Abstracts
Résumé
La photographie est utilisée ici comme matériau permettant une approche des rapports symboliques qui se construisent au moment du mariage. Rituel au coeur du rituel, la séance de photographie raconte une histoire idéalisée du couple et de leurs relations familiales. Derrière cette mise en scène, nous décelons les conceptions communes et les valeurs qui structurent les rapports sociaux. Le choix du mariage ritualisé à la fin du XXe siècle montre que, même s’ils se sont libérés de l’autorité parentale, les jeunes ont intériorisé les normes qui structurent la conjugalité et la filiation.
Mots-clés:
- mariage,
- rituel,
- photographie,
- rapports sociaux,
- rapports symboliques
Abstract
Photography is used here as an instrument to capture the symbolic relationship that is constructed at the time of the wedding. The photo session is a ritual within a ritual, narrating an idealized story of the couple and their family relationships. Underlying this portrayal is a commonalty of patterns and values that can be seen to structure social relationships. By opting for a ritualized wedding ceremony in the latter years of the XX century, young people are indicating that, even if they have thrown off the shackles of parental authority, they have internalized the standards that structure the conjugal relationship and filiation.
Key terms:
- wedding,
- ritual,
- photography,
- social relationships,
- symbolic relationships
Article body
Les jeunes ne franchissent plus aujourd’hui le rite de passage vers la vie adulte comme ils le faisaient il y a 50 ans. Affranchis de l’autorité parentale, ils peuvent vivre en couple sans pour cela être obligés de se marier. Le mariage, le travail, les études et la fondation d’une famille s’insèrent à des moments différents du cycle de vie : le passage de la jeunesse vers la vie adulte s’étire et peut suivre différentes trajectoires (Lemieux et Mercier, 1992; Lemieux, 1996). Par contre, lorsque les couples choisissent la voie de la ritualité, l’ensemble du rituel peut devenir assez complexe et plutôt homogène (Tremblay, 2001). La montée de l’individualisation, qui a permis aux jeunes d’expérimenter une vie plus autonome, a ébranlé la ritualité du mariage, mais le rituel du mariage n’est pas disparu. Comment interpréter cette résistance (Baillargeon, 1987)? L’individualisation semble avoir entraîné l’émergence de deux mouvements opposés mais complémentaires. D’un côté, ce processus a permis l’affranchissement des acteurs devant les institutions et leurs rites, autorisant les couples à esquiver le rituel du mariage. De l’autre, l’individualisation s’est réalisée par le développement de la conscience et par une plus forte intériorisation des normes et des codes de conduite (Goffman, 1991). Les couples qui le désirent peuvent recourir délibérément au rituel pour exprimer, construire et affirmer leurs identités individuelle, conjugale et familiale. Le rituel n’est toutefois plus simplement « rite de passage »; le rituel nous « montre » et démarque plus que le passage individuel de l’adolescence vers l’âge adulte (Segalen, 2003). Il s’inscrit dans le mode de vie actuel, il baigne totalement dans les rapports marchands, calqué sur le monde du spectacle. Le rituel illustre, met en scène et reconduit l’adhésion des participants à certains faits de culture.
Les couples qui s’engagent dans la ritualisation du mariage investissent le rituel de significations qui éclairent leur conception de la famille et leur propre insertion dans le tissu familial. Ils se saisissent du rituel et y projettent leur manière de concevoir les relations conjugales et les différences entre les sexes. Leurs gestes paraissent parfois éloignés des rapports sociaux qui structurent leur quotidien, par exemple dans la place qui est donnée à leurs parents, alors qu’ils sont autonomes et qu’ils ont quitté le nid familial depuis longtemps. Ces couples offrent, dans la cérémonie religieuse du mariage, une mise en scène de leur amour et de leurs relations, tant conjugales que familiales. Ils réinventent le rituel en s’appropriant des pratiques anciennes, de la même manière qu’on le fait ailleurs dans la société occidentale (Segalen, 1998). Au coeur de cette représentation, leurs actions sont pérennisées par le rite de la photographie. L’analyse des gestes photographiés n’a pas fait l’objet d’une étude ethnologique dans le contexte québécois. De plus, cette approche est polysémique, c’est-à-dire qu’elle peut être observée de différents points de vue. Mettre en lumière ces rapports symboliques donnera accès aux valeurs sur lesquelles reposent les structures conjugales et familiales et permettra d’éclairer ces « faits de culture » sous de nouveaux angles.
La recherche présentée ici est une exploration méthodologique et théorique de l’approche photographique[1]. Nous voulions vérifier la pertinence et les potentialités d’une analyse des albums de mariage pour comprendre les rapports symboliques qui soutiennent la ritualité du mariage. Le corpus est constitué d’une trentaine de grands albums de photos, c’est-à-dire d’albums réalisés par les photographes à partir d’un choix des meilleurs clichés, après consultation auprès du couple, clichés qui ont ensuite été agrandis. Ce corpus a été divisé en trois périodes qui couvrent une quinzaine d’années chacune : 1955-1970, 1971-1986 et 1987-2001. Chaque photo contenue dans l’album est une pièce du document. L’album raconte une histoire particulière, celle du mariage d’un couple, mais il évoque aussi toutes les histoires d’amour idéalisées. Malgré cette caractéristique, qui donne plus de poids à la tradition qu’au changement, les albums de mariage illustrent les transformations survenues à l’intérieur de la dynamique familiale à la fin des années 1960[2].
Les photos comme matériaux
a) Les études sur le mariage réalisées à partir de photos
Quelques auteurs ayant utilisé les photos de mariage ont cherché à déterminer les fonctions et le sens de leur usage à l’intérieur du rituel. Ils ont aussi identifié les problèmes et montré les possibilités de ce matériau. Pierre Bourdieu est sans doute le premier à avoir conduit une enquête, parmi les paysans, dont l’objectif était de parler des photos prises au moment des noces. En 1965, il publie les conclusions de cette étude. Le mariage est la première cérémonie qui amène la famille paysanne à recourir aux services d’un photographe. Bourdieu affirme que la photographie de noces a été intégrée rapidement au rituel du mariage chez les paysans, malgré leur réticence à utiliser l’appareil photographique, parce que la photo remplit l’une des fonctions essentielles de la fête familiale, celle de revivifier le groupe. La photographie « fournit le moyen d’éterniser et de solenniser ces moments culminants de la vie sociale où le groupe réaffirme son unité » (Bourdieu, 1965b : 165). Il constate aussi que la photo de noces est utilisée par la mère pour enseigner aux enfants leur place dans le groupe familial et les liens qui les unissent aux membres de la parenté. Placés devant l’appareil, les paysans adoptent une attitude rigide, austère et conventionnelle. Ils se tiennent de face et dans un plan éloigné, de manière à donner d’eux-mêmes une image de dignité, d’honneur et de responsabilité. La photographie chez les paysans se veut intemporelle. « Si une action s’y dessine, affirme Bourdieu, c’est toujours un mouvement essentiel, “immobile” et arraché au temps » (1965b : 173). L’enlacement des époux, par exemple, montre que l’amour est éternel et durera au-delà du temps, au-delà de la mort.
