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En prenant pour cas d’étude la participation des États européens à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (finul), cette recherche a pour but de mettre en évidence des éléments pertinents de la formation d’une culture stratégique européenne, au moment où la Politique de sécurité et de défense commune (psdc)[1] évolue en quête de renforcement et intégration.

Le postulat de départ est que, si l’on considère la culture stratégique comme un ensemble de normes socialement transmises et partagées dans une certaine communauté de sécurité (Meyer 2005 : 528), une culture stratégique européenne, encore en formation, a déjà des fondements importants, dans la mesure où le personnel européen est depuis longtemps intégré dans plusieurs institutions militaires supranationales et organisations internationales autres que l’Union européenne (ue). Le processus d’apprentissage n’a donc pas uniquement lieu dans un environnement lié au sens strict à l’ue, mais également dans des situations « non-ue », dans lesquelles le personnel militaire des États européens coopère, permettant ainsi la diffusion de normes et valeurs avant même qu’elles soient codifiées en une politique claire.

Selon le constat du général Pellegrini, qui a commandé la finul pendant la restructuration de 2006, « la finul [de l’été 2006] apparaît comme un véritable laboratoire où se développent de nouvelles manières d’aborder les opérations de maintien de la paix » (Pellegrini 2010 : 134). Du fait que dans ce cadre onusien les États européens participants[2] fournissaient un total de plus de 70 % des troupes déployées (Biscop 2007a : 3), on estime légitime de s’interroger à la fois sur les raisons de cet engagement et sur les perspectives qui en découlent pour l’Union européenne.

Le but de cette recherche, bien qu’elle soit limitée à un seul cas, est d’élargir l’étude de la culture stratégique européenne au-delà des frontières politiques de l’ue, afin de contribuer à la compréhension des éléments qui forment cette culture stratégique dont on considère qu’elle est indispensable au renforcement de la psdc.

En guise de conclusion, nous proposerons également une réflexion sur l’avantage que la participation à la finul apporte à la recherche de légitimité de l’ue comme acteur stratégique sur la scène de la sécurité internationale.

I – La finul dans le cadre du conflit israélo-libanais

La complexité du scénario qui fait suite à l’opération Litani en 1978 ainsi que les requêtes des gouvernements libanais et israélien ont poussé le Conseil de sécurité des Nations Unies vers l’adoption des résolutions 425 (1978) et 426 (1978) prévoyant la formation d’une force de maintien de la paix.

La finul avait pour tâche principale de « confirmer le retrait des troupes israéliennes du sud du Liban, rétablir la paix et la sécurité internationales et aider le gouvernement libanais à assurer le rétablissement de son autorité effective dans la région » (onu, résolutions 425 (1978) et 426 (1978)). La Force est placée directement sous le contrôle de l’onu. Les contingents sont mis à disposition par les États membres (onu S/12611 : 2) et, s’ils demeurent sous l’autorité de leurs propres officiers et des règles militaires de leurs pays respectifs, du point de vue opérationnel, « aussi longtemps que les contingents demeurent sous l’autorité du commandement des Nations Unies, les pouvoirs des États participants demeurent limités. Ils doivent se soumettre à la direction politique et stratégique des autorités politiques et militaires des Nations Unies » (Fadel 2010 : 89).

Malgré la présence de l’onu, un conflit larvé se poursuit au Liban du Sud. Le 12 juillet 2006, des combattants du Hezbollah pénètrent en territoire israélien, tuent trois soldats de l’armée israélienne et en capturent deux. Israël déclenche rapidement des opérations militaires qui ne prendront fin qu’après l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 1701 (2006).

L’année 2006 voit la mise en place d’une finul renforcée. Si la finul est autorisée à prendre toutes les mesures nécessaires pour accomplir sa mission, cette résolution ne place pas le renforcement de la mission sous le chapitre vii de la Charte des Nations Unies (Pellegrini 2010 : 133). La résolution 1701 (2006) permet aux forces déployées d’agir « avec un nouveau rôle plus contraignant pour les parties, de nouvelles structures mieux adaptées et des modes d’action plus réalistes » (ibid. : 125). La nouvelle mission couvre toute la zone entre le fleuve Litani et la Ligne bleue[3], avec un plafond autorisé de 15 000 militaires[4] (ibid. : 127) qui comprend également une force navale (Maritime Task Forcemtf).

