaque fois qu’il y a des changements. La répercussion de cette limite est tout de même minime et pourrait davantage influencer les plus récentes publications seulement.

Seules les publications les plus populaires ont été analysées puisque nous cherchions à savoir ce qui suscitait le plus de réactions. Cependant, il serait intéressant de faire l’analyse de tout le contenu des pages afin de comparer les sujets ou les types de publications qui interpellent moins les membres.

Il aurait été intéressant de comparer l’activité des groupes s’identifiant à Anonymous entre les différentes plateformes sociales que l’organisation utilise comme Tweeter ou Instagram. De plus, l’identité des utilisateurs Facebook est nécessaire afin de participer aux activités de ce réseau, contrairement à l’anonymat qu’offrent d’autres réseaux sociaux. Il serait pertinent de comparer les présents résultats avec ceux découlant d’autres plateformes pour constater si l’état d’anonymat a un impact sur les sujets abordés par les groupes.

Les recherches futures pourraient reprendre les publications déjà classifiées afin de développer un algorithme d’exploitation des données par l’analyse des textes des publications qui classifierait automatiquement le contenu des pages. La méthodologie qui a été développée dans la présente étude était essentielle pour mettre les bases afin de pousser l’efficacité et la profondeur des futures recherches sur le sujet. Dans un autre ordre d’idées, une analyse du réseau de ce groupe pourrait être faite si le nom du profil Facebook des gens publiant et des gens réagissant aux publications était pris en compte. Des liens pourraient se former entre les membres du groupe et entre les différents sous-groupes.

Conclusion

Dans le cadre de la présente recherche, les deux principaux objectifs étaient de découvrir ce que les publications des pages s’identifiant au mouvement Anonymous sur Facebook et localisées au Canada ont en commun et ce qui les distingue. Les ressemblances entre les différents sous-groupes sont nombreuses. Premièrement, le type de message le plus souvent publié par l’ensemble des administrateurs des différentes pages est celui visant à dénoncer. Les publications faisant la promotion d’Anonymous sont celles qui arrivent au deuxième rang. Le contenu politique est également important sur l’ensemble des pages Facebook analysées. Ce contenu regroupe un grand nombre de publications transmettant un message qui s’oppose au gouvernement. Il en ressort que la communauté Anonymous au Canada ne semble pas représenter une menace très active, du moins sur Facebook. L’appel à la commission d’actions étant à peu près inexistant, ces publications, lorsqu’il y en a, proposent plutôt des rassemblements et la signature de pétitions que la commission d’actes illégaux en tant que tels. Ainsi, les membres d’Anonymous utilisent davantage leurs pages Facebook pour diffuser leurs points de vue, leurs idéologies ainsi que pour faire la promotion du groupe. La conclusion pratique de nos observations est que Facebook n’est pas utilisé afin d’organiser le mouvement, il pourrait s’agir davantage d’une façon de maximiser le capital de sympathie de la population dont la majorité est plus facilement joignable à travers ce réseau. Les activités illégales commises par les membres d’Anonymous telles qu’elles sont illustrées dans les médias par le passé pourraient concerner des membres plus solitaires et moins impliqués dans ces communautés en ligne. Les membres de ces communautés partagent donc une idéologie, mais sans plus.

La recherche a permis d’approfondir les connaissances sur les activités sociales en ligne de différents groupes s’identifiant à la communauté d’Anonymous. Au surplus, elle représente également un avancement méthodologique par l’utilisation peu commune de l’outil Facepager qui permet de collecter un grand nombre d’informations en peu de temps. Il sera intéressant au cours des prochaines années de voir comment cet outil ou des outils similaires seront mis à contribution puisqu’une partie des échanges entre les membres de différentes communautés sont maintenant plus accessibles que jamais.