Martine Segalen a également travaillé à partir de la photographie de noces afin d’éclairer certains aspects des liens de parenté en milieu rural. Elle observe la gravité de l’expression des visages, qui reflète « la solennité de l’instant » (1972 : 123). Le lieu où sont conservés les clichés de même que la manière de les commenter révèlent le respect qui entoure la cérémonie du mariage. Il y a, selon Segalen, un intérêt à analyser systématiquement les photographies de noces. Ces matériaux permettent de connaître les rapports entre les participants et les époux en évaluant la disposition des personnes. Elle conclut, premièrement, que la parenté invitée ne dépasse pas les oncles, les tantes et les cousins germains. Deuxièmement, les familles des deux conjoints sont équilibrées et n’occupent pas un espace prédéterminé sur la photo du groupe. Troisièmement, les degrés généalogiques et le statut de célibataire sont fortement distingués. Au premier plan de la photo sont assis les membres de la famille non mariés et plus jeunes ou du même âge que les époux. Au deuxième rang, avec les époux, on voit les parents, les grands-parents, les oncles et les tantes mariés. Puis, au troisième et dernier rang, sont disposés les frères, les soeurs et les cousins germains mariés ou les célibataires âgés. Il est donc possible d’établir une sociographie de la parenté en étudiant les photos de noces.
Une anthropologue italienne, Clara Gallini, a observé l’usage qui est fait de la photographie et de la cassette de prises de vues dans les rituels récents du mariage en Italie. Elle remarque que le développement de cette pratique a favorisé l’éclosion d’un nouveau complexe « mythico-rituel » (1992 : 125) qui vient se greffer au rituel religieux, parfois même le soumettre. Il arrive en effet que des couples obtiennent du prêtre qu’il reprenne une partie du scénario nuptial, après leur retour de voyage, parce que l’enregistrement ou la photo a été raté. L’utilisation de la technique et de procédés médiatiques n’entrave pas la construction mythique. Ce produit, à la fois unique et stéréotypé, « se présente donc comme un entrelacement bien singulier de l’universalité d’un mythe avec la spécificité d’une histoire personnelle » (Gallini, 1992 : 218). Clara Gallini avance que cette pratique de l’album et de la cassette de prises de vues « acquiert une importance majeure auprès des classes “populaires” et petit-bourgeoises [sic] du fait [...] de la plus grande prégnance, pour elles, de l’institution familiale et aussi de la nécessité de se construire des symboles d’une “distinction” qui en marque l’identité » (1988 : 216).
Le récit des albums et films italiens est centré sur la cérémonie nuptiale et sur les événements qui la précèdent et la suivent immédiatement. On y voit la mise en scène du couple, mais c’est d’abord le changement de statut de la femme qui en est le principal sujet. Les albums de photos et les cassettes de prises de vues sont plus que des rites commémoratifs, selon Clara Gallini. Elle les associe à des formes nouvelles et inédites d’itérations rituelles d’origine médiatique (1988 : 220). Elle observe que la lecture et le visionnement de ces images donnent lieu à des rencontres familiales et amicales, à l’invitation de la mariée ou de sa mère, et dont l’objectif est de revivre collectivement la cérémonie nuptiale. Ces rites familiaux conditionnent la production d’images au moment même de la cérémonie. Des prises de vue sont exécutées dans des parcs publics, où les époux, disposés à la manière des personnages médiatiques, illustrent l’amour triomphant (1988 : 222-223).
Gallini fait remarquer que la photographie de noces peut être analysée de deux points de vue différents. Le premier décodage permet de lire la photo comme un document et d’en tirer des informations sur les rites, d’une part, et sur les relations entre les acteurs et les pratiques symboliques, d’autre part. Le deuxième décodage permet de considérer ces photos comme des productions symboliques s’exprimant à travers un langage médiatique.
b) L’analyse photographique
Les auteurs qui se sont penchés sur le document photographique n’ont pas caché l’ambiguïté que recèle ce type d’analyse. Quel est le rapport de la photographie à la réalité? Quel est le statut de l’acte photographique dans une démarche visant l’objectivité? Les chercheurs exercés à l’anthropologie ou à la sociologie visuelle ont encore du mal à fixer la méthodologie qui devrait guider l’utilisation de ce matériau (Prosser, 1998). Par contre, tous s’accordent maintenant à affirmer que la photographie n’est pas une pure transposition de la réalité. La photographie est polysémique; elle oblige le chercheur à réaliser plusieurs lectures.
À la lumière des travaux déjà réalisés à partir de photographies, nous envisageons l’analyse de ce type de documents à la manière d’une fouille archéologique. Une première lecture montre le contenu du rituel et les relations entre les individus. La photographie de mariage est en effet une trace tangible qui informe sur ce que les acteurs accomplissent au moment du mariage. De cette première lecture, nous pouvons établir ce que les acteurs, et les photographes, considèrent important à l’intérieur du rituel et ce qu’ils veulent fixer sur pellicule pour en conserver le souvenir. Comme Clara Gallini l’a bien démontré, la photographie est à la fois un rite et une image figée de tous les autres rites. L’acte photographique, lorsqu’il est exercé de manière officielle, souligne les moments importants de la célébration, il délimite ce qui fait partie du rituel et ce qui n’en fait pas partie, il solennise certains gestes. Peu importe que la photographie soit prise par un professionnel ou un amateur, et que ce photographe soit animé d’intentions sur ce qu’il considère « photographiable » (Bourdieu, 1965a : 24), les photos donnent accès à la culture instituée, c’est-à-dire à cette portion de la culture qui recouvre les pratiques de la vie quotidienne et favorise la ritualisation (Dumont, 1987; Bouchard, 1999). En d’autres mots, que ce soit un photographe professionnel ou un ami de la famille qui fasse office de photographe officiel, les gestes pris en photo sont ceux qui représentent « ce qui fait le mariage » aux yeux des membres du groupe.
À partir de l’identification de ces images, le chercheur ou la chercheuse peut accéder à un deuxième niveau de lecture. La mise en scène réalisée autour de gestes, d’attitudes et d’objets révèle en effet les rapports symboliques qui s’établissent au sein du couple et de la famille. Le décodage de cette mise en scène ouvre une perspective sur les « schèmes de perception, de pensée et d’appréciation communs à tout un groupe » (Bourdieu, 1965a : 24). Derrière les gestes du mariage se profile une conception commune de la filiation et de la manière dont on la transforme pour faire une place à la conjugalité. De la mise en scène des rites émerge aussi une conception commune des rapports sociaux de sexe. Les attitudes corporelles, la disposition des acteurs et l’utilisation d’objets particuliers révèlent les structures conscientes et inconscientes qui régissent les rapports familiaux et conjugaux.