II – Éléments normatifs : le concept de « culture stratégique »

C’est à ce stade-ci de l’analyse que le concept de « culture stratégique[5] » entre en ligne de compte. Celui-ci fait l’objet de nombreuses définitions. Roussel et Morin dégagent quatre caractéristiques généralement acceptées : 1) il fait référence à un phénomène lié au « monde des idées », qui a trait à un « système de symboles » ou à des éléments d’un comportement en relation avec l’utilisation de la force ; 2) il s’agit par définition d’un concept systémique, du moment que le pouvoir explicatif se situe au niveau du groupe et non pas à celui de l’individu ; de plus, le postulat principal est que le groupe partage des idées qui donnent forme aux attitudes collectives ; 3) il est exclusif, c’est-à-dire qu’il est censé être un facteur permettant de différencier un groupe d’un autre ; 4) la culture est « profondément enracinée dans l’expérience historique », et il en va de même pour la culture stratégique, que l’on suppose atteindre un état semi-permanent, du moment où les changements ont lieu lentement au niveau macro-historique (Roussel et Morin 2007 : 18-21).

Parmi les multiples définitions de la culture stratégique[6], on fera référence ici au concept tel que le définit Meyer :

[Il s’agit de] normes, idées, comportements, socialement transmis qui découlent de l’identité et sont partagés par la vaste majorité des acteurs et groupes sociaux dans une certaine communauté de sécurité. Ainsi, ils permettent de définir et donner des priorités par rapport aux options à disposition d’une communauté pour ce qui est de l’identification des objectifs de sécurité et défense.

Meyer 2005 : 528-529

À cause de l’intangibilité de l’objet d’étude, la voie la plus pertinente pour vérifier l’existence d’une culture stratégique est, selon nous, l’étude de ses manifestations observables et concrètes, c’est-à-dire l’analyse des choix, des comportements et, de manière générale, de ce qu’ont produit les acteurs. Cette analyse doit permettre de reconnaître des logiques d’action au sein de l’entité observée[7].

Comme Rieker le souligne, la littérature concernant la culture stratégique « manque de précisions en ce qui concerne le mécanisme causal ou constitutif à travers lequel ces idées sont diffusées » (Rieker 2006 : 55). Elle présente donc la socialisation comme le processus à travers lequel « on peut considérer que l’européanisation des identités sécuritaires de l’État-nation a lieu » (ibid. : 53). De même, pour Cornish et Edwards, « il n’y a aucune raison convaincante pour rejeter l’idée d’une culture stratégique européenne. […] Il y a, en tout cas, des indications qu’une culture stratégique est déjà en voie de développement à travers un processus de socialisation, accéléré de façon importante grâce aux arrangements institutionnels mis en place […] » (Cornish et Edwards 2001 : 588).

La convergence des cultures stratégiques se produit par des processus de socialisation au sein d’instances plus ou moins formelles : « Les instances internationales de coopération militaire sont les lieux privilégiés d’échange, mais aussi d’interaction entre les experts que représentent les officiers supérieurs et généraux » (Pajon 2003 : 159). Cela conduit à l’établissement de structures cognitives qui facilitent l’action commune et l’émergence d’une identité collective à travers l’apprentissage in situ, dans lequel les expériences deviennent internationales et par conséquent différentes des précédents nationaux (Gariup 2009 : 115-116)[8]. Comme Biava le souligne, « les intérêts et les identités des acteurs sont donc influencés et reconstitués par les normes des structures dans lesquelles ils sont insérés » (Biava 2011 : 214).

Dans la même ligne de raisonnement, nous estimons que dans le cas de la psdc[9] l’étude des mécanismes horizontaux s’impose, en raison d’une faible pression verticale de la part des institutions européennes de sécurité et de défense. Dans le cadre de la psdc, les acteurs et groupes sociaux qui doivent être pris en considération sont à la fois le personnel militaire et les acteurs politiques impliqués dans la définition des objectifs de la politique sécuritaire et de défense.

Plus particulièrement, en empruntant la terminologie utilisée par Biava, nous recherchons les origines de la culture stratégique européenne dans la phase dite de « présocialisation institutionnelle », pendant laquelle les acteurs portent en eux un ensemble de préférences et intérêts « qui influencent initialement [leur] attitude » (Biava 2011 : 219)[10].

Notre hypothèse est donc que cette phase de présocialisation, porteuse des normes qui contribuent à former la culture stratégique européenne, n’a pas lieu exclusivement au niveau national ou à Bruxelles, mais également dans les situations hors ue, tel l’engagement européen dans le renforcement de la finul. On pourra donc s’attendre à ce que ces mêmes préférences et intérêts soient mobilisés lors de la formulation et la mise en pratique de la psdc.

La culture stratégique européenne ne se construit pas sur un vide. En plus des racines nationales, le personnel militaire européen a déjà un bagage d’expériences partagées dans les enceintes internationales, en particulier dans l’otan et dans les missions de l’onu. La « communauté de sécurité » n’est pas formée exclusivement à Bruxelles, mais d’abord à l’extérieur des frontières géographiques européennes, ce qui fait que les expériences partagées dans des institutions autres que l’ue laissent une « empreinte durable » sur les soldats et officiers européens (Martinsen 2003 : 30).

En vue d’une coopération croissante dans le cadre de la psdc, on devrait donc s’attendre à ce que les élites militaires parviennent à combler les fossés qui séparent les institutions dans lesquelles elles agissent et qu’elles dégagent des logiques de comportement acquises dans d’autres situations multilatérales[11].

