Comptes rendus : Économie internationale

Myers, Gordon, Banana Wars. The Price of Free Trade. A Caribbean Perspective, London, Zed Books, 2004,193 p.[Record]

  • Emmanuel Nyahoho

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  • Emmanuel Nyahoho
    École nationale d’administration publique
    Université du Québec, Montréal

Dans le domaine de l’économie internationale, peu de livres sont dédiés à l’examen des litiges commerciaux dans des industries et de surcroît impliquant des pays à niveau de développement variable. Ce livre, rédigé par Gordon Myers, apporte sans aucun doute un éclairage fascinant sur le dilemme vécu par les pays en développement (pvd) dans leur tentative d’insertion dans le commerce mondial. La question est simple : Les pvd devraient-ils embrasser le principe de la liberté des échanges au risque de voir disparaître un pan entier de leurs facilités de production ? C’est ainsi que l’auteur nous offre la perspective des pays des Caraïbes, producteurs de bananes. Si les préfaciers du livre, le premier ministre de St-Vincent et Grenadines (Ralph Gonsalves), ainsi que l’ancien premier ministre de la République dominicaine (Edison James), appellent à une protection préférentielle en faveur des pays des Caraïbes, au nom d’une certaine « morale sociale », l’auteur lui-même ne cache pas qu’à terme, l’industrie de la banane perdra beaucoup de son importance dans les Caraïbes. En fait, ce livre contient bien des arguments pour plaire autant aux détracteurs du libre-échange qu’à ses supporteurs. Mais comme d’habitude, ces derniers peuvent être réconfortés dans l’utilité et la simplicité de leurs convictions. Suivons à cet égard l’analyse de l’auteur. L’ouvrage de Gordon Myers présente une étude sur les causes et les conséquences d’un litige qui perdure depuis plusieurs années relativement au commerce de la banane. Ce différend commercial qui oppose les deux grands blocs commerciaux en l’occurrence les États-Unis et l’Union européenne a fait l’objet de débats et négociations intenses au sein de l’omc. D’un côté, l’Union européenne soutient le groupe des pays Afrique, Caraïbes et Pacifique (acp) considéré comme étant des pays à économie vulnérable et dépendants du commerce de la banane, et de l’autre côté les États-Unis qui contrôlent le marché des pays d’Amérique latine à travers la présence des grandes firmes multinationales américaines dans ces pays (Chiquita, Dole, Del monte). À cet égard, les pays de l’Union européenne, de par leurs liens historiques, coloniaux, et la particularité de leurs relations commerciales privilégiées avec les pays de l’acp sont en faveur de l’adoption d’un régime commercial qui tient compte de la fragilité et la dépendance des économies de ces pays sur l’exportation des bananes. À l’opposé, les États-Unis sont des fervents partisans d’une politique de libre-échange en vertu des dispositions de l’omc. Pour mieux illustrer l’ampleur, les causes profondes et les conséquences de ce litige, l’auteur a présenté brièvement une analyse économique des spécificités ainsi que les principales caractéristiques de l’industrie de la banane dont l’origine remonte au début du 19e siècle à la suite d’une politique d’implantation décidée par la puissance impériale qu’est le Royaume-Uni. Autrefois principaux exportateurs de la banane, les pays des Caraïbes se font aujourd’hui dépasser par les pays d’Amérique latine (Équateur, Costa Rica, Colombie, Guatemala, Honduras et le Panama) qui couvrent presque 80 % des exportations mondiales. Les pays d’Amérique latine détiennent un avantage comparatif majeur dans la production et l’exportation de la banane grâce à la présence d’une multitude de facteurs propices à cette industrie, en l’occurrence, un sol fertile favorable à la culture de la banane, l’abondance des grandes superficies de plantations, une main-d’oeuvre à salaire compétitif, la proximité des centres de production des marchés d’exportations et l’existence d’une industrie exportatrice à forte intensité en capital grâce à la présence des grandes firmes multinationales dans ces pays. Par contre, malgré le fait que l’économie des pays des Caraïbes dépend essentiellement de l’exportation de la banane, ces derniers ne disposent pas …