À un troisième niveau de lecture, la chercheuse ou le chercheur doit éclairer le contexte particulier dans lequel les photos sont réalisées. La photographie de mariage est exécutée par des professionnels, qui se définissent parfois comme des artistes, mais qui ont certainement des intérêts commerciaux à promouvoir. La photographie de mariage est stéréotypée, elle est un produit de masse offert aux couples. Elle est aussi un objet de création qui se prête à l’analyse intertextuelle, de la même manière qu’un texte littéraire. Le photographe compose la photo, il oriente le contenu du document. Sa perception de ce que doit être une « belle photo de mariage » est influencée par la littérature spécialisée, comme elle l’est par la pratique d’autres photographes qu’il a l’occasion de fréquenter. La composition des photos est-elle influencée par le sexe du photographe? Elle l’est en tout cas par le niveau d’évolution technique. La sophistication du matériel a permis le développement d’effets spéciaux qui transforment l’aspect des photos. D’autres éléments liés au contexte d’exécution de la photo de mariage introduisent des distinctions, sans doute subtiles. Le discours des époux autour des photos et sur le travail du photographe peut également ajouter une dimension qui ne transparaît pas aux différentes lectures des photos. Cette lecture anthropologique des photographies de mariage met en lumière des aspects insoupçonnés des rapports familiaux et conjugaux tels qu’ils sont représentés dans les rites du mariage.
c) La méthodologie de la recherche
Une trentaine d’albums de mariage ont été numérisés et ils constituent la base de cette recherche[3]. Les propos des informateurs ont aussi été enregistrés lorsqu’ils s’exprimaient à propos de leur album de mariage[4]. Cette documentation a permis de répondre aux trois niveaux de lecture que nous avons identifiés : le contenu « textuel », c’est-à-dire ce que nous dit la photo à propos du rituel; les rapports symboliques, c’est-à-dire ce que montrent les photos de la conception commune de la filiation, de la conjugalité, des rapports familiaux et des rapports entre les sexes; et finalement la photo de mariage comme un produit de consommation qui a sa propre finalité. Il est relativement aisé d’établir une grille de lecture pour réaliser les deux premiers niveaux de lecture. Par contre, il faudrait interroger d’autres sources pour éclairer la perspective de la photographie de noces comme produit de consommation. Cette troisième lecture est donc faite ici de manière exploratoire.
Une fiche générale a été réalisée pour chacun des albums afin de caractériser le type d’informations qu’ils contiennent. D’abord, nous avons identifié les relations entre les acteurs qui sont représentés sur chacune des photos. Puis, nous avons fait la synthèse des actions posées par les acteurs. Ces deux types d’informations contenues dans l’album de mariage donnent une vue d’ensemble des relations conjugales et familiales ainsi que du genre d’histoire que l’on veut fixer dans le temps.
Ensuite, nous avons fait un relevé des matériaux qui constituaient chacune des photos : le lieu où la photo a été prise, l’attitude et l’expression des acteurs, les gestes posés, les objets qui font partie de la composition photographique, etc. Lorsque les acteurs ont exprimé des commentaires à propos de leurs photos, ils ont enrichi notre propre observation du contenu symbolique des photos de l’album. Enfin, nous avons analysé la pratique photographique telle qu’elle nous apparaît dans ce corpus restreint, composé de photos qui s’échelonnent sur les cinquante dernières années du XXe siècle. L’évolution des procédés techniques, tels les effets spéciaux et de cadrage, de même que ce que l’on apprend du photographe à travers l’oeil de l’objectif nous donnent un aperçu de la manière dont la photo de mariage est devenue une pratique professionnelle commerciale.
Les résultats de la recherche
1) L’histoire racontée par les albums de mariage
L’album de mariage présente les moments importants de la journée du mariage, ou plutôt certains gestes auxquels les familles accordent un sens particulier. Cette histoire racontée par les albums est aussi, comme en Italie, celle des femmes. C’est le point de vue de la mariée que le photographe adopte, et ce, presque toujours. Elle est photographiée seule chez elle, avec sa mère ou avec son père. Il faut attendre le début des années 1970 pour voir des photos du marié sans la mariée, et encore est-il rarement seul. On le prend en photo avec son père ou son témoin.
La très grande majorité des albums de mariage analysés montrent que l’histoire racontée par les albums concerne à la fois la famille et le couple. Les photos mettent en scène les époux avec leurs pères, leurs familles proches et la parenté, d’une part, et différents symboles de l’union, d’autre part. Les moments forts du mariage, ceux que l’on inscrit dans l’album, représentent la préparation de la mariée et son départ de la maison de ses parents, les étapes importantes de la cérémonie religieuse et quelques fois des photos prises pendant la réception. Le photographe nous montre assez souvent les mariés faisant leur entrée à l’église, s’échangeant les anneaux et le baiser, communiant, signant les registres et sortant de l’église. On retient aussi très souvent la photographie du groupe des invités sur le parvis de l’église. Ensuite, on voit dans l’album des photos du couple, posant en studio ou en plein air. Au tournant de l’an 2000, les mariés ne retiennent plus les photos de la communion ou celles de la signature des époux et des témoins; la mise en scène de l’amour prend le pas sur l’officialisation de l’union. L’album raconte l’histoire d’amour du couple, une histoire romantique et désincarnée. Les prises de vue dans les jardins fleuris et près des fontaines, avec toutes sortes d’effets, placent le couple et le mariage hors du temps.
2) La symbolisation du lien filial
Les photos avec le père ou la mère
Pendant toute la période, de 1955 à 2001, la grande majorité des albums de mariage soulignent la transformation du lien filial, particulièrement dans le cas des femmes. L’album illustre le mariage du point de vue de la mariée et la mère de cette dernière y tient une place toute particulière. C’est en effet, la mère de l’épouse que l’on voit sur la ou les premières photos de l’album. Entre 1955 et 1986, on la voit présenter son bouquet à la mariée alors que celle-ci est assise au salon. On la voit aussi aider la mariée à fixer son voile ou arranger sa coiffure devant le miroir de sa chambre à coucher. Dans les années les plus récentes, les gestes sont souvent beaucoup plus discrets, sinon allusifs. Ils évoquent seulement cette relation entre la mère et la mariée : on voit la première effleurer le voile ou la robe de la seconde, et un oeil non averti ne verrait pas l’intention derrière cet effleurement. Invariablement, les photos prises avec la mariée et sa mère montrent que cette dernière pose des gestes maternels, dans lesquels on devine le dévouement et la tendresse.