III – L’Europe et la finul renforcée

Après le début des hostilités de l’été 2006, Israël avait fait appel aux États européens avant de considérer le retrait de ses troupes (Gross 2009 : 51), tandis que les États-Unis auraient préféré l’option d’une force militaire capable de désarmer le Hezbollah[12] et guidée par la Turquie et l’Égypte, alliés stratégiques dans la région (Gowan 2007 : 70).

Si la possibilité de créer une mission psdc a été prise en considération, elle a été abandonnée à cause des divergences de position des parties prenantes au conflit[13] et en raison de la réticence des États européens à s’impliquer en première ligne au Moyen-Orient (littéralement « getting the finger in the mangle ») (Entretien d’un officier britannique par Gross 2009 : 48 ; Aoun non publié). Le drapeau ue fut donc mis de côté, sans pour autant renoncer à un rôle clé pour les États européens.

Pour ce qui est des troupes, le président français Chirac annonce le déploiement d’un total de 2 000 soldats (Claude 2008 : 892). Toutefois, la proposition arrive seulement « après [réception d’]un certain nombre de garanties concernant les conditions d’efficacité et sécurité optimale [des] troupes » (Chirac cité dans The Financial Times 24 août 2006 ; Mattelaer 2009 : 12)[14]. L’Italie offre une contribution de 3 000 soldats, le plus grand contingent de la force, tandis que l’Espagne promet un bataillon d’un millier de soldats, faisant ainsi sa première apparition sur la scène libanaise, suivie par la Pologne avec 500 soldats, la Belgique avec 300 et la Finlande avec 250 soldats dans une unité mixte de génie avec l’Irlande, tout comme les Portugais qui eux aussi fournissent une unité de génie (Smith, The New York Times, 26 août 2006 ; Gross 2009 : 53 ; Pellegrini 2010 : 135-136).

A — Le niveau national : France et Italie – Strategic Military Cell ; Allemagne et Euromarfor – Maritime Task Force

Le rapport du Secrétaire général des Nations Unies parle formellement de la nécessité de renforcer la division militaire du Département des opérations de maintien de la paix (domp) à travers l’établissement d’une cellule militaire affectée à la finul, s’appuyant sur les ressources existantes à l’intérieur de la division militaire et composée d’officiers appartenant aux nations qui fournissent les plus gros contingents, le tout afin d’orienter le niveau stratégique de la mission (onu S/2006/670 §39).

Les négociations sont laborieuses. On assiste à la formation d’une cellule militaire stratégique (Strategic Military Cell – smc), commandée par le général de corps d’armée Giovanni Ridino (Italie) avec comme adjoint le général de brigade François Estrate (France). Bien que cette cellule ne soit pas intégrée à la chaîne de commandement, l’onu « et en particulier le domp, ayant toujours veillé à garder la direction exclusive de la mission », elle est « parfois associée au processus de décision[15] » et se révèle néanmoins importante pour l’efficacité de la finul. Le général Pellegrini la décrit comme étant « une liaison supplémentaire entre le Directeur des opérations et nous-mêmes, capable de traduire en termes militaires les orientations données par les politiques à New York, et, à l’inverse d’expliquer d’une manière accessible à ces derniers nos préoccupations sur le terrain, [tout en n’étant] pas un intermédiaire » (Pellegrini 2010 : 132). Il est également intéressant de souligner le rôle de la smc dans l’élaboration des règles d’engagement (RoE), afin de dégager des postures comprises et acceptées par tous les pays contributeurs concernant le niveau d’utilisation de la force, dans les limites de la résolution 1701 (ibid. : 133).

C’est dans un cadre d’intérêts nationaux et internationaux multiples que la France et l’Italie parviennent à s’imposer sur la formation de la smc, dont la structure reflète le rôle clé de ces deux pays dans le renforcement de la finul (ibid. : 132).

L’importance politique de l’établissement de la smc est évidente. Mattelaer relève que la smc constitue un compromis entre la nécessité onusienne de ne pas laisser échapper le contrôle de la force et la volonté française, italienne et espagnole d’imposer un général européen pour la gestion des opérations en cas de crise (Mattelaer 2009 : 11-12). D’autres affirment même que la smc a été mise en place à cause de la pression exercée par la France, celle-ci ayant augmenté ses effectifs (Hatto 2009 : 189).

