Comptes rendus : Analyse de politique étrangère

Davis, John (dir.), Presidential Policies and the Road to the Second Iraq War. From Forty One to Forty Three, Aldershot, Ashgate, 2006, 318 p.[Record]

  • Coralie Hindawi

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  • Coralie Hindawi
    Université Pierre Mendès-France, Grenoble, France
    et Arnold-Bergstraesser Institut, Freiburg, Allemagne

Parmi la pléthore d’ouvrages consacrés à la guerre américaine en Irak, celui dirigé par John Davis (Howard University, États-Unis) est l’une des – relativement rares – études qui remontent plus loin que l’accès au pouvoir de George W. Bush. Regroupant les contributions de neuf chercheurs, la thèse principale du livre est que la seconde guerre d’Irak était en fait inévitable et que les dés en étaient d’ores et déjà jetés bien avant l’entrée en fonction de l’actuel président américain. Sur cette base, l’ouvrage a pour ambition d’explorer la politique irakienne de trois présidents des États-Unis : George H.W. Bush, Bill Clinton et George W. Bush. Le premier chapitre de l’étude (von Hermann) est consacré aux différents modes de prise de décision présidentielle. L’auteure cherche à y montrer en quoi les variations dans les modes de prise de décision des trois derniers présidents américains ont eu un impact sur leurs politiques irakiennes respectives. Plus complet et plus élaboré, le deuxième chapitre (signé par Davis) décrit le détournement par les néoconservateurs de la politique américaine vis à vis de l’Irak. Après une courte introduction générale sur le courant de pensée inspiré de Leo Strauss, l’auteur relève la place centrale de l’Irak et le caractère quasi obsessionnel de l’objectif de changement de régime dans l’idéologie néoconservatrice, avant de rappeler comment les néoconservateurs ont fait pression au cours des trois administrations étudiées pour finalement réussir à imposer la guerre tant appelée de leurs voeux. Le troisième chapitre (Fisher) analyse les rapports entre les pouvoirs législatif et exécutif américains dans la conduite de la politique américaine en Irak. Devant la tendance de l’exécutif à recourir à la force armée à l’encontre de l’Irak sans solliciter l’autorisation du Congrès et dans un contexte de désinformation et de pressions politiques, l’auteur considère que c’est la faillite des institutions américaines qui a autorisé la guerre contre l’Irak. Sa contribution est un plaidoyer pour le respect du système constitutionnel américain. Le quatrième chapitre (Davis) montre à quel point la politique irakienne des États-Unis a été, au cours des trois présidences étudiées, le produit hybride des luttes intestines entre des courants adverses s’opposant au sein de l’administration, chaque président léguant à son successeur la question jamais réglée de l’Irak. Suivent trois chapitres de qualité et de pertinence inégales, consacrés à la perspective diplomatique. Le chapitre 5 (Pauly) reprend l’approche du premier chapitre, cherchant essentiellement à caractériser sur quel modèle les trois présidents se sont fondés pour définir leur politique à l’égard de l’Irak. L’auteur semble cependant s’attacher plus à la clarté des objectifs déclarés de l’administration qu’à leur pertinence, accueillant notamment avec un certain enthousiasme la clarté des objectifs stratégiques de l’Administration de Bush junior par opposition à l’ambiguïté des objectifs de son prédécesseur, ou affirmant avec vigueur la légalité du concept de légitime défense préventive sans justifier ses propos. Dans le chapitre suivant, l’auteur (Lansford) compare les politiques des trois présidents en matière de formation de coalitions. Il observe que, depuis la large coalition de 1991, le soutien des États alliés n’a cessé de s’éroder, et que les expériences en Bosnie et au Kosovo ont nourri des doutes sur l’utilité militaire d’une coalition et encouragé une démarche unilatérale permettant de garder le contrôle militaire des opérations ainsi que la primauté des intérêts américains. Bien que le lien entre le dernier chapitre de cette partie (El-Khawas) et le reste de l’ouvrage ne soit pas très évident, le septième chapitre a cependant pour qualité d’évoquer une question souvent négligée dans les études occidentales et qui joue néanmoins un rôle très important dans la perception désastreuse par de nombreux Arabes de la …