La mariée est aussi prise en photo avec son père. Souvent, au cours des deux premières périodes étudiées, on la voit agenouillée devant lui, dans sa robe blanche, afin de recevoir sa bénédiction avant le départ pour l’église. Le geste est très différent de ceux que l’on voit poser par la mère. Le père adopte une attitude protectrice, distante mais bienveillante. On devine l’attachement et le respect, mais sans que l’affection transparaisse de manière trop directe. À partir de 1970, cette photo de la bénédiction peut être remplacée par une autre où l’on voit la mariée épingler la fleur à la boutonnière de son père. Cette fois, c’est la jeune femme qui tient le rôle actif, dans un geste empreint de fierté. Elle démontre qu’elle est prête à assumer son rôle d’épouse. Le père est passif, il accepte cette démonstration affective sans rendre la pareille.
Le père, parfois aussi la mère dans les mariages les plus récents, accompagne la mariée à l’église. Malgré la diffusion de la cohabitation avant le mariage les époux retournent chez leurs parents la veille du mariage. La mariée part donc de la maison de ses parents et se rend à l’église en leur compagnie (ou seulement avec son père). Ils entrent à l’église avec elle de manière solennelle. Ce geste est photographié assez souvent, et cela même si la jeune femme est déjà émancipée de ses parents. Pour l’observateur étranger qui tenterait de comprendre le déroulement du rituel à partir des albums de mariage, il semblerait évident que l’épouse ne dispose pas de sa liberté et qu’elle est étroitement surveillée. Il en déduirait aussi que ce sont les parents qui consentent au mariage pour elle.
L’enquête menée dans la vallée du Haut-Richelieu démontre que la réalité est plus complexe (Tremblay, 2001). Les parents ont joué un rôle relativement actif dans le rituel du mariage jusque dans les années 1980. Ils étaient habituellement les hôtes de la noce, mais ils intervenaient très discrètement dans le choix du conjoint. Par contre, ils établissaient un contrôle assez serré des fréquentations, même si la plupart des jeunes pouvaient sortir sans chaperon avant les années 1950. Si le futur époux sollicite la main de la jeune femme auprès du père de cette dernière, c’est bien plus par respect et par convenance que par désir de se soumettre à son jugement. Le père n’oserait pas affronter sa fille en s’opposant à sa décision, puisque c’est d’abord à elle que le jeune homme a fait la proposition du mariage. La demande en mariage au père de la jeune femme vient officialiser une décision déjà prise.
L’entrée de la mariée à l’église au bras de son père relève du même type de geste : il montre l’importance de l’attachement filial, bien plus que la dépendance ou la sujétion réelle de la mariée à l’égard de son père. Cette symbolisation du lien filial est devenue si importante qu’à partir des années 1970 le marié fait aussi une entrée solennelle avec son père ou ses parents. Les albums laissent l’impression qu’il vient de quitter sa famille d’origine, peu importe qu’il n’habite plus avec ses parents ou qu’il soit émancipé depuis longtemps.
L’entrée solennelle du marié avec son père ou ses parents dénote qu’il s’est introduit un changement dans le sens du rite. Si ce geste a pu signifier la dépendance des femmes à l’égard de leurs parents dans les années 1950 et 1960, il est investi d’une tout autre signification à partir des années 1970. L’entrée des époux accompagnés de leurs parents à l’église veut illustrer la densité des liens entre parents et enfants, même si les premiers n’exercent plus d’autorité réelle au moment du mariage des seconds. En dépit de la diffusion de la cohabitation avant le mariage chez les couples mariés dans les années 1990, les parents tiennent à ce rite d’entrée et manifestent vigoureusement leur désaccord devant un curé qui tente d’implanter une nouvelle pratique dont ils sont exclus (Tremblay, 2001). Ils veulent tenir une place centrale dans la célébration du mariage, une place qui montre davantage une image idéalisée de la famille que l’exercice de l’autorité parentale.
Les photos des époux avec leurs familles d’origine
Dans certains albums, on peut voir des photos montrant les époux avec leurs parents ou avec leur famille d’origine. Sauf exception, ce type de photos ne se rencontre pas avant la fin des années 1960, et seulement lorsque les mariés ont fait confectionner un album plutôt volumineux. La présence de ce genre de clichés dans l’album de mariage soulève malgré tout des interrogations. Ces photos mettent à l’avant-scène les parents et les frères et soeurs en tant qu’acteurs dans le rituel du mariage, au moment où leur rôle effectif tend à perdre de l’importance. Elles montrent que les époux n’entreprennent pas seuls cette démarche, et que les membres de la famille sont solidaires de leur engagement.
Certains albums contiennent des photos de la famille d’origine, avec les conjoints mariés et leurs enfants. On trouve donc sur ce genre de photos toute la descendance des parents des époux. Le mariage donne l’occasion de fixer l’image de la famille et d’en renforcer les liens. Quelques albums font une place aux photos du couple ou de l’un des époux avec ses grands-parents. Ici aussi, l’objectif est de pérenniser la relation en fixant sur pellicule le visage des ascendants. Cette place occupée dans l’album révèle que les mariés attachent de l’importance à la filiation.
3) La symbolisation du lien conjugal
Le couple constitue l’acteur principal de l’album de mariage. Les albums sont de plus en plus volumineux avec le temps, mais la proportion de photos du couple par rapport aux autres photos est sensiblement la même, autour de 40 %. Ce qui change au cours de ce dernier demi-siècle, c’est la mise en scène réalisée par le photographe.
La période 1955-1970
Entre 1955 et 1970, les photos du couple sont prises au studio du photographe, à l’église ou à la salle de réception, très rarement à l’extérieur. Certains photographes donnent un effet dramatique à une photo de l’album en plaçant les époux à contre-jour. Toutefois, la mise en scène de l’ensemble est peu élaborée. Le couple est représenté sans trop d’artifices, si ce n’est la robe de la mariée qui place cet événement dans une dimension irréelle, en dehors de la vie quotidienne.
Au cours de cette première période, la plupart des photos du couple représentent une action qui se déroule à l’église ou à la réception. Le couple est photographié à l’église, agenouillé ou debout devant le prêtre, alors que l’époux glisse l’anneau de mariage au doigt de l’épouse. À la fin des années 1960, le photographe immortalise aussi le baiser et la communion des époux. Ensuite, un cliché montre les époux au sortir de l’église puis un autre représente la montée en voiture. On voit très souvent les mariés boire une coupe de vin et presque tous les albums présentent une photo des mariés qui tiennent ensemble un couteau au-dessus de leur gâteau de noces. Le couple est parfois photographié alors qu’il ouvre les danses. Assez souvent voit-on un cliché des époux ayant revêtu leurs costumes de voyages de noces et s’apprêtant à monter en voiture. Il y a enfin une série de photos du couple, prises généralement au studio du photographe, parfois à l’extérieur, près de l’église ou de la salle de réception.