L’aspect militaire n’en demeure pas moins important. Pour les pays contributeurs, la promesse d’un effort majeur en matière d’effectifs doit être contrebalancée par la garantie de flexibilité dans les couloirs des Nations Unies. La raison réside apparemment dans la non-propension des États européens à fournir des contingents importants, faute d’une structure de commandement spéciale existante, en raison des hauts risques liés à la mission sur le terrain (Hatto 2009 : 189 ; Mattelaer 2009 : 11-12). Les États européens s’étaient éloignés du système de maintien de la paix onusien par suite des expériences en ex-Yougoslavie ; la possibilité du feu croisé entre Israël et Hezbollah, qui nécessiterait une réponse armée ainsi qu’une chaîne de commandement claire et efficace, faisait remonter en surface la crainte de situations comme le massacre de Srebrenica, encore bien présent dans l’esprit des négociateurs militaires (ibid. : 11 ; Zecchini (Le Monde) 24 août 2006, cité par Hatto 2009 : 190).

L’argument principal porté contre la création de la smc est donc surtout basé sur la perception de cette dernière comme étant une « création ad hoc, dessinée pour faire plaisir aux Européens » (Hatto 2009 : 191) et parfois décrite même comme « contrevenant au principe d’universalité et d’égalité de traitement des membres [des Nations Unies] » (ibid. : 192).

De façon générale, l’Italie et la France ont réussi, du moins au début de la restructuration de la finul, à faire adopter une organisation calquée sur celle des opérations de l’otan et de l’ue. Il est important de noter que « l’accord des pays contributeurs pour s’inspirer des structures et procédures de l’otan […] n’a pas été obtenu sans mal[16] ». Pour la finul « renforcée », cette organisation est la suivante : au sommet de la hiérarchie se retrouvent le commandant de l’opération (coper) à New York ainsi que le commandant de la force (comanfor) déployée sur le terrain, soutenus par un plan d’opération (oplan) qui se décline sur la base du concept d’opération (conops[17]) (Pellegrini 2010 : 131-134)[18].

Il est bon de souligner également que pour la première fois une opération onusienne voit le déploiement d’un groupe d’intervention navale (Maritime Task Force – mtf)[19]. Force intérimaire dans sa conception initiale, après une première période sous le commandement allemand la mtf voit son contrôle passer à l’Euromarfor[20], d’abord guidée par l’Italie, puis par la France. Par la suite, le contrôle de la mtf est confié à la Belgique, de nouveau à l’Italie, puis à l’Allemagne. De même que la smc, la composition de la flotte est l’indice d’une présence européenne forte dans la « finul renforcée ».

B — Le niveau européen, entre intérêts nationaux et globaux

Comme le souligne le général Pellegrini, « la concurrence entre les pays est parfois très forte car la participation à une force internationale n’est jamais désintéressée. Derrière le dévouement à la défense d’intérêts communs, toujours mis en avant, se cachent aussi des objectifs purement nationaux » (Pellegrini 2010 : 134). L’engagement immédiat des troupes italiennes reflète le statut qu’a l’Italie de premier partenaire commercial du Liban ainsi que le développement de sa politique étrangère en Méditerranée (ibid. : 133 ; Hatto 2009 : 190). Les intérêts nationaux français trouvent leur origine dans les liens historiques avec la région, mais aussi dans les liens personnels tissés entre le président Chirac et l’ancien premier ministre libanais Rafiq Hariri, sans oublier la position de force découlant du siège permanent au Conseil de sécurité (Claude 2008 ; Gross 2009 : 113). Il ne faut pas non plus laisser sous silence les considérations politiques qui ont guidé l’action militaire allemande au Liban : la chancelière Merkel a su concilier la diplomatie bilatérale avec la Syrie et Israël, la protection des relations atlantiques ainsi que le soutien des actions multilatérales onusiennes, tout en gardant à l’esprit la future présidence du Conseil de l’ue (ibid. : 147-149).

Le point important pour notre recherche, en dépit de la fin de l’« essai » de la smc (onu A/62/744 §31)[21], réside dans l’oscillation entre la volonté de chaque État de mettre l’accent sur ses propres efforts et l’acceptation du rôle de coordination joué par le Comité politique et de sécurité (cops)[22] afin d’harmoniser les différentes propositions et les discours politiques (Entretien cité dans Gross 2009 : 53).

Au cours des négociations, les États européens se sont opposés à un véritable rôle du cops en tant que « bureau central » pour la gestion des contingents à déployer (Pirozzi 2006 : 3). Le cops a néanmoins joué un rôle crucial dans la coordination des contributions militaires des États (Entretien cité dans Gross 2009 : 54), notamment en pressant la France de garantir le déploiement d’effectifs plus nombreux, témoignant ainsi de la capacité des institutions bruxelloises à faire pression sur les États membres et à influencer le processus décisionnel national (ibid. : 165). Cela mérite d’autant plus d’être signalé que, comme le rapporte Biava dans son étude sur la culture stratégique européenne au sein des institutions travaillant dans le cadre de la psdc, « au sein du cops, l’on remarque un changement de vision qui est intéressant : l’intérêt national devient progressivement l’intérêt européen » (entretien cité en Biava 2011 : 237).

