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C'est l’histoire de Bakary, un jeune Gambien rencontré en avril 2018 à Palerme, en Sicile, dans la bibliothèque mobile (Ideas Box) installée par l’ONG Bibliothèques Sans Frontières (BSF) pour les jeunes mineurs isolés et la population locale. Bakary a 18 ans, il est en Sicile depuis seulement trois mois et commence à apprendre l’italien. Il bénéficie de la protection humanitaire et a reçu un accueil chaleureux de la ville. Il se sent en sécurité désormais, mais cela n’efface pas les violences et les traumatismes qu’il a connus sur sa route jusqu’en Europe. D’ailleurs, l’Europe n’a jamais été son objectif. Comme ses grands frères, comme ses parents avant lui, Bakary est parti pour la Libye, en 2017. La récolte avait été mauvaise cette année-là et il fallait récolter un peu d’argent pour faire vivre la famille. Ce n’était que pour quelques mois, travailler là-bas sur les chantiers et revenir au village. Chaque année, plusieurs dizaines de milliers d’Ouest-Africains partent travailler en Libye. Ces migrations internes au continent africain sont anciennes et souvent temporaires, au gré des saisons, des difficultés sociales ou politiques. Mais la Libye qu’a découvert Bakary n’était pas celle que ses parents avaient connue. Il s’est retrouvé au milieu du chaos, dans un pays déchiré par les conflits entre les clans, où l’insécurité est omniprésente. Il est alors devenu l’esclave d’un clan qui l’a obligé à faire des travaux harassants pour réparer les routes. Trop épuisé pour tenir sa pioche, il a fini par être jeté en prison. Il y est resté un mois et y a subi de nombreuses tortures. Et puis un jour, on l’a forcé à monter sur un canot de fortune. Il ne comprenait pas pourquoi, mais ce qu’il savait, c’est qu’il allait mourir. Ils étaient plus de deux cents à bord. Certains avaient payé chèrement leur place pour l’Europe, mais beaucoup étaient comme lui, des adolescents évacués de prisons surpeuplées. Après une nuit passée en mer, ils ont été secourus par le bateau de SOS Méditerranée, cette ONG qui sillonne les eaux internationales au large des côtes libyennes et qui a déjà sauvé plus de 10 000 personnes de la noyade depuis 2016. Une étude a montré que, comme Bakary, plus de la moitié des jeunes adultes qui arrivent aujourd’hui en Sicile depuis la Libye n’ont pas souhaité venir en Europe (OCDE, 2010).

C’est l’histoire de Dani, un adolescent éthiopien de 16 ans qui vit dans la vallée de l’Omo. Sa famille cultive le sorgho et vit de manière très simple sur ces terres fertiles. Mais le gouvernement éthiopien a lancé de grands projets d’infrastructures hydrauliques pour produire de l’électricité. Sans consultation, Dani et sa famille ont été relocalisés. Ils ne savent ni lire ni écrire, et la promesse de pouvoir aller à l’école les a décidés à partir. Ils ont perdu leurs racines, leur village, leurs voisins et leurs amis. Ils ont perdu leurs cultures. Le père de Dani est mort d’épuisement et de détresse. Dani est désormais le chef de famille et doit partir à la grande ville, Addis-Abeba, pour travailler et envoyer de l’argent à sa famille. Comme des centaines de milliers de compagnons d’infortune, il s’installe dans les bidonvilles de la capitale et survit de petits emplois. Et comme des centaines de milliers de compagnons d’infortune, il n’a pas choisi cette vie-là.

