Comptes rendus

Calenge, Bertrand. Les bibliothèques et la médiation des connaissances. Éditions du Cercle de la librairie, 2015. 147 p. ISBN 978-2-7654-1465-0[Record]

  • Denis Boisvert

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L’avenir des bibliothèques repose-t-il sur la médiation à l’heure du « big bang du monde de l’information »? Les bibliothécaires deviendront-ils des médiateurs en vue de contrer le phénomène de la désaffection envers la fréquentation des bibliothèques traditionnelles perçues comme des antres du savoir d’antan? La relation établie entre le lecteur qui vénère le livre et le bibliothécaire reconnu pour ses précieux conseils de lectures n’est-elle pas en train de disparaître au profit d’un autre type de relation à l’ère d’Internet qui met l’immédiat au coeur des processus d’acquisition des savoirs? Bertrand Calenge, directeur des études à L’École nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques (Enssib) et auteur de plusieurs ouvrages et articles sur les politiques documentaires et les bibliothèques publiques, démontre dans cet ouvrage que la légitimité des bibliothèques au sein de la société de l’information repose plus que jamais sur leurs capacités de médiation de nature à en faire des passeurs de savoirs, des collaborateurs, voire des éditeurs de contenus. Tout comme chez les didacticiens et les philosophes, la notion de médiation est ici étroitement associée à un processus créateur ou bien à un phénomène évolutif impliquant un aspect relationnel qui est avant tout affaire de comportement et d’attitude puisque la médiation est plus qu’une simple relation entre un document, un usager et un bibliothécaire. Elle s’inscrit dans un passage entre un objet mémoriel, tel que défini par Jean-Michel Salaüm, destiné à être transféré à un lecteur et un passeur de savoir et de connaissances qu’est le bibliothécaire. Reconnaissant qu’aujourd’hui, il est devenu plus facile de retrouver des informations utilitaires sur Internet que dans les bibliothèques, l’auteur établit la légitimité de la médiation en faisant référence au passage essentiel du document aux savoirs et à la connaissance sous l’impulsion du numérique. Un passage irréversible qui entraîne une profonde mutation des pratiques établies dans le processus de diffusion de l’information. Plutôt que de donner priorité à la mise à disposition de l’information en fonction de publics potentiels, une approche axée sur le soutien au passage des savoirs et des connaissances en tenant compte d’une diversité des pratiques cognitives chez les individus est ici favorisée. L’importance d’être imaginatifs pour les bibliothécaires au moment où les modes d’acquisition des connaissances sont de plus en plus éclatés à l’ère numérique et à celle des réseaux sociaux est soulignée en rappelant que notre époque est marquée par l’hybridation de l’information, une forme de stratification des supports à l’information qui correspond au croisement de plus en plus répandu des collections imprimés et numériques au sein de nos espaces documentaires. Le directeur des études à l’Enssib n’hésite pas à affirmer que les métiers de l’information doivent se confronter à une vive concurrence et que les spécialistes de l’information sont tenus d’acquérir de nouvelles connaissances afin d’être eux aussi des navigateurs magiciens comme Google en structurant l’information de manière à créer un objet signifiant pour l’usager desservi. Après avoir clairement établi que la médiation s’inscrit dans une dimension transactionnelle ayant pour effet de transformer le métier de bibliothécaire, Calenge consacre un chapitre entier de son ouvrage à définir le concept de médiation afin de nous permettre de savoir de quoi il s’agit puisque, comme le mentionnait Michel Foucault, dans les mots, il y a aussi les choses. Les manières et les rôles de la médiation sont cernés explicitement en tenant compte des dimensions humaines et fonctionnelles toujours à partir « d’un point de vue délibérément orienté usager ». Les pages consacrées à l’analyse de la plus-value de la médiation apportée aux bibliothécaires dans l’exercice de leur profession rendent justice à un métier dont les …

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