De plus, la réunion extraordinaire du Conseil Affaires générales et relations extérieures a été l’occasion de souligner la volonté politique de l’ue en tant qu’acteur unitaire :

Par son ampleur, la contribution globale des États membres à la finul prouve que l’ue assume ses responsabilités. Le Conseil se félicite de l’intention des États membres de déployer un nombre substantiel de soldats au Liban […]. Des contributions supplémentaires seront probablement encore apportées, de sorte que l’Union jouera un rôle de premier plan au sein de la finul.

Conseil de l’ ue, 2006

Il est par ailleurs intéressant de noter la position exprimée par madame Sylvie Bermann qui était à l’époque à la tête de la Direction des Nations unies et des organisations internationales au ministère français des Affaires étrangères :

La finul est un engagement européen, au même titre que la relation avec le Liban est chère aux Européens. Lorsque le Secrétaire général des Nations Unies est intervenu devant le Conseil de l’ue, le 25 août 2006, pour lui demander son soutien au renforcement de la finul, les Européens ont répondu présents. De fait, la finul renforcée […] a été le premier engagement d’ampleur des Européens dans une opération de maintien de la paix des Nations Unies.

Bermann, dans Fadel et Eid 2009 : 34-35

La position française est donc un exemple des tensions qui sous-tendent la situation de la politique étrangère et militaire européenne. Pour ce qui est de l’action diplomatique et militaire française, on pourrait parler de « discours national habillé à l’européenne[23] ». Paris a été capable d’utiliser à la fois la plateforme européenne et la plateforme onusienne pour donner forme à la politique mise en oeuvre dans le conflit au Liban. Dans le cadre européen, elle a néanmoins dû se rallier à la position du cops, notamment en ce qui concernait la taille des contingents à fournir. Cela démontre à la fois le degré de liberté d’action des États de l’ue et la pression croissante que les institutions européennes peuvent exercer sur ses membres (Gross 2009 : 113).

La présence de l’Allemagne au sein de la mtf est également un exemple de la volonté des États européens de s’engager dans le maintien de la paix, sans perdre leurs propres spécificités. On pourrait mettre en évidence la volonté d’adaptation de l’Allemagne aux standards militaires européens, tout en cherchant à ne pas heurter la sensibilité de sa population. La déclaration du ministre des Affaires étrangères Steinmeier est donc révélatrice d’une nouvelle identité européenne de la politique militaire allemande : « Il y a dix ans, personne n’aurait pu imaginer envoyer des soldats allemands aux côtés de soldats d’autres États européens » (Black, The Guardian, 27 septembre 2006 ; Gross 2009 : 149). De plus, la décision de participer au renforcement de la finul avec sa propre flotte a pour l’Allemagne une signification hautement symbolique : il s’agit de sa première mission au Moyen-Orient, et l’on doit tenir compte de l’impact psychologique de la proximité physique de l’armée allemande avec la population israélienne (ibid. ; Deutsche Welle, 20 septembre 2006 ; Aoun non publié).

Il faut certes noter que, lors de la conférence de Rome pour la gestion de la crise, c’est non pas une position européenne unifiée, mais diverses positions nationales qui ont été mises en avant[24]. En dépit des divergences, les États étaient tout à fait conscients du rôle que l’ue serait amenée à avoir. Comme Aoun le souligne, l’ue ne pouvait pas ignorer un conflit de si vaste envergure dans la Méditerranée. Après tout, ce conflit avait comme principaux protagonistes deux des plus importants partenaires des États membres, alors que la solution du conflit israélo-arabe est également l’une des priorités stratégiques de l’ue[25] (Aoun non publié ; Biscop 2007b : 8).

On assiste donc à certains changements par rapport aux précédentes situations de gestion européenne des crises. Les États membres ont reconnu le rôle clé du cops et, de manière plus générale, celui de l’Union comme plateforme pour négocier la volonté politique des États pour la contribution au renforcement de la finul. Les institutions ont su saisir cette occasion d’imposer certaines conditions (Entretien cité dans Gross 2009 : 51).

Ce qui est donc interprété comme une politisation négative du processus décisionnel pour le déploiement et la gestion des forces dans le cadre d’opérations onu exercées par les États de l’ue (Hatto 2009 : 191)[26] peut être également considéré comme le résultat positif de l’imposition des intérêts européens au niveau global, et comme un premier signal que l’ue renforce sa capacité d’action internationale dans le cadre de la sécurité globale[27]. Il peut aussi bien s’agir d’un signal de la capacité des institutions européennes, notamment le cops, à fonctionner en tant que forum de concertation et de pression sur les États membres.

III – À la recherche d’une culture stratégique européenne

Pour la première fois dans l’histoire de l’ue, une « stratégie européenne de sécurité » (ses) a été présentée en 2003. Censée donner des pistes de réponse aux principales menaces, la ses clame la nécessité de « développer une culture stratégique propre à favoriser des interventions en amont, rapides et, si nécessaire, robustes » (Conseil de l’ue 2003 : 11).

