Introduction au numéro[Record]

  • Diane-Gabrielle Tremblay

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  • Diane-Gabrielle Tremblay
    Télé-université (UQÀM) et Chaire de recherche du Canada sur les
    enjeux socio-organisationnels de l’économie du savoir
    dgtrembl@teluq.uqam.ca

Avec l’adoption dans divers pays de mesures de conciliation, notamment une nouvelle politique de congé parental au Québec, on pourrait penser que les parents n’ont plus de difficulté, aujourd’hui, à concilier emploi et famille. Or, un très grand nombre de recherches réalisées au Québec et ailleurs ont mis en lumière l’intensification, au fil des ans, des difficultés de conciliation entre la vie personnelle et la vie professionnelle, ou encore d’un conflit emploi et famille. Ce conflit s’explique par le manque de temps que vivent les parents, ce qui se traduit par un conflit entre les temps affectés au travail et ceux que l’on affecte – ou que l’on souhaite affecter – à la famille et à d’autres activités (politiques, sociales, culturelles). Ce sont souvent ces dernières activités qui sont exclues; les parents commencent par les remettre à plus tard et finissent par les exclure complètement de leur vie. Au Québec comme ailleurs, les politiques de congé parental ont beaucoup évolué au fil des ans. Toutefois, au terme du congé, le soutien offert aux parents est assez limité, ce que plusieurs regrettent. En effet, une fois le congé de maternité terminé, la vraie conciliation entre les activités familiales et parentales commence. Or, comme les services publics de soutien à la famille et autres ne sont pas parfaitement adaptés aux nouvelles réalités du travail, les difficultés peuvent parfois être importantes. En effet, les services de garde offrent des heures d’ouverture limitées (généralement de 7 h à 18 h), alors que les heures de travail sont de plus en plus variables, les heures d’ouverture des services publics et commerces privés (bien que ces derniers s’améliorent) sont aussi limitées, de sorte qu’il est souvent difficile pour les parents de régler des problèmes administratifs avec l’État ou d’avoir accès à certains services de santé en dehors de leurs heures de travail. Par ailleurs, les entreprises elles-mêmes offrent peu de flexibilité d’horaires à leurs employés, comme nous avons pu le constater dans des recherches que nous avons menées (Tremblay, 2004) et cela occasionne aussi des difficultés pour les parents qui souhaitent souvent des horaires plus flexibles pour se faciliter la vie. Enfin, la division sexuelle du travail entre les hommes et les femmes ne s’est pas modifiée considérablement, de sorte que les femmes continuent d’assumer l’essentiel des responsabilités familiales et des tâches domestiques (Institut de la statistique du Québec, 2000; Tremblay, 2004). Plusieurs études ont par ailleurs souligné le fait que ce conflit entre les heures de travail et le temps que l’on souhaite affecter à la famille et à d’autres activités entraîne des conséquences néfastes, non seulement pour les employés, mais aussi pour les employeurs. Pour les employés, les effets peuvent se traduire par des problèmes de relations familiales et affectives, par un manque de satisfaction au travail, ainsi que par des problèmes de santé et de stress. Pour les employeurs, les inconvénients sont, entre autres, le coût économique de l'absentéisme, les pertes liées à une diminution de la motivation et du rendement, la résistance à la mobilité et aux promotions, le roulement élevé de personnel, la difficulté d’attirer et de retenir un personnel qualifié, la formation insuffisante de la main-d'oeuvre. Le conflit grandissant entre emploi et famille tient à des changements profonds qui surviennent à la fois dans la composition de la main-d’oeuvre et dans l’organisation du travail. En ce qui touche la main-d’oeuvre, l’évolution la plus marquante est sans contredit l’arrivée massive des femmes sur le marché du travail. La nouvelle main-d’oeuvre compte plus de femmes que jamais – de tous âges et à différentes époques de leur vie – et donc également …

Appendices