Les clichés qui montrent les époux en train d’accomplir une action caractérisent assez bien l’image que l’on se fait et que l’on veut conserver du mariage. Une série de gestes instaurent le couple marié : échanger des anneaux, monter dans la voiture, boire une coupe de vin, tailler le gâteau, danser ensemble, partir en voyage. Ces gestes évoquent à la fois la dimension religieuse et quotidienne de l’amour. On y devine la promesse de fidélité et l’engagement pour la vie. On y perçoit aussi la fusion des volontés et des désirs, le goût du partage et des projets. La consommation de vin et la présence du gâteau rappellent que le couple vivra désormais ensemble, partageant les repas quotidiens. C’est ensemble aussi que les époux trouveront leur plaisir, comme le suggèrent les photos où l’on voit le couple ouvrir les danses ou partir en voyage de noces.
Dans deux albums de cette période, les photographes ont voulu renforcer cette vision idéalisée du couple et du mariage en prenant des photos dans un décor naturel extérieur. Dans le premier album, dont le mariage est célébré en 1965, on voit, par exemple, une photo qui montre les époux à demi tournés devant le paysage. Dans le second album, dont le mariage est célébré en 1969, la mise en scène est encore plus recherchée et annonce les changements des périodes suivantes. Les gestes sont visiblement mis en scène par le photographe. Sur l’une de ces photos, l’épouse est à assise par terre, alors que son mari est assis sur un banc; sa tête, posée sur les genoux de l’époux, est protégée par les mains de ce dernier.
Ces clichés évoquent l’amour conjugal à base de tendresse, de complicité et de projets menés à deux. Le décor naturel rappelle la beauté de l’amour, qui transforme ce que l’on voit et isole du reste du monde. Le photographe fixe une image qui représente l’époux comme le protecteur de l’épouse, alors que cette dernière est empreinte de douceur et de fragilité.
La période 1971-1986
À partir de 1971, les photographes font plusieurs clichés à l’extérieur, dans un jardin attrayant, cherchant à bien composer leurs photographies. Ils s’efforcent de placer les mariés de manière à illustrer l’amour romantique et éternel. Les photographies de couples se promenant dans des jardins enchanteurs sont très nombreuses.Toutefois, lorsqu’il s’agit d’interpréter cet amour idéalisé, il arrive que les mariés fassent preuve d’une certaine gêne. Plusieurs couples paraissent maladroits, leurs attitudes ne semblent pas naturelles.
Les photographes disposent de cadres de carton, de différentes formes et grandeurs, qui permettent de placer deux ou quatre photos sur la même page. Ces arrangements amènent les photographes à transformer l’album en récit. L’organisation des albums de mariage de la période 1955-1970 respecte l’ordre chronologique des événements, mais à partir de 1971 on peut suivre le déroulement de la cérémonie religieuse dans le moindre détail. Une première page montre les mariés qui entrent à l’église, la suivante illustre les gestes du mariage : échange des consentements, échange des alliances et baiser. Ensuite, on peut voir les époux participer à la consécration et communier, puis signer les registres avec leurs témoins. Ce type d’encadrement permet de montrer davantage de clichés, et surtout de représenter les époux dans des moments d’action.
D’autres innovations transforment l’aspect de l’album et contribuent à modifier la représentation des époux. L’introduction des effets photographiques comme les surimpressions et les photos à contre-jour donne une touche artistique à l’album et situe les époux dans un espace irréel, accentuant la vision idéalisée de l’amour et du couple qui transparaissait déjà à travers les costumes. Des cadres en forme de coeur ou d’ovale donnent du relief à certaines photographies. La réalisation d’une image résultant de la surimpression de la photo des mariés et d’une feuille de musique, ou du registre consignant l’acte religieux, situe le mariage en dehors du temps et même de l’espace.
À la fin des années 1960 apparaît dans les albums de mariage le cliché des mains des époux portant les alliances. Ce type de photos devient assez répandu dans la période 1971-1986. La photo des alliances est habituellement prise près du bouquet de la mariée; le gâteau ou le registre religieux peuvent aussi servir d’arrière-plan. Cette photo démontre la force symbolique de l’anneau de mariage, qui, à lui seul, devient un objet « photographiable ». Les alliances sont des bijoux de grande valeur, et leur design souvent exclusif peut mériter cette attention. Mais surtout, cet objet concentre toute la signification du mariage. L’alliance évoque la conquête enfin achevée, le lien visible aux yeux de tous, l’engagement inaltérable que ce lien suppose.
D’autres photos n’illustrent pas une action précise, mais elles révèlent des rôles, des sentiments ou des idées sous-jacentes au mariage. Les photographes veulent illustrer l’admiration que les époux éprouvent l’un pour l’autre. Autant les hommes que les femmes adoptent des positions gestuelles à travers lesquelles transparaît cette fierté. Le marié qui, les bras croisés, regarde son épouse en souriant, ou l’épouse qui se blottit dans le dos de son mari, pendant que celui-ci ajuste sa cravate. D’autres clichés évoquent la complicité et la confiance mutuelle. Un type d’effet spécial créé par certains photographes représente l’idée que le conjoint occupe toutes les pensées, que l’on ne peut vivre sans l’autre. L’un des conjoints est photographié au premier plan, tandis que l’autre est placé en médaillon ou à l’arrière-plan.
On trouve encore des photographies qui montrent l’époux dans un rôle de protecteur vis-à-vis de l’épouse. C’est dans le regard, dans la disposition des mariés et dans la direction du geste que transparaît cette attitude. Le marié, par exemple, fixe le photographe, alors que la mariée est appuyée contre lui et regarde dans une autre direction. D’autres gestes, encore moins équivoques, démontrent que le désir sexuel est assumé. Quelques photographes ont voulu fixer sur pellicule l’époux qui enlève la jarretière de l’épouse. L’allusion à l’intimité sexuelle est directe. D’autres mariés sont photographiés pendant qu’ils s’étreignent ou s’embrassent. Ces gestes, que l’on voyait très rarement dans les albums de mariage avant 1965, dénotent que quelques tabous ont été levés.
Les albums de mariage contiennent encore les photos habituelles de la cérémonie religieuse, de l’arrivée et du départ de l’église et quelques photos prises au moment de la réception. Les moments importants de la célébration, comme l’arrivée des époux et des témoins, l’échange des consentements, l’échange des alliances et la communion sont photographiés. Ces photos prises à l’église tiennent une place non négligeable dans les albums. Ces couples, qui ont délaissé la pratique religieuse régulière, associent le mariage à une démarche religieuse. Cette observation corrobore les explications de plusieurs témoins interrogés lors d’une enquête précédente. Parmi les 30 couples mariés à l’Église catholique entre 1980 et 1995 que nous avons rencontrés, 22 ont utilisé des mots relevant de la croyance religieuse pour justifier leur mariage (Tremblay, 2001).
