Comptes rendus : Droit international

Richard, Vanessa, La coopération sur la gestion des cours d’eau internationaux en Asie, coll. Monde européen et international, Paris/Aix-en-Provence, La Documentation française/ceric, 2005, 460 p.[Record]

  • Frédéric Lasserre

…more information

  • Frédéric Lasserre
    Département de géographie et
    Observatoire de recherches internationales sur l’eau
    hei, Université Laval, Québec

Peu d’ouvrages, en anglais et a fortiori en français, se penchent sur la question de la gestion des fleuves internationaux en Asie. On peut certes penser à des études régionales, comme Conflictand Cooperation on South Asia’s International Rivers. A Legal Perspective (Law, Justice, and Development), de M.A. Salman et Kishor Uprety, Banque mondiale, Washington, dc, 2005 ; à L’aménagement du Mékong de Luc Lacroze, L’Harmattan, Paris/Montréal, 1998 ou The Mekong. Environment and Development de Hiroshi Hori, United Nations University Press, Tokyo, 2000 ; à Politics of Himalayan River Waters de B.C. Upreti, Nirala Publications, New Delhi, 1993 ; à des études fondées sur l’analyse d’un concept comme la gestion intégrée, comme Integrated Water Resources Management in South and South-East Asia, d’Asit K. Biswas, Olli Varis et Cecilia Tortajada (dir.), Oxford University Press, 2005 ; ou à des études plus spécifiquement axées sur les fleuves, comme Asian International Waters, from Ganges-Brahmaputra to Mekong, Bombay/Delhi, Oxford University Press, 1996, ouvrage qui présente le défaut, comme le souligne avec raison Mme Richard, de se contenter de juxtaposer des monographies de bassins versants asiatiques sans rechercher la moindre conclusion. L’ouvrage de Vanessa Richard présente, à ce titre, l’importante qualité de se donner comme objectif de mener une étude globale de la coopération sur les fleuves internationaux asiatiques, et non de se contenter de décliner des études de cas, sans effort de synthèse et de lien entre chapitres, ce dont se contentent parfois trop d’ouvrages de spécialistes connus dans le domaine… Saluons donc ici cet effort méthodologique et cette entreprise de recherche. À travers l’examen de l’histoire des institutions de gestion de quatre fleuves internationaux, Gange (et de fréquentes mentions du cas de l’Indus) en Asie du Sud ; Mékong en Asie du Sud-Est ; Syr et Amou Daria en Asie centrale, l’auteure cherche à souligner les facteurs favorables et les freins qui subsistent à l’établissement d’une gestion conjointe, dans le contexte de phénomènes plus transversaux : décolonisation, essor du développement durable, effondrement du bloc de l’Est, mondialisation, concept de bonne gouvernance, privatisation croissante… De la mise en perspective des choix effectués dans différents bassins – au-delà des circonstances et caractéristiques propres à chacun d’eux – l’auteure s’efforce de tirer des leçons plus générales sur la construction, le fonctionnement et les limites des régimes juridiques de coopération mis en place, en termes de promotion d’une gestion concertée et durable. Au croisement du droit international de l’environnement et du droit du développement économique, la mise en perspective permet également de dessiner les contours du rôle que peut et doit jouer le droit dans la mise en place d’une gestion intégrée des ressources en eau partagées. Le plan de l’ouvrage reflète cet effort de synthèse : la première partie, « De la coexistence à la coopération en matière de gestion des ressources en eau partagées », retrace l’histoire de la mise en place des divers régimes juridiques exposés. La seconde partie aborde « les instruments juridiques et mécanismes institutionnels, traductions de nouvelles dynamiques de coopération », avec la mise en place de mécanisme de gestion concertée, mais aussi les obstacles qui demeurent à l’intégration réelle et à la mise en oeuvre d’une réelle gestion concertée ; tandis que la troisième partie, se plaçant dans une perspective plus vaste, s’interroge sur le rôle des « outils financiers et commerciaux [comme] moteurs potentiels de promotion d’une gestion durable en Asie ». Le principal écueil de cet ouvrage réside dans son caractère résolument juridique ; non pas que le droit ne soit pas …