Comptes rendus : Mondialisation et transnationalisme

Rapley, John, Globalization and Inequality. Neoliberalism’s Downward Spiral, Boulder, co, Lynne Rienner, 2004, 193 p.[Record]

  • Gabrielle Lachance

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  • Gabrielle Lachance
    Sociologie, option développement
    Sainte-Foy, Québec

On peut se demander ce qu’un autre ouvrage sur la mondialisation peut apporter de neuf. Une recherche de ce thème sur le moteur Google donne 878 000 titres en français et 4 600 000 en anglais. Comme le phénomène évolue rapidement, les études émanant de diverses disciplines permettent une mise à jour de ses tenants et aboutissants. Il est intéressant de noter que le dernier Forum économique mondial de Davos a retenu comme principaux thèmes de discussion, non pas l’économie mondiale et la libéralisation des échanges, mais la pauvreté, la mondialisation équitable et le changement climatique. Cela s’apparente davantage à des thèmes chers au Forum social mondial de Porto Alegre. Ce dernier aurait-il influencé à ce point les responsables économiques et politiques réunis à Davos ? Serait-ce plutôt, comme nous le verrons dans ce volume, que les défenseurs de la libéralisation ont enfin compris, devant l’échec évident du modèle néolibéral, qu’il leur fallait « s’adapter ou mourir » (p. 165) ? Comme amorce, l’auteur évalue l’impact de la mondialisation néolibérale sur les modèles de distribution du revenu dans le monde et montre comment cela a affecté la stabilité politique tant à l’échelle nationale que mondiale. Pour ce faire, il utilise le concept de régime politique (basé sur des normes) plutôt que celui d’institution (plus spécifiquement l’État-nation) et opine que, pour être fonctionnel, un régime doit non seulement avoir une stratégie d’accumulation du revenu mais aussi une stratégie de distribution. Il considère cette dernière comme la clé du processus, car lorsque le peuple croit que les élites le privent de ce qu’il considère être une juste part des ressources de la société, il peut saper leur pouvoir et même le détruire. L’auteur aborde ensuite le rôle prépondérant que les élites jouent dans la constitution du pouvoir économique et politique d’une société. Il étudie plus particulièrement trois régimes de la période d’après-guerre qui ont émergé de l’État-nation vu comme l’expression politique du capitalisme moderne : l’État-providence, l’État « développementaliste » et le communisme. Il estime que ce sont les crises survenues dans ces régimes vers la fin du 20e siècle qui ont permis la mise en place de politiques néolibérales par des élites politiques liées étroitement au pouvoir économique. Il constate que si la stratégie d’accumulation du régime néolibéral a eu un grand succès, celle d’une distribution trop inégale a conduit à une crise. Le troisième chapitre aborde la question culturelle car, en plus de leurs besoins matériels, les êtres humains ont des besoins d’ordre culturel : la connaissance, les symboles, les valeurs, les arts, etc. Les régimes d’après-guerre, favorisés par une croissance soutenue, ont étendu leur rôle de pourvoyeur et favorisé le développement de valeurs collectives. Toutefois, les crises économiques des années 1970 ont amené les individus à se centrer sur leurs besoins propres en même temps que le néolibéralisme naissant encourageait l’individualisme, le matérialisme, la concurrence et la consommation à outrance. Les changements de régimes ayant correspondu à des modifications culturelles, on peut présumer qu’une équation existe entre la stabilité d’un régime et sa stabilité culturelle. Le modèle de régime néolibéral a pris son essor au Chili, en 1973, avec des économistes chiliens issus de l’Université de Chicago ou influencés par ses théories. De là, il s’est étendu aux pays du premier monde, du tiers monde et, après la chute du mur de Berlin, à ceux de l’ex-bloc soviétique. Les politiques néolibérales ont favorisé la mondialisation et ont entraîné dans leur sillage des changements économiques, politiques et sociologiques. En effet, malgré un progrès économique sans précédent, le fossé continue de s’agrandir entre riches et pauvres tant au niveau des …