La littérature sur l’existence d’une culture stratégique propre à l’ue est vaste, et se divise de façon générale en deux axes : l’axe réaliste, sceptique quant à la possibilité pour l’ue de développer une culture stratégique propre, et l’axe constructiviste, qui identifie des éléments de convergence des cultures stratégiques nationales, en particulier au niveau institutionnel (voir entre autres Biava 2011 : 57-66).

Le rôle des élites européennes dans le renforcement de la finul est selon nous un témoignage du fait que l’on retrouve, à l’intérieur d’une culture stratégique européenne en formation, des cultures préexistantes, à la fois alternatives et complémentaires, qui agissent dans deux directions différentes : si les cultures nationales peuvent agir comme force centrifuge, la socialisation des militaires que l’on observe au niveau des organisations internationales a un potentiel centripète qui ne doit pas être sous-estimé.

Si des analyses plus approfondies, basées en particulier sur des entretiens avec les acteurs impliqués dans la formulation de la psdc, peuvent apporter davantage d’éléments pour mettre en évidence les normes en voie d’institutionnalisation en provenance du niveau international et vers le niveau européen, il est néanmoins possible d’opérer un premier test sur le comportement des acteurs européens lors du renforcement de la finul. Afin de vérifier le degré d’ancrage des normes dans les institutions[28], Legro propose un test basé sur trois critères : spécificité, durabilité et concordance. « La spécificité fait référence à la manière dont les lignes directrices […] sont définies. La durabilité a affaire avec la durée pendant laquelle les règles ont été effectivement mises en oeuvre et si et comment elles ont survécu aux défis à leur autorité. La concordance décrit l’ampleur de l’acceptation de ces mêmes règles dans les discussions diplomatiques et les traités » (Legro 1995 : 15-16).

Pour ce qui est de la durabilité, on pourrait considérer qu’à la lumière de la mise à terme de la smc l’imposition de la doctrine otan de la part des États européens sur l’onu a en quelque sorte échoué[29]. Si le résultat n’est pas celui initialement espéré, on retiendra néanmoins certains indices évoqués plus haut, et notamment l’accord des forces des États membres sur l’utilisation de la doctrine otan (et ue) par la France et l’Italie, épaulées par les autres États européens, dans la structuration de la « finul renforcée » (Mattelaer 2009 : 15). La construction de la smc est donc un signal (bien que temporaire et partiel[30]) du partage d’une certaine doctrine militaire acquise à l’extérieur de l’ue, mais utilisée pour mettre à profit à la fois les aspirations nationales et le renforcement de l’ue en tant qu’acteur sécuritaire sur la scène internationale.

On pourrait également tester les critères de spécificité et de concordance à travers les aspects du concept de culture stratégique tels que Meyer les décrit, en prenant en considération la possibilité d’une analyse de la posture stratégique des États membres de l’ue. À cause de la difficulté d’opérationnalisation du concept de « culture stratégique », Meyer propose quatre composantes normatives qui concernent l’utilisation de la force et qui peuvent être vérifiées de façon empirique : les objectifs de l’utilisation de la force ; la modalité d’utilisation de la force ; la propension à la coopération avec les autres partenaires ; et le seuil national et international pour l’autorisation à l’utilisation de la force (Meyer 2004 : 11).

Le renforcement de la finul a été l’occasion pour les institutions de la psdc d’exercer une certaine pression sur les États membres. Les négociations qui ont eu lieu au sein du cops ont permis d’atteindre une certaine coordination par rapport aux quatre composantes de la culture stratégique évoquées plus haut. Les intérêts nationaux ont été ramenés dans le cadre européen pour ce qui est des objectifs (pacification de la Méditerranée, « international actorness » de l’ue) et des modalités (taille des contingents) de l’utilisation de la force. De plus, pour ce qui est de la coopération avec d’autres partenaires, vu l’impossibilité de construire une opération psdc, les États européens ont su obtenir un rôle clé dans le renforcement de la Force, tout en restant dans un cadre onusien, et ils ont mis en évidence l’importance de l’engagement européen. Concernant le seuil d’utilisation de la force, on pensera au rôle des États européens à l’intérieur de la smc pour ce qui est des négociations des règles d’engagement (RoE), clairement dans le cadre et en déclinaison « en termes de postures militaires de la résolution 1701 (2006)[31] ». Cela est encore plus important à partir du moment où :

… il est de coutume de considérer que l’autorisation de l’emploi de la force est liée au type de chapitre (6 ou 7) sous lequel un mandat est donné à une mission de l’onu. Cette manière de voir est erronée. […] Ce n’est pas le chapitre qui définit le niveau d’utilisation de la force mais les règles d’engagement. Il est bien évident que ces règles sont généralement plus mesurées sous le chapitre 6 que sous le chapitre 7, mais il n’y a pas d’automatisme[32].

