Essai

ArafatLe passé, le présent et les options futures[Record]

  • Marie-Joëlle Zahar

L’escalade du conflit israélo-palestinien remonte à septembre 2000. C’est toutefois en septembre 2001, après l’attentat terroriste contre les tours jumelles du World Trade Center à New York que ce conflit prend une tournure particulièrement inquiétante. En effet, bien que la deuxième Intifada remonte à septembre 2000, c’est un an plus tard que le vocabulaire politique s’aligne sur l’escalade militaire quand Israël adopte le vocabulaire de la guerre contre le terrorisme dans sa lutte contre l’Autorité nationale palestinienne, tenue responsable de la violence. C’est dans ce cadre que Yasser Arafat, accusé de soutenir des actes terroristes contre l’État hébreu, revient sous les feux de l’actualité. Si l’administration américaine essaie de le supplanter en imposant la candidature de Mahmoud Abbas au poste de Premier ministre et alors même que le cabinet israélien vote son expulsion des territoires occupés, voire menace de l’assassiner, les foules palestiniennes continuent à lui vouer ferveur et loyauté. Contre toute attente, Arafat gagne son bras de fer avec Washington ; Abbas démissionne de ses fonctions et Washington fait pression sur Israël pour ne pas donner suite à sa menace d’expulsion. De toute évidence, le facteur Arafat ressemble de moins en moins à un épiphénomène de la paralysie du processus de paix. Quel est cet homme qui tient tête aux puissants de ce monde sans en avoir vraiment les moyens militaires et économiques ? Qui est cet Arafat qui inspire dévotion aux uns et haine aux autres : un terroriste, un révolutionnaire ou le gagnant du prix Nobel de la paix ? Pour mieux comprendre Arafat, et par là même le rôle potentiel de sa personnalité dans le futur des relations israélo-palestiniennes, toute analyse doit se pencher sur la totalité de son expérience. Du révolutionnaire au chef politique, une même logique relie les différentes facettes de l’homme et les différentes étapes de sa lutte pour le peuple palestinien. Cette logique est celle de la survie. Quel que soit le contexte dans lequel il évolue, Arafat est un survivant. Survivre au pouvoir c’est avant tout naviguer entre les écueils érigés par les adversaires internes et externes. En démocratie, tout chef politique est tributaire de ses électeurs pour rester au pouvoir. Dans les régimes et autres organisations autoritaires, le maintien du pouvoir implique un jeu encore plus complexe. Il s’agit de coopter les alliés et de dissuader les ennemis potentiels tout en s’assurant que l’équilibre des forces, entre et au sein des deux groupes, demeure tel que nul n’a vraiment les moyens de monter un défi soutenu au leader politique. Aux défis externes, il s’agit souvent d’opposer un soutien populaire interne qui légitime le leader assiégé et signale à ses détracteurs internationaux que nul autre ne jouirait de l’assentiment populaire et qu’il faut donc, bon gré mal gré, composer avec la personne au pouvoir. En d’autres termes, tout chef politique qui veut se maintenir au pouvoir doit se constituer à la fois représentant fidèle de ses concitoyens et interlocuteur indispensable de ses adversaires. À ce jeu, nul n’est passé plus maître que les chefs autoritaires des pays du Moyen-Orient. Tout comme Yasser Arafat, les grands chefs politiques arabes – le président syrien Hafez al-Assad, le roi Hussein de Jordanie – ont dû composer avec des défis internes à leur leadership, mais aussi avec des défis externes de taille. Et tout comme Arafat, ils ont excellé au jeu qui consiste à se maintenir au pouvoir envers et contre tous. À son décès en 2000, le roi Hussein de Jordanie avait à son actif un demi-siècle de règne. Pour saisir le discours et les actions politiques d’Arafat, tout comme ceux de ces autres …

Appendices