C’est l’histoire de Nella, 17 ans, Burundaise ou Tanzanienne, elle ne sait plus vraiment. Au milieu des années 90, sa famille a fui la guerre civile au Burundi. Elle est née dans un camp de réfugiés à l’ouest de la Tanzanie. C’est là-bas qu’elle a grandi, et qu’elle est allée à l’école anglophone. Un jour de 2014, on lui a dit qu’il fallait partir. La guerre était finie depuis longtemps au Burundi et les gouvernements s’étaient mis d’accord pour rapatrier les réfugiés. Avec sa famille, elle est retournée pleine d’espoir et de papillons dans le ventre à l’idée de retrouver cette terre fantastique si souvent racontée par ses parents, cette terre qui avait nourri les contes et les rêves de sa jeunesse et qu’elle n’avait jamais connue. Mais le retour a un goût amer. Le Burundi est un pays très densément peuplé qui ne parvient pas à nourrir sa population. Près de 50 % des Burundais souffrent de malnutrition chronique. Les terres de la famille de Nella avaient été squattées depuis vingt ans, puis officiellement récupérées par d’autres. Mais il fallait bien s’occuper des quelque 30 000 rapatriés de Tanzanie. Alors l’État du Burundi, avec l’appui des institutions internationales, a créé des villages de la paix où les rapatriés peuvent s’installer. C’est mieux que rien, mais ici tout est différent : Nella doit apprendre une nouvelle langue, le français, si elle souhaite un jour accomplir son rêve, aller à l’université et devenir médecin.

Ces trois drames de vie se déroulent à des milliers de kilomètres les uns des autres. Nous aurions d’ailleurs pu en raconter des dizaines d’autres, sur d’autres continents. Le point commun entre Bakary, Dani et Nella n’est pas d’être Africain ou jeune adulte. Ce qui relie intimement ces trois histoires, c’est la violence des transformations que leurs protagonistes ont subies. Lorsqu’on observe les populations en situation de vulnérabilité à travers le monde, on s’aperçoit que dans l’immense majorité des cas, elles ne sont pas en capacité de faire des choix éclairés, de lutter pour leurs droits. Que serait-il advenu de Bakary si, mieux informé de la situation en Libye et des risques qu’il courrait en allant là-bas, il avait décidé de se rendre en Tunisie ou au Ghana pour tenter d’y travailler ? Pourrait-on imaginer une vie différente pour Dani et les millions de personnes qui connaissent un exode rural forcé dans le monde d’aujourd’hui ? Ne pourrait-on pas imaginer des trajectoires choisies, comme par exemple aller à la grande ville pour entrer à l’université ? Comment intègre-t-on des populations qui ont fui et reviennent dans leur pays d’origine plus de vingt après sans les exclure à nouveau, sans qu’elles-mêmes se sentent étrangères à leur propre pays ?

Pour ces populations, l’accès à l’information et à la connaissance est vital. L’économiste et Prix Nobel Amartya Sen (1979) a théorisé un mode de développement, l’agency, qui privilégie la liberté en la considérant à la fois comme une finalité et un moyen. Il place la « capabilité », c’est-à-dire la capacité à agir et à être dont disposent les individus, comme levier et condition pour être libre de faire des choix entre différentes possibilités, d’être en position de prendre des décisions qui correspondent à ses aspirations, de vivre des évolutions choisies plutôt que des transformations forcées (Sen, 1979[1]). Cette approche du développement est particulièrement intéressante, car elle ne s’intéresse plus à l’accumulation de capital ou au développement des biens et services, mais bien à ce qui fait de nous des êtres humains : notre capacité à penser librement, à nous informer, à nous former, à éduquer nos enfants et à décider de la vie que l’on veut vivre.

Les bibliothèques comme vecteurs de développement humain

BSF travaille au renforcement de l’autonomie et de la capacité d’agir (agency) des populations vulnérables à travers l’accès à l’information, à l’éducation et à la culture. Nous partons du principe que la vulnérabilité est une réalité complexe, aux multiples facettes. Elle peut être causée par des événements exogènes (par exemple un conflit ou une catastrophe naturelle qui oblige des populations à se déplacer), des événements de vie (un décrochage scolaire, des violences liées au genre, etc.), des risques liés à la situation sociale (des inégalités sociales, une grande précarité, un exode rural, etc.), ou encore par les grandes ruptures provoquées par la révolution numérique (exposition des enfants aux risques sur Internet, compréhension de l’information et de la propagande, etc.). Dans tous les cas, les populations vulnérables vivent des situations de transformations forcées sur lesquelles elles n’ont que très peu de prise.