Les photos prises avec le gâteau de noces ou avec les coupes de vin sont présentes dans la plupart des albums de mariage. On y voit aussi la photo du groupe des invités sur le parvis de l’église. Parfois, la table d’honneur de la réception est photographiée. Par contre, la photo du départ des époux en voyage de noces n’est presque plus dans les albums. Ce changement peut être attribuable au déplacement de la cérémonie religieuse de la matinée vers la fin de l’après-midi, ce qui amène les mariés à partir tard dans la soirée. Les photographes n’acceptent peut-être plus de demeurer disponibles aussi tard le samedi soir afin de prendre une photo.
On trouve aussi très souvent une photo du couple devant les portes grandes ouvertes de l’église, et les photos habituelles devant ou à l’intérieur de la voiture. Ces photos évoquent l’avenir, le départ, le voyage. Elles montrent bien que, dans l’imaginaire populaire, le mariage est le commencement de la vie, ou le commencement d’une nouvelle vie.
La période 1987-2001
L’élévation du niveau esthétique, lié au développement technique, est notable entre les albums de cette période et ceux de la période précédente. Flous, prises à contre-jour, photos en noir et blanc, virage sépia, plans en contre-plongée, mouvements des acteurs, surimpressions d’images et utilisation de filtres transforment complètement les albums de la dernière décennie du siècle. Les photographes amènent les époux dans de beaux jardins et utilisent avec beaucoup de talent les fontaines, les bassins d’eau, les arbres et les plates-bandes fleuries. Les époux semblent aussi généralement moins intimidés par l’appareil photo.
Le changement touche également le type de photo que l’on trouve dans l’album. Il y a encore beaucoup de photos de famille, mais certaines actions ont disparu. Il est plus rare, par exemple, de voir la mariée photographiée devant ses cadeaux ou aidée de sa mère ou encore bénie par son père. Certains albums montrent une ou deux photos prises pendant la cérémonie religieuse. Le contraste est assez grand avec les albums de la période précédente qui présentaient, à la manière d’un roman-photo, tous les gestes religieux posés par les époux et leurs témoins.
Les photos du couple seul sont épurées, si on les compare à celles des deux premières périodes. Les représentations des mariés évoquent plus que jamais l’idéalisation de l’amour conjugal; elles illustrent rarement des actions concrètes. Il est rare de trouver des clichés de la communion, de l’échange des anneaux et du baiser à l’église. Les photographes conservent la sortie de l’église et la montée en voiture, comme signe du passage à l’église. La réception ne les intéresse pas davantage. Il y a moins de mariés pris en photo derrière le gâteau de noces, un couteau dans leurs mains jointes. On les montre encore, toutefois, une coupe de vin à la main. Tout se passe comme s’il n’y avait pratiquement plus d’actions concrètes qui fondent le couple; les costumes et un jardin fleuri, bien aménagé, suffisent à justifier la séance de photos. L’union est réalisée en dehors de l’institution, en dehors du temps et de l’espace réels. Il ne reste plus que le départ de la maison familiale et la sortie de l’église comme actions concrètes prises en photo. Cette tendance s’approche de ce que Clara Gallini a nommé le rituel médiatique, qui se suffit à lui-même et participe, comme le rituel religieux, à la fondation du couple.
4) La symbolisation de l’alliance des familles
De manière quasi incontournable, de 1955 à l’an 2001, on trouve dans les albums de mariage la photographie de tous les invités prise sur le parvis de l’église, parfois à l’intérieur de l’église quand les conditions du temps ou l’heure du mariage ne sont pas favorables à la photographie en plein air. Cette photo illustre l’une des fonctions les plus anciennes du rituel du mariage, celle d’opérer l’alliance des parentés. Le mariage unit non seulement deux conjoints non apparentés, mais aussi leurs familles respectives (Segalen, 1998). Le rituel crée des liens d’affinité entre les époux de même qu’entre les familles. Même si, dès le début des années 1960, l’alliance des familles a très peu de répercussions dans la vie quotidienne des époux, cette photo est un élément fondamental de l’album de mariage. Presque tous les couples possèdent une photo du groupe de leurs invités à la noce. La référence au groupe des apparentés est encore, à la fin du siècle, un symbole du mariage.
La photographie de tous les invités est celle sur laquelle les membres de la famille s’attardent longuement au moment de l’entrevue. Ils nomment les membres de la parenté, constatent les absences, se remémorent les liens et les anecdotes. Ce cliché permet aussi de faire la sociographie de la famille, comme l’a fait Martine Segalen. On peut voir les membres de la famille les plus proches se placer auprès des époux, alors que la parenté éloignée s’installe derrière. Cette photo révèle l’étendue de la parenté et le genre de noces qui sont célébrées. Dans la période 1955-1970, les groupes de 200 invités ne sont pas rares, surtout à la campagne. À partir du début des années 1970, il y a souvent moins d’une centaine d’invités qui accompagnent les mariés à l’église. Les époux ont des familles moins grandes et ils ne compensent pas en invitant plus d’amis. Les noces se font plus intimes et demeurent généralement une affaire de famille.
D’autres types de photos montrent l’extension du lien familial opéré par la célébration du mariage. Les albums contiennent très souvent une photo du couple de mariés avec leurs parents respectifs, pendant toute la deuxième moiti du XXe siècle. O On peut y voir aussi parfois, lorsque l’album contient plusieurs photos, un cliché de la table d’honneur à la réception. Ces photos visent à solenniser l’alliance des familles, les familles étant cette fois représentées par les figures parentales. Il arrive aussi que l’alliance des familles prenne une forme moderne en montrant le couple de mariés avec la famille du marié, et vice versa. Dans ce type de photographie, c’est davantage l’intégration du conjoint à sa belle-famille qui est mise en évidence.
