Comptes rendus : Théorie, méthode et idées

Nicol, Heather N. et Ian Townsend-Gault (dir.), Holding the Line. Borders in a Global World, Vancouver, bc, ubc Press, 2004, 384 p.[Record]

  • Jean Marie Izquierdo

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  • Jean Marie Izquierdo
    cervl, Sciences po Bordeaux

À travers les nombreux auteurs (26), le lecteur est invité à se rendre compte que les expressions tant de la force des États que de la globalisation prennent des formes très dissemblables. Et c’est là que les deux coordonnateurs ont réussi à éviter l’écueil qui les menaçait. En effet, vouloir illustrer le caractère « totalisant » du phénomène de la globalisation aurait pu conduire à une multitude d’études de cas, incomparables au bout du compte et inutilisables dans le cadre d’une démonstration intelligible. Or, dans le cas présent, ils sont parvenus à parfaitement disposer les contributions. Et ce qui aurait pu être un défaut se révèle être ici la qualité essentielle de l’ouvrage. C’est ainsi qu’une première partie, The World Stage-New Opportunities and Problems, plutôt théorique et introductive s’intéresse aux différentes questions que posent d’une part, 1) la perméabilité des frontières, notamment vis-à-vis d’acteurs (les États) aux frontières disparates (fermées/perméables) (Gerald Blake, Boundary Permeability in Perspective), puis d’autre part, 2) la circulation des capitaux, des biens et des informations et la réaction de États en termes de politique publique (Tom Edwards, Informations Geopolitics. Blurring the Lines of Sovereignty ) et enfin, 3) les ressorts légaux des États face aux flux transnationaux (Robert Adamson, Law, Sovereignty and Transnationalism). Ce premier tour d’horizon pose les jalons des réflexions qui vont suivre. Car de façon très didactique, les contributions suivantes nous illustrent ces questions en les confrontant à des contextes géographiques plus ciblés : d’abord en Europe sur les stratégies des acteurs face à l’enjeu de la construction européenne (part. 2, Regionalism and Subregionalism in Europe), avec les travaux de Eberhard Bort (European Borders in Transition. The Internal and External Frontiers of The European Union) et de James Wesley Scott (Transnational Regionalism, Strategic Geopolitics and European Integration), puis en Afrique et en Asie sur la complexification des échanges continentaux (part. 3, Emerging Perspective), puis aux Caraïbes et en Amérique du Sud sur les formes de coopérations régionales entre États-nations faiblement structurés (part. 4, Redefining Boundaries in Americas), et enfin en Amérique du Nord sur la coopération transfrontalière entre les États-Unis d’Amérique et le Canada dans le cadre de l’alena (part. 5, Borderless North America ?). La confrontation des notions découlant de la globalisation (transnationalisation, flux de biens et de capitaux…) et ses conséquences en termes de structuration de frontières « traditionnelles » notamment dans le cadre d’accords régionaux est ici très bien décrite. La perméabilité de certaines frontières, comme le suggère Gerald Blake dans son article, conduit à la mise en place d’autres frontières, où que nous nous trouvions sur la planète. La 6e partie, Borders as Metaphors, poursuit ces réflexions en s’interrogeant sur les représentations des frontières. En quoi et comment intériorisons-nous les frontières ? Comment les comprenons-nous ? Les frontières ne sont pas uniquement la résultante d’un dessin géométrique, elles sont aussi le produit d’un dessein politique des États. Ce sont ces représentations que Mathew Coleman et Steven Jakson explorent. Toutes les frontières ne sont pas égales, et certaines le sont moins que d’autres… C’est la démonstration que fait M. Coleman dans son article Permeable Border and Boundaries in a Globalizing World. Feeling at home amidst Global Poverty. Sur l’ensemble de la planète, il se dessine invariablement une sorte de division internationale des richesses définissant par conséquent les espaces de pauvreté. Une fois de plus, ce sont les États et les sociétés qui participent de cette définition de la place de chacun dans le monde. S. Jakson le démontre parfaitement à travers l’exemple malais : les frontières …