À BSF, nous pensons qu’aussi bien en amont qu’en réponse à ces situations, l’information, l’éducation et la culture sont des leviers de prévention des vulnérabilités et d’émancipation. Les bibliothèques sont à la fois des lieux de développement des individus et des espaces citoyens de création du lien social. Dans une élégie pour les bibliothèques publiée dans le New York Times en 2017, l’écrivain indien Mahesh Rao raconte son lien intime avec ces lieux de savoir et d’ouverture sur le monde. Il nous livre également sa description préférée de la bibliothèque publique, celle de la journaliste et universitaire Sophie Mayer : « The ideal model of society, the best possible shared space, [because there] each person is pursuing their own aim (education, entertainment, affect, rest) with respect to others, through the best possible medium of the transmission of ideas, feelings and knowledge – the book. » (Citée dans Rao, 2017)

Des populations plus éduquées et mieux informées peuvent construire des stratégies de prévention et de diminution des risques. La culture, dans toute sa diversité, est elle-même un formidable outil d’émancipation, de pensée critique et de dialogue démocratique et citoyen. En cela, les bibliothèques peuvent s’affirmer comme des leviers pour la réduction des inégalités, des lieux de construction du lien social et des boîtes à outils pour donner aux populations la possibilité d’inventer les solutions qui répondent à leurs besoins. Qu’elles soient physiques ou virtuelles, fixes ou mobiles, bibliothèques municipales, fab lab ou makerspaces, les bibliothèques du XXIe siècle sont d’abord des lieux d’accès, de médiation, de rencontre et d’invention de nouveaux usages. Dans les situations les plus difficiles comme dans les pays industrialisés, elles sont des hubs de lien social et de créativité au service des populations.

De l’urgence de lire

Prenons l’exemple des situations humanitaires. Dans ces contextes, la priorité est la mise à l’abri des populations, leur hébergement, et leur prise en charge médicale et sociale. Mais très vite, ces populations réfugiées ont aussi besoin de faire appel à ce qui fait réellement de nous des êtres humains : notre capacité à lire et à écrire, à apprendre et à échanger.

Le temps moyen passé par un réfugié dans un camp est de dix-sept ans. C’est pour cette raison que nous avons créé l’Ideas Box, cette médiathèque en kit qui se déploie en moins de vingt minutes pour créer un espace sécurisé de 100 m2 équipé d’un accès à Internet, de tablettes d’ordinateurs, d’un cinéma et d’une bibliothèque papier et numérique. L’important n’est pas tant l’outil, mais les contenus, et nous travaillons à sélectionner finement les ressources en fonction des besoins des populations, que ce soit des ressources destinées à se cultiver, à se former, à s’informer, à renforcer l’éducation et la résilience, et ce dans vingt-trois langues aujourd’hui. Nous en avons installé plus de quatre-vingts dans les camps et les villes du Burundi, du Rwanda, du Congo, de la Jordanie, de l’Irak, du Liban, du Bangladesh et sur la route des réfugiés en Europe, comme en Grèce ou en Italie.