Pour ce qui est du rôle joué par le cops dans les négociations concernant le déploiement des troupes européennes, on peut y retrouver des éléments indiquant un processus de socialisation envers une vision partagée de l’engagement européen, qui se reflète même dans des missions non-ue. Les éléments que Biava met en évidence au sujet des acteurs travaillant au sein du cops, qui « développent un ensemble de visions et d’attentes partagées concernant l’engagement de l’ue dans le cadre de la psdc », étaient également présents au moment des négociations au niveau européen pour l’engagement des États membres lors d’une opération onusienne comme la finul renforcée. Il s’agit en particulier de la légalité internationale, de l’acceptation par les pays hôtes, de la complémentarité constructive et de la coopération avec la communauté internationale, de l’existence d’un mandat précis et détaillé dans le cadre des opérations militaires ainsi que du principe de la responsabilité locale (Biava 2011 : 259)[33].

À travers cet aperçu, on peut donc mettre en évidence des indices qui montrent que les critères de spécificité et de concordance des composantes d’une culture stratégique peuvent être vérifiés, du moins pour ce qui est des États contributeurs de la finul. En ce qui a trait aux intérêts des États membres en matière de sécurité internationale, nous rejoignons Ortega en affirmant que l’intérêt européen peut difficilement être appréhendé en tant que somme totale des intérêts des États membres ; on devrait plutôt parler d’intérêts communs qui se trouvent au carrefour entre les intérêts nationaux et globaux des États membres (Ortega 2001 : 103). L’attitude de la France, de l’Italie et de l’Allemagne dans les négociations de 2006, comme nous l’avons vu précédemment, semble en être un parfait exemple.

Il en va de même pour ce qui est de la culture stratégique européenne : elle ne pourra pas être appréhendée comme la somme des cultures stratégiques nationales, mais comme quelque chose d’autre propre à l’ue. C’est en ce sens que l’on pourra définir la culture stratégique européenne comme étant à un niveau « intermédiaire » entre le niveau national, où l’on repère les origines des expériences, et le niveau international, dans lequel les responsables de la politique de sécurité et de défense sont impliqués en ayant affaire avec les institutions internationales auxquelles leurs États d’origine sont parties. Cela est d’autant plus clair si nous considérons l’ue comme un « complexe de sécurité régional[34] » qui se situe entre les politiques nationales et le système international au sens large.

IV – L’ue comme acteur stratégique unitaire ?

Il est important de souligner que, si les ambitions en matière de sécurité et défense de l’ue, comme de tout acteur international, sont restreintes par les capacités dont elle dispose, l’importance de documents tels que la ses reste proportionnelle à la volonté effective des États membres de mettre en oeuvre son contenu (Meyer 2004 : 2-3).

Il serait donc erroné de considérer la psdc comme une politique exclusivement axée sur les capacités (capabilities driven) : l’importance de la scène libanaise pour les États membres et pour l’ue ainsi que l’investissement qui en a suivi doivent être analysés à la lumière d’une politique de sécurité et de défense qui combine aspects civils et militaires utilisés à des fins politiques (Martinsen 2003 : 12).

Partant de ce constat, et pour savoir si l’ue est un acteur avec sa propre culture stratégique, il faut prendre en considération des cas dans lesquels l’ue a « commencé l’action stratégique – le problème concernant la culture stratégique étant en premier lieu non pas la culture militaire mais la volonté politique » (Haaland Matlary 2006 : 111 ; Gowan 2007 : 61). Si l’on considère un acteur stratégique comme étant capable de brandir la menace de l’utilisation de la force tout en possédant l’habileté à la déployer effectivement (Haaland Matlary 2006 : 112), les États européens ayant participé au renforcement de la finul en 2006 ont démontré qu’ils ont agi en tant qu’acteur stratégique unitaire.

La réunion extraordinaire du Conseil des Affaires générales et relations extérieures qui a eu lieu après la fin des hostilités a été l’occasion de souligner la volonté politique de l’ue comme acteur unitaire :

Par son ampleur, la contribution globale des États membres à la finul prouve que l’ue assume ses responsabilités. Le Conseil se félicite de l’intention des États membres de déployer un nombre substantiel de soldats au Liban, ainsi que de fournir d’importants moyens maritimes et aériens et en matière de commandement, de communications et de soutien logistique. Des contributions supplémentaires seront probablement encore apportées, de sorte que l’Union jouera un rôle de premier plan au sein de la finul.

Conseil de l’ue 2006 : 6

On observe également dans la presse eurosceptique une confiance retrouvée envers l’ue : « la crise libanaise a aidé à démontrer la substance d’une politique européenne extérieure et de défense, y compris l’utilisation de la force à l’étranger » (The Economist 2006 ; Gowan 2007 : 71).

