Comptes rendus : Études stratégiques et sécurité

Stulberg, Adam N., Michael D. Salomone et Austin G. Long, Managing Defense Transformation. Agency Culture and Service Change, Aldershot, Ashgate, 2007, 214 p.[Record]

  • David Grondin

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  • David Grondin
    École d’études politiques, Université d’Ottawa, Ottawa

Par une étude comparative de plusieurs organisations militaires, Managing Defense Transformation pose la question de la capacité d’adaptation de ces organisations à gérer leur transformation militaire et à essayer de comprendre le succès plus ou moins mitigé des uns et des autres dans un contexte de transformation radicale des doctrines, des technologies d’armement, des systèmes de communication, des opérations et des entraînements, et ce, dans un laps de temps toujours de plus en plus restreint. Qui dit organisations militaires dit traditions – et résistance aux changements. Or, les services armés sont aussi paradoxalement toujours confrontés à des évolutions, des révolutions et des innovations techniques et doctrinaires qu’ils doivent apprendre à maîtriser et à incorporer à leurs façons de faire la guerre. On peut cependant difficilement parler de révolutions militaires aujourd’hui sans passer par l’expérience particulière des États-Unis. D’une part, les percées des États-Unis sur le plan technologique militaire ne sont un secret pour personne. D’autre part, dans le contexte de l’après-11-Septembre notamment, cela prend un tout nouveau sens, à la lumière du contexte spécifique de la « guerre contre la terreur » et du rôle crucial joué par Donald Rumsfeld pour amener les forces armées américaines à accélérer leur transformation et à s’adapter à la nouvelle situation stratégique. L’effet conjugué de la mondialisation et de la lutte contre le terrorisme mènent, en effet, à une plus grande intégration et uniformisation des pratiques de réformes militaires, notamment en ce qui a trait à l’adaptation des forces militaires. Dans cette perspective, les auteurs Stulberg, Salomone et Long examinent la culture spécifique de certaines organisations et les rôles joués par certains agents pour accélérer ou améliorer la transformation des services armés. L’objectif avoué du livre est ainsi de comprendre ce qui augmente la diffusion et l’institutionnalisation de façons radicales de faire la guerre au sein d’un service armé. Ce sont donc les dynamiques intraorganisationnelles, à savoir les sources microfondationnelles du changement organisationnel, qui intéressent les auteurs, notamment en vue de mieux comprendre l’innovation militaire. On étudie alors les sources du changement dans l’organisation militaire. Fruit d’un travail collectif, cet ouvrage est ainsi animé par de bonnes questions : dans quelles conditions l’innovation peut-elle s’enraciner dans un service armé en transformant les façons de faire la guerre auxquelles ce service recourt ? Comment des sauts discontinus dans les formes militaires peuvent-ils se produire dans un contexte organisationnel qui place généralement une prime sur la continuité ? Comment les adeptes de l’innovation militaire peuvent-ils contourner les barrières culturelles et comportementales à l’intérieur des services militaires ? Cette étude voulait, en rapportant quatre cas historiques classiques d’innovation et de transformation militaires, montrer comment le processus administratif de transformation militaire devait être considéré comme un changement intraorganisationnel dont le succès allait reposer sur les agents du changement qui allaient entreprendre et superviser les procédures en institutionnalisant le processus et en prenant soin d’ancrer les normes de gestion nécessaires dans l’institution en question pour accompagner la révolution et ses coûts. En confrontant les résultats de l’étude comparée avec le cas actuel de la transformation des forces armées américaines, on peut conclure que les auteurs ont atteint leur objectif. On doit souligner d’emblée que l’ouvrage suit une ligne directrice qui parvient presque à faire oublier qu’il est un projet collectif par son uniformisation dans l’approche et la direction adoptées par ses responsables, ce qui s’avère encore plus méritoire du point de vue du recenseur. L’objectif de mieux comprendre la transformation militaire sous un angle organisationnel n’est jamais perdu de vue. L’ambition énoncée est néanmoins d’en arriver à une théorie permettant d’expliquer les changements organisationnels de la transformation militaire susceptibles …