Mais au-delà des crises humanitaires, n’y a-t-il pas une urgence permanente à donner les moyens à chacun de faire des choix éclairés ? Trump, Poutine, Salvini, Bolsonaro, l’Union européenne qui se délite, les murs qui se multiplient et les ponts qui s’effondrent : les inégalités s’accroissent partout, les ports se ferment aux exilés, et la démocratie libérale qui devait s’étendre sur le globe, à en écouter Francis Fukuyama (1992) et ses thèses sur la fin de l’histoire, se rétracte à vue d’oeil. Et nous, que faisons-nous ? Nous qui maîtrisons ces codes de l’information, qui sommes riches de savoir, d’idées, d’esprit critique, de mesure et d’équilibre, que faisons-nous en vérité ? Il y a urgence à casser les murs de nos bibliothèques pour amener leurs richesses à ceux qui en ont le plus besoin. En 2014, nous avons créé l’Ideas Box pour ouvrir des fenêtres sur le monde dans les camps de réfugiés. Mais très vite, des mairies et des associations en France, aux États-Unis et en Australie, ont fait appel à nous pour en implanter dans les quartiers populaires, en zone rurale, par exemple auprès des populations aborigènes dans le bush australien. Toutes nous ont fait part d’un sentiment d’urgence, d’un devoir impérieux d’aller à la rencontre de ces publics qui ne viennent pas ou plus à nous, de créer des ponts entre les bibliothèques en dur dont il est parfois si difficile de pousser la porte, et ces populations fragilisées par les transformations brutales de notre monde. Les Ideas Box permettent de recréer des espaces où l’on parle, où l’on se rencontre au coeur des quartiers, dans des lieux familiers où l’on se sent en sécurité. C’est le même esprit qui nous animait quand nous avons commencé à créer des bibliothèques dans des laveries automatiques aux États-Unis à travers notre programme Wash and Learn, à Detroit, dans le Bronx ou à Baltimore, dans les quartiers les plus pauvres du pays. Avec les bibliothèques et les associations de quartier, nous transformons ce temps perdu – deux heures à attendre que son linge soit lavé et séché - en formidable opportunité d’apprendre, de faire ses devoirs, de créer son CV, de s’informer ou simplement de prendre un livre pour s’évader.

Ces programmes nous disent tous quelque chose de fondamental sur le rôle et sur le métier de bibliothécaire. Une chose est certaine : nous n’avons jamais eu autant besoin de bibliothèques qu’aujourd’hui.

La maîtrise de l’information et des compétences numériques au coeur des nouvelles inégalités

Le manque d’accès et de maîtrise de l’information représente aujourd’hui la clé de la plupart des inégalités dans nos sociétés globalisées où la mondialisation règne en maître. Comment dès lors trouver la bonne filière, la bonne formation, le bon travail ? Comment faire ses démarches administratives, prendre un rendez-vous chez le médecin ou comprendre ses droits ? En France, 43 % des personnes résidant en zone rurale sont inquiets à l’idée de devoir effectuer de plus en plus de démarches en ligne (Mission Société Numérique, 2018). Il est pourtant essentiel d’être capable de trouver son chemin parmi le fourmillement d’informations plus ou moins fausses, plus ou moins tronquées, et de savoir séparer le bon grain de l’ivraie. Essentiel aussi de pouvoir participer à des mouvements sociaux, de construire des liens, de rêver ensemble. C’est un enjeu qui nous dépasse et qui pourtant interroge le fondement même de notre démocratie, notre capacité à ne pas être de simples consommateurs digitaux, mais des citoyens éclairés et créatifs.

La question qui se pose à nous aujourd’hui est la suivante : comment construire une société plus forte, plus démocratique et plus résiliente face aux enjeux qui bouleversent notre monde, au premier rang desquels se trouve le numérique ? C’est dans cet esprit que nous avons créé en 2014 le programme Voyageurs du Numérique afin d’apporter des outils et de la formation à ceux qui sont les plus étrangers au numérique, mais aussi à la génération des milléniaux, qui malgré leur apparente maîtrise du numérique ont tout autant besoin d’être épaulés. Notre objectif : créer une immense bibliothèque francophone d’activités à conduire autour du numérique, autant pour les bibliothécaires que pour les enseignants, les animateurs socioculturels ou les familles. La plateforme de Voyageurs du Numérique regroupe plusieurs centaines de fiches et de parcours d’activité autour de quatre grandes thématiques : « l’inclusion numérique » pour maîtriser les bases de l’outil informatique (ordinateur, tablette, smartphone, Internet, etc.) ; « S’informer sur Internet » pour comprendre la manière dont l’information est construite et véhiculée sur Internet, décrypter les fake news et combattre la propagande ; « Maîtriser ses pratiques sur Internet » pour protéger ses données et avoir la maîtrise de son identité et de sa sécurité numériques ; enfin, « Coding et robotique » pour s’initier à la programmation informatique, à la bidouille électronique, à la robotique et à la création de jeux vidéo. Pour compléter le dispositif, nous aidons les acteurs qui veulent se lancer à travers des formations et de l’accompagnement. Plus de 130 clubs se sont ainsi montés en France cette année et nous avons l’objectif d’atteindre les 400 d’ici la fin de l’année 2019. BSF cherche également à essaimer le projet à l’international où des clubs se sont déjà constitués, comme c’est le cas au Cameroun, en Côte-d’Ivoire ou encore en Colombie. Cette dynamique, portée par l’animation de la communauté, et la gratuité de l’ensemble des ressources et des interventions proposées par BSF, sont rendues possibles grâce au soutien de la Fondation d’entreprise Française des jeux.