Gowan soutient que la relation entre l’ue et l’onu, pour ce qui est des questions de sécurité internationale, fournit des précédents importants dans la définition de l’identité sécuritaire européenne. En ce qui a trait à la finul renforcée, le rôle du Conseil a brouillé les frontières entre l’onu et l’ue : le rôle de la smc comme mécanisme pour la coopération des États européens repose sur la même sorte d’interaction intergouvernementale que celle qui sous-tend les déploiements militaires psdc (ibid. : 64 et 74).

Si dans les discussions internes aux Nations Unies on faisait référence à l’engagement des différents pays et non pas de l’ue[35], au moment du renforcement de la finul le haut représentant Solana a su jouer un rôle fondamental pour ce qui est de la construction de l’image extérieure de l’Union[36], en soulignant la valeur ajoutée de la participation européenne à la finul. Cela a permis le renforcement de la confiance onusienne par rapport à l’engagement de l’Union (Gross 2009 : 55) ainsi que le consensus des parties au conflit et d’autres puissances régionales qui voyaient de façon négative une présence otanienne au coeur du Proche-Orient. L’image projetée était donc celle d’une légitimité découlant de la neutralité de l’acteur européen.

Ainsi que l’étude de Gariup le démontre, une « culture politique européenne » en matière de sécurité est utilisée comme contexte tant du discours que de l’action sécuritaire. Cela permet de renforcer ces mêmes valeurs et normes qui constituent cette culture – telle qu’elle est ressentie par les acteurs européens eux-mêmes – ainsi que de la projeter vers l’extérieur en tant que justification cohérente des politiques de sécurité (Gariup 2009 : 118).

L’engagement militaire européen au Liban dans le cadre de la finul renforcée peut être vu comme un indicateur de la capacité croissante de l’ue à agir comme un acteur international (Biscop 2007b : 10).

V – L’Union européenne dans la scène de la gouvernance globale de la sécurité

Comme l’ont souligné des études précédentes, l’Union européenne contribue par ses actions à la construction de l’agenda sécuritaire international : en tant qu’organisation régionale intergouvernementale, l’ue ne fait pas que jouer un rôle complémentaire à celui de l’onu. Elle peut également « servir à contourner d’éventuels blocages onusiens, à mitiger l’impact des puissances internationales par la pratique d’un multilatéralisme plus local », et cela, en agissant aussi à travers les « connexions établies par la diplomatie bilatérale des […] États membres et au sein de plateformes multilatérales » (Wasinski et Morselli 2011 : 81).

Si cela permet une construction plus flexible de l’agenda sécuritaire international (ibid.), cela entraîne ce qu’Ortega appelle l’« integration paradigm » (Ortega 2007 : 102), c’est-à-dire la difficulté pour les États membres de réconcilier leurs propres intérêts nationaux avec les processus d’intégration européenne, en particulier dans le domaine de la sécurité et de la défense, ainsi qu’avec leurs relations bilatérales au sein de l’otan et des Nations Unies.

Cette situation a évidemment des effets positifs sur la performance de l’ue, que l’on qualifie désormais de « capable, active et cohérente ». Pour ce qui est de la finul, les critiques sont plus mitigées : « L’Europe n’a pas passé le test brillamment, mais elle n’a pas non plus échoué » (Robbins 2006 : 25-26, cité dans Gowan 2007 : 70).

L’intérêt politique de la résolution du conflit israélo-libanais a accru l’efficacité de l’action européenne. La problématique principale, mise en évidence dans les plus récentes évolutions de la finul renforcée, demeure l’absence d’une politique européenne cohérente vis-à-vis du Proche-Orient, qui entraîne une difficulté à opérer sur le terrain faute de lignes de conduite claires sur le plan politique : l’Europe en tant qu’acteur stratégique unitaire était donc plus visible « en Europe et à New York qu’au Liban. […] L’Europe en tant que telle semblait inexistante sur le théâtre libanais[37] ».

Au-delà du cas de figure de la finul renforcée, le défi pour l’ue en tant qu’acteur stratégique international est donc d’abord la prise de conscience des éléments de « culture stratégique » partagés par ses États membres. Le but doit être l’amélioration des capacités de projection d’une identité influente sur la scène internationale (Gowan 2007 : 64). L’étude des dynamiques de négociations du renforcement de la finul pourrait donc être utile pour déterminer les bases sur lesquelles bâtir une véritable culture stratégique européenne, surtout par comparaison avec des dynamiques comme l’implication des États européens en Libye en 2011 et considérant la restructuration institutionnelle opérée par le traité de Lisbonne. De plus, le rôle des États européens ainsi que des institutions de l’ue dans la négociation et la mise en oeuvre de la finul renforcée sont un signal que, jusqu’à ce que le projet psdc soit achevé, l’« international actorness » européen peut être construit à l’extérieur des frontières géographiques, par une combinaison bien calibrée des intérêts, des actions et des discours nationaux des États membres et des institutions.