Les photos de groupes prises depuis 1987 semblent amorcer un virage. Certaines photos montrent des invités distraits, dissimulés derrière d’autres personnes, ou qui se déplacent au moment où le photographe fixe l’image du groupe. Désintérêt du photographe? Désintérêt des invités? La plupart des couples conservent tout de même cette photo du groupe dans leur album, d’autres ne l’ont pas retenue. La photo de tout le groupe est alors moins fiable, sur le plan de l’analyse documentaire, lorsque les époux veulent se remémorer les invités présents à leur mariage. L’album de mariage n’est plus le support de la mémoire familiale; il devient un symbole de l’amour des époux. Une informatrice mariée en 1999, qui n’avait pas choisi cette photo quand elle a composé son album, a émis le commentaire suivant, qui est éloquent concernant l’utilisation des photos de mariage :
Oui, quand on fait la photo, là, toute la famille aussi à la fin, je pense que c’est une photo importante. On l’a pas dans l’album, mais on l’a dans les autres […] c’est important parce que […] on s’en rend pas compte, mais dans le temps qui passe, y a beaucoup de gens qui ne sont plus là, qui y étaient à ce moment-là, c’est le fun parce que tu peux les montrer à tes enfants, à des gens que tu connais, dans le fond, au lieu de les imaginer tu peux leur dire : « Bien regarde, ça c’est ma mère, ça c’est… » C’est important pour moi parce que dans le fond, ma fille a jamais connu ma mère. Mon fils n’a jamais connu ni l’un ni l’autre. C’est sûr que c’est quelque chose d’important que tu vois tout le monde […] Ça me permet de garder des souvenirs des gens aussi. (G-99)
5) Les rapports de sexe à travers les albums de mariage
La place occupée par la mariée dans l’album relègue l’époux dans un rôle secondaire, et cela de façon très marquée jusqu’au début des années 1970. Le photographe ne se déplace pas chez les parents du marié pour y prendre des photos et ne photographie pas le marié seul. Il le prend quelques fois avec son père au moment de l’entrée à l’église, mais jamais avec sa mère. Le marié apparaît dans l’album lorsque la célébration religieuse est commencée.
Si la jeune femme tient un rôle central dans l’album de mariage, elle est généralement passive. Photographiée chez ses parents, sa mère s’occupe d’elle, son père la protège. Des clichés nous la montrent dans sa chambre, ou dans celle de ses parents, dans le salon ou dans le jardin, mais rarement pose-t-elle des gestes d’action. Jusqu’au milieu des années 1960, elle est aussi passive à l’église : l’époux lui glisse l’alliance au doigt, il lui donne le bras au moment de la sortie. À partir de 1965, les photographes modifient leur regard; ils fixent l’image de la mariée qui communie, qui signe les registres et qui passe l’anneau au doigt de son mari.
Cette place prédominante occupée par la mariée dans l’album de mariage, comme l’observe aussi Clara Gallini en Italie, appuie l’idée populaire que la mariée est la reine de ce grand jour. Cela atteste également la proposition de Pierre Bourdieu qui critique le concept de rite de passage, lui préférant celui de rite d’institution. Il affirme que le rituel du mariage ne vise pas principalement à séparer les gens mariés de ceux qui ne le sont pas, mais plutôt à instituer une division sexuelle des rôles et des responsabilités. Pendant la période 1955-1970, le mariage est un rite de passage qui donne aux époux la possibilité de vivre une sexualité épanouie sans risquer la honte et la désapprobation sociale. Car même dans le contexte de la révolution sexuelle, les informateurs et les informatrices affirment qu’il aurait été très difficile pour eux de vivre ensemble sans se marier, et la conception d’un enfant impliquait nécessairement l’organisation d’un mariage à la hâte. Le mariage est aussi, et les albums le démontrent bien, l’institution de la différenciation sexuelle. C’est bien la mariée qui est photographiée devant la table des cadeaux : objets ménagers et literie qui meubleront son quotidien. À travers les rites, la mariée intériorise ce que la société attend d’elle, c’est-à-dire remplir adéquatement son rôle d’épouse et de mère. Les photos illustrent sa passivité, son désir de plaire et d’être protégée par son mari, sa volonté de respecter ses parents, son acceptation du rôle de ménagère.
Certaines photos révèlent cependant que des changements sont amorcés dans les rapports entre les sexes au milieu des années 1960. Les albums montrent une mariée plus active à l’intérieur de la célébration religieuse : elle signe, elle communie, elle passe l’alliance au doigt de son mari. Deux photos, dont le sens est équivoque, illustrent bien ce changement. Sur la première, la mariée revêtue de son costume de voyage fait manger un morceau de gâteau de noces au marié. La seconde montre la mariée qui fait boire du vin à son époux. Ces gestes peuvent être lus au premier degré, c’est-à-dire qu’ils représentent une responsabilité féminine, celle de l’alimentation de la famille. Ils peuvent aussi évoquer, au second degré, la consommation sexuelle à laquelle non seulement l’épouse consent, mais participe avec un certain plaisir.
Une photo est particulièrement intéressante et n’aurait pas eu sa place dans un album de mariage seulement quelques années auparavant. On peut y voir la mariée qui, au départ en voyage de noces, est assise au volant, alors que son mari prend place sur le côté passager. L’informatrice raconte que cette photo est une blague suggérée par son mari. Elle ne savait pas conduire à cette époque, mais elle ajoute qu’elle a payé la noce, les meubles et l’achat de la voiture, parce que son mari était aux études jusqu’à la veille du mariage et qu’elle travaillait. Cette photo montre que la transgression des rapports sociaux de sexe était socialement acceptable à la fin des années 1960. Si c’est l’époux qui concède à la femme la première place, le photographe a tout de même jugé que cette scène était « photographiable ». Après coup, les époux ont vu l’épreuve de cette photo et ils ont considéré qu’elle méritait d’être insérée dans l’album. Sans doute représente-t-elle le type de relations qu’ils voulaient établir dans leur mariage, au risque de surprendre certains membres de la famille et les amis qui ont regardé l’album par la suite.
Dans les albums de la période 1971-1986, la mariée est toujours au centre du rituel, mais elle s’est affranchie de sa passivité. On la voit prendre soin de son père et agir à l’église. Elle paraît libérée au plan sexuel et épanouie dans sa relation avec son mari. Les photographes ont rarement placé l’époux de manière à le définir comme le protecteur de l’épouse. Par contre, un type de photo est apparu, qui rappelle le préjugé populaire sur la longueur excessive des préparatifs des femmes. On voit en effet, dans quelques albums, le père du marié montrer l’heure à son fils, comme s’il lui disait qu’il devrait maintenant s’habituer à attendre son épouse. De façon générale, si l’album présente toujours le point de vue de la mariée, on y voit beaucoup les époux dans des attitudes de complicité, de camaraderie et de tendresse. À partir de 1971, la première photo de l’album est souvent celle du couple, ou encore une photo des alliances, alors qu’avant 1970, presque tous les albums présentaient d’abord la mariée seule ou avec sa mère ou son père.