La bibliothèque au coeur des transformations sociales contemporaines

La manière dont les bibliothèques se positionnent aujourd’hui sur la question des compétences numériques est un bon exemple du rôle que celles-ci peuvent jouer dans l’accompagnement au changement dans nos sociétés. Mais dans le même temps, le métier de bibliothécaire manque cruellement de rôle modèle, de visibilité dans sa capacité à transformer la société. Il existe en réalité une dichotomie profonde entre les représentations sociales et politiques des bibliothèques et la réalité de leur travail au quotidien.

Au sein même de la profession, le débat autour des transformations du métier est aigu. Il y a quelques semaines, la responsable des programmes numériques d’une bibliothèque française, Laurène Pain-Prado, expliquait à quel point elle était submergée par les demandes d’usagers qui désiraient être accompagnés pour remplir des formulaires d’aide sociale (Mouillard, 2018). Elle disait accéder aux demandes de ces usagers parce qu’elle ne pouvait pas les laisser livrés à eux-mêmes, mais aussi que ces tâches auxquelles elle n’était pas formée la détournaient de ses véritables missions. La caisse d’allocation familiale (CAF) lui avait proposé de former des bibliothécaires à remplir des demandes sur leur site, mais elle avait refusé. Cette réponse, que l’on peut trouver choquante, révèle en fait une réalité plus complexe : accepter cette formation serait revenu à reconnaître officiellement que l’on prend à son compte une mission nouvelle pour la bibliothèque. L’interview se termine sur ces mots : « Un bibliothécaire fournit un service culturel, pas un service social. » (Mouillard, 2018) La bataille que nous vivons aujourd’hui est profondément culturelle et sociale, parce qu’elle nous interroge sur la société dans laquelle nous voulons vivre. Partout, les bibliothèques sont de formidables leviers pour réduire les inégalités, parce qu’elles sont souvent le dernier service public à l’accès sans condition, et parce que les usagers leur font confiance dans un monde où cette notion est de moins en moins partagée, elles constituent une force de changement immense.

Un récent rapport coordonné par Chris Bourg (Massachusetts Institute of Technology, 2016), directrice des bibliothèques du MIT, propose une vision de la bibliothèque du XXIe siècle comme une plateforme ouverte donnant accès à une information qui permet de résoudre les problèmes globaux comme l’accès à l’eau ou la découverte de nouvelles sources d’énergies renouvelables. Devant les défis du monde d’aujourd’hui, elle entend donner accès à des sources d’information vérifiées et les outils pour les évaluer, les comprendre et les exploiter, ce que les bibliothèques et les bibliothécaires ont d’ailleurs toujours fait[2]. Dans une interview à propos de ce rapport, elle ajoute : « I don’t think we need to save libraries, but I do think we might need libraries to save us[3]. »

Partout où elles se trouvent, les bibliothèques changent des vies, tant elles se situent au carrefour d’un fantastique potentiel de développement humain et d’une fabrique de citoyens. Ce positionnement unique en fait un formidable levier pour que la bibliothèque devienne un acteur central du changement et de la transformation sociale. Nous rejoignons ici la pensée d’Amartya Sen (1979) dans cette perspective de donner aux populations, en particulier les jeunes adultes, la capacité et la « capabilité » de faire des choix et de s’adapter aux transformations du monde en contribuant à sa réinvention.

Il y a urgence, urgence de lire. Mais nous avons tous les outils et toutes les cartes en main.