Cette tendance à l’équilibre entre l’homme et la femme est moins affirmée dans la période 1987-2001. D’abord, la mariée redevient celle qui occupe les premières pages de l’album, avec sa mère, son père ou sa famille. Par contre, les photos du marié seul, avec ses parents ou avec sa famille, sont plus nombreuses. La volonté de lui faire une place équitable dans l’album du mariage est notable. À la fin du siècle, le mariage consacre peut-être moins le changement de statut pour la femme qu’un passage pour le couple. Le mariage constitue actuellement un choix individuel, relégué au domaine de la vie privée. Il faudrait cependant vérifier s’il ne représenterait pas, pour ces couples mariés récemment, une forme renouvelée du rite de passage associé à une vision sacrée du mariage et de la famille.
De l’usage des symboles dans la construction des identités
Clara Gallini a attiré l’attention sur l’importance des nouveaux rites qui se sont développés autour de la fabrication d’images du mariage. Elle en conclut que la commémoration n’est pas l’objectif principal de ces séances de photos et de prises de vues, qu’il s’agit plutôt d’un nouveau rituel médiatique doublant la cérémonie religieuse et fonctionnant de la même manière, c’est-à-dire que chaque visionnement, chaque lecture de l’album entraîne la refondation du couple. Il y a, au Québec, un rite de la prise des photographies dans un jardin bien aménagé, mais aucun couple n’a rapporté l’existence de réceptions autour de l’album de photos ou devant l’écran de télévision afin de regarder la cassette du mariage. Les couples ont presque tous apporté leur album de photos lorsqu’ils sortaient dans la famille et chez les amis au cours des premiers mois de leur mariage. Cependant, ils affirment que ces rencontres étaient plutôt intimes et informelles.
Les albums de mariage, qu’ils fassent partie ou non d’un rituel médiatique, sont encore très certainement des objets commémoratifs. Ils ravivent le souvenir et sont des témoins précieux des gestes posés ce jour-là. Les couples qui ont accepté de prêter leur album pour cette étude le font avec réticence et ils exigent des assurances que nous leur rapporterons l’album. D’autres refusent tout simplement de voir leur album franchir le seuil de leur porte. Comme le souligne Gallini, ces photos sont produites grâce à des techniques mass-médiatiques, donc aisément reproductibles. Toutefois, leur valeur symbolique est inestimable. Elles sont entrées dans le trésor familial que l’on veut montrer et transmettre aux enfants. L’album de mariage a acquis un statut de symbole au cours des dernières décennies. Il fait partie d’un ensemble d’objets – comme les alliances ou la robe de la mariée – qui participent à la construction des identités conjugale et familiale.
Si l’album de mariage n’est pas un rituel médiatique en soi, comme l’observe Gallini en Italie, la prise de photos renvoie tout de même à une forme de médiatisation. Les mariés, habillés de costumes extraordinaires, sont disposés comme les acteurs d’un photo-roman. Ils se déplacent dans un décor enchanteur, telles des vedettes de cinéma, et sont photographiés sous tous les angles. Et le photographe multiplie les clichés, contribuant à faire de cette séance de photos un rite très important. Il offre un produit de consommation dont les mariés ne veulent ou ne peuvent pas faire l’économie. Dans les dernières années du siècle, certains photographes font plus qu’offrir un produit de masse. Ils ont développé leur art au point de considérer ces photos de mariage comme des oeuvres d’art : certains signent chacune de leurs photos pour réserver leurs droits. Ces photographies distinguent les mariés. Elles permettent de commémorer, mais aussi de marquer l’écart social.
Cet essai démontre l’intérêt des albums de photos de mariage pour faire progresser nos connaissances dans une dimension peu connue de l’histoire de la famille, celle de l’évolution des rapports symboliques au XXe siècle. Certains gestes observés dans les mariages récents, qui paraissent inadaptés au contexte de la vie quotidienne des jeunes, sont plus que des coutumes conservées par pur traditionalisme. Ces rites se réfèrent à des liens, des émotions, des croyances. Ils illustrent les conceptions du couple à propos de la conjugalité, des liens avec leurs parents et leurs familles. Ils montrent les valeurs auxquelles les époux sont attachés. Dans les mariages célébrés à la fin du siècle, ces gestes sont d’autant plus significatifs qu’ils ne sont plus obligatoires. Ils révèlent l’engagement de certains acteurs dans la construction de leurs identités conjugale et familiale, qui se manifeste à travers des symboles comme l’album, l’alliance, le gâteau, le voyage et la robe de la mariée. « L’invention de la tradition » est délibérée; elle représente l’un des procédés par lesquels sont créées les identités.
Repoussés aux confins de la vie privée à mesure que le siècle avance, si les rituels ne sont pas (encore) disparus, c’est qu’ils expriment des croyances et des sentiments socialement partagés. Les rituels traduisent en gestes et en mots l’intériorisation des rôles basés sur la différenciation sexuelle. Ils supposent l’adhésion, consciente et inconsciente, aux valeurs et aux mythes qui donnent un sens à notre univers social. L’analyse des photos de mariage permet de saisir, dans une perspective diachronique, ce va-et-vient entre l’individuel et le social, entre l’intériorisation des structures sociales et la socialisation des individus.
Appendices
Notes
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[1]
Cette recherche a été menée grâce à une bourse postdoctorale du Conseil de recherche en sciences humaines du Canada. Je tiens à remercier madame Denise Lemieux et l’INRS Urbanisation, Culture et Société pour leur accueil.
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[2]
Merci à Denise Lemieux, Bettina Bradbury, Denise Baillargeon, René Hardy et Suzanne Morton, leurs commentaires ont permis d’enrichir cet article.
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[3]
Cette recherche s’inscrit dans le prolongement de mes recherches doctorales et postdoctorales. J’ai conduit une enquête sur les rituels du mariage au XXe siècle, et la photographie m’est apparue un matériau d’une grande richesse pour approfondir l’analyse du lien social. Les albums de mariage ont donc été collectés auprès de ces couples mariés entre 1955 et 2001 et numérisés. Une assistante de recherche a collecté et numérisé quelques albums auprès d’informateurs dont le mariage avait eu lieu dans la région de Trois-Rivières, ce qui m’a permis de contrôler la portée de mon analyse.
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[4]
Les informateurs et informatrices qui ont accepté de participer à cette enquête (28 couples) se sont mariés entre 1955 et 2000. Ils proviennent principalement de la région de St-Jean-sur-Richelieu et quelques-uns des environs de Trois-Rivières. Ils sont répartis uniformément sur toute la période : 8 pour les années 1960, 6 pour les années 1970, 7 pour les années 1980 et 3 pour les années 1990. Ils appartiennent aux catégories socioprofessionnelles des travailleurs manuels (qualifiés : p. ex. technicien, non qualifiés : journalier) et des cadres intermédiaires et personnels de bureau. Les noces des couples mariés entre 1955 et 1975 ont été organisées et payées par les parents, alors que les couples mariés plus récemment ont, en grande partie, assumé les frais de la réception.
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